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07 mars 2025 ~ 0 Commentaire

Scientifiques

 

Les scientifiques debout contre l'obscurantisme, aux États-Unis comme en France

Les scientifiques debout contre l’obscurantisme, aux États-Unis comme en France

En réaction aux attaques de Donald Trump contre la science, des chercheurs du monde entier manifestent le 7 mars. Un mouvement d’ampleur pour bâtir une science loin des « régimes totalitaires ».

Les scientifiques contre-attaquent. Vendredi 7 mars, une marche pour défendre la science est organisée à Washington et dans des dizaines de villes aux États-Unis, par le mouvement Stand Up for Science (Debout pour les sciences). Celle-ci est relayée dans de nombreux pays, dont la France.

L’initiative est une réaction à la brutale offensive contre la recherche lancée par l’administration Trump depuis le 20 janvier et son investiture à la présidence des États-Unis. Coupes budgétaires et licenciements massifs dans les institutions et laboratoires de recherche, suppression de données scientifiques, censure et filtre idéologique des financements… La violence de l’attaque a pris de court la communauté des chercheurs.

« Il y a eu un moment de sidération aux États-Unis, témoigne Olivier Berné, astrophysicien au CNRS et co-initiateur en France de la mobilisation Debout pour les sciences. Mes collègues là-bas n’osent plus s’exprimer, ils ont peur, ils ne s’attendaient pas à être attaqués à ce point-là. »

Nommer la menace totalitaire

Les multiples mobilisations prévues le 7 mars doivent permettre de dépasser ce marasme. « Des chercheurs s’organisent au niveau fédéral et à l’international, de manière spontanée et populaire. Ce mouvement est le premier et le seul grand mouvement de contestation aujourd’hui aux États-Unis », dit Olivier Berné.

Le premier objectif est de mettre des mots sur le basculement en cours. « Obscurantisme », « mise en application littérale et affolante de la dystopie orwellienne », « attaques d’une ampleur inédite depuis la Seconde Guerre mondiale », disent les divers textes de collectifs de scientifiques.

« C’est du négationnisme scientifique d’extrême droite »

« On vit un moment illibéral, avec des méthodes faisant penser à des régimes totalitaires. Même si l’on n’a pas envie de sortir ce mot tout de suite, il faut attendre de voir la réaction des contre-pouvoirs, des États fédérés, de la justice, des mobilisations dans la rue », commente Emmanuelle Perez Tisserant, historienne spécialiste des États-Unis, également initiatrice de la mobilisation en France. Et d’ajouter : « Mais lorsque Trump menace de couper les financements aux universités qui autoriseraient des manifestations, cela fait clairement penser à de l’autoritarisme, voire à du fascisme. »

Toutes les sciences ne sont pas logées à la même enseigne : les sciences sociales, les travaux sur les discriminations ou sur le genre notamment, et les sciences de l’environnement, climat et biodiversité en tête, sont les cibles privilégiées.

Lire aussi : « Femme », « climat »… Trump interdit des mots dans les articles scientifiques

« Ils cherchent à museler ou supprimer les sciences les plus critiques : celles qui alertent sur les inégalités sociales ou l’urgence écologique, et montrent qu’un changement radical de société est nécessaire », dit Odin Marc, chercheur en sciences de la Terre au CNRS, membre de Scientifiques en rébellion et du collectif scientifique toulousain Atécopol, les deux organisations soutenant la mobilisation. Il affirme : « C’est du négationnisme scientifique d’extrême droite et une dynamique de criminalisation des lanceurs d’alerte, scientifiques et au-delà. »

L’Europe sur la même pente glissante

L’appel aux chercheurs et aux citoyens à descendre massivement dans la rue vise aussi à alerter sur l’ampleur des conséquences de ces attaques contre la recherche, et à leurs répercussions mondiales. Sur le climat, par exemple, les études et les données étasuniennes sont cruciales pour la recherche mondiale, via notamment les observations de la Nasa ou le travail de la National Oceanic and Atmospheric Administration (NOAA).

Or, cette dernière vient d’être victime d’une vague de licenciements massifs, tandis que Katherine Calvin, scientifique en chef de la Nasa, a été interdite de participer à une réunion du Giec, dont elle est coprésidente d’un groupe de travail.

« Les données produites par les États-Unis sont étudiées dans le monde entier. Leur suppression ou restriction d’accès serait catastrophique. Cela montre notre très forte dépendance aux États-Unis et le besoin de repenser une forme d’autosuffisance dans la production des savoirs en Europe », dit Olivier Berné.

Ce qui suppose, a fortiori, que l’Europe ne suive pas le chemin des États-Unis. C’est l’autre signal d’alarme lancé par les chercheurs : « Ce qui se joue aujourd’hui aux États-Unis pourrait bien préfigurer ce qui nous attend si nous ne réagissons pas à temps », écrivent des scientifiques dans une tribune au Monde, qui appellent à rejoindre la mobilisation du 7 mars.

Les attaques frontales contre la science, et celles politiques et médiatiques, se multiplient aussi chez nous, en reprenant la rhétorique trumpiste : face à une crise, casser le thermomètre (ou les scientifiques) plutôt que de remettre en cause le modèle dominant. En France, sur l’écologie, le gouvernement comme l’extrême droite s’en sont pris brutalement ces derniers mois aux institutions scientifiques ou aux agences relayant les messages de la recherche.

Une mécanique délétère qui vise toute tentative de discours divergeant. « On le voit encore avec la décision de justice d’annulation du chantier de l’A69 [entre Toulouse et Castres]. Plusieurs journalistes ou élus s’en sont pris aux juges ou à la rapporteuse publique avec la même stratégie que Trump : décrédibiliser toute parole qui n’est pas la leur, quitte à inonder le débat de contre-vérités », souligne Odin Marc.

Bâtir une science ni fasciste ni capitaliste

La menace est aussi plus insidieuse. Elle passe par les politiques de destruction des moyens publics de la recherche depuis des décennies. « On sous-finance depuis vingt ans l’université. Des postes disparaissent chaque année au CNRS et il y a de moins en moins de financements par étudiant. Ce désengagement de l’État de la production de connaissances, c’est l’autre versant de cette pente glissante dans laquelle nous sommes engagés », prévient Olivier Berné.

Le collectif Scientifiques en rébellion dénonce également la multiplication des partenariats public-privé, les financements par projet au cas par cas, l’application d’une politique sélective « darwinienne » dans la recherche selon les performances des équipes, qui privilégie les gros projets et une science utilitariste, au service de l’industrie. En 2024, un rapport publié par un groupe de chercheurs alertait sur l’emprise croissante des intérêts privés sur la recherche publique en France. L’époque étant aux cures d’austérité drastiques, cette dynamique pourrait encore s’accélérer.

« Réclamer la liberté académique n’a pas de sens si on ne lui donne pas de budget. Sinon, la recherche est obligée de se lier à des intérêts privés. Il faut protéger la science du politique, en sécurisant son budget et en inventant des mécanismes pour qu’elle soit davantage en phase avec les besoins de la société », plaide Odin Marc.

Conventions citoyennes, forums citoyens et autres modalités d’interaction font partie des pistes avancées par Scientifiques en rébellion pour associer la société civile aux orientations de la recherche. « Protéger la science passe aussi pour nous par une critique de ses dérives actuelles. Il faut un vrai renouveau des relations entre science et société, pour que la production de connaissances soit vraiment au service de la démocratie et des nécessaires transitions écologique et sociétale », dit le chercheur.

Ce lien avec les citoyens est d’autant plus urgent à consolider face à la vague trumpiste. « Ce qui m’inquiète le plus, c’est qu’un certain nombre de nos concitoyens ne conçoivent pas les libertés académiques comme un bien à défendre, relève Emmanuelle Perez Tisserant. Un discours populiste qui gagne du terrain considère la recherche publique comme un repère de privilégiés. Il faut mieux défendre et formuler notre vision d’une science comme bien commun, comme savoir critique qui échappe à l’injonction de rentabilité économique. Sinon, ce sera toujours trop facile de couper les financements. »

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07 mars 2025 ~ 0 Commentaire

Scientifiques ( Reporterre)

 

Les scientifiques debout contre l'obscurantisme, aux États-Unis comme en France

Les scientifiques debout contre l’obscurantisme, aux États-Unis comme en France

En réaction aux attaques de Donald Trump contre la science, des chercheurs du monde entier manifestent le 7 mars. Un mouvement d’ampleur pour bâtir une science loin des « régimes totalitaires ».

Les scientifiques contre-attaquent. Vendredi 7 mars, une marche pour défendre la science est organisée à Washington et dans des dizaines de villes aux États-Unis, par le mouvement Stand Up for Science (Debout pour les sciences). Celle-ci est relayée dans de nombreux pays, dont la France.

L’initiative est une réaction à la brutale offensive contre la recherche lancée par l’administration Trump depuis le 20 janvier et son investiture à la présidence des États-Unis. Coupes budgétaires et licenciements massifs dans les institutions et laboratoires de recherche, suppression de données scientifiques, censure et filtre idéologique des financements… La violence de l’attaque a pris de court la communauté des chercheurs.

« Il y a eu un moment de sidération aux États-Unis, témoigne Olivier Berné, astrophysicien au CNRS et co-initiateur en France de la mobilisation Debout pour les sciences. Mes collègues là-bas n’osent plus s’exprimer, ils ont peur, ils ne s’attendaient pas à être attaqués à ce point-là. »

Nommer la menace totalitaire

Les multiples mobilisations prévues le 7 mars doivent permettre de dépasser ce marasme. « Des chercheurs s’organisent au niveau fédéral et à l’international, de manière spontanée et populaire. Ce mouvement est le premier et le seul grand mouvement de contestation aujourd’hui aux États-Unis », dit Olivier Berné.

Le premier objectif est de mettre des mots sur le basculement en cours. « Obscurantisme », « mise en application littérale et affolante de la dystopie orwellienne », « attaques d’une ampleur inédite depuis la Seconde Guerre mondiale », disent les divers textes de collectifs de scientifiques.

« C’est du négationnisme scientifique d’extrême droite »

« On vit un moment illibéral, avec des méthodes faisant penser à des régimes totalitaires. Même si l’on n’a pas envie de sortir ce mot tout de suite, il faut attendre de voir la réaction des contre-pouvoirs, des États fédérés, de la justice, des mobilisations dans la rue », commente Emmanuelle Perez Tisserant, historienne spécialiste des États-Unis, également initiatrice de la mobilisation en France. Et d’ajouter : « Mais lorsque Trump menace de couper les financements aux universités qui autoriseraient des manifestations, cela fait clairement penser à de l’autoritarisme, voire à du fascisme. »

Toutes les sciences ne sont pas logées à la même enseigne : les sciences sociales, les travaux sur les discriminations ou sur le genre notamment, et les sciences de l’environnement, climat et biodiversité en tête, sont les cibles privilégiées.

« Ils cherchent à museler ou supprimer les sciences les plus critiques : celles qui alertent sur les inégalités sociales ou l’urgence écologique, et montrent qu’un changement radical de société est nécessaire », dit Odin Marc, chercheur en sciences de la Terre au CNRS, membre de Scientifiques en rébellion et du collectif scientifique toulousain Atécopol, les deux organisations soutenant la mobilisation. Il affirme : « C’est du négationnisme scientifique d’extrême droite et une dynamique de criminalisation des lanceurs d’alerte, scientifiques et au-delà. »

L’Europe sur la même pente glissante

L’appel aux chercheurs et aux citoyens à descendre massivement dans la rue vise aussi à alerter sur l’ampleur des conséquences de ces attaques contre la recherche, et à leurs répercussions mondiales. Sur le climat, par exemple, les études et les données étasuniennes sont cruciales pour la recherche mondiale, via notamment les observations de la Nasa ou le travail de la National Oceanic and Atmospheric Administration (NOAA).

Or, cette dernière vient d’être victime d’une vague de licenciements massifs, tandis que Katherine Calvin, scientifique en chef de la Nasa, a été interdite de participer à une réunion du Giec, dont elle est coprésidente d’un groupe de travail.

« Les données produites par les États-Unis sont étudiées dans le monde entier. Leur suppression ou restriction d’accès serait catastrophique. Cela montre notre très forte dépendance aux États-Unis et le besoin de repenser une forme d’autosuffisance dans la production des savoirs en Europe », dit Olivier Berné.

Ce qui suppose, a fortiori, que l’Europe ne suive pas le chemin des États-Unis. C’est l’autre signal d’alarme lancé par les chercheurs : « Ce qui se joue aujourd’hui aux États-Unis pourrait bien préfigurer ce qui nous attend si nous ne réagissons pas à temps », écrivent des scientifiques dans une tribune au Monde, qui appellent à rejoindre la mobilisation du 7 mars.

Les attaques frontales contre la science, et celles politiques et médiatiques, se multiplient aussi chez nous, en reprenant la rhétorique trumpiste : face à une crise, casser le thermomètre (ou les scientifiques) plutôt que de remettre en cause le modèle dominant. En France, sur l’écologie, le gouvernement comme l’extrême droite s’en sont pris brutalement ces derniers mois aux institutions scientifiques ou aux agences relayant les messages de la recherche.

Une mécanique délétère qui vise toute tentative de discours divergeant. « On le voit encore avec la décision de justice d’annulation du chantier de l’A69 [entre Toulouse et Castres]. Plusieurs journalistes ou élus s’en sont pris aux juges ou à la rapporteuse publique avec la même stratégie que Trump : décrédibiliser toute parole qui n’est pas la leur, quitte à inonder le débat de contre-vérités », souligne Odin Marc.

Bâtir une science ni fasciste ni capitaliste

La menace est aussi plus insidieuse. Elle passe par les politiques de destruction des moyens publics de la recherche depuis des décennies. « On sous-finance depuis vingt ans l’université. Des postes disparaissent chaque année au CNRS et il y a de moins en moins de financements par étudiant. Ce désengagement de l’État de la production de connaissances, c’est l’autre versant de cette pente glissante dans laquelle nous sommes engagés », prévient Olivier Berné.

Le collectif Scientifiques en rébellion dénonce également la multiplication des partenariats public-privé, les financements par projet au cas par cas, l’application d’une politique sélective « darwinienne » dans la recherche selon les performances des équipes, qui privilégie les gros projets et une science utilitariste, au service de l’industrie. En 2024, un rapport publié par un groupe de chercheurs alertait sur l’emprise croissante des intérêts privés sur la recherche publique en France. L’époque étant aux cures d’austérité drastiques, cette dynamique pourrait encore s’accélérer.

« Réclamer la liberté académique n’a pas de sens si on ne lui donne pas de budget. Sinon, la recherche est obligée de se lier à des intérêts privés. Il faut protéger la science du politique, en sécurisant son budget et en inventant des mécanismes pour qu’elle soit davantage en phase avec les besoins de la société », plaide Odin Marc.

Conventions citoyennes, forums citoyens et autres modalités d’interaction font partie des pistes avancées par Scientifiques en rébellion pour associer la société civile aux orientations de la recherche. « Protéger la science passe aussi pour nous par une critique de ses dérives actuelles. Il faut un vrai renouveau des relations entre science et société, pour que la production de connaissances soit vraiment au service de la démocratie et des nécessaires transitions écologique et sociétale », dit le chercheur.

Ce lien avec les citoyens est d’autant plus urgent à consolider face à la vague trumpiste. « Ce qui m’inquiète le plus, c’est qu’un certain nombre de nos concitoyens ne conçoivent pas les libertés académiques comme un bien à défendre, relève Emmanuelle Perez Tisserant. Un discours populiste qui gagne du terrain considère la recherche publique comme un repère de privilégiés. Il faut mieux défendre et formuler notre vision d’une science comme bien commun, comme savoir critique qui échappe à l’injonction de rentabilité économique. Sinon, ce sera toujours trop facile de couper les financements. »

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30 janvier 2025 ~ 0 Commentaire

Facultés Brest

Facultés Brest dans A gauche du PS

L’Université de Bretagne Occidentale est en déficit de 4,5 millions d’euros, et Macron prévoit une baisse des moyens des universités en France de 1,08 milliards d’euros ! Mobilisons-nous ensemble pour nos conditions d’études !

31 Janvier à 18h, Amphi 3 de la fac Segalen : Assemblée inter-universitaire
5 Février à 12h30, Amphi 3 de la fac Segalen : Assemblée Générale

Contre le déficit à la fac, mobilisation générale !

Mobilisons-nous ensemble pour nos conditions d’études !

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23 décembre 2024 ~ 0 Commentaire

Serbie (ESSF)

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La montée des protestations étudiantes en Serbie révèle des tensions profondes Basé sur les reportages de Mašina, 16-20 décembre 2024

La vague actuelle de protestations étudiantes en Serbie trouve son origine dans un incident tragique survenu le 1er novembre 2024, lorsqu’un auvent en béton s’est effondré dans une gare de Novi Sad, faisant 15 morts. Cette catastrophe a suscité une vaste indignation publique, beaucoup l’attribuant à la corruption gouvernementale, à la négligence et à des pratiques de construction inadéquates. En réponse, les étudiants universitaires et du secondaire ont lancé des manifestations, exigeant des comptes et conduisant à la suspension des cours dans plusieurs universités.

Ce qui a commencé comme des protestations contre cette tragédie spécifique s’est maintenant transformé en un mouvement national englobant tout le système éducatif serbe, révélant des tensions plus profondes concernant des réformes proposées qui, selon les critiques, transformeraient les universités en « zones franches d’investissement ». Écrivant dans Mašina le 20 décembre, Stefan Aleksić explique que les changements législatifs prévus créeraient effectivement une « zone franche éducative », suivant un schéma similaire aux privatisations industrielles antérieures. « Après avoir démantelé l’industrie développée pour permettre au capital sale d’ouvrir des ateliers de misère et d’enrouler des câbles ici, nous allons maintenant démanteler les institutions éducatives existantes », écrit Aleksić.

Un soutien public sans précédent

L’ampleur du soutien apparaît remarquable. Selon un sondage réalisé par Mašina entre le 16 et le 17 décembre, M.M. rapporte que 97% des 4 080 répondants soutiennent les blocages étudiants, choisissant l’option « oui, qu’ils continuent ». Des milliers de messages de soutien ont afflué, dont l’un dit : « Mes enfants sont petits, mais je leur raconterai comment vous étiez et comment ils devraient être. Bravo ! »

La communauté académique se rallie aux protestations

Plus d’une centaine de doctorants de l’Université de Belgrade ont publié une déclaration reliant les événements actuels à la mission historique de l’université. A.G.A. rapporte leur insistance sur le fait que « L’Université de Belgrade, l’institution d’enseignement supérieur la plus ancienne et la plus prestigieuse de Serbie, défend la connaissance, la pensée critique et l’intégrité académique comme valeurs suprêmes depuis sa fondation. »

Les doctorants relient explicitement les protestations actuelles aux principes académiques plus larges, notant que « la pensée critique… implique non seulement un examen critique des connaissances et des réalisations scientifiques, mais aussi un examen critique de la société dans laquelle nous agissons et à laquelle nous appartenons. »

Un mouvement croissant

A.G.A. rapporte que toutes les facultés de Belgrade, Novi Sad, Niš et Kragujevac sont actuellement bloquées. Le mouvement s’est étendu au-delà des universités traditionnelles aux écoles professionnelles, les étudiants de l’École supérieure d’électrotechnique et d’informatique (VIŠER) déclarant : « VIŠER fait face au même blocage que l’Université de Belgrade. Nous pensons que ces événements n’ont pas reçu autant d’attention médiatique que les étudiants universitaires, bien que les étudiants en formation professionnelle ne manquent ni de nombre ni de dévouement. »

Activités étudiantes pendant les blocages

Les étudiants utilisent leur expertise pour analyser les politiques gouvernementales. A.G.A. rapporte que les étudiants en mathématiques de la Faculté des sciences naturelles de Novi Sad ont examiné les prêts « favorables » du gouvernement pour les jeunes, révélant qu’« après l’achat d’un appartement d’une valeur de 75 000 EUR, les jeunes rembourseront plus de deux appartements similaires sur 40 ans. »

#Les travailleurs de l’éducation et les étudiants défient les mesures gouvernementales

Les protestations s’appuient sur des mois de grèves « de faible intensité » des travailleurs de l’éducation. I.K. rapporte que, alors que davantage de lycées rejoignaient les protestations étudiantes, les syndicats d’enseignants envisageaient d’intensifier leurs actions. Le gouvernement a tenté de devancer ces mouvements en annonçant une prolongation des vacances d’hiver, à partir du 24 décembre.

Cependant, A.G.A. rapporte que les élèves du XIV Gymnasium de Belgrade ont voté pour continuer à venir à l’école malgré les vacances déclarées, précisant que leur décision était « exclusivement une réponse aux vacances imposées par le gouvernement serbe et le ministère de l’Éducation visant à briser les blocages des lycées. »

Réponse gouvernementale et manifestation critique de dimanche 22 décembre

Bien que le président Vučić se soit engagé à répondre aux demandes des manifestants, notamment en publiant tous les documents relatifs à la reconstruction de la gare et en assurant la responsabilité, les protestations continuent. I.K. rapporte qu’une importante manifestation nationale est prévue pour le dimanche 22 décembre à 16h00 place Slavija, Belgrade. L’agriculteur et militant Zlatko Kokanović déclare à Mašina : « Les étudiants nous appellent – parents, agriculteurs, médecins, professeurs, avocats, juges, procureurs, police, armée : ’Venez soutenir vos enfants.’ »

P.-S.

Cette analyse s’appuie sur la couverture extensive des reporters de Mašina du 16 au 20 décembre 2024 :
A.G.A. a couvert les activités étudiantes pendant les blocages, la participation des lycéens et le soutien des doctorants
I.K. a rapporté les développements de la grève des enseignants et la manifestation prévue dimanche
Stefan Aleksić a fourni une analyse des réformes universitaires et de leurs implications plus larges
M.M. a documenté le soutien public à travers les données de sondage
A.M. a rapporté la réponse des institutions culturelles

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22 décembre 2024 ~ 0 Commentaire

PROFS (FR3)

profs

« Ça a toujours été comme ça depuis dix ans ». La galère des enseignants vacataires des universités pour se faire payer

Pour le millier d’enseignants vacataires que comptent les campus de Lorient-Vannes-Pontivy, les heures travaillées en septembre seront payées avec un trimestre de retard. Le délai est aussi long à l’Université de Rennes. Une configuration difficile en ces temps de vie chère. Mais les administrations assurent ne pas pouvoir réduire les délais.

Ekaterina enseigne le russe à la faculté de Lettres et de Sciences sociales, à Lorient, depuis cinq ans. Pour ce travail, elle gagne 34 euros net par heure d’enseignement. « Depuis tout ce temps, ça n’a pas changé : nous commençons nos cours fin septembre, et nous sommes rémunérés fin janvier. »

Un retard systématique au premier semestre, qui lui fait se serrer la ceinture pendant de longs mois. Ce paiement différé n’est pas nouveau, et il s’applique dans de nombreuses universités. Mais en ces temps d’inflation, il devient très problématique.

Des retards sans explications claires

À Rennes, une autre enseignante vacataire, en faculté des sciences pharmaceutiques, confirme le délai de trois, voire quatre mois avant d’être payé. « On m’a fait comprendre que c’était la procédure habituelle pour les premiers mois après la rentrée. Ce serait un problème de crédit qui ne serait pas débloqué avant la fin de l’année. » Eloïse (prénom d’emprunt, car la personne souhaite conserver l’anonymat) enseigne les sciences pharmaceutiques, 20h par mois à l’Université, et touche pour cela environ 1500 euros brut. Mais les rémunérations de septembre, octobre et novembre ne sont jamais versées avant le mois de janvier, en plusieurs fois. « Ça a toujours été comme ça, depuis dix ans. »

Les vacataires ne peuvent enseigner plus de 192 heures par an à l’Université, de septembre à fin avril, et ils doivent justifier d’une autre activité, qui doit leur apporter la majeure partie de leur revenu.

« C’est une rémunération dont j’ai vraiment besoin »

De son côté, Ekaterina enseigne aussi le russe dans un lycée, ce qui constitue son activité principale. « Je ne peux pas travailler plus d’heures au lycée où j’enseigne, parce qu’avec la situation géopolitique, il n’y a pas assez d’élèves désireux d’apprendre le russe. Donc mon travail à l’université, ce n’est pas seulement un complément de salaire, c’est une rémunération dont j’ai vraiment besoin. »

L’Université s’estime contrainte par le ministère des Finances

Contactée, l’administration de l’Université de Bretagne Sud reconnaît des reports : »les premières mises en paye n’interviennent pas avant fin novembre, ou en décembre. »  Mais la présidente de l’Université, Virginie Dupont estime ne pas pouvoir y remédier. « Il y a un décalage minimum de deux mois lié au principe de « paye à façon », qui est appliqué dans la fonction publique » explique la Présidente, estimant que les retards supplémentaires de paiement seraient liés à des justificatifs manquants de la part des vacataires. « Les dates de mise en paiement sont imposées, chaque mois, par la direction générale des Finances publiques, il y a un calendrier pour cela », justifie-elle.

Plusieurs mois pour procéder au paiement

D’après le dossier de paie d’un enseignant vacataire que nous avons pu consulter, le retard dépasse les deux mois annoncés. Pour une soixantaine d’heures de travail effectuées en octobre, le paiement n’est validé que le 22 novembre suivant, soit un mois et demi plus tard. Sur le total des heures effectuées, l’Université annonce qu’elle rémunérera 4h en décembre et 16h seront mises en paiement sur la paye de janvier 2025. Le reste sera versé en février.

Un délai extrêmement long qui n’est pas sans conséquences sur les enseignants. Au-delà de leur situation personnelle, les préoccupations financières peuvent aussi affecter leur état d’esprit, et à terme la qualité de leur enseignement ou leur motivation. Une mission de l’Inspection générale de l’Enseignement supérieur et de la recherche doit établir, dans les prochains mois, des préconisations pour améliorer la façon dont les vacataires sont rémunérés.

Écrit par Myriam Thiébaut 17/12/2024

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03 décembre 2024 ~ 0 Commentaire

FSU-SNUIPP

Une manifestation d'enseignants à Paris, le 10 septembre 2024. (XOSE BOUZAS / HANS LUCAS / AFP)

Le syndicat majoritaire FSU-SNUIpp prévoit 65% de grévistes jeudi dans les écoles

Les agents de la fonction publique sont appelés à se mobiliser pour une journée d’action et de grève, jeudi, au lendemain du vote à l’Assemblée nationale de motions de censure contre le gouvernement.

Les professeurs des écoles « ont répondu à l’appel à la grève des organisations syndicales » avec près de « 65% de grévistes annoncés » dans le « premier degré » jeudi 5 décembre, a annoncé mardi le FSU-SNUIpp, majoritaire. Les agents de la fonction publique sont appelés à se mobiliser pour une journée d’action et de grève, menaçant d’ouvrir un nouveau front social, alors que le gouvernement est menacé de censure.

L’annonce par l’exécutif, fin octobre, d’un plan de lutte contre l’« absentéisme » des fonctionnaires, qui doit permettre de dégager 1,2 milliard d’euros d’économies, a progressivement tendu les relations entre les syndicats d’agents et le ministre de la Fonction publique. « L’attaque violente des mesures de (…) Guillaume Kasbarian, mais également les annonces de suppressions de postes résonnent fortement dans les écoles du pays », écrit le FSU-SNUIpp dans un communiqué.

« Des conditions de travail dégradées »

« Dans tous les départements, ce sont des milliers d’écoles qui seront fermées jeudi et les personnels manifesteront partout leur colère face à ce gouvernement. » « Depuis trop d’années déjà, les enseignantes et enseignants se sentent méprisé.es par un pouvoir qui ne prend pas la mesure du terrain », poursuit le syndicat. Ce dernier déplore « des conditions de travail dégradées, un salaire en berne et un pouvoir d’achat qui ne fait que baisser ».

Après les cheminots et les agriculteurs, l’exécutif se prépare à une nouvelle semaine de tensions sociales. Plusieurs dizaines de rassemblements sont prévus en France à l’appel d’une intersyndicale, jeudi, au lendemain de l’examen à l’Assemblée nationale de deux motions de censure contre le gouvernement.

03/12/2024

https://www.francetvinfo.fr/

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26 octobre 2024 ~ 0 Commentaire

Education (NPA)

Commission éducation nationale
Hebdo L’Anticapitaliste – 726 (24/10/2024)

Éducation : mettre un stop à l’entreprise de démolition

Les suppressions de postes dans l’éducation nationale prévues pour 2025 continuent de détruire le service public d’enseignement, pour servir les intérêts de l’école privée. Il faut un plan d’urgence pour sauver l’Éducation nationale !

Michel Barnier avait assuré faire de l’école sa priorité. Ce n’était pas pour la sauver, mais parce qu’elle est au centre de son plan de destruction de la fonction publique. Ainsi, l’Éducation nationale éponge la plus grande part des suppressions de postes dans le projet de budget 2025.

Des arguments dans la continuité d’une politique destructrice

Ce sont 4 035 suppressions de postes d’enseignantEs qui sont prévues dont 3 155 dans le premier degré au prétexte d’une baisse démographique nationale. Cette baisse globale aurait pu être l’occasion de diminuer le nombre de jeunes par classe. D’après la FSU-SNUIPP, 28 % des classes du primaire comptent plus de 25 jeunes, alors que la moyenne dans l’Union ­européenne est de 19,1.

On compte 8 865 suppressions de postes dans le second degré, entre 2017 et 2023, pour 7 441 élèves supplémentaires. Le nombre de jeunes par classe est en augmentation continue (plus de 25 en collège, plus de 30 en lycée), alors que les ministères successifs se gargarisent d’objectifs « d’individualisation des parcours de l’élève ». L’enseignement professionnel tient le record des suppressions de postes avec la fonte des horaires d’enseignement : les élèves de Bac pro ont perdu l’équivalent de 14 semaines de cours depuis les réformes de 2019.

Pendant que le gouvernement diminue l’enveloppe publique, les budgets alloués à l’enseignement privé augmentent. Le nombre de jeunes de 15 ans et plus scolariséEs dans le privé est passé de 16,4 % en 2018 à 21,6 % en 2022. Sans compter le financement du « privé hors contrat », dénoncé par les organisations syndicales, le 16 octobre 2024 : « alors qu’unE élève en lycée professionnel public coûte en moyenne 13 760 euros, certaines écoles de production affichent 29 700 euros par personne, soit plus du double, financés à 85 % avec des fonds publics. »

Un plan d’urgence pour l’Éducation

Pour revenir au nombre d’enseignantEs par élève de 2006, il faut embaucher 42 257 profs. Et pour redonner à l’éducation la même part dans le PIB qu’en 1996, il faudrait 27 milliards supplémentaires (la moitié du budget de l’armée ou bien 12,5 % des aides publiques aux entreprises en 2024). C’est le prix d’une éducation qui donne à chaque jeune les moyens de réussir sa scolarité.

Il y a urgence à ce que chaque territoire fasse état de ses besoins réels. Par exemple, les 2 000 postes d’accompagnantEs d’élèves en situation de handicap (AESH) annoncés nationalement sont inférieurs au besoin de 2 200 AESH chiffré pour la Seine-Saint-Denis. Il leur faut également un statut de fonctionnaire à la hauteur des tâches effectuées : une formation, 24 heures payées 1 700 euros net (alors qu’aujourd’hui les collègues se débrouillent pour se former et gagnent en moyenne 850 euros).

Pour obtenir la satisfaction de nos besoins, il faut construire un mouvement de défense du service public d’éducation, qui passera par une mobilisation nationale des salariéEs, des élèves et de leurs parents.

La commission Éducation nationale

https://lanticapitaliste.org/

 

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30 septembre 2024 ~ 0 Commentaire

BREST ( 1er Octobre)

greve

Éducation nationale : ce qu’il faut savoir sur la journée de grève à Brest

Les organisations syndicales et politiques appellent à la grève dans l’Éducation nationale mardi 1er février. À Brest, le rendez-vous est fixé à 11h place de la Liberté.

Les principales organisations syndicales et des partis politiques appellent les personnels de l’Éducation, parents d’élèves, lycéens, étudiants et citoyens à participer à la journée de grève et de manifestation dans l’Éducation nationale mardi 1er octobre 2024.

À Brest, un rassemblement est prévu à 11h place de la Liberté.

Revendications

Parmi les revendications et inquiétudes : la perte possible de nombreux postes d’enseignants dans le premier degré pour la prochaine rentrée scolaire dans le Finistère, la mise en place de groupes de niveaux, l’augmentation des salaires et de meilleures conditions de travail.

https://actu.fr/bretagne/

Mouvement social du 1er octobre : à Brest, les écoles perturbées et une manifestation prévue à 11 h

Plusieurs syndicats et organisations étudiantes appellent à la grève nationale, mardi 1er octobre 2024, pour demander au gouvernement une hausse des salaires et l’abrogation de la réforme des retraites. À Brest, une manifestation aura lieu à 11 h, place de la Liberté.

L’intersyndicale relaie l’appel à manifester.
L’intersyndicale relaie l’appel à manifester. | ARCHIVES GUILLAUME SALIGOT / OUEST-FRANCE

CGT, FSU, FO, Solidaires, Union pirate et la Confédération paysanne s’unissent pour appeler à plusieurs mobilisations dans le Finistère, mardi 1er octobre 2024.

À Brest, elle aura lieu à 11 h, place de la Liberté. Selon l’intersyndicale, cette date « marque le début des discussions sur le budget de l’État à l’Assemblée nationale. C’est le moment de gagner qu’enfin les plus riches et multinationales soient taxés pour financer nos services publics, la justice sociale et environnementale ». Elle souhaite aussi profiter de la rentrée du nouveau gouvernement Barnier pour demander l’abrogation de la réforme des retraites.

La section PCF du pays de Brest (comme le NPA) annonce, via un communiqué, qu’elle apporte « tout son soutien à cette journée contre l’austérité et pour le progrès social, et appelle à rejoindre en grand nombre la manifestation ».

Ce mouvement social aura un impact sur les établissements scolaires de Brest. Des accueils périscolaires seront fermés, ainsi que des cantines et des multi-accueils, annonce la Ville.

https://www.ouest-france.fr/

 

 

 

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18 septembre 2024 ~ 0 Commentaire

Propos racistes (Basta!)

profs

Propos racistes à l’école, popularité de Bardella : les profs face aux idées d’extrême droite

Alors que monte le vote en faveur de l’extrême droite, l’école n’échappe pas à ses idées. Les enseignantes et enseignants font face à une libération de la parole raciste, notamment dans les territoires et villes où est implanté le RN.

Tous ont demandé l’anonymat. Les enseignants qui témoignent de la montée des idées d’extrême droite dans leurs établissements scolaires ne veulent pas le faire sous leurs vrais noms. « Si jamais la mairie apprend que c’est moi qui ai parlé, c’est mon école qui va en payer le prix », s’inquiètent des professeurs de Béziers, Orange ou Hénin-Beaumont, des villes dirigées par l’extrême droite. Mais ailleurs aussi, les salles de classe et salles des professeurs font l’expérience de la montée de ces idées.

Maria, enseignante d’histoire-géographie à Nîmes, a constaté l’intérêt de ses élèves pour Jordan Bardella, tête de liste RN aux Européennes, pendant la campagne élections de juin dernier. « Lors d’un cours d’enseignement moral et civique sur la démocratie avec mes terminales, plusieurs d’entre eux m’ont parlé du candidat RN, de sa campagne sur les réseaux sociaux et de leur envie de voter pour lui », témoigne-t-elle.

Pour l’enseignante, l’enjeu est de rester dans la neutralité politique qu’exigent d’elle son poste et son statut de fonctionnaire. « J’ai orienté la discussion vers la comparaison avec d’autres pays européens. L’idée était de voir quelles avaient été les conséquences sur la société de l’arrivée au pouvoir de l’extrême droite », explique l’enseignante. Elle n’a pas initié cette discussion dans l’objectif de faire changer d’avis ces élèves, mais pour « leur donner les outils pour qu’ils s’émancipent ».

Face aux élèves, le devoir de neutralité

Parfois, ces outils ne fonctionnent pas face aux discours de haine. Maria se souvient d’un autre élève, plus jeune, lors d’un cours de géographie de seconde. « On étudiait les migrations et cet élève a dit publiquement que les personnes migrantes « n’avaient qu’à rester chez elles » et que l’on « n’avait pas à être envahis », se souvient la professeure. J’étais assez déboussolée car en plus, le cours insistait sur le fait que ces migrations étaient économiques, que la plupart des exilés présents en France y travaillaient, etc. »

Pour l’enseignante, sa discipline et son rôle visent justement à apprendre aux élèves à argumenter et déconstruire les idées préconçues. « C’est d’autant plus frustrant quand on n’y arrive pas », déplore-t-elle. Il est souvent difficile de contrer ce que les élèves entendent à la maison ou à la télévision. Encore plus lorsque les réseaux sociaux s’en mêlent, pointe Samia, enseignante de sciences économiques et sociales à Avignon. « Une de mes élèves avait pris un selfie avec sa classe pour la diffuser sur internet. Elle avait commenté « Moi et ma classe de migrants ». L’élève a été convoquée et sanctionnée, mais imaginez l’ambiance dans la classe après ça… »

Jean, professeur des écoles à Béziers, se souvient de cette toute jeune élève de primaire. « À l’occasion d’un cours sur Léonard de Vinci, j’en viens à parler des valeurs humanistes, que nous sommes tous humains et que le racisme est une construction. Et là, l’élève intervient, affirmant que « Marine Le Pen n’était pas raciste », qu’elle voulait « juste que l’on soit en sécurité chez nous ». Bien sûr qu’elle répétait des paroles qui n’étaient pas les siennes, mais comment réagir ? » se demande l’enseignant. Il a essayé dans un premier temps de la faire réfléchir sur ses propos : que veut dire « chez nous » ? Et « en sécurité » ? « Mais j’ai très vite coupé court à la conversation, je sentais que cela glissait vers le terrain des idées politiques. »

En tant qu’agents de la fonction publique, les enseignants doivent respecter le devoir de neutralité. « Je ne dois pas intervenir dans les opinions de mes élèves, souligne Jean. D’autant que cela pourrait créer un conflit de loyauté entre l’école et leur famille. » Toutefois, l’enseignant se doit de réagir aux propos racistes, contraires aux valeurs de la République. Mais la différence est fine, constate Lucia, enseignante au collège près de Nice : « Prenez un propos raciste, je peux réagir. Prenez ce même propos raciste et ajoutez les noms de Le Pen ou Bardella, c’est de suite plus compliqué de répondre. »

Dialogue parfois difficile avec les familles

Les propos sont loin de concerner seulement les enfants. « Puisqu’ils viennent de la famille, on a aussi parfois à gérer les parents », grince Jeanne. La professeure des écoles exerce à Bollène, commune du Vaucluse qui a été dirigée par une maire d’extrême droite (Marie-Claude Bompard) de 2008 à 2020. « Cela a délié les langues et la parole raciste. Par exemple, j’ai eu des parents qui ont refusé d’acheter la photo de classe car il ne voulaient pas y voir les élèves d’origine maghrébine. »

Avec ses collègues et sa hiérarchie, l’enseignante rappelle alors aux parents le cadre légal et les valeurs de l’école républicaine. Là encore, c’est un jeu d’équilibriste à tenir pour ne pas couper toute communication avec les familles. Un équilibre que connaît bien Jean, son collègue de Béziers : « On essaye de garder un regard neutre sur les familles, pour l’enfant et sa réussite scolaire, et ce même si c’est parfois difficile. Il nous faut préserver le lien entre les familles et l’école. »

Mais pour Lucia, hors de question de ne pas signaler des propos « contraires à la République ». L’enseignante niçoise se souvient d’un épisode survenu il y a quelques années dans son collège. Un élève avait été frappé par un autre dans la classe dont elle était professeure principale. « Nous avons reçu l’élève frappé et sa mère les avons informés de la sanction décidée. La mère a déclaré que ce n’était non pas un élève mais un « arabe délinquant » qui avait attaqué son fils et qu’elle réglerait ça « hors de l’école ». Face à ces menaces, nous avons dû alerter la gendarmerie. »

Le vote RN monte chez les enseignants

Alors que le vote en faveur de l’extrême droite augmente dans la société, la salle des profs ne fait pas exception. Le corps enseignant a longtemps été perçu comme un bastion de gauche. En 2012, seulement 3 % des enseignants votaient pour l’extrême droite. La proportion est montée à 20 % aujourd’hui, selon la dernière enquête électorale du politologue Luc Rouban pour le Cevipof. Le corps enseignants reste toutefois un bastion du vote de gauche.

Les enseignants votent certes beaucoup moins RN que le reste de la population, mais le monde éducatif n’est plus hermétique aux idées du parti de Le Pen et Bardella, constate la prof de sciences économiques et sociale Samia. « Je n’ai jamais eu de collègues qui ont affirmé haut et fort voter pour le RN. Peut-être n’osent-il pas devant moi qui suis issue de l’immigration ? Mais, souvent, les silences de certains veulent dire bien plus que les mots », considère-t-elle. Maria a elle aussi constaté des éléments de discours qui se banalisent : « Des collègues estiment que le RN est un parti comme les autres, qu’il faut les écouter puisqu’ils représentent un certain pourcentage des Français. »

À l’inverse, parfois, la puissance de l’extrême droite permet de souder les rangs des équipes pédagogiques. À Orange, Sophie enseigne dans une des écoles primaires de la ville gérée par un maire d’extrême droite depuis 1995. « Entre enseignants, on a à cœur de proposer des projets éducatifs autour du vivre ensemble, de la solidarité et de l’échange. Et ce quelles que soient les écoles », affirme-t-elle. Mais ce n’est pas toujours facile face à une mairie qui peut décider d’une partie de budgets de l’école. « On échange toujours entre enseignants pour trouver des solutions. Il ne faut pas qu’ils réussissent à nous diviser », ajoute la professeure.

Continuer d’enseigner

Pourtant, soupire Jeanne, l’institutrice de Bollène, « on voit la résistance s’amoindrir au fil des années. Au rythme des élections s’ancre l’habitude de voir une extrême droite forte. » Bollène a finalement élu un maire socialiste lors des dernières élections municipales, mais l’extrême droite y reste implantée. « Il suffit de regarder les résultats des législatives et les votes pour le RN », pointe l’enseignante. La commune de 13 000 habitants a voté à 50 % pour la candidate RN au premier tour et l’a élue député à plus de 63 % au second. Jeanne y voit un résultat des longues années passées avec une mairie d’extrême droite. Lorsque l’extrême droite est au pouvoir, « il y a des barrages qui sautent et que l’on ne peut plus combler ».

Mais ces enseignants et enseignantes veulent continuer à exercer malgré tout dans ces territoires. « L’extrême droite au pouvoir, c’est ce que je vis depuis plus de dix ans. Mais à ma manière, dans ma salle de classe et dans mon quotidien, je lutte », revendique Sophie, à Orange. Rares sont celles et ceux qui parlent de démissionner de l’Éducation nationale, même si elle devait se retrouver sous la tutelle d’un ministre RN. « Jamais je ne partirai, du moins pas de moi-même », tranche Samia à Avignon.

Malika Butzbach 18 septembre 2024

https://basta.media/

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10 septembre 2024 ~ 0 Commentaire

FSU (France Info)

L'intersyndicale réclame toujours un plan d'urgence pour l'éducation dans le département de la Seine-Saint-Denis. (ERIC BRONCARD / HANS LUCAS via AFP)
L’intersyndicale réclame toujours un plan d’urgence pour l’éducation dans ledépartement de la Seine-Saint-Denis. (ERIC BRONCARD / HANS LUCAS via AFP)

Conditions de travail, évaluations nationales… Les enseignants appelés à la grève contre une « rentrée catastrophique » ce mardi

Une semaine après la rentrée scolaire, trois syndicats enseignants dénoncent la généralisation des évaluations en élémentaire et leurs conditions de travail, notamment en Seine-Saint-Denis où un plan d’urgence est toujours réclamé.

FSU-Snuipp, CGT-Éducation et Sud-Éducation appellent à la grève mardi 10 septembre pour dénoncer la généralisation des évaluations dans les classes allant du CP au CM2. Ils souhaitent aussi dénoncer les conditions de travail dans les écoles, notamment les effectifs dans les classes et le manque d’attractivité du métier d’enseignant.

Urgence dans le 93

Mardi, c’est aussi la relance du mouvement de contestation en Seine-Saint-Denis lancé en février dernier. L’intersyndicale réclame toujours un plan d’urgence pour l’éducation dans ce département, le plus pauvre de métropolitaine. Une « rentrée catastrophique », c’est ce que dénoncent ces professeurs mobilisés. « Depuis neuf mois, rien n’a été mis en œuvre. L’incendie dans le 93 n’est pas éteint », tonne Louise Paternoster, enseignante dans une école de Saint-Denis et représentante du syndicat CGT-Éduc’Action dans le département. Elle pointe notamment le manque de personnels dans les établissements scolaires.

« Dans 65% des collèges et dans 71% des lycées, il manque au moins un personnel enseignant. La problématique du remplacement est catastrophique dans le département. Ce sont 15 mois de volés sur toute une scolarité en raison du manque de remplaçants. » Louise Paternoster, CGT-Éduc’Action à franceinfo

Voir le futur ministre au plus vite

L’an dernier, après quatre mois de mobilisation, l’intersyndicale avait décroché un rendez-vous avec la ministre de l’Éducation Nicole Belloubet mais la dissolution de l’Assemblée nationale a tout annulé. « Pour nous, c’est un vrai hold-up », s’indigne la syndicaliste. Ces enseignants défendent donc toujours leur plan d’urgence de 358 millions d’euros notamment pour créer 5 000 postes supplémentaires d’enseignants et un peu plus de 3 000 emplois de vie scolaire.

La motivation est toujours là assure Louise Paternoster. « On a aujourd’hui des personnels qui compensent les manques, qui font un peu des miracles avec des bouts de ficelle, mais qui ne baissent pas les bras. On sait qu’en tenant tête et en se mobilisant, ça nous a ouvert les portes de la rue de Grenelle. L’objectif, c’est qu’aujourd’hui on soit à nouveau réentendus. » L’intersyndicale demandera donc une audience au plus vite à la prochaine personne qui occupera le ministère de l’Éducation.

10/09/2024

https://www.francetvinfo.fr/

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