Résolument du côté des travailleur-euse-s en lutte, pour un programme d’urgence, ouvrier et populaire pour la Bretagne! (ccr)
Contre la répression, les poursuites judiciaires et les fausses solutions gouvernement-Medef-FNSEA type « Pacte d’avenir pour la Bretagne » !
Disons-le clairement : à gauche il y a, d’un côté, ceux qui observent (de loin et de haut…) la photo, sans voir la dynamique et ceux qui voient la mobilisation sans voir la nécessité de lui proposer un autre cap. Avec les premiers, on a l’impression que la colère qui est en train de s’exprimer en Bre- tagne, les affrontements de Pont-de-Buis du 26 octobre et la manifestation de Quimper du 2 novembre peuvent se réduire à une même manif dans laquelle il y aurait des ouvriers licenciés et leur patron, le gérant d’un supermarché et ses caissières, l’artisan routier et le propriétaire d’une grosse flotte de camions, des marins et patrons pêcheurs et les gros mareyeurs, des agriculteurs et les gros patrons de l’agroalimentaire, sans oublier l’extrême droite en embuscade cachée derrière les Gwenn-ha-du, les drapeaux bretons.
Faire de la manif de Quimper un deuxième acte de la mobilisation contre le mariage pour tous, c’est faire, peu ou prou, consciemment ou non, le jeu du gouvernement. De l’autre côté, il y a ceux qui disent que, tout ces contradictions réelles que l’on a vu à Quimper, c’est secondaire, que laisser primer la défense des subventions bruxelloises, des aides aux patrons et l’opposition à l’écotaxe sur la défense de l’emploi et l’interdiction des licenciements, c’est loin d’être primordial et que l’essentiel c’est la mobilisation.
Ce que les drapeaux bretons pourraient préfigurer L’enjeu, pour l’extrême gauche, pour les équipes syndicales combatives, pour les secteurs mobilisés de la jeunesse, c’est plutôt de considérer les mouvements en Bretagne comme un triple point d’inflexion :
Un avant et un après, tendanciellement, dans la situation politico-sociale actuelle, sur fond de discrédit gouvernemental, de popularité au ras-du-sol, de gestion calamiteuse de l’affaire Leonarda-Kachik et de mobilisations lycéennes qui se poursuivent [1] ;
Un changement du climat politique, avec une prééminence d’éléments de lutte de classe et d’insubordination, confus et contradictoires, certes, mais une situation marquée par les tendances à l’affrontement et à l’action directe, et ce après la séquence précédente marquée par les manifs réacs contre le mariage pour tous, la poussée du FN, les accords régressifs de compétitivité dans les entreprises et les réformes anti-sociales du gouvernement à laquelle se sont associées peu ou prou les directions syndicales ou devant lesquelles elles sont restées l’arme au pied [2] ;
Une opportunité, du coup, et une obligation d’intervenir pour proposer largement aux organisations ouvrières et de jeunesse de se mobiliser pour la défense des conditions de vie, de travail, de l’emploi, en Bretagne et ailleurs, en toute indépendance du patronat et des notables de droite qui essayent de chevaucher le mouvement, et en toute indépendance, également, d’un gouvernement socialo-écologiste et de ses alliés de circonstance qui essaient d’éteindre l’incendie avant les élections municipales et européennes pour mieux repasser à l’offensive par la suite.
Les secousses que connaît la Bretagne ne sont pas tant spécifiquement régionales qu’elles sont surtout l’expression de la façon dont la crise est en train de saper les bases de la structure économique sur laquelle l’Ouest s’est construit au cours des quarante dernières années. Ce qui est proprement breton, en revanche, c’est que la situation nous renvoie l’image du niveau de tension auquel l’extrême gauche devrait se préparer si elle entend être une alternative politique du monde du travail et de la jeunesse, face aux contrecoups d’une crise dont personne ne voit le bout du tunnel et que la gauche au gouvernement comme la droite dans l’opposition sont bien décidés à faire payer aux classes populaires.
Ce qu’il y a de distinctif, en revanche, dans les événements bretons, c’est la façon dont une région jusque-là marquée par une certaine stabilité sociale et relativement épargnée par la crise connaît une poussée sociale multiforme et violente qui déborde largement les canaux institutionnels habituels par le biais desquels, par les négociations, le dialogue ou la matraque, les gouvernements sont habitués à avancer et à faire accepter de plus ou moins bonne grâce l’austérité et les licenciements. Possibilités de radicalisation soudaine, de coups de colère qui sortent du cadre des mobilisations syndicalo-électoralo-routinières, mais aussi fragmentation de la lutte des classes, difficultés à tracer un cap de classe en l’absence, en amont, d’un pôle de syndicalisme lutte de classe, anti-tables-rondes et ronds-de-jambe avec la gauche, et d’une gauche radicale à la hauteur de la crise, c’est cela aussi que font présager les événements bretons.
Tradition de colères sur fond d’effritement accéléré de l’appareil productif Pour ceux qui pensaient que les seuls gros dossiers de la rentrée c’étaient les retraites et les accords de compétitivité, les affrontements bretons ont eu un caractère quelque peu inattendu. Leur côté spectaculaire fait néanmoins partie d’une sorte de patrimoine régional, souvent masqué et occulté, mais qui explique la radicalité et la détermination des manifestants, à la fois dans les actions qui ont été menées comme au cours des accrochages contre les forces de l’ordre lorsqu’ils ont été provoqués. Mais ce qui explique, plus proche de nous, cette tension qui a fini par exploser, c’est la dégradation abrupte de la situation économique régionale. Aujourd’hui, les trois piliers du tissu économique breton qui ont fait la croissance de la région qui sont en crise. C’est le cas de l’industrie automobile, qui représente 10.000 emplois directs, avec notamment le pôle PSA à Rennes, des télécoms, secteur sous pression qui emploie directement 65.000 personnes et, enfin, de l’agroalimentaire, avec autant d’emplois directs parmi lesquels 8.000 sont menacés. (…)
Troisième élément, à ce niveau : même si le mouvement breton n’est pas « révolutionnaire et prolétaire à l’état pur » (mais quel mouvement l’est ?), le réduire simplement à un mouvement droite piloté en sous-main par les notables de l’agroalimentaire et sponsorisé par Armor Lux, le comparer à une sorte de « Tea-party » régional, c’est à la fois méconnaître sa dynamique, ses potentialités et faire preuve d’une condescendance assez crasse. Du côté de ceux qui, comme Mélenchon, ont raillé les « esclaves qui manifestaient aux côtés de leurs maîtres », ce mépris n’a aucunement contribué à clarifier les enjeux politiques et à renforcer un pôle combatif des travailleurs et de la jeunesse dans le mouvement contre les licenciements en Bretagne. (…)
Pacte d’avenir pour la Bretagne ou construire dans les mobilisations un bloc de classe indépendant et un plan d’urgence ouvrier et populaire ?
La radicalité de la réaction bretonne a mis à mal la stratégie hollandiste de négociation-dialogue-table-ronde-concertation mise en œuvre depuis le début plus d’un an maintenant pour mieux asséner les coups que la droite n’a pas pu décocher avant lui. Face à la violence des accrochages, on a demandé à Valls de ne pas jeter davantage d’huile sur le feu pour l’instant, tout en menaçant de poursuites les « fauteurs de trouble », comme si à l’origine il n’y avait pas le rouleau-compresseur des licenciements qui menacent des milliers de familles. (…)
L’opération, dans le plus pur style élyséen, consiste à faire venir s’asseoir à la même table les licencieurs et les licenciés, les syndicats de patrons et les directions des syndicats de salariés, la gauche et la droite, les maires de tout bord. (…)
Une journée de mobilisation a d’ailleurs été annoncée pour le 30 novembre dans le Finistère. D’ici-là, même s’il est peu probable que de nouveaux sinistres sociaux soient annoncés, il y a fort à parier que la colère ne sera pas retombée. De ce point de vue, l’enjeu est double : poursuivre le rapport de force et élever le niveau de l’affrontement pour faire plier patrons et gouvernement mais également éviter que ce soit la droite voire même l’extrême droite, marginale jusqu’à présent dans les manifestations et qui n’a pas les moyens de se mettre en avant, qui soit en mesure de capitaliser le ras-le-bol breton. C’est en ce sens qu’il faut continuer à œuvrer à la construction du pôle ouvrier le plus fort possible, comme l’a fait le NPA Kreiz-Breizh au cours des dernières semaines et encore une fois lors de la mobilisation de Quimper. (…)
Face aux menaces sur l’emploi, nationalisations des entreprises qui ferment ou licencient ! (…)
Une victoire en Bretagne pourrait ouvrir la voie à un mouvement d’ensemble ?
Commentaire du comité de Rédaction:
Quimper ou Carhaix ? Manif de droite ou manif populaire ? Les échauffourées avec les CRS sont-elles suffisamment de gauche lorsqu’on y retrouve des ouvriers aux côté de syndicalistes agricoles de la FNSEA ou se suffisent-elles à eux-mêmes, tant qu’il y a affrontement ? Casser la grille d’une sous-préfecture, est-ce que ça a autant de valeur lorsque ce sont des travailleurs du rang qui la défoncent que lorsqu’un patron de l’industrie volaillère se trouve parmi les ouvriers de ses abattoirs ? Autant de questions légitimes, mais mal posées, pour saisir les enjeux de ce qui se passe, aujourd’hui, en Bretagne.
Un autre article sur le même sujet par la « tendance Claire »
Commentaire du blog:
Nous donnons la parole aux « minoritaires » du Npa. Ceci est « pour information » et n’est pas une prise de position officielle.
L’illustration, est le drapeau du « PCB », parti communiste breton, qui a fusionné avec l’OCT en 1975, OCT qui a fini par fusionner avec la LCR