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04 mars 2025 ~ 0 Commentaire

Cameroun (Reporterre)

 

Au Cameroun, la révolte des travailleurs du sucre

Au Cameroun, la révolte des travailleurs du sucre

Une grève dans une filiale camerounaise du géant français Castel a été violemment réprimée en février, causant la mort d’un ouvrier et d’un policier. Depuis, la situation reste précaire.

« On n’avait jamais perdu de camarade jusqu’ici, mais voilà, c’est arrivé. Cela montre bien que la situation va de mal en pis », s’indigne un membre du Syndicat des travailleurs saisonniers de la filière canne à sucre (Strascas), au Cameroun. Le 4 février, un mouvement de grève des ouvriers de la Société sucrière du Cameroun (Sosucam) a été violemment réprimé par les forces de sécurité à Nkoteng, dans le centre du pays, tournant au drame : un employé d’une vingtaine d’années, Gaston Djora, a été tué par balle et un policier a succombé à ses blessures.

Tous les Camerounais connaissent la Sosucam, installée dans le département de la Haute-Sanaga, à une centaine de kilomètres au nord de Yaoundé : ils consomment son sucre depuis des décennies. Créée en 1964, l’entreprise appartient à 26 % à l’État du Cameroun et à 74 % au groupe français Somdia, lui-même propriété de la multinationale française Castel, principal producteur de vin dans le monde. Il contrôle aussi 80 % du marché de la bière au Cameroun.

La Sosucam produit annuellement environ 100 000 tonnes de sucre. Elle possède deux usines et 25 000 hectares de plantations de canne à sucre, réparties sur plusieurs arrondissements : Mbandjock, Nkoteng et Lembe-Yezoum. Près de 8 000 personnes travaillent sur ces sites, dont 90 % sont des saisonniers, employés comme manœuvres pendant la campagne sucrière (novembre-mai), et parfois aussi pendant l’intercampagne (juillet-août). Une grande partie d’entre eux, soit environ 3 500 personnes, sont dans les champs pour planter, glaner ou couper, les autres officient dans les usines et le transport des récoltes.

« Travailler sans être payé, ce n’est pas possible »

Pour ces saisonniers, originaires pour beaucoup du nord du pays, une région défavorisée, les conditions de travail sont très pénibles : « Aucune couverture médicale, pas de logement décent pour certains, salaires très bas, manque d’équipements de protection, non-respect du cadre légal limitant le travail temporaire », a résumé dans un rapport de 2023 le Strascas, qui rend aussi compte d’entraves à ses activités et d’accidents du travail récurrents.

Lorsque la grève a débuté le 26 janvier, le salaire mensuel de base d’un manœuvre agricole était de 56 000 francs CFA (85 euros) — une somme ne permettant pas de vivre décemment. Au niveau national, le salaire minimum garanti pour les ouvriers agricoles est de 45 000 francs CFA (69 euros).

En février 2022, les saisonniers avaient déjà fait grève pour dénoncer des licenciements abusifs et leurs conditions de travail. Il y avait eu des violences. L’entreprise, déjà mise en cause pour des problèmes environnementaux et sociaux par les populations riveraines, avait dû suspendre les licenciements. Elle avait aussi augmenté de 75 francs CFA (0,11 centime d’euro) une « prime de coupe », parfois donnée en fin de journée aux coupeurs de canne (elle était ainsi passée de 0,27 à 0,38 centime d’euro), et accordé une « prime de campagne » de 15 000 francs CFA (23 euros).

Cette année, les ouvriers se sont révoltés en raison d’un changement dans les dates et modalités de paie, un retard de paiement, et des rétrogradations inexpliquées d’échelons sur la grille salariale ayant entraîné des baisses de salaire. « Le travail est très dur et l’est de plus en plus. Travailler sans être payé, ce n’est pas possible. Les gens se sont rassemblés pour dire : “Pas de travail s’il n’y a pas d’argent ! Trop, c’est trop” », explique à Reporterre le président du Strascas, Mahamat Zoulgue.

Ils ont ramassé « des gars en ville pour les mettre de force dans des bus »

Le mouvement a commencé à Mbandjock, suivi par 2 000 personnes, et s’est propagé le 29 janvier à Nkoteng avec 1 500 grévistes supplémentaires. « Les premiers jours, tout était calme, on se rassemblait le matin, puis chacun rentrait chez lui », témoignent des saisonniers, pour qui « cette crise couvait depuis longtemps ». Au bout de quelques jours, la direction de la Sosucam a renoncé à changer le système de paiement des salaires. Mais elle n’a pas répondu aux revendications concernant le niveau de la rémunération, si bien que les grévistes n’ont pas repris le chemin des plantations.

La situation a fini par dégénérer le 4 février à Nkoteng, lorsque les forces de sécurité ont entrepris, selon des témoignages, de « ramasser des gars en ville pour les mettre de force dans des bus qui devaient les conduire aux champs. La population a dit non et s’est levée comme un seul homme. C’est à ce moment-là que la police a commencé à tirer avec de vraies balles et que l’un des nôtres est tombé ». Durant les affrontements, un policier a reçu un coup mortel à la tête, un nombre indéterminé de personnes ont été blessées, et des champs de canne à sucre ont été incendiés.

« Ce qui était à l’origine une réclamation relative à la date de paiement des acomptes d’une partie du personnel, à laquelle il a été répondu favorablement, est devenue progressivement une entrave au travail accompagnée de tensions et heurts urbains et échappant totalement au cadre de l’entreprise », a commenté la Sosucam dans un communiqué.

Disant avoir mené une « concertation » avec « les délégués du personnel, les présidents des syndicats, les représentants désignés des manœuvres agricoles coupeurs », elle a ensuite annoncé, le 7 février, une augmentation du salaire de base des coupeurs de canne de… 1 000 francs CFA (1,5 euro). Elle a invité dans la foulée les employés à reprendre le travail. « La reprise en marche ! » a-t-elle posté les jours suivants, en lettres capitales, sur son compte LinkedIn, avec une vidéo de camions chargeant des tiges de canne à sucre — sans faire aucune allusion à l’ouvrier et au policier tués.

Pression et chantage

Si une partie des travailleurs sont retournés dans les champs, plusieurs centaines d’autres sont restés chez eux. « On ne peut pas se satisfaire des mesures annoncées par Sosucam », commente un membre du Strascas, qui revendique 450 adhérents et 2 000 sympathisants. « Nous n’avons pas été invités aux présumées réunions de concertation. Pourtant, nous avions écrit pour dire que notre syndicat souhaitait participer. La direction a préféré discuter avec des syndicats qui lui sont inféodés », précise un autre.

Le 15 février, la compagnie, qui a dit avoir comptabilisé treize jours d’arrêt de production, 970 hectares de plantations partis en fumée et une perte de plus de 5 milliards de francs CFA (7,6 millions d’euros), a adressé une note aux « collaborateurs de Sosucam » pour constater « un taux d’absentéisme élevé ». Ajoutant : « Seront considérés comme démissionnaires et remplacés » ceux qui n’auront pas repris le travail « sous vingt-quatre heures ».

Quelques jours après, elle a été obligée de lancer une campagne de recrutement pour trouver 600 ouvriers agricoles. « La répression et le remplacement des travailleurs saisonniers absents ne sauraient être une option pour trouver des solutions durables à la crise », laquelle « reste la même, irrésolue et latente », a réagi le Strascas, qui réclame un « dialogue inclusif » et plaide pour un salaire de base d’au moins 70 000 francs CFA (107 euros) pour les manœuvres agricoles.

« Nous ne baissons pas les bras »

« Les travailleurs ont toujours la même colère », constate un syndicaliste, qui s’exprime comme d’autres sous anonymat par crainte de représailles. « Dans cette société, rien ne change jamais. Même pour obtenir une augmentation symbolique de 5 francs CFA [moins de 1 centime d’euro], on est obligé de faire grève. Jusqu’à perdre un camarade… » soupire un autre.

Les saisonniers ont reçu l’appui de la députée européenne Marina Mesure, membre de La France insoumise (LFI), qui a demandé à la Commission européenne d’examiner la situation au regard de la directive européenne adoptée en 2024 sur le devoir de vigilance des entreprises — la maison mère de la Sosucam étant installée dans un État membre de l’Union européenne, la France. Contacté par message électronique, le groupe Castel n’a pas réagi.

Les autorités camerounaises, elles, n’ont guère manifesté d’empathie pour les employés de la société : s’il a parlé de la nécessité d’un « dialogue franc et sincère », le ministre du Travail et de la Sécurité sociale, Grégoire Owona, a fustigé des « mouvements sociaux sauvages ».

« Nous ne baissons pas les bras, répond Mahamat Zoulgue, le président du Strascas. Le combat continue pour trouver des solutions. »

https://reporterre.net/

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02 mars 2025 ~ 0 Commentaire

Immigrés (France Info)

pst algerie

« On avait besoin de main-d’œuvre sur tous les terrains » :

Comment l’accord de 1968 avec l’Algérie a aussi profité à la France

Le Premier ministre, François Bayrou, a ouvert la réexamen de cet accord bilatéral qui régit les conditions d’immigration des Algériens en France.

C’est un texte juridique qui se retrouve au cœur du débat politique français et qui cristallise les tensions diplomatiques inédites entre Paris et Alger. Lors d’une conférence de presse tenue mercredi 26 février, le Premier ministre, François Bayrou, a annoncé que la France allait demander à l’Algérie de « réexaminer » l’accord de 1968 entre les deux pays. Paris va notamment fournir à Alger une « liste d’urgence » de personnes considérées comme « sensibles » et que le gouvernement français veut voir reprises par l’Algérie, faute de quoi l’accord sera dénoncé.

Cette demande est exprimée de longue date par l’extrême droite et la droite, y compris par certains membres du gouvernement, comme le ministre de l’Intérieur, Bruno Retailleau. « Cet accord est daté et a déformé l’immigration algérienne. Il n’a pas lieu d’être. Il faut le remettre sur la table », dénonçait le locataire de Beauvau, le 19 janvier sur BFMTV.

Emmanuel Macron a lui tenter de calmer le jeu vendredi, appelant les deux capitales à « réengager un travail de fond » sur leurs accords d’immigation. « Nous n’avancerons pas s’il n’y a pas un travail, on ne peut pas se parler par voie de presse, c’est ridicule, ça ne marche jamais comme cela », a-t-il lancé lors d’une conférence de presse à Porto. « Il ne faut pas que [les relations] fassent l’objet de jeux politiques », a-t-il ajouté. En parallèle de ces tensions, nombre d’historiens rappellent d’ailleurs que la France a longtemps bénéficié de cet accord et relativisent sa portée actuelle.

« Maintenir un courant régulier de travailleurs »

Le document signé le 27 décembre 1968 a fait l’objet de trois révisions, en 1985, 1994 et 2001. Il confère aux Algériens un statut dérogatoire au droit commun, qui régit leurs conditions de circulation, de séjour et d’emploi sur le territoire national.

L’accord, considéré aujourd’hui par certains responsables politiques français comme trop avantageux pour l’Algérie, a initialement été signé pour restreindre les facilités d’immigration offertes par les accords d’Evian.

Signés six ans plus tôt, ceux-ci ont mis fin à la guerre d’Algérie (de 1954 à 1962) en reconnaissant l’indépendance du pays, colonie française depuis 1830, tout en actant « que la liberté de circulation serait maintenue », note l’historien et politiste Emmanuel Blanchard dans son ouvrage Histoire de l’immigration algérienne en France.

« On est passé d’une circulation de peuplement, avec des gens qui pouvaient circuler librement, à l’instauration d’une migration de travail. On avait besoin de main-d’œuvre sur tous les terrains », observe auprès de franceinfo l’historien Benjamin Stora, spécialiste de l’Algérie contemporaine et de l’immigration algérienne. « On donne aux Algériens le statut de travailleurs étrangers. C’est une compensation, car il n’y a donc plus de liberté de circulation. »

« On avait besoin de travailleurs algériens mais plus de populations qui circulaient. C’est ça, les accords de 1968. »Benjamin Stora, historien, spécialiste de l’Algérie

à franceinfo

Concrètement, « seuls 35 000 Algériens par an peuvent venir s’installer en France, sans que ceux-ci n’aient besoin de visa long séjour. Ces derniers bénéficient d’une carte de résidence (CRA) de cinq ans s’ils peuvent justifier d’un emploi. Au bout de trois ans de résidence en France, une CRA de dix ans peut être octroyée, relève TV5 Monde. L’accord de 1968 facilite également le regroupement familial (conjoint, enfants, ascendants), au bout de douze mois de présence en France. »

Le décret d’application du 18 mars 1969 justifie l’accord par « la nécessité de maintenir un courant régulier de travailleurs », qui « tienne compte du volume de l’immigration traditionnelle algérienne en France ». Pour Benjamin Stora, l’époque était « à l’expansion économique de la France », avec les Trente Glorieuses.

« Il fallait construire tous azimuts, des autoroutes, des logements. Or, l’immigration européenne, qu’elle soit portugaise ou espagnole, se tarissait, il y avait besoin d’une immigration algérienne », détaille l’historien.

Le destin de ces immigrés algériens se cantonne souvent aux usines. « Plus de 90% des Algériens étaient ouvriers : la plupart d’entre eux n’avaient d’autre destin que ‘la pelle et la pioche’, expression utilisée par les principaux intéressés afin de désigner les emplois de manœuvres dans le BTP ou l’industrie », relève ainsi Emmanuel Blanchard dans son ouvrage.

« Cet accord n’existe pratiquement plus »

Les Trente Glorieuses se terminent en 1973 avec le premier choc pétrolier. « Lorsqu’on a signé l’accord de 1968, on était donc bientôt à la fin des Trente Glorieuses, mais les Algériens ont ensuite participé à la vie de la France dans tous les domaines et de manière notable », poursuit l’historien Jacques Frémeaux, professeur à l’université La Sorbonne et spécialiste de l’histoire coloniale.

Ils sont aussi les premiers concernés par le chômage qui s’installe avec la récession économique. « Les immigrés et en particulier les Arabes furent les premiers frappés par les licenciements. Ils subirent de plein fouet les conséquences des discriminations, qui les frappaient dans toutes les dimensions de leurs carrières », affirme Emmanuel Blanchard dans son livre. Néanmoins, cela n’a pas atténué le flux des arrivées des Algériens en France.

« Le taux de chômage était certes en hausse rapide mais les emplois de service faiblement qualifiés étaient en essor. L’immigration algérienne qui n’avait jamais été homogène se diversifia alors encore un peu plus et continua de se renouveler au cours des années 1980 et 1990. « Emmanuel Blanchard, historien et politiste »

dans « Histoire de l’immigration algérienne en France »

La communauté algérienne, poursuit ce spécialiste, devient la plus nombreuse en France, au tournant des années 1980, « place auparavant occupée par les Italiens puis les Portugais ». Or, cette situation n’est pas de nature à ravir les autorités françaises qui, dès 1947 et le nouveau statut de l’Algérie, ont vu arriver dans l’Hexagone ces immigrés pendant plusieurs décennies.

« Les centaines de milliers d’arrivées alors enregistrées ne furent cependant pas encouragées par les pouvoirs publics français. Ceux-ci auraient en effet préféré que l’immigration soit alimentée par d’autres régions et demeure ‘européenne’ », relate Emmanuel Blanchard.

L’accord de 1968 va, au fur et à mesure de ses révisions et a fortiori depuis l’obligation de visa imposée en 1986, se restreindre. « De facto, cet accord n’existe pratiquement plus. Qu’est-ce qui compte pour un Algérien ? C’est d’avoir un visa. Or, depuis 1986, c’est très dur l’avoir », assure Benjamin Stora.

Les Algériens restent cependant aujourd’hui en France les premiers ressortissants étrangers, en nombre, puisqu’ils sont chaque année « plus de 400 000″ à « obtenir un visa pour se rendre et séjourner plus ou moins longuement en France », selon Emmanuel Blanchard.

Margaux Duguet 02/03/2025

https://www.francetvinfo.fr/

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27 février 2025 ~ 0 Commentaire

Vannes

Les salariés de Michelin à Vannes se sentent méprisés
Les salariés de Michelin à Vannes se sentent méprisés • © France3 Bretagne

« Encore du mépris envers les salariés ». A Vannes, Michelin devrait fermer le 1er septembre 2025

Ce matin à l’usine Michelin de Vannes, les syndicats ont fait un point auprès des salariés après la 5ème réunion de négociations des primes de départ depuis l’annonce de la fermeture de l’usine. S’il y a eu des avancées, ils les jugent bien insuffisantes. D’autant qu’ils ont appris que l’usine doit fermer dès le 1er septembre 2025.

Méprisés. Voilà comment se sentent les salariés de l’usine Michelin de Vannes.
Depuis novembre 2024 et l’annonce de la fermeture du site, les syndicats se battent pour de meilleures conditions de départ.

Après 5 réunions de négociation, ils ne se sentent toujours pas écoutés. « On a l’impression de parler à un mur. Les personnes qui sont en face de nous ne sont pas décideurs. On nous dit que l’enveloppe est presque vide. On leur propose d’aller chercher une rallonge, une enveloppe supplémentaire. On nous dit que les personnes qui sont décideurs ne sont pas disponibles. On trouve que c’est encore du mépris envers les salariés« .

Fermeture le 1er septembre? L’inquiétude grandit chez les salariés

En prime, l’annonce d’une date avancée de la fermeture. Pas encore décidée, elle suscite l’inquiétude. Si elle est actée, l’usine fermera le 1er septembre 2025. Trop tôt, pour des salariés encore dans le flou, concernant leur avenir.

« Trouver du boulot, c’est possible, il y en a. Mais ici, on était bien rémunérés. Si on part dans une autre entreprise, on repart de zéro, on doit montrer nos compétences, on repart sur un autre projet. La majorité des personnes ici, c’est plus de 46 ans. Donc c’est très compliqué « .

La santé mentale des salariés préoccupante

Compliqué pour tous les salariés depuis quatre mois. La santé mentale des salariés s’est dégradée. L’intersyndicale veut déposer une alerte pour danger grave imminent.
Il y a des gens qui parlent de pensées noires, de suicide.

« Moi je peux vous dire, je vais voir la psychologue. Parce que je ne suis pas bien. J’ai d’autres problèmes ailleurs, plus ça, ça ne le fait plus ».

La semaine prochaine aura lieu une dernière réunion de négociations. L’intersyndicale espère une meilleure écoute et de plus grandes avancées.

  Benoit Levaillant 25/02/2025

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13 février 2025 ~ 0 Commentaire

L’industrie française traverse une crise majeure

 

Un ouvrier inspecte un bol dans l'usine du verrier français Duralex, à La Chapelle Saint-Mesmin, dans le centre de la France, mercredi 7 septembre 2022. (Image d'illustration)
Un ouvrier inspecte un bol dans l’usine du verrier français Duralex, à La Chapelle Saint-Mesmin,

Entre défaillances et crises, «la France est à l’aube d’une nouvelle vague de désindustrialisation»

‘industrie française traverse une crise majeure : les spécialistes s’attendent à ce que les fermetures d’usines soient plus nombreuses que les ouvertures en 2025. La chercheuse Anaïs Voy-Gillis, géographe et chercheuse associée à l’université de Poitiers, auteure de Pour une révolution industrielle, pointe la nécessité d’un sursaut européen dans un contexte rendu encore plus difficile par le retour de Donald Trump au pouvoir

RFI : Quelle place occupe l’industrie aujourd’hui en France ? Anaïs Voy-Gillis : Le poids de l’industrie représente environ dix points de PIB, contre une vingtaine en Allemagne et une quinzaine en Italie, ce qui est à peu près la moyenne de la zone euro. La France s’est désindustrialisée plus fortement que les autres pays européens. Aujourd’hui, le poids de l’industrie dans le PIB est proche de celui de la Grèce, alors que la Grèce n’a jamais été une grande nation industrielle.

Comment expliquez-vous la vague de défaillances d’entreprises et de fermetures d’usines à laquelle on assiste depuis fin 2023 ? D’abord, je suis convaincue qu’il y a un phénomène de rattrapage post-Covid, puisque dans les années 2021-2022, on avait moins de défaillances que dans la période qui a précédé la pandémie. Les prêts garantis par l’État, qui ont été massivement accordés en 2020, ont commencé à être exigibles, et certaines entreprises se sont retrouvées en difficulté pour les rembourser. Et depuis la crise énergétique de 2022, les prix de l’énergie restent structurellement plus élevés en Europe qu’aux États-Unis ou en Chine. La France se retrouve donc à être moins compétitive, et dans un contexte de guerre de prix, les entreprises françaises perdent face à des acteurs non-européens qui sont extrêmement agressifs.

Tous les secteurs sont concernés par ces défaillances ? Tous les secteurs industriels et toutes les régions sont concernés. Néanmoins, l’est et le nord de la France sont particulièrement touchés, du fait de leur spécialisation dans l’automobile. Le secteur est en pleine conversion vers l’électrique, ce qui pénalise un certain nombre de sous-traitants, soit parce qu’ils fabriquaient des pièces spécifiques aux voitures thermiques, soit parce qu’ils sont victimes d’une stratégie des constructeurs qui, dans le cadre de la réorganisation de leur chaîne de valeur, se détournent massivement du territoire français. Le secteur automobile européen est dans une situation critique, confronté dans l’électrique à la concurrence de nouveaux acteurs chinois ou américains, une situation inimaginable il y a 10 ans. Au-delà de l’automobile, la chimie et la métallurgie sont aussi touchées. Quand le bâtiment et l’automobile, qui sont des industries de l’aval, connaissent un ralentissement comme c’est le cas aujourd’hui, les industries de l’amont sont touchées par effet de contamination. L’Allemagne est aussi concernée. Le phénomène s’est accentué depuis la guerre en Ukraine et l’arrêt de la livraison de gaz russe.

 

Quelles sont les conséquences sociales de ce phénomène pour les territoires concernés ? À partir du moment où vous avez une usine qui ferme, vous avez un effet de contamination sur tout le territoire. Si vous avez un grand donneur d’ordres qui ferme, l’effet sur le territoire est important, puisque les salariés de l’usine vont être concernés, mais aussi les emplois indirects : les sous-traitants et les fournisseurs, ce qu’on appelle les emplois induits, c’est-à-dire tout ce qui est lié à la consommation et à la fiscalité générées par les gens qui travaillent dans l’usine, par l’entreprise et par les sous-traitants. On a observé des territoires qui ont perdu des habitants, des cafés, des commerces, des services publics, des classes dans les écoles… Certains territoires parviennent à rebondir. Pour d’autres, c’est plus difficile. On voit certaines régions toujours pénalisées par les vagues de désindustrialisation qui ont commencé dans les années 1980.

 

Quand on se rend sur place à la rencontre des salariés concernés, ils ont l’impression d’une forme d’attentisme, voire d’inaction de la part des autorités. Il n’y a pas de doctrine d’État en matière industrielle, et encore moins sur le rôle que l’État peut jouer via les participations qu’il possède dans les grands donneurs d’ordre, comme Renault. Tant que l’on n’aura pas de vision et que l’Europe ne sera pas un peu plus agressive sur la réciprocité dans les normes et dans l’accès au marché européen, cette situation va perdurer. Après la pandémie, on avait réussi à stabiliser le mouvement de désindustrialisation. Nous sommes dans un moment de crise économique qui va entraîner la destruction d’emplois industriels. Cela appelle à un sursaut. Si on veut assurer la réindustrialisation, il faut qu’on prenne acte du contexte géopolitique dans lequel on se trouve.

Il est plus difficile de réindustrialiser que de conserver une industrie existante ? Oui. Quand vous perdez les savoir-faire, l’outil industriel, et que le territoire est en perte de dynamique économique, il est beaucoup plus compliqué de faire revenir une activité que de la maintenir ou d’accompagner une mutation. Pendant un temps, on a pensé compenser en créant des emplois dans la logistique, mais la logistique, ce sont des emplois à moins forte valeur ajoutée et moins bien rémunérés que ceux de l’industrie. Il faut que l’État, les politiques et le ministre de l’Industrie aient une vision de ce qu’ils veulent faire de l’industrie en France. Ça ne suffit pas, de parler de réindustrialisation. La réindustrialisation s’inscrit dans un contexte, dans un projet de société. C’est parce qu’on a créé un cadre, qu’on a mis en place des réformes sur la fiscalité, qu’on a un dynamisme économique, que les usines vont venir s’implanter. Mais se dire « je veux des usines », et donner des subventions, c’est risquer de les voir partir au premier changement de conjoncture économique. C’est ce qu’a connu le Royaume-Uni : plein d’entreprises étrangères sont venues, ont bénéficié de millions de livres d’aides publiques, et sont reparties sans tenir leurs engagements et sans qu’on leur demande de restituer le moindre cent. C’est aussi cette gestion de la désindustrialisation et des années d’inégalités économiques qui a conduit au Brexit.

 

ela fait pourtant une quinzaine d’années que la question de la réindustrialisation s’est imposée dans le débat public, et encore plus depuis la pandémie de covid-19. Ça n’a rien donné ? C’est vrai qu’on reparle beaucoup d’industrie depuis 2020. Mais dès 2008, la crise économique et financière a conduit à l’organisation, l’année suivante, des états généraux de l’industrie. En 2012, il y a eu le ministère du Redressement productif, piloté par Arnaud Montebourg et ses 34 plans pour une nouvelle France industrielle. Sauf que dès qu’il est parti, ces plans ont été balayés et remplacés par autre chose. La nécessité de réindustrialiser pour des questions d’autonomie et de souveraineté fait consensus dans la classe politique française, mais il n’y a pas de consensus sur le « comment ». On parle beaucoup d’industrie, mais on n’a pas réussi à inscrire cette notion de réindustrialisation dans le temps long. Il n’y a pas de doctrine d’État en matière industrielle.

 

Plus récemment il y a eu France 2030, avec des investissements publics d’ampleur… C’est vrai que des moyens massifs ont été alloués à la réindustrialisation, avec 54 milliards d’euros mis dans une dizaine de plans. Mais on avait des objectifs très clairs, comme celui de produire deux millions de véhicules électriques, et d’autres beaucoup plus flous, comme « prendre notre part dans l’exploration des fonds marins ». Et puis, dans ces 54 milliards d’euros, qu’est-ce qui était vraiment de l’argent frais et qu’est-ce qui relève simplement de la bascule de fonds existants ? Néanmoins, même si c’était insuffisant, il faut saluer l’initiative. La période qui a suivi, entre 2020 et 2023, a semblé plus favorable, avec une augmentation du remplissage des carnets de commande. On recrutait beaucoup. Mais c’est une situation très fragile, dans un contexte géopolitique de concurrence entre les pays qui veulent tous renforcer leur base industrielle, au moment où la demande mondiale est complètement atone, notamment en Chine. Et ce alors même que la Chine est déjà en surcapacité de production, notamment concernant les biens clés pour la transition écologique : l’éolien, les panneaux solaires, les véhicules électriques… À cela s’ajoutent les barrières tarifaires aux États-Unis qui poussent les entreprises chinoises à exporter encore plus vers l’Europe, le prix de l’énergie toujours très élevé en Europe… Et puis, il y a les normes environnementales et sociales, nécessaires mais exigeantes, que doivent respecter les entreprises européennes, mais pas leurs concurrents. Tout cela mis bout à bout : nous sommes plutôt à l’aube d’une nouvelle vague de désindustrialisation en France qu’à un véritable mouvement de réindustrialisation.

Il y a pourtant eu des ouvertures d’usines, notamment de batteries électriques dans le nord de la France… Oui, mais cela reste fragile. On ne produit pas encore massivement des batteries électriques en Europe. Et quand bien-même ce serait le cas, si les constructeurs n’assemblent pas les véhicules en Europe, la chaîne de valeur ne va jamais se reconstituer.

Est-ce que c’est un risque qui pèse sur ces usines, cette « vallée de l’électrique » que les pouvoirs publics tentent d’encourager ?

J’aimerais vous dire que la réponse est non. Malheureusement, je ne suis pas convaincue que toutes les usines ouvertes survivent. Pour différentes raisons : à la fois le manque de dynamisme du marché, les difficultés à reconstituer les chaînes de valeur (de la fabrication des batteries électriques à leur recyclage en passant par la fabrication des pièces des véhicules et leur assemblage, NDLR) sur le territoire européen, la concurrence entre les différents projets européens, le fait qu’on ne maîtrise pas la chimie derrière la production des batteries, parce que la Chine a plusieurs années d’avance sur nous… Aujourd’hui, l’Europe va se retrouver dans la situation de certains pays émergents, et elle va devoir assurer des transferts de technologie si elle veut assurer sa pérennité.

 

https://www.rfi.fr/

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10 février 2025 ~ 0 Commentaire

Pouagat Lidl

Pouagat Lidl dans A gauche du PS

           Les grévistes devant l’entrepôt de PLOUAGAT

A l’appel de l’intersyndicale composée de quasiment tous les syndicats présents dans la SNC LIDL France, à l’exception de l’UNSA, la grève a été très bien suivie. Plus de 4 000 grévistes selon La CGT. Des magasins fermés voir en mode service minimum.

La direction de la SNC LIDL qui n’a de commerçante que le nom a les yeux braqués sur les seuls résultats financiers, la fameuse « performance ».

Dans ce cadre, il n’est pas étonnant que les NAO 2025, en clair les négociations annuelles obligatoires achoppent sur de minables augmentations de salaires, l’ouverture généralisée des magasins le dimanche matin. 

L’exemple d’Auray qui fait parti de la DR 15 est significatif, le magasin ouvre…sans clients. C’est cela la « performance » LIDL… 

Le turn over des salariés dans le nouvel entrepôt de Plouagat n’est surement pas du au hasard non plus.

La dégradation des conditions de travail, le raz le bol a surement pesé sur l’engagement dans la grève. Le prochain round de négociation nationale a lieu vendredi prochain. 

Le mouvement de grève peut il rebondir, s’étendre, se renforcer? 

Les salarié-e-s de LIDL ont défié la famille Schwarz. Dieter Schwarz reste assez largement la plus grosse fortune d’Allemagne. Il faut taper dans sa caisse.

Correspondant comité Nathalie Le Mél 

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09 février 2025 ~ 0 Commentaire

Afrique du Sud

 

Photo
Dessin de Yaser Abo Hamed, Australie/Cartoon Movement

Les corps émaciés remontés de l’enfer de Stilfontein, dans le nord-ouest du pays, attestent de manière choquante du succès de la stratégie de l’État sud-africain, déterminé à forcer les mineurs illégaux à “se rendre ou à mourir de faim”.

La catastrophe était prévisible – déjà une soixantaine de morts et ce n’est pas fini [à la date du 27 janvier, on compte 88 morts]. Mais ce bras de fer entre l’État et les activités minières clandestines est le fruit d’une histoire complexe. Et résoudre les problèmes qui ont conduit à cette tragédie ne sera pas facile.

Comme tant d’autres drames qui ont marqué l’histoire de l’industrie minière sud-africaine, cette catastrophe fait payer un lourd tribut aux travailleurs noirs pauvres des pays voisins qui, pendant des générations, ont été exploités pour enrichir d’autres personnes grâce aux ressources de l’Afrique du Sud.

L’arme de la faim

Les faits sont les suivants : début novembre, le service de police sud-africain (Saps) dit avoir arrêté 565 mineurs illégaux, les zama zamas [surnom des mineurs illégaux], dans le Nord-Ouest, dans le cadre de l’opération Vala Umgodi.

Dans un communiqué publié à l’époque, les policiers déclarent que les zamas remontent de la mine “poussés par la faim et la déshydratation. Les forces de l’ordre empêchent les habitants qui vivent à l’extérieur de ces mines désaffectées de porter de la nourriture, de l’eau et des produits de première nécessité aux mineurs illégaux. Grâce à cette volonté de l’État, ces mineurs illégaux sont contraints de remonter à la surface.”

L’objectif de la police était de les faire “mourir de faim” – ce sont les termes qu’elle a employés – et les résultats effroyables de cette stratégie sont désormais tangibles.

Couper l’accès à la nourriture et à l’eau est une tactique mise en place pendant des années afin de freiner l’extraction minière illégale de l’or. Il y a plus de dix ans, [la compagnie minière sud-africaine] Harmony Gold a interdit de descendre de la nourriture dans ses exploitations afin d’empêcher ses employés de faire passer en contrebande des vivres aux mineurs illégaux qui s’infiltrent dans les mines en activité et les puits désaffectés, comme celui qui se trouve près de Stilfontein.

“Il faut deux choses pour survivre sous terre : de la nourriture et de l’eau. Vous pouvez toujours trouver de l’eau au fond d’une mine, mais interdire la nourriture est très efficace”, avait alors déclaré Graham Briggs, ancien directeur général de Harmony Gold, à Reuters, en 2012.

Une stratégie rodée

Les syndicats avaient validé cette décision à condition qu’un repas copieux et gratuit soit fourni aux mineurs qui remontent à la surface à la fin de chaque période de travail. Cette politique avait été élaborée en concertation avec les syndicats par une société minière légitime afin

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31 décembre 2024 ~ 0 Commentaire

SBFM (Lorient)

sbfm caudan

Nouvelles menaces sur la Fonderie de Bretagne

CorrespondantEs
Hebdo L’Anticapitaliste – 735 (26/12/2024)
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Fondeurs, oui ! Chômeurs, non ! Ce slogan résume la volonté des 350 salariéEs de la Fonderie de Bretagne à Caudan (56) qui luttent depuis plusieurs années contre les effets des restructurations de l’industrie automobile et pour le maintien de leurs emplois. Mais la décision de Renault de se désengager, annoncée vendredi 20 décembre, à la veille des fêtes, pourrait signer la fin de l’usine et le chômage pour ses salariéEs.

Le désengagement de Renault, principal client, s’inscrit dans une politique globale. Les constructeurs automobiles, à la recherche du profit maximum, et dans le cadre de la crise touchant tout le secteur, ont procédé depuis plusieurs années à l’abandon ou à l’externalisation de nombreuses activités et notamment des fonderies. Ils ont souvent fait le choix de délocaliser, entrainant des milliers de licenciements dans la branche malgré des luttes importantes. Celles-ci, faute de coordination, ont été défaites boîte par boîte.

Renault contraint de maintenir la production abandonne

Les salariéEs de la Fonderie de Bretagne ont une tradition de lutte ancienne. Avec leur syndicat CGT, ils ont réussi depuis 2009, par plusieurs grèves longues, à contraindre Renault à maintenir la production et donc l’emploi malgré une baisse des effectifs et la vente à des repreneurs — fonds d’investissement avides de profits rapides — bénéficiant de subventions publiques importantes. Engagées depuis quelques mois, les négociations avec un nouveau repreneur devaient permettre la poursuite de l’activité et sa diversification. La condition étant que Renault s’engage à fournir des volumes jusqu’en 2028 afin d’assurer la transition. Le constructeur vient donc de refuser ce geste, contraignant le repreneur à renoncer. La direction de l’usine annonce que les fonds disponibles ne permettront pas de maintenir l’activité au-delà de quelques mois, voire quelques semaines. Sous le choc, les salariéEs ont quitté l’usine et n’y reviendront qu’en début d’année. Une procédure de sauvegarde va être engagée par le tribunal de commerce.

Un État hypocrite

L’État, actionnaire de Renault à hauteur de 15 %, révèle toute son hypocrisie lorsque le ministre de l’Industrie démissionnaire déplore l’attitude du constructeur. Comme le dit justement un responsable CGT de l’usine : « C’est Renault qui a la mainmise sur l’État, on a un État faible et il s’est engagé trop tard dans le dossier »1. De fait, l’État et le gouvernement sont au service des capitalistes et laissent faire comme le montrent récemment les vagues de suppressions d’emplois notamment chez Michelin à Vannes dans le même département où 300 licenciements vont avoir lieu. Seul un rapport de forces pourra leur imposer de maintenir les emplois.

Nul doute que début janvier, les salariéEs décideront des actions à mener. Les forces syndicales et politiques du Pays de Lorient devront les soutenir unitairement. Il n’y aura pas de solution durable sans mobilisation, sans mettre en avant la nécessité d’un moratoire ou d’une interdiction des licenciements, et sans chercher à imposer la réquisition-socialisation afin de garantir l’emploi et de préparer les transformations nécessaires des productions pour lutter contre le réchauffement climatique.

Correspondant

  • 1. Rapporté par Ouest France du 20 décembre 2024.

https://lanticapitaliste.org/

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20 décembre 2024 ~ 0 Commentaire

Fonderie Lorient (SBFM)

sbfm caudan

« Un profond dégoût et de la colère », la Fonderie de Bretagne se dit « exécutée par Renault Group à la veille de Noël »

« Patron voyou », « cynisme froid », « décision inique », « exécution à la veille de Noël » : le groupe Renault est accusé d’avoir fait capoter un projet de reprise de la Fonderie de Bretagne, à Caudan, dans le Morbihan. Des attaques que conteste le constructeur automobile. 350 emplois sont menacés.

Après une visioconférence avec le Ministre délégué à l’Industrie Marc Ferracci, la direction de la « Fonderie de Bretagne », a annoncé ce 20 décembre 2024 l’échec des négociations pour la reprise du site de Caudan dans le Morbihan.

« La Fonderie de Bretagne froidement exécutée par Renault Group à la veille de Noël », selon la direction

Selon FDB, le groupe automobile a refusé de valider les termes d’un projet de reprise par le fonds Private Assets.

« Cette décision inique condamne la faisabilité du projet de reprise et va provoquer à très court terme la fermeture de l’entreprise, la perte de 350 emplois et le démantèlement d’un actif industriel de grande qualité », », a tancé la direction du site, en faisant part de « son profond dégoût et sa colère face au cynisme froid de Renault », qui « exécute froidement « La Fonderie de Bretagne » à la veille de Noël. ».

Ancienne filiale de Renault, FDB avait été vendue en 2022 au fonds d’investissement allemand Callista Private Equity, au terme, déjà, d’une longue lutte sociale. Mais le groupe automobile est resté le principal client de la Fonderie, représentant 95% de son chiffre d’affaires en 2024.

En grave déficit, FDB, dont les salariés produisent des pièces en fonte pour les suspensions comme pour les échappements, a entamé en juillet des négociations avec le fonds d’investissement allemand Private Assets pour sa reprise.

Ce fonds, déjà propriétaire d’un groupe de fonderies en Allemagne et en Espagne, Procast Guss, s’était engagé à apporter 11 000 tonnes de production au plan de charge, selon la direction de FDB. Mais, après une ultime réunion de négociation lundi, « il manquait de la visibilité sur les volumes commandés par Renault pour les années 2025, 2026 et 2027 pour finaliser un accord », a souligné la Fonderie de Bretagne.

« Renault refuse d’apporter suffisamment de visibilité », selon le Ministère

Contacté par l’AFP,  le cabinet du ministre de l’Industrie a également indiqué que Renault « refusait d’apporter suffisamment de visibilité sur la part de marché de leurs commandes. Or cette visibilité est nécessaire pour permettre tout projet de reprise industrielle ».

« Renault doit désormais faire face à ses responsabilités et assumer les conséquences des décisions qui seront prises », a ajouté l’entourage du ministre démissionnaire Marc Ferracci.

Renault renvoie la balle

« Les engagements de Renault Group étaient connus de tous les acteurs depuis des semaines », a rétorqué Renault auprès de l’AFP, imputant l’échec du projet de reprise « au désengagement soudain de Private Assets, alors que tous les acteurs avaient fait un effort ».

Le groupe au losange souligne ainsi avoir « confirmé son engagement à hauteur de 35 millions, soit 65 % du financement » et avoir « toujours soutenu la Fonderie de Bretagne via des commandes et la couverture de pertes ».

« Patron voyou » selon la CGT

À l’annonce de l’échec des négociations, la numéro 1 de la CGT Sophie Binet a quant à elle qualifié Renault de « patron voyou » qui « laisse fermer des entreprises industrielles très solides, sachant que ça fait quatre ans qu’on travaille sur la diversification et qu’il y avait tout un réseau d’entreprises qui elles, contrairement à Renault, s’étaient engagées ».

Sur le site morbihannais de Caudan, le délégué du syndicat CGT, Maël Le Goff a, lui aussi, dénoncé la politique du constructeur.

« Renault a décidé de délocaliser sa production en 2021. Ils ne veulent pas s’engager sur des volumes, car ils se sont déjà engagés avec des fonderies à l’étranger. Après des années de lutte, c’est compliqué à absorber », a ajouté le syndicaliste, décrivant des salariés partagés entre « la haine, les pleurs, le dégoût, le silence et la révolte »

« Du cynisme » selon les élus bretons

Dans un communiqué commun, Loïg Chesnais-Girard, président de la Région Bretagne, et Fabrice Loher, président de Lorient Agglomération, maire de Lorient, et ministre il y a encore quelques jours,  ont également dénoncé le « cynisme dévastateur » du constructeur automobile.

« Renault doit assumer publiquement cet abandon et prendre ses responsabilités » a indiqué Fabrice Loher qui  « salue les efforts consentis pour trouver un avenir à ce site industriel aujourd’hui modernisé », et appelle à « rester engagés pour une reconversion ».

Ce désengagement marque « une trahison inacceptable envers les salariés et le pays tout entier », commente de son côté Loïg Chesnais-Girard, le président de région. « J’appelle à une prise de conscience collective et à une mobilisation immédiate pour préserver ce qui reste de notre industrie et pour éviter que d’autres drames similaires ne se produisent. Notre avenir industriel mérite mieux que ce renoncement irresponsable ».

Cynisme, c’est encore le terme employé par le député écologiste de Lorient, Damien Girard : «  le groupe aux résultats records net de 2,3 milliards d’euros en 2024 condamne 300 emplois industriels bretons, 300 familles. Cette décision avant les fêtes de fin d’année est non seulement irresponsable, mais aussi purement cynique ».  

Héritière des Forges d’Hennebont, créées en 1860, la Fonderie de Bretagne est implantée à Caudan depuis 1965.

Après une visioconférence avec le Ministre délégué à l’Industrie Marc Ferracci, la direction de la « Fonderie de Bretagne », a annoncé ce 20 décembre 2024 l’échec des négociations pour la reprise du site de Caudan dans le Morbihan.

« La Fonderie de Bretagne froidement exécutée par Renault Group à la veille de Noël », selon la direction

« Cette décision inique condamne la faisabilité du projet de reprise et va provoquer à très court terme la fermeture de l’entreprise, la perte de 350 emplois et le démantèlement d’un actif industriel de grande qualité », », a tancé la direction du site, en faisant part de « son profond dégoût et sa colère face au cynisme froid de Renault », qui « exécute froidement « La Fonderie de Bretagne » à la veille de Noël. ».

La réaction de Jérôme Dupont, directeur de la Fonderie de Bretagne, après l’échec des négociations pour la reprise du site morbihannais • ©FTV

Ancienne filiale de Renault, FDB avait été vendue en 2022 au fonds d’investissement allemand Callista Private Equity, au terme, déjà, d’une longue lutte sociale. Mais le groupe automobile est resté le principal client de la Fonderie, représentant 95% de son chiffre d’affaires en 2024.

En grave déficit, FDB, dont les salariés produisent des pièces en fonte pour les suspensions comme pour les échappements, a entamé en juillet des négociations avec le fonds d’investissement allemand Private Assets pour sa reprise.

Ce fonds, déjà propriétaire d’un groupe de fonderies en Allemagne et en Espagne, Procast Guss, s’était engagé à apporter 11 000 tonnes de production au plan de charge, selon la direction de FDB. Mais, après une ultime réunion de négociation lundi, « il manquait de la visibilité sur les volumes commandés par Renault pour les années 2025, 2026 et 2027 pour finaliser un accord », a souligné la Fonderie de Bretagne.

« Renault refuse d’apporter suffisamment de visibilité », selon le Ministère

Contacté par l’AFP,  le cabinet du ministre de l’Industrie a également indiqué que Renault « refusait d’apporter suffisamment de visibilité sur la part de marché de leurs commandes. Or cette visibilité est nécessaire pour permettre tout projet de reprise industrielle ».

« Renault doit désormais faire face à ses responsabilités et assumer les conséquences des décisions qui seront prises », a ajouté l’entourage du ministre démissionnaire Marc Ferracci.

Renault renvoie la balle

« Les engagements de Renault Group étaient connus de tous les acteurs depuis des semaines », a rétorqué Renault auprès de l’AFP, imputant l’échec du projet de reprise « au désengagement soudain de Private Assets, alors que tous les acteurs avaient fait un effort ».

Le groupe au losange souligne ainsi avoir « confirmé son engagement à hauteur de 35 millions, soit 65 % du financement » et avoir « toujours soutenu la Fonderie de Bretagne via des commandes et la couverture de pertes ».

« Patron voyou » selon la CGT

À l’annonce de l’échec des négociations, la numéro 1 de la CGT Sophie Binet a quant à elle qualifié Renault de « patron voyou » qui « laisse fermer des entreprises industrielles très solides, sachant que ça fait quatre ans qu’on travaille sur la diversification et qu’il y avait tout un réseau d’entreprises qui elles, contrairement à Renault, s’étaient engagées ».

Sur le site morbihannais de Caudan, le délégué du syndicat CGT, Maël Le Goff a, lui aussi, dénoncé la politique du constructeur.

« Renault a décidé de délocaliser sa production en 2021. Ils ne veulent pas s’engager sur des volumes, car ils se sont déjà engagés avec des fonderies à l’étranger. Après des années de lutte, c’est compliqué à absorber », a ajouté le syndicaliste, décrivant des salariés partagés entre « la haine, les pleurs, le dégoût, le silence et la révolte ».

« Du cynisme » selon les élus bretons

Dans un communiqué commun, Loïg Chesnais-Girard, président de la Région Bretagne, et Fabrice Loher, président de Lorient Agglomération, maire de Lorient, et ministre il y a encore quelques jours,  ont également dénoncé le « cynisme dévastateur » du constructeur automobile.

« Renault doit assumer publiquement cet abandon et prendre ses responsabilités » a indiqué Fabrice Loher qui  « salue les efforts consentis pour trouver un avenir à ce site industriel aujourd’hui modernisé », et appelle à « rester engagés pour une reconversion ».

Ce désengagement marque « une trahison inacceptable envers les salariés et le pays tout entier », commente de son côté Loïg Chesnais-Girard, le président de région. « J’appelle à une prise de conscience collective et à une mobilisation immédiate pour préserver ce qui reste de notre industrie et pour éviter que d’autres drames similaires ne se produisent. Notre avenir industriel mérite mieux que ce renoncement irresponsable ».

Cynisme, c’est encore le terme employé par le député écologiste de Lorient, Damien Girard : «  le groupe aux résultats records net de 2,3 milliards d’euros en 2024 condamne 300 emplois industriels bretons, 300 familles. Cette décision avant les fêtes de fin d’année est non seulement irresponsable, mais aussi purement cynique ».  

Héritière des Forges d’Hennebont, créées en 1860, la Fonderie de Bretagne est implantée à Caudan depuis 1965.

  Gilles Le Morvan 20/12/2024
https://france3-regions.francetvinfo.fr/

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23 novembre 2024 ~ 0 Commentaire

Douarnenez ( France 24)

Il y a 100 ans, la grève victorieuse et chantante des sardinières de Douarnenez

Le 21 novembre 1924, des ouvrières des conserveries de sardines de Douarnenez entamaient une grève pour réclamer une augmentation de salaire. Ce mouvement a par la suite pris une ampleur nationale, réunissant jusqu’à 2 000 grévistes. Au bout de six semaines de mobilisation, les « Penn Sardin » ont fini par obtenir gain de cause face à des patrons jusque-là intransigeants. Cent ans après, cette grève inédite est toujours célébrée.

Un groupe de femmes grévistes lors de la grève des sardinières.
Un groupe de femmes grévistes lors de la grève des sardinières. © Cédias – Musée social

« Saluez, riches heureux, ces pauvres en haillons / Saluez, ce sont eux qui gagnent vos millions ». En cette fin d’année 1924, un chant anarchiste résonne dans les rues de Douarnenez, en Bretagne. Par centaines, des ouvriers des conserveries de sardines de la ville, dont une très grande majorité de femmes, battent le pavé, sabots au pied, sur les quais, pour réclamer une meilleure rémunération. Pendant 46 jours, la cité bretonne vit au rythme de cette grève qui mobilise jusqu’à 2 000 personnes dans cette commune de 12 000 habitants.

Tout débute le 21 novembre, lorsqu’une centaine de travailleurs de l’usine métallurgique Carnaud, qui fabrique des boîtes de conserve pour les sardineries, décident de débrayer. « Une centaine d’ouvrières et une quarantaine d’ouvriers demandent une augmentation de salaire de 20 centimes », résume Fanny Bugnon, maîtresse de conférences en histoire contemporaine et études sur le genre à l’université Rennes 2. « À l’époque, ces femmes gagnent 0,80 franc de l’heure, soit le prix d’un litre de lait. C’est une somme très faible. En comparaison, à la même époque en région parisienne, le salaire d’embauche des ouvrières non qualifiées est de 1,50 franc de l’heure. »

Des conditions de travail éprouvantes

La grogne couve depuis un moment. Alors que le pays se remet à peine de quatre longues années de guerre et qu’il fait face à une forte inflation, les revendications salariales se font de plus en plus pressantes. Les conditions de travail sont aussi particulièrement éprouvantes. « C’est physique. On travaille debout, dans le froid, en manipulant de l’eau bouillante ou des ciseaux très tranchants », raconte Fanny Bugnon, qui a retracé l’histoire de ce mouvement social. Les ouvrières, surnommées les « Penn Sardin » (« têtes de sardines », en breton), sont aussi soumises à des cadences épuisantes. Elles peuvent travailler de nuit, selon l’arrivée aléatoire des bateaux et de leurs cargaisons dans le port. « Par ailleurs, le travail est en théorie possible à partir de 12 ans, mais un certain nombre de témoignages font état de l’entrée dans les conserveries d’enfants plus jeunes. Il n’y a pas non plus d’âge de retraite. On peut y travailler jusqu’à 70 ans », ajoute l’historienne.

Très rapidement, la contestation engagée à l’usine Carnaud fait des émules. Elle se transforme en quelques jours en grève générale à Douarnenez. Le 25 novembre, les 21 conserveries de sardines de la ville sont à l’arrêt. Les marins pêcheurs rejoignent aussi la lutte des ouvrières. Les protestataires peuvent compter sur le soutien du nouveau maire communiste, Daniel Le Flanchec, qui installe le comité de grève dans sa mairie. Comme l’explique Fanny Bugnon, ce mouvement est une tribune et un enjeu important pour un Parti communiste en plein essor : « Le Parti communiste vise à construire et à consolider ses premiers bastions et à faire en sorte que les municipalités rouges puissent être la caisse de résonnance des aspirations de la classe ouvrière. »

La Confédération générale du travail unitaire (CGTU), qui regroupe alors des militants communistes et anarchistes, envoie aussi des renforts à Douarnenez. La syndicaliste et militante féministe Lucie Colliard se joint ainsi à Charles Tillon, futur résistant et ministre communiste, alors jeune permanent régional de la CGTU, pour structurer la mobilisation.

Des briseurs de grève

Alors que les patrons se montrent intransigeants, le mouvement trouve un écho dans toute la France. « Le comité de grève et les militants communistes réussissent le tour de force de faire reconnaître nationalement la légitimité de la grève et des revendications ouvrières, y compris par des journaux particulièrement hostiles à la classe ouvrière et ses luttes. Ils portent le débat au Parlement, font pression sur les radicaux qui sont alors ministres du Travail et de l’Intérieur pour qu’ils prennent en charge des démarches de sortie de crise », souligne Théo Bernard, doctorant en histoire contemporaine et auteur d’un mémoire intitulé « La Grève des sardinières et des manœuvres des usines métallurgiques et des fabriques de conserve de Douarnenez (1924-1925) ».

Le ministre du Travail Justin Godart propose une médiation. Le 15 décembre, deux hommes et trois femmes en grève se rendent à Paris pour représenter le comité, mais les négociations échouent. La grève bascule lorsque les dirigeants du syndicat patronal décident d’embaucher des briseurs de grève à Paris. La violence s’immisce dans le conflit. Des coups de feu éclatent. « Le premier janvier 1925, dans des circonstances mal établies, ils s’en prennent à des militants dans un café de la ville. Daniel Le Flanchec ainsi que son neveu sont gravement blessés. Le maire est atteint à la gorge, ce qui limite ses capacités d’orateur pour le reste de son existence », relate Théo Bernard.

L’incident vire à l’émeute. L’indignation ouvrière est extrêmement forte. Les patrons sont discrédités et finissent par céder le 6 janvier. Les sardinières seront bien payées un franc de l’heure. « Un contrat collectif est négocié et signé. Il reconnaît des augmentations de salaire modestes mais fait entrer le droit du travail dans les usines. Les heures de nuit sont par exemples majorées », détaille l’historien. Dans les rues de Douarnenez, les grévistes laissent éclater leur joi

Une mémoire qui résonne aujourd’hui

Pendant des décennies, la grève des sardinières est présentée comme un exemple par les militants communistes. Certains y perçoivent même aujourd’hui l’un des premiers mouvements féministes. « C’est un raccourci qui est fait », insiste Fanny Bugnon. « On peut bien sûr en tant que féministe s’en inspirer et y voir un modèle de mobilisation de femmes, mais ce n’est pas une grève féministe dans le sens où il n’y avait aucune revendication d’égalité de droits. Ce n’était pas le sujet de cette grève. »

Alors que les femmes n’ont pas encore le droit de vote, ce mouvement entraînera toutefois l’entrée en mai 1925 au conseil municipal de Douarnenez de Joséphine Pencalet, une ouvrière ayant participé au mouvement, même si son élection sera invalidée quelques mois plus tard par la préfecture. « C’était un phénomène inédit à une époque où les femmes étaient dépourvues de droits politiques », souligne Fanny Bugnon, qui a consacré un ouvrage à cette pionnière, « L’Élection interdite. Itinéraire de Joséphine Pencalet, ouvrière bretonne (1886-1972)«  (éd. du Seuil).

Cent ans plus tard, la mémoire des « Penn Sardin » résonne toujours dans les rues de Douarnenez. La ville est mobilisée pour célébrer ce centenaire. La mairie n’est plus communiste depuis 1995, mais la municipalité de centre-droit a apporté son soutien à un collectif militant nommé « Pemp real a vo! » (« 25 sous, nous aurons ! ») en référence aux revendications des sardinières. Celui-ci organise toute une série d’événements jusqu’à début janvier. « On ne trouve pas beaucoup d’équivalents en France. Il y a eu des grèves un peu partout dans l’entre-deux-guerres, mais quelles villes les célèbrent aujourd’hui ? », constate Théo Bernard.

Dans ce programme, une large place est consacrée à la culture et notamment au chant des sardinières. La grève de 1924 avait en effet été rythmée par des morceaux révolutionnaires. Un siècle plus tard, ces slogans sont toujours d’actualité, note Fanny Bugnon : « C’est une histoire qui continue à parler et qui résonne avec une condition ouvrière qui est en souffrance et en difficulté. Il y a toujours des conserveries, mais de moins en moins parce qu’on pêche le poisson ailleurs et qu’il y a des délocalisations. »

En 2004, la parolière engagée Claude Michel avait rendu hommage aux sardinières dans sa chanson « Penn Sardin ». En dix couplets, elle y raconte le combat des ouvrières. Un hymne qui prolonge leur mémoire et qui est aujourd’hui régulièrement repris dans les manifestations bretonnes : « À Douarnenez et depuis ce temps / Rien ne sera plus jamais comme avant / Écoutez l’bruit d’leurs sabots / Ç’en est fini de leur colère / Écoutez l’bruit d’leurs sabots / C’est la victoire des sardinières ».

23/11/2024  Stéphanie TROUILLARD

https://www.france24.com/

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22 novembre 2024 ~ 0 Commentaire

NPA (LORIENT)

lorient

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