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21 septembre 2024 ~ 0 Commentaire

CHINE Guide suprême

CHINE Guide suprême dans A gauche du PS

Quand la Chine s’érige en guide suprême en Afrique

La Chine entend renforcer son influence économique et politique sur le continent africain en promouvant ses méthodes de gouvernement.

Le 9e Sommet du Forum sur la Coopération sino-africaine s’est tenu à Pékin du 4 au 6 septembre. Il a rassemblé la quasi-­totalité des pays africains autour de Xi Jinping qui a détaillé sa politique africaine.

Relation de dépendance

L’annonce choc, c’est évidemment les 50 milliards de dollars destinés aux pays du continent africain. Une somme certes importante mais à relativiser. Étalée sur trois ans, elle se décompose en 30 milliards de prêts, 10 milliards d’investissement d’acteurs privés et 10 milliards au titre de l’aide au développement.

Lors de son discours d’ouverture, Xi Jinping a tenté de répondre aux critiques nombreuses sur l’asymétrie des relations entre l’Afrique et l’empire du Milieu. À cette fin, il a annoncé des mesures comme la suppression des droits de douane pour les exportations agricoles des 33 pays africains les plus pauvres et la création d’un million d’emplois grâce aux investissements des entreprises chinoises. Les mêmes qui surexploitent les salariéEs africainEs dans des conditions de travail indignes.

Ces annonces sont loin de changer les rapports déséquilibrés entre le géant asiatique et l’Afrique, et elles sont similaires en tout point à une relation Nord-Sud se traduisant par des importations des matières premières et une exportation de produits manufacturés.

Source d’inspiration pour les dictateurs

Ce qui est passé plus inaperçu — pourtant affirmé comme objectif premier dans le discours de Xi Jinping — est la mise en avant de sa gouvernance comme une alternative au modèle occidental. Cette volonté s’accompagne d’une présence chinoise qui dépasse le strict domaine économique. Ainsi la Chine joue un rôle majeur dans la politique de maintien de la paix de l’ONU, comme première contributrice financière et seconde pour le nombre de soldats dans les différentes missions onusiennes.

Elle renforce aussi son poids politique depuis quelques années à travers le lancement d’instituts de formation destinés aux cadres des partis politiques africains et des hauts fonctionnaires de l’État. L’idée défendue est que la démocratie est d’abord et avant tout le développement économique, rendu possible grâce à la domination du parti sur les structures d’État qu’elles soient civiles ou militaire.

Un modèle politique aussi enseigné dans les formations militaires où les officiers supérieurs africains constatent que l’armée chinoise est au service non du gouvernement mais du parti dominant. Une politique, on s’en doute, qui n’est pas pour déplaire à nombre de dictateurs qui sévissent sur le continent.

On peut aussi légitimement se poser la question de la pertinence du besoin de ce type de formation, qu’elle soit d’ailleurs chinoise ou occidentale. En effet, elle reflète une vision condescendante et une méconnaissance de la riche culture politique de l’Afrique, nourrie notamment par des décennies de lutte pour sa libération.

Publié par L’Anticapitaliste le 19 septembre 2024

19 septembre 2024 Paul Martial

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02 septembre 2024 ~ 0 Commentaire

LABOUR (UK)

LABOUR (UK) dans A gauche du PS
Keir Starmer en août 2024. © Number 10 – CC BY 2.0

Parti travailliste – Nous ne vous avons jamais promis un jardin de roses

Dave Kellaway réagit au discours du Premier ministre britannique Keie Starmer du 27 août et aux premiers mois du nouveau gouvernement.

De nombreux hauts responsables du Parti travailliste sont fascinés par la politique américaine, en particulier par le Parti démocrate. Ils imitent souvent ses messages et ses stratégies électorales. Il est facile d’imaginer qu’ils préféreraient une structure de parti de type démocrate, où les membres ont encore moins d’influence et les syndicats moins de pouvoir. Il n’est donc pas surprenant qu’un collaborateur astucieux ait eu l’idée d’un discours d’ouverture en forme de « roseraie » pour Starmer ce mardi.

Le jardin de Downing Street n’est pas vraiment une roseraie, mais le nom évoque la Maison Blanche, l’atmosphère présidentielle. Le fait d’organiser le discours à l’endroit même où Johnson et son équipe ont fait la fête pendant les restrictions imposées par le Covid était un choix astucieux, car Starmer a condamné le désastre économique et la corruption de quatorze années de mauvaise gouvernance des conservateurs.

Sur le ton solennel qui le caractérise, M. Starmer a essentiellement soulevé deux points.

Premièrement, il a affirmé que les conservateurs avaient dissimulé un trou de 22 milliards de livres sterling dans les finances publiques.

Deuxièmement, il a affirmé que ce déficit signifiait que le Parti travailliste ne pouvait pas réaliser toutes ses ambitions.

Des décisions « difficiles » en matière d’impôts et de dépenses étaient nécessaires pour jeter les bases de l’économie, afin que de meilleures politiques puissent être mises en œuvre par la suite.

Il n’est pas surprenant qu’un nouveau gouvernement disposant d’une large majorité fasse passer des politiques impopulaires dès le début. Les conservateurs sont en plein désarroi. Les signes d’une résistance significative au sein du groupe parlementaire du Parti travailliste sont minimes : seuls sept députés se sont rebellés contre le plafonnement des allocations pour deux enfants.

La résolution des conflits salariaux avec les médecins, les conducteurs de train et d’autres travailleurs du secteur public a satisfait les dirigeants syndicaux. La suppression de la législation sur le niveau de service minimum introduite par les Parti travailliste, accompagnée de la promesse d’une nouvelle législation du travail destinée à faciliter l’organisation des syndicats, suit une voie similaire.

L’opinion publique, bien qu’elle soit tiède et que la cote personnelle de M. Starmer soit actuellement en baisse, s’aligne probablement sur sa critique générale du gâchis laissé par les conservateurs. Les propositions visant à introduire des augmentations d’impôts limitées sur les riches, par le biais d’ajustements de l’impôt sur les plus-values, de l’impôt sur les successions et des dispositions relatives à l’impôt sur les pensions, sont populaires à la fois au sein du Parti travailliste et de manière plus générale.

Même certains indicateurs économiques s’améliorent pour le gouvernement. On pourrait parler d’une période de lune de miel, même si elle n’est pas passionnante.

LE PARTI TRAVAILLISTE CHOISIT L’AUSTÉRITÉ

Comme Grace Blakeley l’a clairement expliqué dans son article de la Tribune, ce supposé trou noir de 22 milliards de livres est une tactique de peur, conçue pour tromper le public avec une perspective partielle et idéologique de l’économie. D’une part, il inclut les milliards nécessaires pour résoudre les grèves du secteur public. Contrairement aux riches qui thésaurisent leurs actifs, ces travailleurs dépenseront leurs revenus, ce qui stimulera l’économie.
Résumons ses principaux points :

- Dans un pays riche comme la Grande-Bretagne, les dépenses publiques ne sont pas limitées à court terme par les recettes fiscales.

- De nouvelles dettes peuvent être émises, et tant qu’elles sont utilisées pour des investissements productifs, tels que des mesures de transition écologique, l’argent peut être récupéré au fil du temps. C’est ce qu’a fait le gouvernement Attlee après la guerre, malgré une situation économique bien pire, et il a mis en place l’État-providence.

- L’État britannique contrôle le système monétaire – il est tout simplement faux de dire que l’État doit s’incliner devant les marchés mondiaux. Il est intervenu pour sauver les banques en 2008, lorsque les marchés mondiaux ont failli provoquer l’effondrement de l’économie.

- Le gouvernement pourrait taxer les grandes entreprises qui ont réalisé d’énormes profits pendant la crise du coût de la vie – les profits des entreprises énergétiques à elles seules dépassent de plusieurs fois les 22 milliards de livres sterling.

- Il pourrait également réglementer la manière dont les banques émettent des crédits et abaisser les taux d’intérêt, qui rendent actuellement les emprunts d’État plus coûteux. L’assouplissement quantitatif utilisé après 2008 et pendant la Covid a transféré 44 milliards de livres sterling à la Banque d’Angleterre, dont la majeure partie a fini dans les coffres des banques commerciales.

Comme le conclut à juste titre M. Blakeley, la décision de poursuivre les mesures d’austérité est un choix politique. Starmer pourrait choisir d’intervenir dans l’économie de la même manière qu’un gouvernement conservateur l’a fait pendant la crise de Covid, lorsque les indemnités de chômage partiel protégeaient les revenus des citoyens. Il est tout simplement absurde d’affirmer que la réduction des allocations de chauffage pour les retraités et le maintien du plafond des allocations familiales pour deux enfants sont des « choix difficiles ». Ce ne sont pas les personnes qui sont les mieux armées pour subir ce genre de choix.

Un choix vraiment difficile consisterait à mettre en œuvre un impôt sur la fortune efficace, car cela provoquerait une réaction brutale de la part des riches, qui contrôlent la quasi-totalité des médias. Les riches utiliseraient les marchés et leurs alliés de la City de Londres pour tenter de perturber le gouvernement, mais il faut parfois tenir tête à ceux qui sont les plus solides. Starmer ne le fera pas, car c’est avec ces gens-là qu’il veut s’associer pour générer la croissance qui, soi-disant, se répercutera sur le reste d’entre nous.

RÉACTIONS AU DISCOURS DE LA ROSERAIE

Le doux parfum et les mots doux émanant de la roseraie ont été en partie éclipsés par la puanteur du copinage dirigé contre les dirigeants de Starmer. Bien sûr, c’est un peu fort de la part d’une presse dominée par les conservateurs qui n’a jamais exploré à fond la corruption morale endémique de Johnson. Néanmoins, les preuves présentées et les volte-face soudaines affaiblissent la prétention du Parti travailliste de faire le ménage.

Des donateurs et des conseillers du Parti travailliste ont obtenu des postes dans la fonction publique ou un accès privilégié à Downing Street. Il a été révélé que Wahid Ali, l’un des principaux donateurs du Parti travailliste, a offert à Starmer 14 000 dollars pour des costumes et des lunettes élégants. Pour être honnête, il a effectivement meilleure allure, mais ce relooking devrait être prélevé sur son salaire. Private Eye a également découvert que Starmer et Reeves ont bénéficié de cadeaux, tels que des vacances, de la part de donateurs.

Même si ce n’est pas de la même ampleur que les scandales des conservateurs, cela n’a rien de réjouissant pour des millions de retraité·es qui devront choisir entre se chauffer et manger cet hiver, alors que les compagnies d’énergie augmentent encore leurs factures de 10 %.

L’idée selon laquelle nous devrions réduire l’allocation de chauffage d’hiver parce que de riches retraité·es comme Richard Branson en bénéficient est facilement réfutable. Il suffit de récupérer le coût de cette allocation pour tout le monde – afin qu’aucun·e retraité·e pauvre ou moyen n’en soit privé·e – en taxant davantage les riches. Les prestations universelles, comme le NHS, garantissent qu’il est dans l’intérêt de tous d’améliorer le système – il s’agit d’une prestation communautaire.

Sharon Graham, leader du syndicat UNITE, a également critiqué le discours, le qualifiant de « sombre » et déclarant qu’il était « temps de voir le changement promis par le Parti travailliste ». Elle a ajouté : « Nous n’avons plus besoin d’excuses sur la responsabilité fiscale ou de parler de création de richesse. Nous ne devrions pas opposer les retraités aux travailleurs ; ce n’est pas un choix qui devrait être sur la table ».

Même The Guardian, qui s’est montré relativement peu critique à l’égard du nouveau gouvernement travailliste (il suffit de regarder des chroniqueurs comme Behr, Kettle, Toynbee et Freedland), a réussi à souligner dans un éditorial que : » Sans un sentiment d’espoir et de progrès, le Parti travailliste encourra l’impopularité. Le montant qu’un gouvernement doit emprunter et dépenser devrait être déterminé par l’état de l’économie, et non par le niveau d’endettement que lui a laissé son prédécesseur ».

L’humoriste John Crace a bien résumé le problème de crédibilité du discours : « Il ressemblait au maçon qui vous dit que vous avez besoin d’un toit entièrement neuf alors que vous l’avez appelé pour nettoyer les gouttières ».

L’une des meilleures réponses au discours a été la déclaration publiée par Jeremy Corbyn et les quatre autres députés de la gauche indépendante :

La politique est une question de choix – et le gouvernement choisit d’infliger de la souffrance et de la pauvreté dans tout le pays.

Le gouvernement avait annoncé qu’il réduirait les factures d’énergie. Au lieu de cela, il a réduit l’allocation de chauffage en hiver pour les retraités.

 

Le gouvernement a dit qu’il voulait relancer notre économie, mais au lieu de cela, il veut réduire les investissements publics.

 

Au lieu de cela, il veut réduire les investissements publics. Le gouvernement a déclaré qu’il mettrait fin à 14 années d’échec des conservateurs. Au lieu de cela, il a voté pour maintenir le plafond des allocations pour deux enfants.

 

Nous refusons d’accepter que la pauvreté soit inévitable dans la sixième économie mondiale.

 

Il y a beaucoup d’argent. Il est simplement entre de mauvaises mains.

Le gouvernement doit s’opposer aux profiteurs avides en mettant fin à la privatisation de l’eau, de l’énergie, du courrier et des soins de santé. Il doit maintenir l’allocation de chauffage d’hiver pour tous les retraités. Et il devrait introduire des impôts sur la fortune pour mettre fin à la pauvreté des enfants et reconstruire nos services publics.

 

La décision de priver nos services publics de ressources a été une décision politique. Et ce sera une décision politique de répéter cette expérience économique ratée.

Un choix difficile consiste à décider s’il faut chauffer sa maison ou mettre de la nourriture sur la table. L’austérité n’est pas un choix difficile. C’est un mauvais choix.

 

Le bon choix consiste à investir dans les communautés afin d’apporter le véritable changement dont nos électeurs ont besoin, qu’ils exigent et qu’ils méritent.

Adnan Hussain, député de Blackburn ; Ayoub Khan, député de Birmingham Perry Barr ; Iqbal Mohamed, député de Dewsbury et Batley ; Jeremy Corbyn, député d’Islington North ; Shockat Adam, député de Leicester South.

CONSTRUIRE LA RÉSISTANCE À L’AUSTÉRITÉ DU PARTI TRAVAILLISTE

Contrairement à l’ère Blair, nous avons maintenant une situation politique où il existe un groupe indépendant de députés à la gauche du Parti travailliste au Parlement. La question s’est posée de savoir si les député·es élu·es dans des circonscriptions où vivent d’importantes communautés musulmanes, en grande partie à cause de la question de Gaza, adopteraient des positions de gauche sur les politiques sociales et économiques. La déclaration ci-dessus suggère que la réponse est oui. La victoire de Corbyn à Islington semble désormais cruciale pour favoriser le développement politique de ce groupe.

Si l’on ajoute à ce groupe les sept député·es travaillistes qui rompu avec la discipline majoritaire de leur rébellion sur le plafonnement des allocations pour deux enfants, il devient évident qu’il sera possible d’établir un lien entre l’action de masse à l’extérieur du Parlement et les députés à l’intérieur de celui-ci. Nous savons également qu’il existe un malaise généralisé au sein du PLP à propos de la décision sur les allocations pour deux enfants et de la réduction des aides pour le chauffage en hiver.

Il semblerait que cette inquiétude existe même au sein du Cabinet. Les dirigeants syndicaux ont déjà critiqué ces décisions et des résolutions ont été adoptées à ce sujet lors du prochain congrès du TUC. Le fait que le gouvernement ait réglé les revendications salariales du secteur public démontre que l’action de grève peut être payante et faire pression sur un gouvernement du Parti travailliste.

Pendant les élections, certains membres de la gauche ont affirmé qu’il y avait peu de différence entre un gouvernement travailliste et un gouvernement conservateur. Ils ont rejeté l’approche de ACR consistant à « chasser les conservateurs » et ont plutôt appelé à ne pas voter pour le « Parti travailliste », même dans les sièges marginaux ou lorsqu’aucun candidat de gauche indépendant crédible ne se présentait.

Nous pouvons déjà constater que la lutte de masse, les campagnes et la pression politique peuvent avoir un impact plus rapide et plus important sur un gouvernement Parti travailliste que sur un gouvernement Tory – bien que cela ne se produise pas sur toutes les questions ou dans tous les contextes. Si nous continuons à adopter une approche sectaire à l’égard du Parti travailliste et de ses membres, nous limiterons l’ampleur et l’impact de nos campagnes. Nous devons créer le plus de tensions possibles au sein du mouvement travailliste et du PLP entre la ligne de Starmer et la défense des intérêts de la classe ouvrière.

L’Assemblée populaire appelle à une grande manifestation lors de la conférence du Parti travailliste le 22 septembre à Liverpool, centrée sur les questions d’austérité. Les manifestations nationales de solidarité avec la Palestine se poursuivent depuis le 7 septembre. Fergal Sharkey et les associations écologiques organisent une manifestation de masse le 26 octobre contre les compagnies des eaux, exigeant une action gouvernementale décisive. Les socialistes devraient soutenir toutes ces initiatives et d’autres similaires.

Le gouvernement de Starmer dispose peut-être d’une majorité écrasante, mais il n’a qu’un mince mandat populaire, basé sur un peu moins d’un tiers des électeurs inscrits. La politique d’aujourd’hui est plus volatile. Les demi-mesures du Parti travailliste, son discours sur le trop grand nombre d’immigrés et les attaques contre le niveau de vie pourraient entraîner une hausse continue du soutien au Parti réformiste raciste de Farage et à des éléments plus extrêmes.

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09 mai 2024 ~ 0 Commentaire

EPR ( ODN )

epr

Observatoire du nucleaire SCOOP – L’électricité de l’EPR coûtera 2,5 fois plus cher que celle du reste du parc nucléaire

L’EPR de Flamanville va donc être un désastre économique pour la France en plus d’être une catastrophe industrielle pour EDF

- L’électricité produite par l’EPR sera beaucoup plus chère que celle désormais produite massivement en Europe par les renouvelables

Alors que le chargement en combustible du réacteur nucléaire EPR de Flamanville a commencé le 8 mai 2024, l’Observatoire du nucléaire tient à faire savoir que, si EDF parvient dans les mois qui viennent à faire fonctionner correctement ce réacteur, malgré ses diverses tares et malfaçons dont sa cuve défectueuse, l’électricité ainsi générée sera ruineuse.

EDF maintient ce sujet dans une totale opacité afin de laisser croire que l’EPR serait compétitif, ce qui est totalement impossible pour un réacteur dont le prix est passé d’environ 3 milliards à l’origine à plus de 20 milliards : l’estimation de 19 milliards par la Cour des comptes date de 2020 et est donc inévitablement à revoir à la hausse. Il est cependant possible d’avoir une comparaison entre les coûts de production de l’électricité de l’EPR et celle du reste du parc nucléaire d’EDF.

En effet, le rapport de juillet 2023 de la Commission de régulation de l’énergie (CRE) sur le coût de production du parc nucléaire situe la part de l’EPR à 2,5 euros/MWh pour la période 2026-2030 (1) pour un coût d’ensemble du parc nucléaire de 60,7 euros/MWh sur la même période, à savoir en moyenne une part de 1,04 euros/Mwh pour chacun des 56 réacteurs actuels.

L’électricité produite par l’EPR sera donc 2,5 fois plus chère que celle du reste du parc nucléaire d’EDF, laquelle est pourtant déjà déjà fort onéreuse comme peuvent le constater les citoyens de France qui voient leurs factures d’électricité s’envoler et leurs impôts servir à renflouer les entreprises de l’atome.

Pourtant, grâce aux productions de plus en plus massives et de moins en moins chères des énergies renouvelables, les prix de gros de l’électricité baissent très fortement en Europe (2), mais cela ne profite pas aux habitants de la France, piégés dans l’impasse nucléaire et soumis aux augmentations régulièrement annoncées par le ministre de l’économie Bruno Le Maire.

De plus, en venant s’ajouter aux productions électriques désormais largement excédentaires en Europe, la production de l’EPR va mécaniquement contribuer à faire encore plus baisser les prix de gros… et rendre le nucléaire (ancien et EPR) encore moins rentable, contraignant EDF à vendre à pertes ou à arrêter des centrales, ce qui arrive d’ores et déjà, et de plus en plus souvent, et lui coûte terriblement cher dans les deux cas. La mise enservice de l’EPR  de Flamanville va donc aggraver la situation de quasi faillite dans laquelle se trouve déjà EDF.

Alors que les énergies renouvelables viennent de dépasser le seuil de 30% de l’électricité produite sur Terre (3), et vont continuer leur montée exponentielle, le nucléaire poursuit son effondrement, passé de 17,1% en 2001 (4) à  9,2% en 2022  (5). De fait, si la France s’obstine à vouloir construire de nouveaux réacteurs (dits EPR2), dont les coûts s’envolent déjà (6) alors qu’ils n’existent même pas sur le papier, ce sera une inévitable nouvelle catastrophe économique. 

A supposer qu’EDF parvienne à construire le premier EPR2, il ne fonctionnera officiellement pas avant 2035 et probablement pas avant 2040 en réalité : il sera encore plus submergé par les renouvelables, dont la progression est exponentielle, et ne pourra probablement même pas être mis en service. Il est encore temps pour la France de sortir de l’impasse nucléaire en stoppant le programme EPR et de prendre le seul train d’avenir, celui des énergies renouvelables…

(1) https://www.contexte.com/article/energie/info-contexte-cout-du-nucleaire-le-regulateur-etrille-la-contre-evaluation-dedf_174867.html

(2) https://www.latribune.fr/climat/energie-environnement/electricite-l-ere-des-prix-negatifs-commence-994515.html

(3) https://www.connaissancedesenergies.org/afp/le-monde-depasse-en-2023-les-30-delectricite-dorigine-renouvelable-selon-un-rapport-240508

(4) https://www.alternatives-economiques.fr/structure-de-production-mondiale-delectricite-origine-2001-0110200355482.html

(5) https://www.connaissancedesenergies.org/sites/connaissancedesenergies.org/files/inline-images/Monde-Production-electricite-2022%20%281%29.png

(6) https://www.latribune.fr/climat/energie-environnement/nucleaire-la-facture-des-futurs-reacteurs-epr2-d-edf-grimpe-deja-en-fleche-992108.html

www.observatoire-du-nucleaire.org

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14 mars 2024 ~ 0 Commentaire

portugal (à l’encontre)

Portugal. La question gouvernementale et la place d’une initiative unitaire de la gauche à l’occasion du centenaire du 25 avril

Les résultats des élections législatives du dimanche 10 mars (voir article et tableau publiés sur ce site le 11 mars) débouchent sur une difficile situation pour une constitution «assurée» d’un gouvernement, du simple fait que le parti-coalition de droite Alternative démocratique (AD), à la tête duquel se trouve Luís Montenegro, ne dispose que d’une majorité relative de 79 députés sur 230. La majorité absolue est de 116 députés. Il est très probable – 4 députés issus des votes des émigré·e·s ne sont pas encore connus – que le président de la République, Marcelo Rebelo de Sousa, demandera à Luís Montenegro de former un gouvernement. Pour autant que ce dernier devance, en dernière instance, le PS grâce aux votes des circonscriptions d’émigrés qui seront dépouillés le 20 mars.

Le maire de Lisbonne, Carlos Moedas, membre du PSD (AD), n’a pas manqué de désigner comme responsables pour qu’aboutisse la formation d’un gouvernement AD: «le PS, Chega et d’autres partis». Autrement dit, la «responsabilité» technique de la formation ou non du gouvernement repose, selon lui, sur les options des élu·e·s de ces partis dans l’Assemblée de la République. Ce qui renvoie en priorité à la «responsabilité» du PS qui compte actuellement 77 député·e·s, pour autant que «le cordon sanitaire» soit maintenu par Luís Montenegro et l’AD face à l’extrême droite de Chega.

L’AD peut compter sur l’Initiative libérale (8 sièges). A l’opposé, la gauche – au sens le plus générique, PS, Bloco, PCP, Livre (écologique) – compte 90 députés, et 91 si est additionné le PAN-Personnes-Animaux-Nature. Donc une coalition négative peut se former pour bloquer des propositions de la droite qui, pour dépasser cet obstacle, devrait faire appel à Chega (48 sièges). Or Luís Montenegro a répété le «non et non» pour un «accord» avec Chega.

Pour réduire la dynamique de coalition négative de la gauche, il faudrait que la droite gagne les 4 députés de l’émigration, ce qui aboutirait à une égalité: 91-91.

D’autres «inconnues», avant la tenue de la première réunion de l’Assemblée de la République, au début du mois d’avril, peuvent être mentionnées. Les élections du président et des vice-présidents de l’Assemblée. Les quatre principaux partis parlementaires peuvent proposer un candidat. Reste ouverte la mise en échec d’une des propositions, le vote étant secret. De plus et surtout, comment sera reçu le programme de gouvernement proposé par le premier ministre désigné? Chega, qui insiste sur son électorat de 1 million, va montrer ses muscles pour être partie prenante au moins des principaux éléments d’un programme gouvernemental. Si Chega présente une motion de censure, il ne sera pas suivi par le PS, du moins sur la base des déclarations actuelles.

La question la plus importante, le test, va porter sur le budget 2025, d’autant plus que le PSD (AD) a indiqué qu’il était favorable à «un budget rectificatif», lors de la campagne électorale. Mais son avance limitée sur le PS semble devoir le pousser à aborder ce thème central en obtenant une abstention sur la base de quelques mesures budgétaires acceptables par ce dernier. Si ce budget présenté par le futur gouvernement passait, la survie d’un tel gouvernement serait plus probable, d’une part parce que le président de la République ne peut plus dissoudre l’Assemblée car ce pouvoir n’est plus applicable au cours des six derniers mois du mandat présidentiel et, d’autre part, parce que pourrait s’affirmer dans le PS une orientation – déjà mentionnée par certains caciques – visant à accepter une stabilité gouvernementale, bien que le PS se situe dans l’opposition.

Dès lors, les initiatives communes de la gauche, au sens large, telles que proposées par le Bloco de Esquerda, sur les questions sociales et symboliquement sur le 50e anniversaire du 25 avril ont toute leur place dans ce contexte relativement mobile, mais marqué sérieusement par l’affirmation de Chega.

C’est dans cette perspective que le 12 mars le Bloco a lancé une initiative unitaire pour l’échéance du 25 avril, ce qui pourrait stimuler une possible riposte sociale sur les droits démocratiques et sociaux (entre autres dans la santé, l’enseignement et le logement). Nous la reproduisons ci-dessous. (Rédaction A l’Encontre)

«Le Bloco souhaite une convergence dans l’opposition et se réunira avec les partis»

Par le Bloco de Esquerda

Le 12 mars au soir, Mariana Mortágua a annoncé que le Bloco a demandé des réunions avec le Parti socialiste, le PCP, Livre (écologistes) et le PAN (Personnes-Animaux-Nature) pour «analyser les résultats des élections et discuter des éléments de convergence à venir dans l’opposition au nouveau gouvernement [qui devra être constitué] et dans la définition d’alternatives pour le pays».

Dans un message vidéo [voir ci-dessous avec traduction automatique] publié ce mardi, Mariana Mortágua a analysé les résultats des élections de dimanche dernier et a indiqué des pistes pour une unité de la gauche pour le futur.

Selon la coordinatrice du Bloco, «les élections de dimanche ont changé le visage politique du pays» et «le résultat obtenu par l’AD et la montée de l’extrême droite font courir au Portugal le risque d’une réaction conservatrice qui menace les droits sociaux».

C’est pourquoi elle affirme que «les partis du camp démocratique, les écologistes et la gauche doivent maintenir ouvertes les portes d’un dialogue et rechercher la plus grande convergence possible pour défendre l’essentiel». Et elle insiste: «Nous ne renonçons à rien. Ni à la mémoire, ni à l’avenir, ni à l’Etat social, ni à l’objectif d’égalité.»

«Et, bien sûr, [l’objectif des réunions unitaires sera] de garantir qu’ensemble, nous organiserons des manifestations historiques dans tout le pays le 25 avril», a conclu la coordinatrice du Bloco de Esquerda [pour rappel, il y a cinquante ans le 25 avril marquait le renversement du régime salazariste]. (Déclaration publiée le 12 mars au soir sur le site du Bloco de Esquerda).

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PS: Selon diverses sources, la proposition du Bloco pour une rencontre unitaire de la gauche a reçu une réponse positive de la part du PCP. Son dirigeant, Paulo Raimundo, l’a déclaré lors d’une conférence de presse, tout en indiquant que le PCP n’allait pas «se dissoudre dans une convergence», ce qui relève de l’évidence. Le PAN a fait de même ce mercredi. Selon la presse, la PS s’est aussi manifesté comme «disponible» au même titre que Livre.

Selon le PS, des rencontres avec chaque parti devraient prendre forme, ce qui pourrait renvoyer au type de négociations qui ont eu lieu en 2019 pour établir les rapports entre le PS, le Bloco, le PCP. La dynamique «unitaire» et sa configuration vont être testées dans les jours qui viennent. (Réd. A l’Encontre)

13 mars 2024 Alencontre

https://alencontre.org/

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19 décembre 2023 ~ 0 Commentaire

france-palestine (npa)

Crédit Photo DR 
Revue L’Anticapitaliste n° 151 (décembre 2023)

Les circonvolutions de la politique française sur la Palestine et Israël

Les rapports entre la bourgeoisie française et ses gouvernements face au sionisme et à l’État d’Israël ont suivi de nombreuses circonvolutions depuis les années trente du siècle dernier, mais ont toujours été essentiellement déterminés par les aléas de la politique colonialiste et impérialiste de la France en Afrique du Nord et au Moyen-Orient.

Dans ce cadre, la question palestinienne a toujours été une variable d’ajustement de cette politique. Au début du siècle dernier, la France a imposé son hégémonie coloniale sur l’Afrique du Nord et l’essentiel de l’Afrique de l’Ouest. Le Moyen-Orient, comme l’Afrique de l’Est, est surtout une zone d’influence exclusive de la Grande-Bretagne qui assure le contrôle du canal de Suez et des voies commerciales avec l’Inde, ayant consolidé ses colonies dans le Golfe persique, en Égypte et au Soudan. De plus, l’utilisation croissante du pétrole commence à faire de l’Iran et de la Mésopotamie une zone stratégique. La Grande-Bretagne essaya même dans les années 1910 de mettre la main, en Iran, sur ce qui restera, jusque dans les années 1940, le plus important gisement de la région, et lorgna aussi sur le gisement ottoman de Mossoul.

Après l’échec de Bonaparte en Égypte, les impérialistes français, notamment Napoléon III, avaient essayé à plusieurs reprises et sans succès, durant le XIXe siècle, d’étendre leur empire nordafricain vers le Levant et la « Grande Syrie ». La France compta donc utiliser l’affaiblissement de l’Empire ottoman durant la Première Guerre mondiale pour mettre enfin un pied dans cette région et participer à l’exploitation pétrolière naissante.

Le dépeçage de l’Empire ottoman avait été dessiné par la France et la Grande-Bretagne avec le fameux accord secret Sykes-Picot de 1916, révélé au grand jour par la Pravda dès fin 1917. Il prévoyait l’octroi à la France d’une vaste zone au nord d’une ligne Gaza Kirkouk, allant au nord jusqu’en Anatolie, intégrant notamment la Cilicie région arménienne de l’empire ottoman et une partie du Kurdistan. La Grande-Bretagne s’octroyait le sud de la région arabe jusqu’à la mer d’Oman. La Palestine devait constituer une zone internationale.

Mais, parallèlement à cet accord secret, la Grande-Bretagne, pour affaiblir le pouvoir ottoman, avait soutenu la révolte menée dès 1916 par les mouvements indépendantistes, anticoloniaux et nationalistes arabes, avec un engagement à soutenir la création d’un État arabe unifié moderne, unifiant les arabes sunnites et chiites d’Alep à Aden, sous l’impulsion de Hussein ben Ali, souverain hachémite du Hedjaz et chérif de La Mecque, et des nationalistes de Damas.

Cet accord reconnaissait l’indépendance des pays arabes de la péninsule arabique jusqu’à la province de Mersin en Anatolie, de la Méditerranée à la frontière perse, y compris donc la Palestine et la Syrie. De plus, en 1917, par le biais de deux déclarations (Cambon et Balfour), les gouvernements français et anglais engageaient leur soutien à l’Organisation sioniste mondiale à la création « en Palestine d’un foyer national pour le peuple juif […] étant clairement entendu que rien ne sera fait qui puisse créer un préjudice pour les droits civils et religieux des communautés non juives en Palestine… » (Déclaration Balfour).

Le but, des impérialistes britanniques notamment, était de s’assurer le soutien du mouvement sioniste pour faire pencher les États-Unis dans l’engagement américain dans la guerre, face à l’Allemagne, et aussi de consolider au Nord de l’Égypte la façade maritime en espérant avoir un contrôle étroit sur cette zone.

L’accord secret Sykes Picot contredisait l’engagement envers les droits nationaux des arabes, tout comme il écartait ceux des Arméniens et des Kurdes.

L’imposition du partage colonial face à l’indépendance arabe

À la fin de la guerre, les armées arabes, avec le soutien des Britanniques, sortirent victorieuses de leur affrontement avec l’armée ottomane et avait libéré l’ensemble des territoires arabes de la mer d’Oman à l’Anatolie. Fayçal, dirigeant des armées arabes et fils du chérif hachémite Hussein ben Ali, signait un accord avec le dirigeant sioniste Chaim Weizmann acceptant l’application de la déclaration de Balfour mais explicitement pour lui dans le cadre du nouvel État arabe unitaire et dans le respect des droits des populations arabes vivant déjà sur cette terre.

Mais la résolution de San Remo, en avril 1920, dans la foulée de la Conférence de Paris de 1919, faisait voler en éclat ce nouvel État arabe, sans aucun respect des engagements pris avec Hussein en 1915. Sous les auspices de la Société des Nations (SDN), la Mésopotamie (l’Irak) et la Palestine passèrent sous « mandat » britannique, la Syrie et le Liban sous « mandat » français.

La Grande-Bretagne, forte de son rapport de force militaire face aux Français, obtient d’intégrer à leur zone la région de Mossoul et Kirkouk, où la Turkish Petroleum exploitait les gisements. En dédommagement, la France mettait la main sur les 25 % de parts que détenait la Deutsche Bank dans cette société. Créée pour gérer ces parts, la Compagnie française des pétroles (CFP, future Total) eut ainsi accès au partage des richesses pétrolières du Moyen-Orient, et à un strapontin au côté des 7 majors (BP, Shell, Exxon, Texaco, Mobil, Socal et Gulf) qui détinrent le monopole mondial de l’exploitation et de la distribution jusqu’aux années soixante.

En juillet 1920, les troupes françaises (80 000 soldats avec l’appui de chars, d’artillerie et de l’aviation) envahissent donc le royaume arabe de Syrie, s’imposent à la bataille de Khan Mayssaloun face à l’armée des nationalistes arabes (5 000 soldats mal équipés).

L’ironie morbide des décisions colonialistes de la SDN est que les mandats britanniques et français devaient « permettre aux États du monde arabe d’accéder à l’indépendance et à la souveraineté » mais se traduisent dans toute la région par l’écrasement de la souveraineté arabe déjà réalisée et la création d’une Syrie sous mandat colonial français, avec la création artificielle du Liban et de la Palestine sous mandat britannique, privant la Syrie de toute façade maritime.

En écrasant le régime démocratique et populaire de Fayçal qui aura vécu deux ans, les colonialistes français se sont comportés à Damas avec la même morgue que celle affichée en Afrique du Nord, s’opposant pendant plus de vingt ans au nationalisme arabe qui, chercha à aboutir à une souveraineté nationale et à réunifier la Syrie, appuyée sur plusieurs élections exprimant un sentiment national qui dépassait les « communautés ».

En 1936, la chambre de Front populaire faillit ratifier un nouvel accord avec les nationalistes du Bloc national, reconnaissant leurs droits nationaux vers une Syrie indépendante. La droite y mit un frein, et l’arrivée du régime de Pétain en 1940 fit craindre aux Anglais que la Syrie du mandat serve de point d’appui à l’armée allemande. Ils acceptèrent l’appui des FFL pour intervenir en Syrie et écarter du pouvoir l’administration de Vichy. Pour asseoir leurs bases populaires, Britanniques et gaullistes acceptèrent de proclamer que « les peuples libanais et syriens seraient désormais indépendants et pourraient se constituer soit en deux États séparés soit en un seul État ». Mais dès 1944, l’administration coloniale refuse de céder son pouvoir et cherche à maintenir un contrôle de la France sur les souverainetés syriennes.

Le 29 mai 1945, presque un mois après les insurrections algériennes de Sétif et Guelma qui aboutirent à 35 000 assassinats d’autochtones, l’aviation française bombarda la population de Damas qui exigeait purement et simplement l’indépendance et le départ de la France, avec un bilan d’au moins 400 morts. Finalement, sous pression de la Grande-Bretagne, la France se retirera totalement et sans condition en 1946.

La France colonialiste perd donc totalement pied au Moyen-Orient alors que la Grande-Bretagne garde la main, ayant mieux su négocier les accessions à l’indépendance des monarchies hachémites en Irak et en Jordanie dans le cadre du mandat, dans la péninsule arabique où elle soutient la famille Saoud, (qu’elle avait mise en place dans les années vingt en destituant le souverain hachémite Hussein ben Ali). Si les relations bilatérales sont compliquées mais maintenues avec l’Égypte et notamment sur le contrôle du Canal de Suez, les Britanniques gardent le contrôle du Golfe arabique avec les « États de la Trêve » (aujourd’hui Émirats arabes Unis, Qatar et Bahreïn) toujours intégrés à l’Empire britannique.

Le soutien de la France à Israël de 1945 à 1967

La France d’après-guerre, déjà affaibli par le mouvement des indépendances qui s’annoncent en Indochine et en Afrique, cherche donc un nouveau point d’appui au Moyen-Orient. Alors que Churchill et la Grande-Bretagne cherchent à bloquer l’arrivée de migrants juifs en Palestine, la France, elle, va aider le départ des côtes françaises de bateaux de migrants et de caisses d’armements (Exodus, Altalena…).

En 1947, elle accordera aussi l’asile politique à Yitzhak Shamir, militant sioniste de droite et futur Premier ministre israélien, responsable de l’organisation armée Lehi (groupe Stern), spécialisée dans les assassinats politiques contre des responsables britanniques. Jusqu’en 1948, il s’occupera en France d’organiser les actions et la logistique de l’Irgoun. En tant que « terroriste », sa tête était mise à prix et il était recherché par la police britannique, à la suite notamment de l’attentat de l’Irgoun contre l’hôtel King David (au moins 91 morts). La France refusera son extradition.

Donc, discrètement, mais clairement, les autorités françaises soutiennent contre les Britanniques le développement de l’immigration en Palestine et la création d’un État juif. Dans les années 50, la France va jouer la carte d’Israël pour essayer de maintenir une présence dans la région, alors que toute la région arabe a une image déplorable de la France, après l’expérience du mandat et avec le contexte colonial de la guerre de libération en Algérie.

La Grande-Bretagne, elle, va en 1955 consolider ses alliances par le pacte de Bagdad duquel la France est exclue, avec le Pakistan, la Turquie, l’Irak et l’Iran, rejoints ensuite par les USA. Il s’agit clairement d’une alliance militaire face « au communisme » et à l’URSS sur sa frontière sud-ouest. L’Égypte nasserienne, suite à ce pacte, développe un autre pacte rassemblant le Yémen, l’Arabie saoudite et la Syrie, développant ses liens avec l’URSS, tout en faisant appel à la Tchécoslovaquie pour les fournitures d’armes.

L’Égypte reconnait aussi la République populaire de Chine, mise au ban des relations internationales par les pays occidentaux depuis 1949. Suite à cette évolution, les USA refusent tous les crédits que Nasser veut obtenir pour la modernisation du pays, notamment pour le barrage d’Assouan. En conséquence, l’Égypte va nationaliser la Compagnie universelle du Canal de Suez le 26 juillet 1956, prenant le contrôle du canal et expropriant les capitaux français et anglais (avec de solides indemnités et rachat amenant à la création de ce qui deviendra le groupe Suez).

À l’époque, la France redoute le soutien de Nasser au FLN algérien – c’est au Caire que le mouvement à son siège et il est soutenu par les livraisons d’armes venant de l’Égypte. Le SDECE essaya même à l’époque, sans succès, de pousser les Frères musulmans égyptiens à l’assassinat et au renversement de Nasser. La Grande-Bretagne et Israël craignent le blocage de la voie de transport maritime qui a aussi pris une importance stratégique avec le développement du commerce du pétrole.

La France, l’Angleterre et Israël mènent donc, en octobre suivant, la nationalisation, des discussions secrètes débouchant sur le protocole de Sèvres prévoyant une opération militaire contre l’Égypte avec, de la part de la France, la couverture aérienne et navale de l’offensive terrestre israélienne, une importante livraison d’armes, l’équipement de l’armée israélienne en avions de chasse Dassault et de chars AMX français.

« L’opération de Suez » est donc lancée fin octobre, officiellement pour riposter au blocus du détroit de Tiran, à l’extrémité du Golfe d’Aqaba. Sous protection française, l’armée israélienne et ses alliés traversent le Sinaï jusqu’au Canal de Suez. Mais, ni les USA ni l’URSS ne veulent d’un conflit régional de cette importance et, après la percée militaire, les armées de cette alliance doivent se retirer, deux mois après le début du conflit.

Malgré cet échec politique, l’opération de Suez sera les premiers pas d’une coopération militaire franco-israélienne étroite qui durera jusqu’à la guerre des Six Jours en 1967. Un volet important sera la structuration par la France du programme nucléaire israélien avec la construction de la centrale de Dimona, dans le Néguev, aboutissant à la maîtrise de l’arme nucléaire par Israël, sans que le pays ne l’ait jamais reconnu. La France restera jusqu’en 1967 le premier fournisseur d’Israël en matériel militaire.

L’opération de Suez est malgré cela un échec pour la France et la Grande-Bretagne qui apparaissent comme des impérialismes de seconde zone poursuivant leur politique d’agression coloniale, mais affaiblis et soumis aux décisions américaines. Cette action discrédita particulièrement la France aux yeux des pays arabes, cette opération s’ajoutant à la guerre coloniale en Algérie. La Grande-Bretagne en tirera comme leçon un alignement systématique sur l’impérialisme américain et la France tentera avec De Gaulle, à partir de la fin de la guerre d’Algérie, une politique d’indépendance basée sur la maîtrise de l’arme nucléaire et en cherchant à faire oublier sa politique colonialiste.

À la fin des années cinquante, l’armée française s’était livrée notamment à des crimes de guerre au Cameroun pour assassiner des militants indépendantistes, mettre en place un gouvernement fantoche et démanteler l’UPC et la résistance anticolonialiste.

L’ouverture vers l’OLP

Après la défaite française en Algérie, la France chercha donc à renouer avec une politique vis-à-vis des pays arabes, notamment les pays producteurs de pétrole et les pays clients des fournitures d’armement français. Cette réorientation va se télescoper avec l’alliance privilégiée avec Israël.

Après 1967, la France apparaîtra préoccupée de la question palestinienne, reconnaissant la légitimité de la résistance et exigeant qu’Israël applique la résolution 242 stipulant le retrait total des territoires occupés, c’est-à-dire la bande de Gaza et la Cisjordanie. Le tournant se concrétise à partir de 1974 avec le vote de la France à l’ONU, de reconnaissance de l’OLP comme principal représentant du peuple palestinien, et la France devient le premier pays européen accueillant une représentation de l’OLP.

En 1972, la France refusera l’extradition, vers l’Allemagne ou Israël, d’Abu Daoud, militant du Fatah, coorganisateur de l’attaque lors des Jeux olympiques de Munich en 1972, au cours de laquelle 18 personnes dont 11 athlètes israéliens furent tués. Cet attentat avait été impulsé et financé par Mahmoud Abbas, trésorier du Fatah à l’époque et président actuel de l’Autorité palestinienne. De même, sera mis en œuvre un accord franco-iraquien pour la mise en œuvre du réacteur nucléaire Osirak en 1975 Ce réacteur sera détruit par un raid israélien en 1981.

Par la suite, les années quatre-vingt et quatre-vingt-dix vont voir une reconfiguration du paysage politique avec le renversement du Shah en Iran et la création de la République islamique, la crise du nationalisme arabe et la disparition de l’URSS. Dans les années quatre-vingt-dix, avec les accords d’Oslo et l’alignement progressif des capitales arabes sous le giron des USA, la politique arabe de la France mit largement de côté cette prise en compte de la question palestinienne.

Elle n’était plus un passage obligé dans le dialogue avec les capitales arabes, notamment celles du Golfe qui, face à l’influence de l’Iran, normalisèrent leur rapport avec Israël. Les intérêts commerciaux de la France dans les pays arabes pouvaient dès lors s’accorder avec une empathie politique avec Israël et un alignement sur la politique prosioniste des États Unis et de l’essentiel des pays européens. La présidence de Jacques Chirac fut la dernière phase de cette politique autonome avec, notamment, le refus de suivre George Bush dans la guerre d’Irak de 2003 qui aboutit à l’élimination de son ancien allié Saddam Hussein et l’ouverture de la déstabilisation de la région.

Un nouveau paradigme se construisit dès lors, notamment après septembre 2001 et l’intervention occidentale en Afghanistan, à l’axe du Mal mis en avant par les USA, reliant l’Iran au Hezbollah libanais et au Hamas, se superposèrent les axes du terrorisme islamiste de Daesh et d’Al Qaeda.

Les gouvernements sionistes successifs des années quatre-vingt-dix à aujourd’hui accélérèrent la colonisation et la répression de la résistance palestinienne, s’appuyant notamment sur le discrédit de la direction du Fatah, alors que la majorité parlementaire aux élections législatives de l’Autorité palestinienne était largement obtenue par le Hamas en 2006. Les gouvernements français acceptèrent désormais d’épouser les définitions imposées par Israël : les groupes armés palestiniens sont des groupes terroristes, l’antisionisme est une nouvelle forme de l’antisémitisme.

Malgré le maintien officiel de la politique adoptée après 1967, à partir de la présidence de Sarkozy, il n’y eut plus aucune prise en compte politique des droits du peuple palestinien et la France se rangea totalement sur le soutien pur et simple à la politique israélienne, tout comme le fit l’Union européenne.

Léon Crémieux

https://lanticapitaliste.org/

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30 novembre 2023 ~ 0 Commentaire

ehpad (rennes)

hoptiam

Ephad, Esat, IME… « Le salaire de base vient de passer en dessous du SMIC ». Le cri d’alarme des travailleurs du médico-social

Les soins et la solidarité sont dans un état de fragilité immense. C’est ce que sont venus dire près de 400 travailleurs, directeurs et présidents d’associations et de fédérations oeuvrant dans le domaine du médico-social, ce jeudi 30 novembre devant la préfecture, à Rennes. Ils ont symboliquement remis les clés de leur établissement devant les grilles.

Entre colère, ras-le-bol et inquiétude. Environ 400 responsables du secteur social, médico-social et sanitaire privé non lucratif breton se sont regroupés devant la préfecture à Rennes, ce jeudi après-midi.

Nom de la manifestation :  « Non à un Jeudi noir de la santé et des solidarités. Et si on vous rendait les clés ! »

Une manifestation avec la même symbolique mais centrée sur les Ehpad avait déjà eu lieu le 10 octobre à Plédran, dans les Côtes d’Armor.

Ils tirent la sonnette d’alarme, dénonçant la « fragilité extrême du système de santé et des solidarités » en France. Ils demandent des moyens financiers et humains pour les Ehpad, Esat ou IME qu’ils gèrent, où dans lesquels ils travaillent, pour des salaires souvent indécents.

Moins que le SMIC

Comme Patricia Bouëtel, qui travaille en protection de l’enfance. « Au moment du covid, on s’est retrouvé tout seul », déplore-t-elle. « Pas de masque, pas de gel, toutes les structures fermées. Et nous on avait des adolescents qui étaient dans un état lamentable, des éducateurs qui ne savaient pas comment faire. On n’a jamais été augmenté. Le salaire de base vient de passer en dessous du SMIC. Ça fait 40 ans que je bosse dans la protection de l’enfance.  Je ne pensais pas connaître ça dans ma vie ».

Non-marchandisation des personnes vulnérables

Ce que craignent les manifestants, c’est la remise en cause du système non-lucratif. Un de nos crédos, c’est la non-marchandisation de l’accompagnement des personnes vulnérables. Nous voulons préserver ce système. Il faut que le grand public comprenne que la non-lucrativité du secteur implique un accompagnent, des personnes vulnérables pour tous et qu’on ne laisse personne sur le bord du chemin.

« Nous sommes des magiciens »

D’après les manifestants, des associations sont en danger économique. « L’inflation, l’augmentation des personnes vieillissantes fait que beaucoup de nos structures sont au bord de la cessation de paiement », explique Mathieu Thiébaut, membre d’association. Nous sommes des magiciens. Tous les gens qui travaillent, professionnels ou bénévoles, arrivent à inventer des solutions au quotidien ».

Quelques élus ont rejoint les rangs de la manifestation.

Au même moment, la ministre des Solidarités et des Familles dans le Finistère

Pendant ce temps, la ministre des Solidarités et des Familles, Aurore Bergé, était en visite dans le Finistère. Ce mercredi, elle a annoncé la construction de « 100 établissements médico-éducatifs » d’ici 2027, pour l’inclusion des enfants en situation de handicap dans les écoles.

Les professionnels attendent de voir.

 30/11/2023  Benoit Levaillant (Avec Sylvaine Salliou)

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27 novembre 2023 ~ 0 Commentaire

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Le directeur de l’hôpital dans le viseur, forte mobilisation des personnels contre la politique de restriction budgétaire de l’hôpital de Lorient

La mobilisation importante ce lundi 27 novembre pour la sauvegarde des conditions de travail et d’accueil à l’hôpital de Lorient est sans précédent selon les syndicats.

Plus de 500 personnes se sont rassemblées ce lundi après-midi devant l’hôpital du Scorff à Lorient (Morbihan) pour exprimer leur colère et leurs inquiétudes sur la gestion menée par leur tout nouveau directeur, basée sur des économies à tous les niveaux.

L’appel à la mobilisation avait été lancé une intersyndicale (CGT, CFDT, FA Fédération Autonome, Santé Sociaux G.H.B.S et Sud) à 14h devant l’hôpital du Scorff. Et l’appel a largement été entendu, puisque plus de 500 manifestants se sont rassemblés pour défendre leurs conditions de travail, conditions d’accueil des patients et les emplois.

Car depuis son arrivée en juillet dernier, Jean-Christophe Phelep, le nouveau directeur du groupe hospitalier Bretagne sud (GHBS) a réussi, selon les syndicats, un exploit : faire l’unanimité contre lui. « En deux mois, il a réussi l’exploit de réunir pour la première fois une intersyndicale à l’hôpital du Scorff » nous lâchait l’intersyndicale fin septembre dernier.

Une mobilisation historique

Selon un représentant CGT et un médecin au cours de la manifestation, une telle mobilisation, « c’est du jamais vu depuis 20 ans », « une mobilisation historique ».

Dans les rangs des manifestants composés avant tout de soignants, de personnels, de médecins, de patients, de résidents d’Ehpad et de citoyens, l’inquiétude est de mise par rapport aux conditions de travail et de soins prodigués dans l’établissement. Des slogans inscrits sur des pancartes tels : « Vous ne pensez qu’aux sous. Nous ne pensons qu’aux soins », « Non au management par la peur », « Maltraitance du directeur envers le personnel soignant », démontre bien la colère des personnels à l’égard de la nouvelle direction.

Selon les manifestants et les syndicats, la politique de restriction budgétaire engagée par le nouveau directeur se fait déjà lourdement sentir. Ainsi, l’intersyndicale dénonce « le climat délétère créé par le nouveau directeur et les nombreuses rumeurs qui se sont finalement concrétisées avec, par exemple, la fin du recours à des agents contractuels, la privatisation possible de certains services, notamment le bio nettoyage ou encore le gel des CDIsation ». 

Gérard, un résident d’Ehpad de 92 ans, n’a pas hésité à sortir pour soutenir « tous ces personnels compétents, très gentils qui vont perdre leur travail à la fin du mois ou du mois suivant ». Des personnes âgées qui n’auront pas de repas de Noël pour cause de restriction budgétaire.

« Un fossoyeur du service public hospitalier »

Jean-Christophe Phelep aurait dressé l’état d’une situation financière calamiteuse, mettant en avant l’endettement de l’établissement hospitalier, ce qui empêcherait d’avoir suffisamment de trésorerie permettant d’investir dans de nouveaux projets.

Ludovic Bénabès, représentant du personnel CGT du GHBS, n’hésite pas à qualifier le nouveau directeur de « fossoyeur du service public hospitalier ».

Selon le syndicaliste, « il y a urgence » devant l’inquiétude grandissante qui s’empare d’une bonne partie des employés soignants et administratifs du groupe hospitalier Bretagne sud. « On a eu neuf assemblées générales en un mois et à chaque fois le personnel a répondu présent en masse comme pour cette mobilisation d’aujourd’hui, ce qui prouve bien le mécontentement de la nouvelle politique menée ».

Le syndicaliste ajoute que ce qui se déroule actuellement à Lorient est symptomatique des politiques de santé qui ont été menées ces dernières années qui ont contribué à dévaster petit à petit et plus particulièrement ces dernières années l’hôpital public ». Et de parler de double discours « entre la volonté de vouloir maintenir un service public hospitalier de qualité et les moyens mis en œuvre pour y arriver ».

 27/11/2023   Thierry Peigné

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27 novembre 2023 ~ 0 Commentaire

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« Tax The Rich » : la Commission européenne valide la pétition sur la taxation des grandes fortunes

« Il y a un véritable ras-le-bol de l’injustice fiscale et de ces deux systèmes de taxation parallèles : celui de Monsieur et Madame tout le monde, qui travaillent, paient leurs impôts là où ils sont domiciliés et ne vivent pas dans l’opulence ; et celui pour les grandes fortunes, qui ont la capacité d’avoir des avocats fiscalistes mettant en place des stratégies de contournement et qui, finalement, payent beaucoup moins d’impôts et accumulent du capital »

Portée par des eurodéputés, des économistes, des millionnaires et des citoyens, l’initiative citoyenne européenne « Tax the Rich » est lancée. L’objectif : récolter 1 million de signatures pour taxer les 1% les plus riches, ceux qui polluent le plus, afin de financer la transition écologique de l’UE.

Aux origines de l’ICE : la taxe sur les superprofits des entreprises

Depuis 2020, les 1 % les plus riches ont accaparé les deux tiers des richesses créées, soit près de deux fois plus que les 99 % restant. Pire, ces mêmes 1 % émettent également plus d’émissions de CO2 que la moitié la plus pauvre de la planète.

Documenté par Oxfam, ce double constat est au cœur de l’Initiative Citoyenne Européenne (ICE) « Tax the Rich », enregistrée en juillet dernier par la Commission. Décryptage avec Aurore Lalucq, eurodéputée Place Publique et co-dépositaire du projet.

« Cette ICE, qui date d’avril dernier, est une idée de Paul Magnette [Président du Parti socialiste de Belgique]. Il m’a sollicitée car j’avais déjà travaillé sur la course au moins-disant fiscal des multinationales. Nous avons donc voulu répéter l’opération, cette fois-ci, au niveau, des grandes fortunes des individus » explique Aurore Lalucq pour La Relève et la Peste.

D’autant plus que, souligne l’eurodéputée, c’est un moment propice pour légiférer sur le sujet.

« Comme le Parlement européen vient d’adopter une taxe sur les superprofits des entreprises, nous n’avons rencontré aucune opposition. De même, au niveau de la Commission, plusieurs signaux nous ont indiqué que la question de la taxation des grandes fortunes était pertinente, tant sur la forme que sur le fond, puisqu’il permettra de créer un débat politique dont peuvent se saisir les sociétés civiles européennes ».

L’injustice fiscale, un sujet qui fait consensus

C’est donc un groupe de sept personnalités européennes issues de tout horizon qui ont collaboré afin de mettre sur pied une ICE recevable par l’Union européenne. Parmi elles, rien d’autre que : l’économiste français Thomas Piketty, la multimillionnaire autrichienne Marlène Hegelhorn, le secrétaire général d’Oxfam Danemark Lars Koch, le chef économiste de la Confédération finlandaise des professionnels (STTK) Lainà Patrizio…

Cette diversité socio-professionnelle a particulièrement été recherchée, souligne l’eurodéputée Place Publique.

« Nous voulions que le panel de personnes déposant l’ICE soit représentatif de la population, pour montrer à la Commission qu’un consensus est en train de se créer au niveau européen, d’autant plus que 67 % de la population de l’UE pense qu’il faut taxer la fortune. »

C’est que, du fait du décrochage de l’inflation par rapport aux salaires, cette question prend de plus en plus d’espace dans l’opinion publique.

« Il y a un véritable ras-le-bol de l’injustice fiscale et de ces deux systèmes de taxation parallèles : celui de Monsieur et Madame tout le monde, qui travaillent, paient leurs impôts là où ils sont domiciliés et ne vivent pas dans l’opulence ; et celui pour les grandes fortunes, qui ont la capacité d’avoir des avocats fiscalistes mettant en place des stratégies de contournement et qui, finalement, payent beaucoup moins d’impôts et accumulent du capital », analyse Aurore Lalucq.

C’est là tout l’enjeu de l’ICE « Tax The Rich ». Deux options s’offrent alors : soit un impôt sur les grandes fortunes est adopté au niveau de l’UE – faisant de la taxe un outil budgétaire -, soit l’UE oblige ses États-membres à établir un impôt commun à l’échelle nationale, sur le modèle de celui adopté par le Parlement européen sur les superprofits des entreprises – faisant ainsi de la taxe un outil étatique.
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L’un des derniers moyens pour financer la transition écologique…

Pourquoi ? « Car pour financer la transition écologique, l’UE a besoin de ressources propres conséquentes. Or, pour l’instant, malgré le fait qu’elle soit la première puissance économique mondiale, l’UE n’a pas le ‘budget’ suffisant pour mettre en place des politiques de soutien » poursuit Aurore Lalucq.

Que ce soit au niveau européen ou au niveau national, la transition écologique s’impose comme une nécessité immédiate. Du développement des énergies renouvelables à la modernisation des réseaux de transports, en passant par le soutien aux ménages les plus précaires pour l’acquisition de voitures électriques ou la rénovation thermique des logements, les besoins sont énormes.

« D’autant plus que 60 % des investissements dans la transition écologique ne sont pas rentables à court terme, ce qui signifie qu’il va nous falloir une puissance publique en capacité d’investir et que les grandes fortunes participent davantage au budget de l’État », analyse Aurore Lalucq.

L’objectif de l’ICE est donc véritablement de recréer de la solidarité.

« La transition écologique doit être sociale, sinon elle échouera » finit-elle par conclure.

Si celle-ci vient à être adoptée, trois interventions législatives seraient alors nécessaires : la mise en place d’une stratégie commune afin de mener une action coordonnée pour éviter le dumping fiscal ; l’élargissement du système de ressources propres de l’UE au nouvel impôt ; le renforcement des fonds pour la facilité et la résilience, pour le Green Deal et la politique de cohésion afin de permettre le financement de la transition écologique.

L’ICE a maintenant un an pour réunir à minima 1 million de signatures, afin de permettre une saisine de la Commission. Un rendez-vous à ne pas manquer !

: Gaelle Welsch

https://lareleveetlapeste.fr/

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08 novembre 2023 ~ 0 Commentaire

travail saisonnier (basta)

travail saisonnier (basta) dans Altermondialisme
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L’incroyable combat d’une travailleuse agricole contre l’exploitation des êtres humains

Yasmina Tellal, aux côtés d’autres travailleurs détachés agricoles, a brisé le silence sur leurs conditions de travail dans des exploitations agricoles du sud de la France. Fin septembre, la justice a condamné les gérants d’une entreprise dénoncée.

« J’ai mené cette bataille pour toutes les femmes, contre l’exploitation des êtres humains », souffle au téléphone Yasmina Tellal, employée de 2012 à 2017 par Laboral Terra, une entreprise de travail temporaire espagnole qui fournit de la main-d’œuvre aux exploitants et entreprises agricoles françaises. Après avoir vécu un calvaire dans les vergers et les serres de Provence durant des années, Yasmina et trois autres travailleurs agricoles saisonniers ont enfin été reconnus victimes par la justice.

Le 26 septembre, le tribunal correctionnel d’Avignon a condamné les deux gérants de Laboral Terra à verser aux travailleurs près de 100 000 euros d’indemnités, au titre des préjudices économique, financier et moral – soit 25 000 euros chacun. Les gérants de Laboral Terra ont également été condamnés à verser 1 euro symbolique à la CGT qui accompagnait les intérimaires en qualité de partie civile [1].

« C’est une grande victoire d’obtenir un préjudice moral. Dans ce type d’affaires, le symbole est important. Cela montre que la justice a compris l’enfer qu’ils ont vécu », a commenté Yann Prévost, l’avocat des travailleuses et travailleurs détachés. « Ils nous ont donné raison à 100 % : le travail non déclaré, le préjudice moral et économique, l’accident du travail, égrène Yasmina.

Une très longue bataille judiciaire

Le chemin de ces travailleuses et travailleurs pour en arriver là a été très long et difficile. « J’ai beaucoup bataillé pour avoir cette reconnaissance de notre souffrance par l’État français », reconnaît-elle. En 2020, nous avions longuement échangé avec Yasmina Tellal qui dénonçait les conditions « inhumaines » dans lesquelles elle avait été employée chez des exploitants et entreprises agricoles du sud de la France. « Ils n’ont rien respecté : ni les 35 heures ni les congés, et pas plus la possibilité d’avoir accès à la couverture complémentaire santé », dénonçait la travailleuse.

Entre 2012 et 2017, ses contrats se sont enchaînés, dans l’emballage de fruits et légumes, puis dans les serres de fraises où l’ « on n’avait pas de pause, pas de café, pas le droit de manger, pas de toilettes », décrit-elle. Dans une autre entreprise d’emballage de pommes, Yasmina travaille 15 heures par jour, avec une heure de pause seulement. Il y a là « un comportement de mépris et un abus de la force de travail », nous avait confié son avocat.

En 2020, Yasmina Tellal dépose plainte contre Laboral Terra aux prud’hommes, avec quatre salariés, pour non-respect des contrats de travail, non-paiement des heures supplémentaires et des congés payés, manque à l’obligation de sécurité et préjudice moral.

Les cotisations sociales, qui sont payées en Espagne par l’entreprise de travail temporaire, se révèlent bien moins élevées qu’en France. S’il n’est pas illégal d’avoir recours au travail détaché, cela doit se faire de manière limitée dans le temps. Or, dans le cas de Yasmina Tellal, son avocat rappelle qu’elle a travaillé pendant plusieurs années pour deux de ces sociétés, ce qui confirme un besoin structurel, et non pas temporaire, de main-d’œuvre.

Série de victoires

Le 22 septembre 2020, Yasmina Tellal et les quatre autres salariés obtiennent, devant les prud’hommes d’Arles, le paiement de rappels de salaires et congés payés par Laboral Terra. Le jugement évoque alors des « retenues frauduleuses sur salaires, (des) indemnités de congés payés jamais versées » ou des salaires calculés sans respecter le minimum légal.

« Le jugement a également reconnu la responsabilité solidaire des entreprises utilisatrices pour le paiement des sommes restantes dues aux salarié·es détaché·es et aux organismes de sécurité sociale », pointe le Collectif de défense des travailleurs étrangers dans l’agriculture des Bouches-du-Rhône (Codetras). En clair, les exploitations agricoles provençales qui ont bénéficié des services de Laboral Terra doivent aussi payer.

Nouvelle victoire judiciaire en juin 2022, au pénal cette fois-ci. Les gérants de Laboral Terra sont alors condamnés par le tribunal correctionnel d’Avignon pour « travail dissimulé » à cinq ans de prison dont deux ferme, 10 000 euros d’amende et se voient interdire d’exercer une activité en lien avec les infractions constatées de travail dissimulé et d’aide au séjour de travailleurs étrangers irréguliers.

Problème : les quatre ex-travailleurs agricoles n’ont pas assisté à ce procès pénal, « faute d’avoir été prévenus », selon leur avocat. Ils n’ont donc pas pu se constituer parties civiles. Les demandes des parties civiles ont finalement été prises en compte lors d’une audience le 24 mai 2023. « Ce sont des victimes qui ont été oubliées », plaide ce jour-là l’avocate Fatma Ferchichi, rappelant que l’enquête pénale a démarré après les plaintes de deux de ces salariés. L’avocate réclame alors 30 000 euros pour chaque travailleuse et travailleur détaché à Laboral Terra.

Le 26 septembre dernier, le tribunal correctionnel d’Avignon a donc suivi les demandes de l’avocate. Les quatre travailleurs détachés dont Yasmina Tellal ont officiellement été reconnus victimes par la justice de « travail dissimulé ». « À la différence du jugement en prud’hommes, le tribunal a jugé que le détachement était illégal précise Yasmina. Le pénal nous a donné raison sur tout ! »

« Ils veulent gagner du temps pour ne pas payer »

« On a gagné une bataille mais pas la guerre, tient à souligner Yasmina. On a gagné sur le papier, mais on n’a pas touché d’argent. » Depuis le jugement aux prud’hommes de 2020, elle et les autres travailleurs détachés n’ont pas perçu le moindre euro. Un an auparavant, en 2019, l’entreprise espagnole s’est déclarée en faillite. Dans ces conditions, c’est normalement la caisse de garantie de salaires (AGS internationale) qui doit prendre le relais [2].

Or, depuis trois ans, l’AGS transnationale rechigne à se substituer au liquidateur de Laboral Terra pour effectuer le versement des sommes dues. « L’AGS nous pose des difficultés pour payer en disant qu’en face le mandataire n’a pas donné le détail des cotisations et nous renvoie en Espagne », se désole l’avocat des travailleuses et travailleurs détachés dans les colonnes de La Marseillaise. La Mutualité sociale agricole attend elle aussi de recouvrer les impayés de cette fraude aux cotisations sociales, soit 3,8 millions d’euros.

« On attend une décision des prud’hommes le 14 novembre pour savoir si l’AGS transnationale va être condamnée à payer », observe Yasmina. Laboral Terra a par ailleurs fait appel de la décision au pénal du 26 septembre. « L’affaire sera étudiée au tribunal de Nîmes, mais on ne connaît pas encore la date. Ils veulent gagner du temps pour ne pas payer », redoute Yasmina.

Elle ne désarme pas et a même fait appel de la décision des prud’hommes de 2020, qui considère le travail détaché comme légal. « On veut que le travail détaché soit reconnu comme illégal. Le pénal nous a donné raison là dessus. La logique voudrait que les prud’hommes nous donnent raison sur cet aspect », précise-t-elle.

L’audience se tiendra le 15 janvier 2024 à Aix-en-Provence. « Ce qui me fait tenir, c’est la rage. Il faut en finir avec les harcèlements des femmes. Et il y a encore en Europe des femmes exploitées sexuellement, menacées de devoir donner leur corps si elles veulent poursuivre leur contrat de travail. »

Sophie Chapelle 8 novembre 2023

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01 octobre 2023 ~ 0 Commentaire

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Défense de l’hôpital de Carhaix : plus de 1 000 manifestants en colère à Quimper

Plus de 1 000 manifestants se sont rassemblés, samedi 30 septembre, devant la préfecture de Quimper, afin de réclamer la réouverture 24 h/24 des urgences de l’hôpital de Carhaix. D’autres rassemblements sont à prévoir ces prochaines semaines.

« Il s’agit maintenant de taper tous ensemble et en même temps sur le même clou, pour gagner notre juste combat », affirmait Matthieu Guillemot, le porte-parole du comité de vigilance de l’hôpital de Carhaix, quelques heures avant leur troisième journée de mobilisation, samedi 30 septembre, devant la préfecture du Finistère. Et son message a été entendu.

Si les deux premiers rassemblements, les jeudis 7 et 14 septembre, avaient réuni entre 100 et 200 manifestants, le troisième fut le bon. Au total, ce sont plus de 1 000 personnes qui ont débarqué au sein de la capitale de Cornouaille, vers 11 h.

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(Le Télégramme/Benjamin Pontis)

Une manifestation statique qui s’est déroulée à l’angle de la rue du Parc et du pont Sainte-Catherine, l’autre côté des quais, longeant les murs de la préfecture, ayant été totalement coupée à la circulation par les policiers quimpérois et une compagnie de CRS venue de Mayenne.

 dans Austérité
(Le Télégramme/Benjamin Pontis)

« Carhaix, Carhaix, Résistance »

Au sein du cortège, on retrouvait des élus finistériens ainsi que de nombreux syndicats et partis politiques comme le NPA qui a accueilli dans ses rangs, samedi, leur porte-parole national, Philippe Poutou.

 dans Quimper et pays glazik
(Le Télégramme/Benjamin Pontis)

Au son des « Carhaix, Carhaix, Résistance », le millier de manifestants avait un message plutôt simple à faire passer, samedi, à Quimper. Ce message ? La réouverture 24 h/24 du service des urgences de l’hôpital de Carhaix qui, depuis le 4 septembre, est fermé entre 18 h 30 et 8 h 30. La raison ? Selon l’Agence régionale de santé (ARS) et la direction de l’hôpital carhaisien, cette décision a été prise en raison du manque de médecins urgentistes.

Samedi, la manifestation devant la préfecture du Finistère s’est déroulée principalement dans une ambiance bon enfant avec un espace buvette et restauration installée au début de la rue du Roi-Gradlon.

Toutefois, aux alentours de 12 h, de légères tensions se sont fait sentir entre les manifestants eux-mêmes, concernant un feu de pneus et d’une poubelle en plein cœur du rassemblement, contraignant la foule à se disperser sur les bords de l’Odet en raison d’épais nuages de fumée et d’une forte chaleur.

Des fumigènes et du gaz lacrymogène

Autre ombre au tableau du rassemblement : un moment de vive tension, vers 13 h 30, lorsque les forces de l’ordre ont demandé aux manifestants de quitter les lieux. Un message qui a énervé une partie des manifestants qui ont alors commencé à jeter des pétards et des fumigènes sur plusieurs CRS stationnés sur le pont Sainte-Catherine. Des jets qui ont provoqué une riposte des forces de l’ordre avec une charge et l’usage de gaz lacrymogène pour tenter d’interpeller un manifestant. En vain.

Puis, un peu après 14 h, une délégation composée d’une dizaine de personnes, dont le maire de Carhaix, Christian Troadec, a rejoint le groupe des manifestants après plus de deux heures d’échanges avec le préfet du Finistère Alain Espinasse, en poste à Quimper depuis août. Mais « nous n’avons rien obtenu », ont-ils déclaré, affirmant qu’ils n’allaient absolument pas abdiquer afin de sauver l’hôpital de Carhaix avant de quitter les lieux aux alentours de 15 h 30. De prochains rassemblements sont donc à prévoir.

 30 septembre 2023
https://www.letelegramme.fr/

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