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01 octobre 2024 ~ 0 Commentaire

Epizooties (Reporterre)

Trois épidémies simultanées : un désastre inédit pour les troupeaux

Epizooties (Reporterre) dans Altermondialisme carte_epizooties
Foyers de maladies en France au 24 septembre 2024. © GDS France

Depuis cet été, trois épizooties touchent simultanément le pays. Cette situation inédite, qui a notamment coûté la vie à des milliers de brebis partout en France, pourrait se reproduire.

Rochepaule (Ardèche), reportage

Sous un hangar, dans la montagne ardéchoise, trois animaux sont enfermés dans un petit enclos. Ces brebis sont les dernières en date à avoir été contaminées par la fièvre catarrhale ovine (FCO-8) à la ferme Le Repaire du lézard. Une agnelle est encore clouée au sol, incapable de se lever. Lina, 9 ans, lui offre à boire pour tenter de lui redonner des forces. « Elle a les pattes tordues, on l’a récupérée dans les ronces », explique la petite fille en tendant un seau d’eau à l’animal.

Depuis la mi-août, cette famille d’éleveurs a vu vingt-sept de ses bêtes périr de la FCO-8. « On a perdu 37 % du cheptel », se désole Mathilde Chopin. L’éleveuse et son compagnon, Ivan Bouvet, se remémorent ce mois d’août difficile, quand, chaque jour, ils allaient au pré la boule au ventre, sachant qu’ils trouveraient, une fois encore, une brebis morte qu’il faudrait tracter sur la pente abrupte jusqu’au bac d’équarrissage. « Ce n’était pas forcément les plus vieilles ou les plus faibles, certaines allaient très bien et, en quelques jours, on les a perdues. Franchement, c’est dur », dit l’éleveuse.

Des épizooties inédites en France

En Ardèche, la mortalité dans les élevages a explosé, multipliée par cinq certaines semaines par rapport à la normale. Les moutons sont les plus touchés avec près de 2 000 enlèvements par les services d’équarrissage depuis la mi-juillet [1]. « En sachant que le chiffre est sous-estimé en raison du décalage entre le terrain et les remontées d’information », précise Margot Brie, directrice du Groupement de défense sanitaire (GDS) de l’Ardèche.

Au sud du pays, plusieurs départements ont subi le même sort. Dans la Drôme voisine, certains éleveurs ont même perdu plus de quatre-vingt dix brebis en quelques semaines.

Cette grippe foudroyante n’est pourtant pas nouvelle. Décrite pour la première fois en Afrique du Sud au XIXe siècle, elle a fait son apparition en Europe méditerranéenne à la fin des années 90. Vingt-cinq ans plus tard, la France vit une situation inédite avec trois épizooties simultanées. En plus du sérotype 8 de la fièvre catarrhale ovine — il s’agit de différentes « variétés » d’un même virus —, deux autres virus mortels pour les ruminants sévissent dans le pays : la maladie hémorragique épizootique (MHE) [2] dans le quart sud-ouest, et la FCO-3 dans le nord-est.

Toutes ces maladies ont un point commun : elles sont transmises par des moucherons infectés, les culicoïdes. Ces insectes femelles de quelques millimètres creusent la peau des moutons, vaches et chèvres jusqu’à pouvoir se nourrir de leur sang, essentiel à la maturation et la ponte de leurs œufs. D’un repas à l’autre, l’insecte transporte l’infection, contamine un nouvel animal et ainsi de suite. Des vecteurs de maladies communs, puisqu’on retrouve les culicoïdes partout dans le monde, avec plus d’un millier d’espèces recensées.

Mondialisation et crise climatique

Si les virus existent en Europe depuis deux décennies et que les insectes se sont adaptés aux environnements locaux, alors comment expliquer la crise sanitaire actuelle ? Face à cette question, les chercheurs restent prudents. « Pour l’instant, on ne sait pas exactement pourquoi ces maladies émergent davantage. Mais on a un faisceau de preuves », dit Thomas Balenghien, vétérinaire entomologiste au Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement (Cirad).

Ces indices sont en réalité deux faces d’une même pièce : l’activité humaine. D’un côté, l’accélération des échanges qui facilite l’introduction de la maladie sur de nouveaux territoires. Et de l’autre, la hausse des températures qui affecte les culicoïdes, en augmentant leur abondance ou la fréquence de leurs repas selon les zones [3].

Depuis la première introduction de la fièvre catarrhale en Europe du Nord, en 2006, les expertises sur le sujet ont fait un bond. Désormais, les culicoïdes sont étudiés de près, une veille sanitaire internationale a été mise en place et des vaccins sont développés par les laboratoires. Mais les mystères persistent… Si l’apparition de la MHE venue d’Espagne était attendue, rien n’explique l’émergence d’une nouvelle souche de FCO-8 dans le Massif central en août dernier, ni l’introduction de la FCO-3, aux Pays-Bas [4], un mois plus tard. Mutation d’un virus, arrivée de culicoïdes contaminés via l’importation, déplacements d’animaux non déclarés… Les hypothèses sont nombreuses.

« Tant qu’on n’a pas compris le mécanisme, il est probable que ça se reproduise, car on ne peut pas agir dessus », reconnaît le chercheur du Cirad. Aujourd’hui, il existe une trentaine de types de fièvre catarrhale et neuf sérotypes de maladie hémorragique. D’autres épizooties sont aussi surveillées de près ; la peste porcine présente en Allemagne ou encore la peste des petits ruminants détectée en juillet dernier, en Grèce et en Roumanie.

Un modèle économique à bout de souffle

Pour l’heure, dans les fermes, chacun gère la maladie au jour le jour. Éleveurs et éleveuses tentent de soulager les bêtes qui vivent avec des articulations enflées, des abcès, de la fièvre, des congestions, parfois une cyanose de la langue, des difficultés respiratoires, entre autres symptômes.

« On a pu soigner certaines brebis, mais il fallait vraiment qu’elles soient repérées et prises en charge très vite. En plein milieu de l’été, quand les bêtes sont en montagne, cachées au milieu des fourrés, c’est quasiment mission impossible », observe Virginie Soulageon, vétérinaire en Ardèche. Au vu de la tension actuelle dans les élevages, il n’a pas été possible de la suivre en intervention. À l’autre bout du fil, sa fatigue est palpable : « On a essayé de faire au mieux, dans la panique générale… C’est du cas par cas. »

Pour cette jeune vétérinaire, cette crise sanitaire est d’abord imputable à un modèle économique dans lequel les éleveurs ovins peinent à subsister : « Cela faisait des mois qu’on appelait à la vaccination contre la FCO-8, mais les agneaux ont tellement peu de valeur que souvent les éleveurs ont préféré ne pas acheter les doses. En fait, tout le monde vit dans la misère : les animaux et les paysans. »

À Rochepaule, Mathilde Chopin fait le calcul : « Avec 70 bêtes, il fallait compter 1 200 euros les deux doses. Sachant que certaines peuvent quand même être malades derrière [parmi les effets secondaires, on compte notamment l’avortement]. » Après l’hécatombe de cet été, le couple a décidé de vacciner les survivantes, d’abord contre la FCO-8, puis contre la FCO-3 dont les doses sont financées par l’État. Une troisième campagne de vaccination contre la MHE pourrait encore venir s’ajouter à cela. « C’est tout récent, on n’a pas de retour dessus. Est-ce qu’on prend le risque de le faire à nos animaux ? Je pense qu’on verra selon ce qu’on nous dit quand la maladie commencera à s’approcher. »

Comme beaucoup d’éleveurs de brebis, Mathilde et Ivan risquent de subir une saison blanche. Outre la perte d’une partie du troupeau, ils s’attendent à ne pas avoir d’agneaux cette année en raison des troubles de la reproduction induits par la FCO. « Je pense aussi aux froma-gers… Sans mise bas, ils n’auront pas de lait », dit Mathilde. À ses côtés, Ivan alerte : « C’est une crise qui secoue le pays. Il faut vraiment que le gouvernement en prenne conscience. » La nouvelle ministre de l’Agriculture, Annie Genevard, est ainsi attendue de pied ferme au Sommet de l’élevage, qui s’ouvre le 1er octobre à Clermont-Ferrand. En attendant, tous espèrent voir les températures baisser pour neutraliser les culicoïdes et les épizooties, au moins pour quelques mois.

Pauline De Deus 1er octobre 2024

https://reporterre.net/

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28 septembre 2024 ~ 0 Commentaire

Vézin le Coquet

Vézin le Coquet dans A gauche du PS

 Ille-et-Vilaine :

Fête des récoltes – les luttes paysannes en Bretagne,

Vezin-le-Coquet, du vendredi 4 octobre 2024 à 18:00 au dimanche 6 octobre 2024 à 20:00

Venez fêter avec nous les récoltes du Réseau de Ravitaillement Rennais (R2R) et des greniers des Soulèvements ! La deuxième édition de la fête des récoltes se déroulera le 4, 5 et 6 octobre, à l’occasion du chantier maraîchage d’octobre du Réseau de Ravitaillement des luttes du pays rennais (R2R) et des Greniers des Soulèvements de la Terre.

Comme l’année dernière, des chantiers maraîchage auront lieu le samedi et le dimanche matin. Nous récolterons les courges et préparerons les parcelles pour la saison prochaine. L’ensemble de la production sera destinée à nourrir nos grèves et mobilisations, dans l’optique de permettre une autonomisation au moins alimentaire des mouvements sociaux.

https://agenda.terresdeluttes.fr/

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25 septembre 2024 ~ 0 Commentaire

Brennilis (Ouest-France FR3)

ankou brennilis

Le démantèlement de la centrale nucléaire de Brennilis commencera fin 2024

L’Autorité de sûreté nucléaire (ARS) a confirmé, ce lundi 23 septembre 2024, le début du démantèlement de la centrale nucléaire de Brennilis (Finistère), à l’arrêt depuis 1985. Il faudra environ dix-sept ans pour mener à bien l’opération, dont le coût était estimé à 850 millions en 2020.

En Bretagne, le démantèlement de la centrale nucléaire de Brennilis (Finistère), à l’arrêt depuis 1985, « va être engagé à partir de la fin de l’année » 2024. C’est ce qu’a annoncé l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN), ce lundi 23 septembre, dans une conférence de presse.

Depuis la signature du décret permettant le démantèlement complet de la centrale nucléaire bretonne, le 26 septembre 2023, l’ASN avait un an pour instruire le dossier et donner son autorisation. Le texte, signé par Élisabeth Borne, fixe des objectifs de propreté radiologique.

L’ASN, cet organisme qui contrôle la sûreté nucléaire au nom de l’État, précise que ses « décisions à venir encadreront les modalités de l’assainissement du site dont la date de fin de démantèlement est prévue à 2041 ».

« La conduite du projet est satisfaisante »

L’ASN annonce également avoir autorisé, en avril 2023, « l’arrêt du rabattement de la nappe phréatique sous la station de traitement des effluents ». Elle a aussi « poursuivi la révision des décisions encadrant les rejets et les prélèvements d’eau, l’instruction des règles générales d’exploitation et du plan d’urgence interne pour le démantèlement complet ».

Tout en estimant que « la conduite du projet de démantèlement est satisfaisante », l’ARS rappelle que EDF, exploitant de la centrale, « doit veiller au respect des échéances prescrites pour la réalisation des contrôles périodiques et à la traçabilité des caractéristiques des matériaux en vue de leur réutilisation ou du déclassement ultérieur de l’installation ».

Le développement des petites centrales nucléaires en France est-il une solution durable pour la transition énergétique ?

Retour à l’herbe prévu en 2041

En décembre 2023, la directrice du site pour EDF, Marianne Fajeau, a précisé le calendrier de l’opération, devant la Commission locale d’information (Cli) des monts d’Arrée, en réunion publique annuelle.

De 2024 à 2027, le chantier sera préparé. En 2028 et 2029, des ateliers blindés devraient être installés, permettant de 2030 à 2036, de démanteler la cuve et les structures activées. L’enceinte devrait être démolie en 2039 et 2040 pour un retour à l’herbe prévu pour 2041. Coût du chantier évalué en 2020 : 850 millions d’euros.

23/09/2024

https://www.ouest-france.fr/

Démantèlement de la centrale de Brennilis : une opération de 17 ans pour espérer « un retour à l’herbe »

Le démantèlement de la centrale nucléaire de Brennilis en Bretagne vient de reprendre et s’étalera sur 17 ans, jusqu’en 2041. L’objectif est de rendre le site à un usage non nucléaire, avec un retour à l’état naturel ou industriel.

Le démantèlement de la centrale nucléaire de Brennilis, en Bretagne, vient de reprendre. Un chantier de longue haleine qui devrait durer 17 ans, avec pour objectif final de rendre le site à un usage non nucléaire, voire naturel. Retour sur les étapes clés de ce projet ambitieux.

Selon Gaëtan Lafforge-Marmet, représentant de l’Agence de Sécurité Nucléaire (ASN), cette opération s’étalera jusqu’en 2041. L’objectif final : redonner au site un usage non nucléaire, voire le rendre disponible pour tout type d’activité, avec un « retour à l’herbe ». Au minimum, la zone pourrait être réhabilitée pour un usage industriel.

Une phase de préparation déjà en cours

Les opérations de démantèlement ont redémarré, et la première étape, en cours actuellement, consiste à préparer le terrain pour les travaux à venir.

« Pendant les 3 à 4 prochaines années, il s’agira de dégager l’espace autour du bloc réacteur », explique Gaëtan Lafforge-Marmet, représentant de l’Agence de Sécurité Nucléaire. Cette phase, appelée « mise en propreté », implique des découpes ciblées dans les structures existantes pour libérer de l’espace et faciliter la future déconstruction. Les matériaux retirés, potentiellement contaminés, seront ensuite acheminés vers des sites spécialisés pour un stockage sécurisé.

« Pendant 3 à 4 ans, nous allons dégager de l’espace autour du bloc réacteur », explique Gaëtan Lafforge-Marmet, chef de la division de Caen à l’ASN.

Le réacteur : un démantèlement prévu dans 7 à 8 ans

La phase la plus complexe interviendra dans plusieurs années : le démantèlement du bloc réacteur lui-même. Il faudra encore attendre entre 7 et 8 ans avant d’entamer cette étape cruciale, qui représente le cœur des travaux de démantèlement. « C’est un chantier délicat qui nécessite une préparation minutieuse et le recours à des techniques spécifiques pour éviter tout risque », souligne le représentant de l’Agence de Sécurité Nucléaire.

Remettre le site à l’état naturel

La dernière étape consistera à déconstruire l’enceinte de la centrale et à réhabiliter le site. Si tout se déroule comme prévu, ces travaux devraient s’achever d’ici 17 ans, permettant de rendre la zone à un usage non nucléaire.

L’ambition affichée est claire : un retour à l’herbe, symbolisant la réintégration de ce site industriel dans son environnement naturel. « Brennilis contient aujourd’hui peu de substances radioactives, et les risques sont limités », rassure Gaëtan Lafforge-Marmet.

Un projet de longue durée, pour une centrale mise à l’arrêt en 1985.

Avec Maxime Lahuppe.  Benoit Thibaut  24/09/2024

https://france3-regions.francetvinfo.fr/

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21 septembre 2024 ~ 0 Commentaire

Chine (Inprecor)

La pauvreté systémique est un obstacle majeur pour l’économie chinoise

Il y a une dizaine d’années, alors que l’économie chinoise était encore au beau milieu d’une « gloire » mondialement reconnue, Tommy Wei a rassemblé des indices semant le doute sur cette supposée prospérité.

Au cours de mes voyages, deux rencontres marquantes. La première s’est déroulée dans une ville du nord en hiver. En marchant dans une rue peu peuplée un après-midi glacial, nous avons vu, sur le bord de la route, un homme vêtu de vêtements légers qui vendait d’énormes plumeaux réalisés en plumes de poulet, probablement utilisés pour nettoyer les carrosseries des automobiles. Je me suis demandé si une telle marchandise, dont l’usage est très spécifique, trouverait des acheteurs en dehors d’un marché. La femme qui m’accompagnait commenta : « C’est ce que les gens doivent faire pour gagner leur vie ».

La deuxième rencontre eu lieu dans une ville du sud, en été. J’ai trouvé une « tour de guet » construite par des villageois il y a une centaine d’années dans un village devenu partie intégrante de la ville. Cette structure en forme de tour servait de défense contre les bandits. Elle était faite de béton armé et ne comportait qu’un petit espace à chaque étage et d’étroites fenêtres de tir sur tous les côtés.

L’accès à ce bâtiment historique n’étant soumis à aucune restriction, j’ai commencé mon ascension. Alors que j’accédais à l’un des étages par un escabeau en fer étroit et raide, j’ai soudain remarqué dans un coin une planche en bois sur laquelle était tendue une moustiquaire et dans laquelle deux bambins en haillons me regardaient les yeux écarquillés, moi, l’invité indésirable. Il s’est avéré que ce bâtiment abandonné, sans électricité ni eau, rempli de moustiques et de poussière, était le « foyer » d’une famille en ville.

De telles images de la pauvreté peuvent être trouvées dans n’importe quel pays, peut-être en raison du chômage causé par la lenteur générale de l’économie nationale, ou en raison de traumatismes personnels et de la toxicomanie. Cependant, la Chine a sa propre particularité : une pauvreté « active » systémique au milieu d’un développement économique rapide. Selon le Bureau national chinois des statistiques (NBS), la durée hebdomadaire moyenne du travail des salarié·es du pays en décembre 2023 était de 49 heures, un nouveau record dans la Chine moderne et l’un des plus élevés au monde. Malgré cela, le revenu salarial annuel moyen des résidents du pays en 2023 n’était que de 22 053 yuans (environ 2 800 euros).

La pauvreté systémique des travailleurs persiste

Le documentaire Eighteen-year-olds on the Assembly Line (À dix-huit ans sur une chaîne de montage), sorti en 2016, illustre cette situation de manière saisissante. Le réalisateur a passé trois ans dans les zones industrielles de Dongguan, montrant aux spectateurs que même les travailleurs/ses les plus acharné·es du monde peinent à échapper à la pauvreté dans les usines chinoises. Le salaire horaire peut être aussi bas que 10 yuans (environ 1,3 euro) pour une journée de 12 heures ; les divertissements ordinaires dans les métropoles épuisent rapidement les salaires ; et l’argent nécessaire au mariage et à la propriété reste un objectif lointain.

En 2022, un TikTokeur a filmé un banquet de mariage dans la région des montagnes de Daliang et a été convoqué par la police parce que la vidéo, largement diffusée, révélait les aspects choquants de la pauvreté en Chine rurale : la salle de mariage était en mauvais état, avec peu de tables, de chaises ou des appareils électriques utilisables. Les invité·es s’accroupissaient au sol pour déguster le seul plat du banquet de mariage : du bok choy mariné et de la soupe au tofu. Cela explique pourquoi de nombreux jeunes Chinois sont toujours prêts à travailler dans des ateliers clandestins.

Xi Jinping a déclaré solennellement, le 25 février 2021, que « la campagne chinoise contre la pauvreté a remporté une victoire globale… et a créé un autre miracle humain dont on se souviendra tout au long de l’histoire ! » Certains racontent avec sarcasme que la récession économique pendant l’épidémie a peut-être laissé des citadins relativement riches dans une situation désespérée, abaissant ainsi la barre de la « pauvreté ».

La prolifération des smartphones, des vidéos courtes et des médias auto-publiés a rendu les rencontres et les récits de pauvreté omniprésents sur Internet. Bien que ces images et ces textes ne puissent remplacer des données économiques rigoureuses, ils remettent en question le récit gouvernemental d’une situation économique favorable.

Malgré une censure stricte, j’ai trouvé un article pathétique sur la pauvreté dans South Reviews, un magazine grand public chinois. Zhao était un jeune homme de 19 ans qui est décédé avant le printemps 2024. Au cours les huit mois précédant sa mort, il avait vendu son plasma seize fois, gagnant 200 à 400 yuans (environ 25 à 50 euros) et un repas à chaque fois.

Zhao travaillait comme steward dans un cybercafé et menait une vie modeste. Il sortait rarement avec des amis et n’avait pas les moyens de s’offrir un vélo électrique pour se déplacer. Sa plus grande dépense avant sa mort était un smartphone qu’il avait acheté pour son père en décembre dernier. Chez lui, il n’y avait ni ordinateur, ni télévision, ni canapé, et il n’allumait pas les lumières à la tombée de la nuit pour économiser l’électricité. Sa mère ne pouvait pas travailler en raison d’une maladie et son père était un travailleur migrant. Le centre de transfusion sanguine où il vendait du sang appartient à une grande entreprise biologique. Le rapport annuel de cette entreprise pour 2023 indique qu’elle dispose de 79 centres de transfusion sanguine en activité, collectant un total de 2 415 tonnes de plasma cette année-là.

Après trois ans de quarantaine stricte, l’économie chinoise n’a pas rebondi comme espéré en 2023. Aujourd’hui, en 2024, le sujet brûlant est la « surcapacité ». L’Union européenne et les États-Unis prévoient d’augmenter les droits de douane sur les voitures électriques fabriquées en Chine. Face aux boycotts occidentaux des produits chinois, la dernière solution de Xi Jinping est de laisser le peuple chinois absorber la « capacité excédentaire ». En mars, le Conseil d’État a publié un plan d’action pour promouvoir le renouvellement à grande échelle des équipements et la reprise de biens de consommation ; en avril, le ministère du Commerce et quatorze autres ministères ont publié conjointement un autre plan d’action, organisant une campagne nationale de reprise de voitures et d’appareils ménagers et du « renouvellement » de l’ameublement.

La politique d’échange mentionnée dans le plan d’action consiste notamment à « accorder un traitement préférentiel aux consommateurs qui échangent leurs vieux appareils contre des appareils économes en énergie » et à « encourager les régions riches en ressources à subventionner les consommateurs pour qu’ils achètent des appareils électroménagers écologiques et intelligents ». Pour les familles qui vivent dans des bâtiments abandonnés ou pour les villageois de la montagne Daliang qui ne possèdent pratiquement aucun appareil, on peut dire d’une telle politique que c’est mieux que rien.

Cela me rappelle une « blague » britannique que j’ai entendue dans mon enfance :

- Maman, pourquoi fait-il si froid à la maison ?

- Parce que nous n’avons pas les moyens d’acheter du charbon, chéri.

- Pourquoi n’avons-nous pas les moyens d’acheter du charbon ?

- Parce que ton père a perdu son emploi.

- Pourquoi papa a-t-il perdu son emploi ?

- Parce qu’il y a trop de charbon.

Selon les chercheurs Wan Haiyuan et Meng Fanqiang de l’Institut de la distribution des revenus en Chine de l’Université normale de Pékin, le nombre de personnes en Chine gagnant moins de 2 000 yuans (environ 250 euros) par mois a atteint 964 millions, soit environ 69 % de la population totale ; pas moins de 95 % de la population gagne moins de 5 000 yuans (environ 637 euros) par mois. S’attendre à ce qu’une telle population absorbe les produits des manufactures d’exportation créées pour répondre aux besoins des pays développés relève du fantasme.

Le groupe cible de ce « plan brillant » est peut-être la « classe moyenne ». Toutefois, les données du premier trimestre 2023 montrent que le solde des prêts hypothécaires en Chine s’élevait à 38,94 milliards de yuans (environ 5 milliards d’euros). Une grande partie de cette dette est supportée par des citadins aux revenus plus élevés, alors quelle est la motivation de cette classe pour acheter de nouvelles voitures électriques ou des réfrigérateurs intelligents ?

Les causes de la pauvreté systémique en Chine ne sont pas seulement les bas salaires et les conditions de travail déplorables, comme le montrent les usines d’électronique de Dongguan, mais aussi le coût prohibitif du logement, de l’éducation, de la santé, de la garde d’enfants et des soins aux personnes âgées. Ces secteurs permettent aux business classes et au gouvernement d’engranger des profits et des impôts élevés. Alors que les biens de consommation comme les téléphones portables et les voitures peuvent être plus abordables qu’il y a 30 ans, la nourriture et l’eau potable sans pesticides excessifs, engrais chimiques et métaux lourds sont devenus un luxe. Peu de Chinois ont réellement « surmonté » la pauvreté lorsque leur vie est mesurée à l’aune de la décence, de la santé, de la détente et d’un avenir prometteur.

Les causes de la pauvreté systémique

Les répercussions de la pauvreté sont visibles : les riches cherchent constamment des moyens de transférer leurs actifs à l’étranger pour échapper à la dévaluation ; des dizaines de milliers de travailleurs et même des membres de la classe moyenne traversent les dangereuses forêts tropicales d’Amérique centrale pour fuir aux États-Unis afin de vendre leur travail à un meilleur prix ; de plus en plus de jeunes perdent espoir d’accumuler de la richesse et de gravir l’échelle sociale, alors ils refusent de travailler dur et préfèrent vivre avec de faibles aspirations ; et certaines personnes désespérées choisissent de mettre fin à leur vies ou de nuire à autrui par frustration.

Alors, pourquoi les dirigeants chinois n’ont-ils pas permis aux citoyens ordinaires d’avoir plus de « dividendes » au cours des dernières décennies de prospérité économique ? Par exemple, l’assurance chômage universelle, des pensions décentes pour toutes les personnes âgées, des allocations adéquates pour les étudiants, un salaire minimum plus élevé, un système de logement public plus inclusif.

Actuellement, selon un rapport de 2023 du Farmers’ Daily, la retraite moyenne en Chine rurale n’est que de 204 yuans par mois (environ 26 euros). Les étudiant·es ont besoin d’un certificat de pauvreté pour demander de petites subventions de l’État de 1 000 à 3 000 yuans par an (environ 127-382 euros). Les logements sociaux du gouvernement requièrent un compte local et un revenu du ménage par habitant inférieur à 960 yuans par mois (environ 122 euros), excluant la plupart des travailleurs/ses migrant·es ruraux.

Une explication intéressante est fournie par le Livre de Lord Shang, un écrit classique de la dynastie Qin (221 avant JC). Il suggère que « la façon de gouverner le pays est d’affaiblir la population », de maintenir les gens pauvres afin qu’ils dépendent de l’État et ne puissent pas s’y opposer. Cette technique a permis d’établir le premier empire unifié de l’histoire chinoise. Certaines indications suggèrent que Xi admire le système Qin, comme la très financée série télévisée d’État « La fugue du Grand Qin », qui a été diffusée après que Xi s’est imposé comme souverain à vie.

La pauvreté systémique sera une pierre d’achoppement. Bien que ces « arts de gouverner » vieux de 2 000 ans soient primitifs et absurdes du point de vue de l’administration moderne et de l’économie capitaliste, le style de gouvernance de Xi Jinping au cours de la dernière décennie nous a donné l’impression que tout est possible. Qu’il s’agisse d’un sous-produit de politiques économiques défaillantes ou d’un moyen intentionnel d’exploiter le peuple, la pauvreté systémique sera une pierre d’achoppement plutôt qu’un catalyseur de la montée en puissance de la Chine.

12 juin 2024 8 août 2024 par Tommy Wei
* Tommy Wei est un militant en Chine. Cet article a été publié par Résistance anticapitaliste. Traduit par Nathanaëlle.

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05 septembre 2024 ~ 0 Commentaire

Barnier (Greenpeace)

ecologie-conflits-energie

Michel Barnier Premier ministre : le renouveau écologique et social n’aura pas lieu

Greenpeace France exprime son inquiétude face à la nomination de Michel Barnier comme nouveau Premier ministre.

Dans un contexte où le besoin de changement est plus pressant que jamais et où des millions de citoyennes et de citoyens se sont rendus dans les urnes pour placer le bloc de gauche, mené par le Nouveau Front populaire en tête des législatives, cette nomination s’inscrit dans la continuité d’une politique ultra-libérale maintes fois dénoncée par notre organisation pour son incompatibilité avec les enjeux de transformation radicale de notre système économique afin de répondre à la crise environnementale et sociale.

Cette nomination qui semble avoir été négociée pour satisfaire aux exigences des chefs de partis de droite et d’extrême droite n’augure rien de bon quant à la ligne politique générale qui sera donnée.

Malgré un intérêt sincère de Michel Barnier pour les problématiques environnementales et un bilan concret sur ces sujets (création de la commission nationale du débat public, loi Barnier inscrivant le principe du pollueur payeur dans la loi ainsi que la mise en place du fonds d’aides aux collectivités pour faire face aux catastrophes naturelles), Greenpeace France doute de sa capacité à répondre concrètement et rapidement aux impératifs dictés par la crise écologique actuelle.

« Cette nomination, qui a été l’objet de tractations d’appareils politiques pendant des mois, est une déception pour celles et ceux qui ont lutté avant l’été pour donner un cap politique différent à la France. Ce choix ne reflète pas le résultat des élections de juillet dernier, déclare Jean-François Julliard, directeur général de Greenpeace France.

Avec Michel Barnier comme Premier ministre, les espoirs de mettre la justice sociale et environnementale en haut du calendrier politique sont bien minces. L’obstination du président E. Macron à ignorer les appels des Français et des Françaises à une transformation profonde de notre modèle de société est dangereuse et ne fera qu’aggraver la fracture sociale et écologique. Continuer dans ce modèle politique capitaliste et brutal, qui écrase les femmes et les hommes et s’assoit sur l’avenir des générations futures, c’est ouvrir un boulevard pour l’arrivée de l’extrême droite au pouvoir en 2027. »

Le premier ministre démissionnaire, Gabriel Attal, a déjà prévu dans le projet de budget 2025 des coupes budgétaires alarmantes de plusieurs milliards pour la transition écologique, amputant notamment MaPrimeRénov, dédiée à la rénovation énergétique des logements ainsi que les aides pour les véhicules électriques.

Matignon prévoit également des baisses de crédits pour le Fonds vert, destiné à la transition écologique des collectivités locales. Greenpeace France demande au nouveau Premier ministre de revenir sur ces prévisions et de réallouer les budgets nécessaires à la transition, il s’agira du premier test pour ce gouvernement afin de jauger de son ambition concernant les enjeux environnementaux. L’urgence climatique ne peut pas attendre une nouvelle clarification politique en 2027.

Face à ce Président, qui persiste à ignorer les signaux d’alarme de la crise écologique et sociale, et au futur gouvernement, la société civile reste plus que jamais mobilisée. Les militantes et militants de Greenpeace France seront dans les rues le samedi 07 septembre prochain pour répondre à l’appel lancé par l’Union étudiante et l’Union syndicale lycéenne à une manifestation contre le coup de force autoritaire du président E. Macron.

5 septembre 2024

https://www.greenpeace.fr

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02 septembre 2024 ~ 0 Commentaire

LABOUR (UK)

LABOUR (UK) dans A gauche du PS
Keir Starmer en août 2024. © Number 10 – CC BY 2.0

Parti travailliste – Nous ne vous avons jamais promis un jardin de roses

Dave Kellaway réagit au discours du Premier ministre britannique Keie Starmer du 27 août et aux premiers mois du nouveau gouvernement.

De nombreux hauts responsables du Parti travailliste sont fascinés par la politique américaine, en particulier par le Parti démocrate. Ils imitent souvent ses messages et ses stratégies électorales. Il est facile d’imaginer qu’ils préféreraient une structure de parti de type démocrate, où les membres ont encore moins d’influence et les syndicats moins de pouvoir. Il n’est donc pas surprenant qu’un collaborateur astucieux ait eu l’idée d’un discours d’ouverture en forme de « roseraie » pour Starmer ce mardi.

Le jardin de Downing Street n’est pas vraiment une roseraie, mais le nom évoque la Maison Blanche, l’atmosphère présidentielle. Le fait d’organiser le discours à l’endroit même où Johnson et son équipe ont fait la fête pendant les restrictions imposées par le Covid était un choix astucieux, car Starmer a condamné le désastre économique et la corruption de quatorze années de mauvaise gouvernance des conservateurs.

Sur le ton solennel qui le caractérise, M. Starmer a essentiellement soulevé deux points.

Premièrement, il a affirmé que les conservateurs avaient dissimulé un trou de 22 milliards de livres sterling dans les finances publiques.

Deuxièmement, il a affirmé que ce déficit signifiait que le Parti travailliste ne pouvait pas réaliser toutes ses ambitions.

Des décisions « difficiles » en matière d’impôts et de dépenses étaient nécessaires pour jeter les bases de l’économie, afin que de meilleures politiques puissent être mises en œuvre par la suite.

Il n’est pas surprenant qu’un nouveau gouvernement disposant d’une large majorité fasse passer des politiques impopulaires dès le début. Les conservateurs sont en plein désarroi. Les signes d’une résistance significative au sein du groupe parlementaire du Parti travailliste sont minimes : seuls sept députés se sont rebellés contre le plafonnement des allocations pour deux enfants.

La résolution des conflits salariaux avec les médecins, les conducteurs de train et d’autres travailleurs du secteur public a satisfait les dirigeants syndicaux. La suppression de la législation sur le niveau de service minimum introduite par les Parti travailliste, accompagnée de la promesse d’une nouvelle législation du travail destinée à faciliter l’organisation des syndicats, suit une voie similaire.

L’opinion publique, bien qu’elle soit tiède et que la cote personnelle de M. Starmer soit actuellement en baisse, s’aligne probablement sur sa critique générale du gâchis laissé par les conservateurs. Les propositions visant à introduire des augmentations d’impôts limitées sur les riches, par le biais d’ajustements de l’impôt sur les plus-values, de l’impôt sur les successions et des dispositions relatives à l’impôt sur les pensions, sont populaires à la fois au sein du Parti travailliste et de manière plus générale.

Même certains indicateurs économiques s’améliorent pour le gouvernement. On pourrait parler d’une période de lune de miel, même si elle n’est pas passionnante.

LE PARTI TRAVAILLISTE CHOISIT L’AUSTÉRITÉ

Comme Grace Blakeley l’a clairement expliqué dans son article de la Tribune, ce supposé trou noir de 22 milliards de livres est une tactique de peur, conçue pour tromper le public avec une perspective partielle et idéologique de l’économie. D’une part, il inclut les milliards nécessaires pour résoudre les grèves du secteur public. Contrairement aux riches qui thésaurisent leurs actifs, ces travailleurs dépenseront leurs revenus, ce qui stimulera l’économie.
Résumons ses principaux points :

- Dans un pays riche comme la Grande-Bretagne, les dépenses publiques ne sont pas limitées à court terme par les recettes fiscales.

- De nouvelles dettes peuvent être émises, et tant qu’elles sont utilisées pour des investissements productifs, tels que des mesures de transition écologique, l’argent peut être récupéré au fil du temps. C’est ce qu’a fait le gouvernement Attlee après la guerre, malgré une situation économique bien pire, et il a mis en place l’État-providence.

- L’État britannique contrôle le système monétaire – il est tout simplement faux de dire que l’État doit s’incliner devant les marchés mondiaux. Il est intervenu pour sauver les banques en 2008, lorsque les marchés mondiaux ont failli provoquer l’effondrement de l’économie.

- Le gouvernement pourrait taxer les grandes entreprises qui ont réalisé d’énormes profits pendant la crise du coût de la vie – les profits des entreprises énergétiques à elles seules dépassent de plusieurs fois les 22 milliards de livres sterling.

- Il pourrait également réglementer la manière dont les banques émettent des crédits et abaisser les taux d’intérêt, qui rendent actuellement les emprunts d’État plus coûteux. L’assouplissement quantitatif utilisé après 2008 et pendant la Covid a transféré 44 milliards de livres sterling à la Banque d’Angleterre, dont la majeure partie a fini dans les coffres des banques commerciales.

Comme le conclut à juste titre M. Blakeley, la décision de poursuivre les mesures d’austérité est un choix politique. Starmer pourrait choisir d’intervenir dans l’économie de la même manière qu’un gouvernement conservateur l’a fait pendant la crise de Covid, lorsque les indemnités de chômage partiel protégeaient les revenus des citoyens. Il est tout simplement absurde d’affirmer que la réduction des allocations de chauffage pour les retraités et le maintien du plafond des allocations familiales pour deux enfants sont des « choix difficiles ». Ce ne sont pas les personnes qui sont les mieux armées pour subir ce genre de choix.

Un choix vraiment difficile consisterait à mettre en œuvre un impôt sur la fortune efficace, car cela provoquerait une réaction brutale de la part des riches, qui contrôlent la quasi-totalité des médias. Les riches utiliseraient les marchés et leurs alliés de la City de Londres pour tenter de perturber le gouvernement, mais il faut parfois tenir tête à ceux qui sont les plus solides. Starmer ne le fera pas, car c’est avec ces gens-là qu’il veut s’associer pour générer la croissance qui, soi-disant, se répercutera sur le reste d’entre nous.

RÉACTIONS AU DISCOURS DE LA ROSERAIE

Le doux parfum et les mots doux émanant de la roseraie ont été en partie éclipsés par la puanteur du copinage dirigé contre les dirigeants de Starmer. Bien sûr, c’est un peu fort de la part d’une presse dominée par les conservateurs qui n’a jamais exploré à fond la corruption morale endémique de Johnson. Néanmoins, les preuves présentées et les volte-face soudaines affaiblissent la prétention du Parti travailliste de faire le ménage.

Des donateurs et des conseillers du Parti travailliste ont obtenu des postes dans la fonction publique ou un accès privilégié à Downing Street. Il a été révélé que Wahid Ali, l’un des principaux donateurs du Parti travailliste, a offert à Starmer 14 000 dollars pour des costumes et des lunettes élégants. Pour être honnête, il a effectivement meilleure allure, mais ce relooking devrait être prélevé sur son salaire. Private Eye a également découvert que Starmer et Reeves ont bénéficié de cadeaux, tels que des vacances, de la part de donateurs.

Même si ce n’est pas de la même ampleur que les scandales des conservateurs, cela n’a rien de réjouissant pour des millions de retraité·es qui devront choisir entre se chauffer et manger cet hiver, alors que les compagnies d’énergie augmentent encore leurs factures de 10 %.

L’idée selon laquelle nous devrions réduire l’allocation de chauffage d’hiver parce que de riches retraité·es comme Richard Branson en bénéficient est facilement réfutable. Il suffit de récupérer le coût de cette allocation pour tout le monde – afin qu’aucun·e retraité·e pauvre ou moyen n’en soit privé·e – en taxant davantage les riches. Les prestations universelles, comme le NHS, garantissent qu’il est dans l’intérêt de tous d’améliorer le système – il s’agit d’une prestation communautaire.

Sharon Graham, leader du syndicat UNITE, a également critiqué le discours, le qualifiant de « sombre » et déclarant qu’il était « temps de voir le changement promis par le Parti travailliste ». Elle a ajouté : « Nous n’avons plus besoin d’excuses sur la responsabilité fiscale ou de parler de création de richesse. Nous ne devrions pas opposer les retraités aux travailleurs ; ce n’est pas un choix qui devrait être sur la table ».

Même The Guardian, qui s’est montré relativement peu critique à l’égard du nouveau gouvernement travailliste (il suffit de regarder des chroniqueurs comme Behr, Kettle, Toynbee et Freedland), a réussi à souligner dans un éditorial que : » Sans un sentiment d’espoir et de progrès, le Parti travailliste encourra l’impopularité. Le montant qu’un gouvernement doit emprunter et dépenser devrait être déterminé par l’état de l’économie, et non par le niveau d’endettement que lui a laissé son prédécesseur ».

L’humoriste John Crace a bien résumé le problème de crédibilité du discours : « Il ressemblait au maçon qui vous dit que vous avez besoin d’un toit entièrement neuf alors que vous l’avez appelé pour nettoyer les gouttières ».

L’une des meilleures réponses au discours a été la déclaration publiée par Jeremy Corbyn et les quatre autres députés de la gauche indépendante :

La politique est une question de choix – et le gouvernement choisit d’infliger de la souffrance et de la pauvreté dans tout le pays.

Le gouvernement avait annoncé qu’il réduirait les factures d’énergie. Au lieu de cela, il a réduit l’allocation de chauffage en hiver pour les retraités.

 

Le gouvernement a dit qu’il voulait relancer notre économie, mais au lieu de cela, il veut réduire les investissements publics.

 

Au lieu de cela, il veut réduire les investissements publics. Le gouvernement a déclaré qu’il mettrait fin à 14 années d’échec des conservateurs. Au lieu de cela, il a voté pour maintenir le plafond des allocations pour deux enfants.

 

Nous refusons d’accepter que la pauvreté soit inévitable dans la sixième économie mondiale.

 

Il y a beaucoup d’argent. Il est simplement entre de mauvaises mains.

Le gouvernement doit s’opposer aux profiteurs avides en mettant fin à la privatisation de l’eau, de l’énergie, du courrier et des soins de santé. Il doit maintenir l’allocation de chauffage d’hiver pour tous les retraités. Et il devrait introduire des impôts sur la fortune pour mettre fin à la pauvreté des enfants et reconstruire nos services publics.

 

La décision de priver nos services publics de ressources a été une décision politique. Et ce sera une décision politique de répéter cette expérience économique ratée.

Un choix difficile consiste à décider s’il faut chauffer sa maison ou mettre de la nourriture sur la table. L’austérité n’est pas un choix difficile. C’est un mauvais choix.

 

Le bon choix consiste à investir dans les communautés afin d’apporter le véritable changement dont nos électeurs ont besoin, qu’ils exigent et qu’ils méritent.

Adnan Hussain, député de Blackburn ; Ayoub Khan, député de Birmingham Perry Barr ; Iqbal Mohamed, député de Dewsbury et Batley ; Jeremy Corbyn, député d’Islington North ; Shockat Adam, député de Leicester South.

CONSTRUIRE LA RÉSISTANCE À L’AUSTÉRITÉ DU PARTI TRAVAILLISTE

Contrairement à l’ère Blair, nous avons maintenant une situation politique où il existe un groupe indépendant de députés à la gauche du Parti travailliste au Parlement. La question s’est posée de savoir si les député·es élu·es dans des circonscriptions où vivent d’importantes communautés musulmanes, en grande partie à cause de la question de Gaza, adopteraient des positions de gauche sur les politiques sociales et économiques. La déclaration ci-dessus suggère que la réponse est oui. La victoire de Corbyn à Islington semble désormais cruciale pour favoriser le développement politique de ce groupe.

Si l’on ajoute à ce groupe les sept député·es travaillistes qui rompu avec la discipline majoritaire de leur rébellion sur le plafonnement des allocations pour deux enfants, il devient évident qu’il sera possible d’établir un lien entre l’action de masse à l’extérieur du Parlement et les députés à l’intérieur de celui-ci. Nous savons également qu’il existe un malaise généralisé au sein du PLP à propos de la décision sur les allocations pour deux enfants et de la réduction des aides pour le chauffage en hiver.

Il semblerait que cette inquiétude existe même au sein du Cabinet. Les dirigeants syndicaux ont déjà critiqué ces décisions et des résolutions ont été adoptées à ce sujet lors du prochain congrès du TUC. Le fait que le gouvernement ait réglé les revendications salariales du secteur public démontre que l’action de grève peut être payante et faire pression sur un gouvernement du Parti travailliste.

Pendant les élections, certains membres de la gauche ont affirmé qu’il y avait peu de différence entre un gouvernement travailliste et un gouvernement conservateur. Ils ont rejeté l’approche de ACR consistant à « chasser les conservateurs » et ont plutôt appelé à ne pas voter pour le « Parti travailliste », même dans les sièges marginaux ou lorsqu’aucun candidat de gauche indépendant crédible ne se présentait.

Nous pouvons déjà constater que la lutte de masse, les campagnes et la pression politique peuvent avoir un impact plus rapide et plus important sur un gouvernement Parti travailliste que sur un gouvernement Tory – bien que cela ne se produise pas sur toutes les questions ou dans tous les contextes. Si nous continuons à adopter une approche sectaire à l’égard du Parti travailliste et de ses membres, nous limiterons l’ampleur et l’impact de nos campagnes. Nous devons créer le plus de tensions possibles au sein du mouvement travailliste et du PLP entre la ligne de Starmer et la défense des intérêts de la classe ouvrière.

L’Assemblée populaire appelle à une grande manifestation lors de la conférence du Parti travailliste le 22 septembre à Liverpool, centrée sur les questions d’austérité. Les manifestations nationales de solidarité avec la Palestine se poursuivent depuis le 7 septembre. Fergal Sharkey et les associations écologiques organisent une manifestation de masse le 26 octobre contre les compagnies des eaux, exigeant une action gouvernementale décisive. Les socialistes devraient soutenir toutes ces initiatives et d’autres similaires.

Le gouvernement de Starmer dispose peut-être d’une majorité écrasante, mais il n’a qu’un mince mandat populaire, basé sur un peu moins d’un tiers des électeurs inscrits. La politique d’aujourd’hui est plus volatile. Les demi-mesures du Parti travailliste, son discours sur le trop grand nombre d’immigrés et les attaques contre le niveau de vie pourraient entraîner une hausse continue du soutien au Parti réformiste raciste de Farage et à des éléments plus extrêmes.

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03 août 2024 ~ 0 Commentaire

Caca (Reporterre)

coca cola

JO : polémique autour du plastique inutile vendu par Coca

Coca-Cola, le partenaire officiel des Jeux olympiques, s’était engagé à réduire l’utilisation de plastique à usage unique pendant les compétitions. Une promesse qu’il tarde à mettre en œuvre.

Vous êtes dans un stade ou dans l’un des multiples sites de compétition des Jeux olympiques. Le soleil brûle votre crâne, pourtant protégé par une casquette brodée des cinq anneaux entrelacés. Vous vous dirigez vers le bar pour vous désaltérer. Au choix : Coca-Cola, Fanta, Sprite ou Tropico, des marques appartenant au géant étasunien Coca-Cola, l’unique partenaire boisson de ces jeux.

Vous commandez. Le serveur attrape un gobelet en plastique, y déverse le contenu d’une petite bouteille en plastique avant de la jeter dans la poubelle derrière le comptoir.

Vous aurez donc une double dose de plastique à chaque boisson consommée. Cette ineptie a été dénoncée par de nombreux spectateurs et spectatrices contactés par Reporterre. « Ils prennent les bouteilles dans les frigos et les versent dans les Écocup. C’est ridicule », a ainsi témoigné Timothée, venu voir le hockey sur gazon au stade départemental Yves-du-Manoir.

De belles promesses

Sur les réseaux sociaux, c’est également l’indignation. « Dès le début, les files d’attente sont énormes, je me demande pourquoi ? C’est vite vu, le protocole est ubuesque. Ils ont à la source uniquement des petites bouteilles de 50 cl qu’ils vident à la chaîne dans des… Écocup estampillées Coca-Cola », explique un internaute sur X, ex-Twitter.

« Une Écocup n’est pas écolo dès lors qu’on vide une bouteille en plastique dedans et qu’on la jette. Tout est fait pour que l’Écocup ne soit jamais rendue, refaire la queue pour la rendre, la ramener au bon stand. L’Écocup est clairement une vente supplémentaire pour Coca. »

Sur LinkedIn, Ingrid Vanhée, directrice d’une association de protection de la nature, se demande si Coca veut gagner « la médaille d’or du greenwashing. Dites-moi qu’il y a une explication environnementale à ce que vous versiez le contenu de petites bouteilles en plastique dans des Écocup, que d’ailleurs vous facturez 2 euros, au nez et à la barbe de vos clients ».

Sur le même réseau social, Agathe de Comeeti, consultante en transition écologique, assiste à la même scène durant le match de foot France-États-Unis au Stade Vélodrome. « Quand je vois ça, c’est incompréhensible ! »

Coca-Cola avait pourtant fait de belles promesses. Dans un communiqué de presse publié en juin 2023, l’entreprise assurait vouloir « réduire de moitié l’empreinte plastique à usage unique par rapport aux Jeux olympiques et paralympiques de Londres 2012 » et, surtout, elle devait installer près de 700 fontaines à soda « dans les points de vente pour le grand public, ainsi que dans les restaurants des villages olympiques et paralympiques accueillant notamment les athlètes et les volontaires ».

Ce genre d’appareil, qui se trouve habituellement dans les fast foods, peut-être comparé à une tireuse à bière. Il mélange un sirop aromatisé avec du dioxyde de carbone et de l’eau pour fabriquer le soda.

À la recherche des fontaines à soda

Selon un communiqué de la ville de Paris, il aurait dû être possible d’acheter des boissons sans bouteille plastique sur huit sites de compétition parisiens : Trocadéro, Concorde, Grand Palais, Invalides, pont Alexandre III, Champ-de-Mars/tour Eiffel, Aréna La Chapelle et le Parc des Princes. Tout cela n’a rien d’extraordinaire. Depuis la loi Agec, toute personne est autorisée à apporter son propre contenant pour acheter une boisson et même obtenir une réduction.

Contacté par Reporterre, la marque étasunienne assure avoir installé toutes ses fontaines sur « l’ensemble les sites Paris intra-muros » ainsi que sur « la majorité des sites temporaires, hors cas particuliers comme Versailles ou Élancourt ». Mais, dès juin dernier, France Nature Environnement dévoilait un document interne montrant que les trois quarts des bouteilles distribuées par Coca-Cola seraient en plastique.

Alors, tel un sourcier, nous sommes partis à la recherche de ces sources à soda, de la Concorde, au Grand Palais, en passant par le pont Alexandre III. Sans succès. Aucun des bénévoles interrogés n’avait aperçu un stand Coca-Cola ou ces fameuses fontaines. L’un d’entre eux nous a envoyé à l’aérogare des Invalides, investie par Coca-Cola depuis le 21 juin avec un restaurant éphémère de 1 000 m2.

À l’intérieur, le comptoir du bar est décoré de milliers de bouteilles en verre. Sauf qu’à l’arrière, les serveurs décapsulent des canettes et ouvrent des bouteilles d’eau en plastique pour déverser leur contenu dans des cups aux couleurs de la marque. Canettes et bouteilles finissent à la poubelle.

« Normalement, nous n’avons que des bouteilles en verre consignées. Mais, exceptionnellement aujourd’hui, on utilise des canettes apportées d’un autre évènement », explique le serveur. Le soda en fontaine est caché à l’intérieur des cuisines. Il est servi uniquement aux clients qui commandent un repas.

La récupération des cups n’est pas optimale

L’entreprise Coca ne nous a pas envoyé la carte des fontaines. En revanche, elle nous a listé toutes les difficultés d’installation de ce système. « Sur les sites dits “temporaires”, l’installation de fontaines à boissons est parfois rendue impossible faute de raccordement au réseau de distribution d’eau, les bouteilles en verre ne sont pas non plus une option pour des raisons liées aux surfaces disponibles et à la manutention. Sur des sites déjà “existants”, comme les stades, nous pouvons être confrontés à un manque de place ou à des infrastructures ne répondant pas au cahier des charges », explique l’entreprise par courriel.

L’association No Plastic In My Sea a également reçu des plaintes de gens sur les réseaux sociaux, sans réussir à avoir une vue d’ensemble du problème. « Dans les fans zones gérées par la mairie de Paris, les choses sont plutôt bien faites. Il y a par exemple une fontaine à soda sur la place de l’Hôtel de Ville. Mais Coca-Cola n’était pas prêt à en mettre partout pour des raisons de coût et de logistique. Il les a installées seulement où il y avait des exigences fortes de la part de ses partenaires, comme la mairie de Paris. Ailleurs, certains acteurs privés, comme les stades, préfèrent écouler des bouteilles plastique car c’est plus simple pour leurs équipes », explique Muriel Papin déléguée générale de l’association No Plastic In My Sea.

En retenant les bouteilles à la source, c’est-à-dire au bar, Coca assure qu’elles seront toutes recyclées. « Il veut rester sur son modèle économique de plastique en démontrant qu’ils peuvent tout recycler à 100 %. Pour cela, ils ont travesti ce que devrait être le réemploi avec ces cups dont la récupération n’est pas optimale », dit Muriel Papin.

En effet, ces gobelets en plastique, plus écolo que ceux en carton, ne sont pas tous retournés à la consigne pour diverses raisons : le bar est parfois fermé à la fin de la compétition, les files d’attente sont trop longues… Quel est le taux de réemploi réel ? Coca-Cola n’a pas répondu à cette question.

« La grosse erreur de Paris 2024, c’est d’avoir “brandé” les cups [1]. Ce qui constitue un frein au retour car les gens veulent les garder comme souvenir. Or, si elles ne sont pas récupérées, c’est encore du plastique à usage unique qui reste dans les placards », explique Muriel Papin.

La déléguée générale de l’association No Plastic In My Sea souhaite quand même rester optimiste : « C’est très bien de parler de ce sujet car les compétitions sont loin d’être terminées et il reste encore du temps pour optimiser le processus et faire des messages de sensibilisation. Sans quoi, tout cela restera du greenwashing. »

Laury-Anne Cholez  2 août 2024

Lire aussi :

JO 2024 : la promesse du zéro plastique déjà enterrée

https://reporterre.net

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19 juin 2024 ~ 0 Commentaire

Taxer les riches? (Basta)

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La gauche souhaite taxer les riches : mais qui sera considéré comme « riche » ?

La France compte 7% de riches, selon les critères définis par l’Observatoire des inégalités. Les revenus du patrimoine augmentent mais les bas salaires stagnent. Une inégalité face à l’impôt à laquelle souhaite s’attaquer la coalition de gauche.

En France, il existe un seuil de pauvreté, mais pas de seuil de richesse. C’est cette discussion qu’a souhaité ouvrir l’Observatoire des inégalités avec la publication de son troisième Rapport sur les riches en France début juin. « Ce qui nous interroge, c’est la récurrence du discours “Les riches, c’est les autres”, notamment quand on se situe à gauche de l’échiquier politique. Il faut qu’on ait un débat très large sur les revenus. Qui doit faire quel effort pour quelle forme de solidarité ? », interroge le directeur de l’Observatoire, Louis Morin.

Une question qui prend tout son sens alors que la nouvelle coalition qui réunit toute la gauche, le « Nouveau Front populaire », ambitionne de réformer la fiscalité et d’y introduire davantage de justice, donc de progressivité de l’impôt. A quel niveau de revenus devra-t-on contribuer davantage à la solidarité nationale et au financement des services publics ? L’ensemble des classes dites moyennes paieront-elles plus d’impôts ou les hausses seront-elles limitées aux très riches ? Et qui sera donc considéré comme très riche. En pleine campagne électorale, ce sujet est crucial.

Des cadres supérieurs majoritairement masculins

À l’instar de l’OCDE (Organisation de coopération et de développement économique) et du gouvernement allemand, l’association fixe un seuil de richesse au double du niveau de vie médian, le montant qui sépare la population en deux – la moitié de la population gagne plus, l’autre moitié gagne moins. Ce revenu médian disponible est actuellement de 1930 euros mensuels.

Est ainsi considérée comme riche toute personne touchant le double de ce revenu, soit plus de 3860 euros nets par mois (après impôts), plus de 5790 euros par mois pour un couple, ou encore plus de 9650 euros pour une famille avec deux enfants de moins de 14 ans.

En utilisant ce seuil, on compte 4,7 millions de riches en France. Cela représente 7,4% de la population. « 93% des Français·es gagnent donc moins », note Anne Brunner, directrice des études à l’Observatoire des inégalités.

Ces riches sont principalement des cadres supérieurs, du privé et du public. Un quart de ces cadres sont riches. « On ne trouve quasiment pas de riches parmi les ouvriers », souligne la directrice des études. Ces riches sont aussi majoritairement des hommes, ces derniers étant plus nombreux que les femmes parmi les hauts et très hauts salaires.

La part des riches dans la population augmente aussi avec l’âge. Les riches représentent seulement 1% des ménages de moins de 30 ans, contre 15% des ménages entre 60 et 64 ans. Enfin, ce sont majoritairement des Parisiens, mais pas que. Si les riches sont principalement concentrés en région parisienne, dans quelques arrondissements de l’Ouest parisien et à Neuilly-sur-Seine, on les retrouve également dans plusieurs communes proches de la frontière suisse.

Moins de riches mais encore plus riches

Le rapport offre également un aperçu détaillé de leurs conditions de vie. Il relève que leur situation leur permet de mieux maîtriser l’espace et de se déplacer comme ils le souhaitent : 97% des Français·es gagnant plus de 2500 euros nets par mois partent ainsi en vacances. Les riches peuvent aussi davantage maîtriser leur temps. 40% des ménages situés dans les 10% les plus riches ont recours à des services à la personne, contre 6% des 10% aux revenus les plus faibles. « Au travail comme à la maison, ce sont donc des personnes qui ont un rôle important de décision, un rôle de contrôle », remarque Anne Brunner.

« Être riche, où qu’on habite, c’est aussi vivre dans plus grand », ajoute Louis Morin. En plus de pouvoir choisir leur cadre de vie, les riches disposent en moyenne de 50% de surface en plus que les personnes non riches, aussi bien dans les communes rurales qu’urbaines. Par ailleurs, 87% des personnes riches sont propriétaires de leur logement, contre 58% des autres ménages. Deux tiers d’entre elles possèdent également un autre bien immobilier en plus de leur résidence principale, contre 22% des autres ménages : une résidence secondaire, un logement mis en location, un terrain, une place de parking…

En dix ans, le nombre de « riches » a baissé. Entre 2011 et 2021, date des données les plus récentes publiées par l’Insee sur les niveaux de vie en France, on en compte 800 000 en moins. Mais ceux qui demeurent riches s’enrichissent davantage. Cette progression est majoritairement portée par le sommet de l’échelle des revenus : au début des années 1980, les 1% les plus riches captaient 7,7% de l’ensemble des revenus, contre 12,8% aujourd’hui, selon le World Inequality Database.

Rétablir l’ISF

« Depuis un certain nombre d’années, les inégalités salariales augmentent », relève Louis Maurin. Les revenus du patrimoine, beaucoup plus volatiles, ont progressé beaucoup plus rapidement que les prix. « L’inflation met en jeu des rapports de force importants, au profit des catégories les plus aisées », note le directeur de l’Observatoire des inégalités. « Les plus aisés bénéficient également d’une fiscalité particulièrement avantageuse depuis 2017 », poursuit-il, prenant comme exemple la suppression de l’impôt sur la fortune en 2018.

Le Nouveau Front populaire, alliance de la gauche pour les législatives anticipées des 30 juin et 7 juillet, promet dans son programme commun publié le 14 juin de rétablir l’impôt de solidarité sur la fortune ; d’instaurer 14 tranches d’imposition au lieu de cinq actuellement – une faible progressivité favorisant les plus riches aux dépens des classes populaires et moyennes davantage taxées en comparaison de leurs revenus ; et de supprimer le plafond d’imposition dont profite les plus riches (et qui bloque la progressivité de l’impôt). L’alliance des gauche promet également d’augmenter le Smic. Ce dernier serait porté à 1600 euros net. Ce qui ne rendrait pas les riches moins riches, mais les pauvres un peu moins pauvres.

Daphné Brionne 19 juin 2024

https://basta.media/

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02 juin 2024 ~ 0 Commentaire

Pesticides ( l’Yonne)

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Quels sont les coûts sociaux de l’usage des pesticides ?

Annoncé lundi 6 mai par le gouvernement, le nouveau plan de réduction de l’utilisation des pesticides en France (Écophyto 2030) est fortement critiqué par les associations de protection de l’environnement. Si l’objectif de réduction de 50 % de l’usage des produits phytosanitaires dans l’agriculture d’ici à 2030, affiché depuis 2008, est conservé dans le plan, le mode de calcul des quantités utilisées, lui, va changer, ce qui est décrié par les ONG environnementales. « [Le nouveau mode de calcul] a un effet masquant sur la quantité. Ce changement n’est pas honnête et jette le trouble sur ce plan », a notamment estimé Dominique Potier, député socialiste et rapporteur de la commission d’enquête sur le plan Ecophyto. Une des autres critiques du plan concerne l’enveloppe de 20 millions d’euros par an prévue pour aider les collectivités locales dans le traitement des eaux polluées, un chiffre qui, selon les professionnels du secteur, est très inférieur aux investissements nécessaires.

Dans une étude sur les « coûts cachés » des pesticides synthétiques publiée en 2022, une équipe de chercheurs a estimé les montants engagés par les pouvoirs publics en France pour faire face aux impacts sanitaires et environnementaux néfastes de l’usage de ces produits en agriculture, ainsi que leurs frais de gestion (réglementation, etc.). D’après leurs calculs, les coûts sociaux attribués à l’utilisation des pesticides en France s’élèveraient au total a minima à plus de 370 millions d’euros par an, ce qui correspond à la fourchette basse de l’estimation. Les coûts environnementaux sont de loin ceux qui pèsent le plus lourd dans la balance : plus de 290 millions d’euros par an, dont au moins 260 millions alloués rien qu’au traitement des eaux polluées par les produits phytosanitaires de synthèse.

Tristan Gaudiaut,  8 mai 2024
 
https://fr.statista.com/

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29 avril 2024 ~ 0 Commentaire

Productivisme (Reporterre)

 «<small class="fine d-inline"> </small>Le productivisme est omniprésent dans l'histoire agricole française<small class="fine d-inline"> </small>».

« Le productivisme est omniprésent dans l’histoire agricole française »

Le productivisme fait partie de l’agriculture française depuis le XIXe siècle, explique l’historien Anthony Hamon. Un héritage encore actif aujourd’hui, dans les discours de l’État et de la FNSEA.

C’est le texte qui doit porter la vision du gouvernement pour l’avenir de l’agriculture. Le projet de loi « d’orientation pour la souveraineté agricole et l’avenir des générations en agriculture » entame son parcours à l’Assemblée nationale ce lundi 29 avril. Les députés débutent l’examen en commission, avant un passage en plénière dans deux semaines.

Mais le texte ne fait qu’approfondir un système agricole délétère pour l’environnement et le revenu paysan, craignent ses détracteurs. Une vision productiviste, portée par le gouvernement et la FNSEA (Fédération nationale des syndicats d’exploitants agricoles), qui n’a rien de nouveau. L’idée que l’agriculture doit produire toujours plus remonte au XIXe siècle, où l’on retrouve aussi les ancêtres du patron de la FNSEA, Arnaud Rousseau. C’est ce que montrent les travaux de l’historien Anthony Hamon, spécialiste de la naissance du productivisme agricole.

Reporterre — On a tendance à dater le modèle agricole productiviste de la révolution verte des années 1960. D’après vos recherches, il est en réalité bien antérieur ?

Anthony Hamon — Il existe depuis le XVIIe siècle, à l’époque de Louis XIV. Ce modèle agricole commercial pourrait être considéré comme l’ancêtre de l’agriculture conventionnelle d’aujour-d’hui. Par exemple, dans la région parisienne, des fermiers ont pu s’enrichir, notamment en vendant leurs denrées à la capitale. À l’époque, le modèle agricole dominant était celui de l’agriculture de subsistance. Ce n’était pas un métier, mais un mode de vie. Ce modèle était adossé à l’agriculture rentière imposée par les grands propriétaires nobles et bourgeois. La culture des céréales restait prépondérante.

Ces deux modèles agricoles ont coexisté de manière plutôt pacifique jusqu’au XIXe siècle. Là, agronomes et économistes ont commencé à dire que cette agriculture de subsistance était incapable de nourrir l’État entier. Ils prônaient une agriculture commerciale visant à enrichir le producteur. De nombreux agronomes ont écrit des traités, notamment Édouard Lecouteux, considéré comme le père de l’économie rurale.

En 1855, il a publié Principes économiques de la culture améliorante. Il y théorisait le paradigme productiviste. L’idée en était que plus il y aurait de débouchés, plus les producteurs pourraient vendre, et plus cela les inciterait à produire, dans un cercle vertueux. À l’époque, le développement du chemin de fer, de la marine à vapeur, des routes et l’essor de l’urbanisation permettaient un agrandissement formidable du marché.

Alors que la France était protectionniste, Édouard Lecouteux préconisait surtout d’ouvrir nos frontières, d’exporter. C’était un changement de paradigme. L’idée était que pour fournir à manger à toute la nation, l’agriculture française devait exporter. Sinon, il y aurait une baisse des prix, des crises de surproduction et cela inciterait à moins produire. Et qu’en cas de mauvaise récolte, il y aurait un risque de famine.

En quoi cette idée est-elle encore présente aujourd’hui dans les discours sur l’agriculture ?

Quand le président de la FNSEA Arnaud Rousseau parle de souveraineté alimentaire, cela n’a rien de nouveau, il est encore dans cette logique. Pour lui, la souveraineté est indissociable d’une agriculture exportatrice et intégrée dans les marchés internationaux. Il prône une division du travail agricole à l’échelle de la planète avec des spécialisations régionales. Ce n’est pas l’agriculture française qui répondra à elle seule à tous les besoins des Français. Elle doit produire ce qu’elle sait produire. Et le reste doit être importé en fonction des besoins des consommateurs.

En contrepartie, il existe une concurrence. Et donc, si la réglementation fait que l’on produit plus cher, selon lui l’agriculture française ne sera pas compétitive. On ne sera ainsi pas souverains et on devra importer plus de produits. Ce mode de pensée vient tout droit du XIXe siècle.

Vous décrivez également les entrepreneurs agricoles du XIXe siècle. Sont-ils les ancêtres de certains agriculteurs aujourd’hui ?

Édouard Lecouteux avait notamment pour amis les grands céréaliers capitalistes de la Beauce parisienne. Ils ressemblent beaucoup à ceux qui contrôlent la FNSEA à l’heure actuelle. Ils avaient déjà de grandes exploitations et leur spécificité était qu’ils produisaient des céréales destinées à alimenter Paris, mais aussi à l’exportation. Durant les années 1860-1870, la France est la première puissance productrice de blé du monde !

Ce modèle a été battu en brèche dans les années 1880, quand a émergé la concurrence des États-Unis. La Troisième République a mis en place des tarifs protecteurs pour ces céréaliers de la Beauce. Édouard Lecouteux était libre-échangiste jusque sous le Second Empire, puis 20 à 30 ans plus tard, s’est retrouvé à la tête du mouvement protectionniste. Il était très lié aux intérêts de ces grands fermiers, qui défendaient le libre-échange ou le protectionnisme en fonction de leurs intérêts économiques.

Une « agriculture paysanne » est aujourd’hui défendue par certains acteurs agricoles, comme le mouvement international Via Campesina ou la Confédération paysanne. Quel est l’ancêtre de ce modèle ?

Leur modèle est la polyculture-élevage. C’est la référence de l’agriculture biologique aujourd’hui, avec l’idée qu’elle se suffit à elle-même et est « respectueuse » de la nature. Elle s’est surtout développée au XIXe siècle et au début du XXe siècle. Les gouvernants de la Troisième République ont favorisé son essor. Elle a connu son apogée dans l’entre-deux-guerres, et a été victime de la révolution verte des années 1950-1960.

« Une paysannerie vue comme anticapitaliste »

L’idée d’Édouard Lecouteux était de remplacer l’agriculture de subsistance par son modèle commercial. Cela ne s’est pas passé ainsi. Le modèle de polyculture-élevage est un peu le résultat d’une fusion entre agriculture de subsistance et agriculture commerciale. Il y a une forme d’autarcie de l’exploitation. On y cultive du blé, des légumes, des fruits, on a quelques vaches. Le but est à la fois de se nourrir et de vendre en ville, sur le marché de proximité. Sauf pour le blé, les bestiaux et le lait, qui sont partis aux coopératives, qui ont fait pression à partir des années 1950-1960 pour une réforme radicale de l’agriculture, et inciter au productivisme.

Dès les années 1950, des personnes ont pris la défense de la polyculture-élevage. Elles ont été moquées, pointées du doigt, on a dit qu’elles pratiquaient une agriculture archaïque. Elles ont subi des pressions qui existent encore aujourd’hui, décrites par exemple dans l’enquête du journaliste Nicolas Legendre, Silence dans les champs.

Pourquoi croit-on que le productivisme agricole est né dans les années 1950 ?

Il commencerait à partir de la mise en place de la PAC [Politique agricole commune] en 1962. Selon moi, on focalise sur la révolution productiviste parce que des personnes encore vivantes l’ont vécue. Un formidable « coup d’accélérateur » a certes été donné à l’époque. Des mesures radicales, comme le remembrement rural, ont été prises par les gouvernements en accord avec une partie de la société.

Mais la logique productiviste est née un siècle avant. Édouard Lecouteux est à l’origine en 1867 de la création de la Société des agriculteurs de France, la SAF, qui existe encore. Il s’agissait d’une association de grands propriétaires fonciers qui voulaient transformer l’agriculture rentière en agriculture capitaliste. La SAF a participé à créer une bonne partie des syndicats agricoles en France sous la Troisième République, mis en réseau par le régime de Vichy. La FNSEA, fondée en 1946, a hérité et profite encore de ce maillage syndical. La SAF a contribué à la diffusion de la logique productiviste dans le champ agricole. La révolution productiviste des années 1960 est l’aboutissement de ce projet.

L’entre-deux-guerres a été l’apogée de la polyculture-élevage. On valorisait alors la figure du soldat paysan, qui s’était battu dans les tranchées pendant la Première Guerre mondiale. On l’opposait à l’ouvrier des villes, socialiste et révolutionnaire ; alors que le paysan aurait été modéré, travailleur, partisan de l’ordre.

Il y avait la volonté de garder une France rurale, de contrer l’exode rural. Le régime de Vichy a marqué l’acmé de ce modèle. C’était aussi un modèle de société, dont l’imaginaire a été construit au XIXe siècle, comme le montrent les tableaux de Jean-Baptiste Corot ou de Gustave Courbet.

Chaque membre de la famille avait son rôle : l’homme labourait, la femme nourrissait les animaux, les enfants gardaient le troupeau. Puis, après la Seconde Guerre mondiale, à la Libération, des problèmes d’approvisionnement alimentaire ont eu lieu. Cela a justifié le bond en avant productiviste, même si en réalité, dès les années 50, l’agriculture française avait retrouvé ses niveaux de production d’avant-guerre et arrivait à nourrir la population.

Pourquoi des organisations paysannes de gauche, comme la Confédération paysanne, ont-elles choisi comme référence le même modèle agricole que celui du régime de Vichy ?

Je ne pense pas qu’ils en aient conscience. Vichy avait lui-même hérité de ce modèle agricole de la Troisième République. Plusieurs éléments leur ont fait choisir la polyculture-élevage. D’abord, dans les années 1950-1960, les fondateurs de la Confédération paysanne ont redécouvert plusieurs auteurs, dont Alexandre Chayanov, un économiste agraire soviétique qui s’était opposé à la collectivisation des terres dans les années 1930. Il prônait une agriculture paysanne opposée à l’agriculture capitaliste. Cela s’est cristallisé lors de la lutte du Larzac : le productivisme a alors été associé au modèle agricole capitaliste. Et l’agriculture paysanne a été associée à la polyculture-élevage, qui était le modèle des parents et grands-parents. Cette paysannerie a été vue comme anticapitaliste.

Les paysannes ont aussi poussé pour promouvoir cette autre agriculture. Avec ses tracteurs et ses grosses machines destinés aux hommes, elle suggérait que les femmes devaient rester au foyer.

Le productivisme n’a donc pas toujours été le modèle dominant. L’agriculture française peut-elle évoluer à l’avenir ?

Une chose est sûre, l’État a toujours la main. Lorsque l’agriculture commerciale est devenue le modèle dominant, c’est l’État qui l’a permis. Les classes dirigeantes du pays y trouvaient leur intérêt. Aujourd’hui, je ne vois pas de volonté de la part d’Emmanuel Macron ou de Gabriel Attal de changer de système agricole. Ils n’iront pas contre certains intérêts économiques.

Marie Astier 29 avril 2024

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