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24 juillet 2015 ~ 0 Commentaire

mythes et mensonges sur hiroshima et nagasaki (lcr.be)

enolagay

Différentes thèses s’affrontent pour expliquer les motivations réelles du bombar- dement atomique d’Hiroshima et de Nagasaki (les 6 et 9 août 1945) par les États-Unis, les amenant ainsi à commettre un crime contre l’Humanité.(…)

La thèse officielle, celle que tous les enfants étasuniens apprennent par coeur à l’école et qui, dernièrement encore, a été réaffirmée par le Sénat des États-Unis, explique que l’usage de la bombe atomique en 1945 a permis de précipiter la fin d’une guerre sang- lante, de perdre moins d’argent et d’épargner des milliers de vies humaines. Le président Truman, qui prit la décision finale, affirma que son geste avait sauvé la vie de près de 250. 000 « boys ». Après la guerre, dans ses « Mémoires », ce chiffre monta à 500.000 (1). D’autres ont été jusqu’à avancer des chiffres de l’ordre de 1… à 3 millions de vies épargnées !

Selon les tenants de cette thèse, au cas où les troupes U.S auraient débarqué au Japon, les soldats nippons, fanatiques et partisans d’une guerre à outrance, auraient opposé une résistance suicidaire et jusqu’au-boutiste. De plus, les soldats japonais auraient été épaulés par des millions de civils tout autant fanatisés. (…)

Face à cette série de dogmes officiels, plusieurs historiens ont osé les démonter pièce par pièce. Le premier d’entre eux, Gar Alperovitz, politologue étasunien, soutient depuis 1965 que son pays a fait usage de la bombe pour faire peur à Staline, dont les «visées expansion-nistes» menaçaient les intérêts (grandissants) des États-Unis dans le Sud-est asiatique et en Europe.

500.000…1.000.000 ? L’argument des 500.000 (ou plus) vies épargnées ne tient absolument pas debout. Un rapport des stratèges militaires américains prévoyant le coût humain d’une invasion du japon (prévue pour le 1er septembre 45) contient de tout autres chiffres. Rédigé par le Chef d’ Etat-Major, le général Marshall, et daté du 18 juin 1945, il estime avec précision les pertes américaines à… 46.000 hommes au maximum. (4). Ce rapport, qui n’a seulement été rendu public qu’en 1985, était adressé au président Truman, celui-ci a donc sciemment menti.

Les chiffres fantaisistes du président et consorts reposaient sur l’argument que les Japonais, civils et militaires, se battraient jusqu’à la mort. Or, pour ce qui est des soldats, ce fanatisme, réel à une certaine époque du conflit, commençait à se fissurer. Alors que durant les batailles précédentes les soldats japonais se faisaient tuer sur place plutôt que de se rendre, lors de l’importante bataille d’Okinawa au mois de juin 1945, plus de 7.000 d’entre eux se sont constitué prisonniers. Du jamais vu. (…)

Quant aux civils, l’argument est tout simplement absurde : le peuple japonais était totalement à bout après presque 13 années de guerre (d’abord avec la Chine, puis avec les Alliés) : privations, misère, faim, souffrance et mort sous les tapis de bombes largués par les bombardiers américains (plus de 21 millions de Japonais ont été d’une façon ou d’une autre touchés par ces bombardements massifs), etc. Un tel peuple n’aspirait plus qu’à la paix et l’on peut difficilement se l’imaginer fonçant droit vers des chars étasuniens avec des « pieux en bois » (5).

La Bombe et le sacrifice d’Hiroshima et de Nagasaki ont-ils au moins permis de préci- piter la fin de la guerre (d’au moins un an nous dit-on) en démontrant le potentiel destructif des États-Unis ? Rien de plus faux. Le Japon avait déjà virtuellement perdu la guerre car il était tout bonnement matériellement incapable de la poursuivre. Le potentiel militaire nippon était pratiquement détruit : 90% des bâtiments de la marine de guerre et de la flotte marchan- de reposait au fond l’océan, ce qui, pour une île dépourvue de ressources et de matières premières stratégiques indispensable à l’industrie de guerre, comme le pétrole par exemple, équivalait à une agonie rapide. (…)

Enfin, « La défense anti-aérienne s’était totalement effondrée » (6), ce qui explique la facilité avec laquelle des impressionnantes escadres de bombardiers US pénétraient dans le ciel nippon. Ces bombardements terroristes, aveugles et coûteux en vies humaines – c’était leur but ; celui de Tokyo du 9 mars 1945 a ainsi fait plus de 125.000 morts, soit plus de victimes directes qu’à Hiroshima ! – avaient complètement déstructuré les entreprises et la machine de guerre japonaise. Tokyo était rasée à 50%, Yokohama, le principal port du pays, à 85%, Kobe à 56%.(…) Imaginer dans ces conditions que le Japon pouvait encore soutenir le conflit pendant une année ou plus relève donc de la pure fantaisie.

Une bombe sans poids (…) Dès le mois d’avril 1945 en effet, l’Empereur était persuadé qu’il fallait négocier et conclure la paix au plus vite. Durant le mois de mai, une tentative de contact entre Japonais et Américains avait eu lieu via les diplomates nippons en poste à Berne. Vu l’échec de ces démarches, la diplomatie japonaise privilégiera ensuite des négociations détournées via Moscou.(…)

Mais les Japonais mettaient tous leurs espoirs de paix sur les Russes sans se douter qu’à la Conférence inter-alliés de Yalta, Moscou avait promis aux Alliés occidentaux de décla- rer la guerre au Japon six mois après la défaite nazie en Europe. (…)

Les autorités étasuniennes savaient parfaitement tout cela. Un rapport secret des services spéciaux américains (découvert en 1988) qui relate les discussions au sein du pouvoir nippon, nous apprend que « les recherches montrent que [au sein du cabinet japonais] il fut peu question de l’usage de la bombe atomique par les États-Unis lors des discussions menant à la décision d’arrêter les combats. [sans l’usage de la bombe], les Japonais auraient capitulés après l’entrée en guerre de l’URSS » (9).(…)

Mais le 10 août, lorsque les Japonais offrent officiellement leur reddition tout en demandant que Hiro-Hito et la monarchie soient maintenues, les États-Unis accepteront sans sourciller cette demande. On peut donc se demander pourquoi il ne l’ont pas men- tionné 15 jours plus tôt, ce qui leur aurait permis d’éviter d’utiliser la Bombe et de sacrifier inutilement des centaines de milliers vies humaines.

La réponse est évidente, Truman et Cie savaient pertinemment que les Japonais refu- seraient l’ultimatum de Potsdam et qu’ils auraient là l’occasion et la justification « morale » d’employer la bombe atomique. En vérité, comme on le verra plus loin, la plus grande crainte de Truman à cette époque n’était pas d’employer la bombe atomique, mais bien tout au contraire de ne pas avoir le temps ni l’occasion de le faire !

Il faut par ailleurs connaître certaines de ses déclarations pour se faire une idée du personnage tel qu’il fut, loin de cette fable d’un « homme torturé par une décision difficile qui lui a coûté ». Lorsqu’il apprit le succès du bombardement d’Hiroshima, Truman déclara joyeusement à ses proches: «Les gars, on leur à balancé un concombre de 20.000 tonnes sur la gueule! » (10). On est loin ici de la phrase « historique », grave et pesée que l’on pourrait attendre d’un homme sensé qui a pris un décision aussi terrible pour l’humanité. Peu de temps après, à un journaliste qui lui demande « Quel a été votre plus grand remord dans votre vie? », Truman répondra : « Ne pas m’être marié plus tôt »! (11) On voit là combien lui aura « coûté » son choix.

Pour conclure… Quelles furent donc les véritables raisons qui motivèrent Truman et sa clique? Plusieurs facteurs entrent en compte (12) et la thèse d’Alperovitz en apporte plu- sieurs. Mais elle est insuffisante quant à sa conclusion. Pour Alperovitz, les Étasuniens jugeaient que les rapports de forces, à l’heure d’un nouveau partage impérialiste du monde, étaient par trop favorables à l’URSS et qu’il fallait stopper « l’expansionnisme » soviétique.

La possession (et la démonstration pratique) d’une arme de destruction sans équivalent était donc un atout important aux mains des États-Unis non pas pour terminer la Seconde guerre mondiale mais bien pour entrer de plein pieds dans ce qui allait devenir la Guerre froide en menant une politique de «refoulement» de «l’expansionnisme rouge». C’est effec- tivement à la conférence de Potsdam que les Étasuniens vont commencer à modifier sen- siblement leur ligne de conduite par rapport à l’«Oncle Joe» comme la presse américaine appelait Staline. Et c’est justement à ce moment que Truman — qui sait depuis peu que la bombe atomique est opérationnelle — en rédigeant un ultimatum inacceptable pour les Japonais, décidait d’employer la bombe comme un atout stratégique majeur face à Moscou.

Mais l’explication donnée par Alperovitz d’une réaction motivée par «l’ expansionnisme soviétique» est plus qu’à nuancer car elle sous-entend une volonté de la part des Sovié- tiques de dominer et d’envahir la planète. Ce qui, lorsque l’on connaît la pratique et la nature du régime stalinien, est entièrement faux. La bureaucratie soviétique se contentait en fait de créer un glacis stratégique protecteur autour de ses frontières et sabotait par contre toute possibilité révolutionnaire en dehors de ce glacis stratégique géographiquement circonscrit – au sein duquel d’ailleurs il s’agissait avant tout de modifier les régimes sociaux et politique de manière bureaucratique, et non par le biais d’authentiques révolutions.

A la fin de la guerre, les Partis communistes staliniens, aux ordres de Moscou, ont ainsi, en France, en Italie et dans plusieurs pays coloniaux, étouffés les germes ou la mar- che en avant de la révolution. Rappelons également que Staline s’opposa avec véhémence à la révolution chinoise de Mao.(…) Le véritable expansionnisme était étasunien et non soviétique. La bombe atomique (et son usage sur Hiroshima et Nagasaki) était une arme politique, c’était une arme au service de l’impérialisme étasunien afin de s’assurer le statut d’une superpuissance mondiale sans partage. Par Ataulfo Riera

Article publié dans La Gauche en août 2000

http://www.gauchemip.org/spip.php?article3827

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22 juillet 2015 ~ 0 Commentaire

la remilitarisation du japon (essf)

japon pacif
*

Le Premier ministre japonais veut imposer une nouvelle loi militariste face à une opposition pacifiste massive.

Depuis des années, la droite nippone tente de faire accepter à la population une rupture radi- cale avec ses convictions pacifistes, forgées par la prise de conscience du désastre que représenta la période 1937-1945.

Tout est bon pour cette entreprise : dramatisation de la montée des tensions géopo- litiques dans la région ; déclarations négationnistes visant à banaliser les crimes commis sous le régime impérial, exaltation du nationalisme de puissance et recours aux sectes ou association telles la puissante Nihon Kaigi ; intervention sur les programmes scolaires en histoire, manipulation des symboles, rupture du tabou concernant l’arme nucléaire ; « réinter- prétation » de l’article 9 de la Constitution de 1947 renonçant à la guerre…

Bien qu’elles n’aient cessé de renforcer leur capacité, le rôle des Forces d’Autodéfense (FAD, le nom officiel de l’armée) est resté très délimité, centré sur l’Archipel. Les premières interventions extérieures ne remontent qu’à 1992, dans le cadre onusien et en dehors des zones de combat, dépendant à chaque fois d’une décision parlementaire. En juillet 2014, la « réinterprétation » de l’article 9 avait permis à Shinzo Abe, Premier ministre japonais, de donner au Japon le droit de participer à des systèmes de défense collective. Il a maintenant décidé de franchir un pas décisif en faisant adopter une nouvelle loi permettant aux FAD d’être déployées à l’étranger pour peu que « la survie du Japon soit menacée ». Ladite « survie » pouvant être « menacée » de bien des façons (approvisionnement énergétique, etc.), il s’agit en fait d’un blanc sein.

Shinzo Abe peut s’appuyer sur Washington, qui souhaite que Tokyo joue un rôle plus actif en ce domaine, et sur les majorités parlementaires. Il a obtenu le 16 juillet un premier vote favorable à la Chambre basse. Les textes doivent maintenant passer devant la Chambre haute. L’objectif est d’obtenir une adoption définitive à marche forcée, dès septembre.

Ce que le Premier ministre n’avait pas prévu, c’est l’ampleur de l’opposition pacifiste qui allait se manifester dans le pays, malgré des années de propagande militariste. Des dizai- nes de milliers de personnes ont manifesté contre le projet de loi, entourant notamment le Parlement le 16 juillet aux cris de «Abe démission», «Non à la guerre». La très grande majo- rité des juristes ont souligné qu’il était inconstitutionnel, contredisant l’article 9. De nombreux universitaires et intellectuels se mobilisent. Seuls 18 % des Japonais approuvent le projet, selon un sondage de la chaîne de télévision publique NHK en date du 12 juillet, et la cote de popularité de Shinzo Abe est tombée à 41 %.

L’offensive du gouvernement Abe ne se limite pas au seul rôle des FAD. Il veut impo- ser dans l’île méridionale d’Okinawa un redéploiement d’une base militaire états-unienne, mais il n’a toujours pas réussi à briser la résistance de la population et des élus locaux. Il introduit de lois sécuritaires (onze textes de plus ont été adoptés le 16 juillet) qui visent no- tamment à interdire de façon discrétionnaire, au nom de la sécurité nationale, la publication d’information qui mettrait en cause le système, y compris l’industrie nucléaire. Militarisme extérieur, autoritarisme intérieur, restriction des libertés civiques, reconstruction d’une histoire officielle et d’une idéologie nationaliste forment un tout.

Pierre Rousset 20 juillet 2015

http://www.europe-solidaire.org/spip.php?article35477

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03 juillet 2015 ~ 0 Commentaire

business et colonialisme (ccr)

tintin hollande

Hollande en tournée en Afrique : affairisme, combine militaire, et soutien aux pires dictateurs

Deux jours pour trois pays : le Bénin, l’Angola et le Cameroun. Entouré d’une armada de petits et grands patrons, Hollande va-t-en-guerre vient régler les comptes après avoir imposé la puissance impérialiste française sur le continent. L’intervention en Centrafrique, l’opération Serval puis Barkhane au Mali, ont permis de renforcer l’impérialisme français dans la région qui comptait déjà plusieurs milliers de soldats français dans des bases militaires installées en permanence. Tandis que la course aux parts de marché africain bat son plein, en dispute avec les émergents – et notamment la Chine –, la nouvelle position acquise de la France comme «gendarme» africain devrait faciliter les affaires. Après la bataille, l’heure est au butin.

Bénin : adouber le nouveau premier ministre et préparer la suite

Depuis Mitterrand aucun président ne s’était rendu au Bénin. Hollande, lui, fait le grand retour de la France dans le pays, en s’improvisant représentant de la démocratie qu’il est venu défendre dans un long discours. Un discours qui prête à rire quand personne n’ignore, et encore moins les journalistes béninois, la réelle raison de sa venue. (…)

Angola : sceller des contrats en dehors du pré-carré français

Un discours sur les valeurs du pluralisme politique d’autant plus risible qu’Hollande s’apprête à poursuivre sa visite chez le très démocratique José Eduardo Dos Santos, 72 ans dont 35 au pouvoir. L’Angola n’appartient pas au pré-carré colonial de la France, mais le pays dont les taux de croissance annuel dépassent les 8% est riche de son sous-sol : deuxième producteur de pétrole du continent, il regorge également de diamants. Et les ambassadeurs du capitalisme française, du raffineur Total au cimentier Lafarge, aux côtés de Hollande comptent bien rafler la mise des juteux contrats qu’a promis le président angolais : 10 milliards d’investissements dans les logements, 15 dans l’électricité, qui seront vigoureusement négociés lors d’un forum économique organisé sur place pour l’occasion.

Au diable, les injonctions démocratiques de la veille, « business is business » ! et voilà comment les belles paroles de la veille sont aussitôt dissipées. Car comme l’a bien fait remarquer Hubert Védrine, ancien chef de la diplomatie française, l’idée est bien de doper la croissance française en berne en allant chercher ailleurs, et notamment sur le continent africain, de nouvelles parts de marché. (..)

Cameroun : remercier le fidèle Biya, adjudant de la lutte contre le terrorisme

C’est la visite à Paul Biya dirigeant du Cameroun depuis plus de trente ans qui indispose le plus le chef d’État français. Forcé de remercier la coopération du Cameroun dans les opérations de libération des otages de Boko Haram, la position d’un Biya qui souhaite se reconduire à son poste en 2018 rend difficile la démarche. Non pas que le président français soit particulièrement mal à l’aise par la franche et notable usurpation du pouvoir de Paul Biya, mais ce dernier attend en retour de cette collaboration un soutien renouvelé à son pouvoir au Cameroun. Or, la stabilité de Biya n’est qu’une façade et une reconduite de sa candidature pour 2018 pourrait bien faire sortir la contestation dans les rues, situation qui indisposerait fortement le positionnement stratégique français sur le continent. (…)

 Résumé: Publié le 2 juillet 2015 Nina Kirmizi

http://www.revolutionpermanente.fr/Hollande-en-tournee-en-Afrique-affairisme-combine-militaire-et-soutien-aux-pires-dictateurs

Article ressemblant:

http://www.courrierinternational.com/article/france-hollande-en-afrique-adieu-les-principes-vive-la-realpolitik

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03 juillet 2015 ~ 0 Commentaire

alexandre koltchenko: compte-rendu de la manifestation parisienne du 30 juin (confusionnisme)

koltvchenko

Nous étions hier soir à Paris une quarantaine de personnes, dont un bon nombre d’Ukrainiens, de Russes et de Tchétchènes, à manifester notre soutien à Alexandre Koltchenko, Oleg Sentsov et l’ensemble des prisonniers politiques actuellement détenus en Russie, dans une ambiance international(ist)e et bon enfant.

Même si nous étions peu nombreux, l’importance de ce soutien pour les militants qui luttent en Ukraine et en Russie pour les droits de l’Homme et contre le fascisme a été soulignée. Parmi les organisations présentes, on a pu remarquer Alternative libertaire, Solidaires, la CNT, Critique sociale, Russie Libertés et Ukraine Action. Une caisse de soutien en faveur de l’Anarchist Black Cross de Moscou, qui vient en aide aux prisonniers, a également circulé.

Le même jour, une belle action s’est tenue à Strasbourg : pendant trois heures ce matin, le standard du consulat de Russie a été assailli d’appels demandant la libération des deux activistes ukrainiens, tandis qu’à Moulins, le collectif de soutien a tenu une conférence de presse dans les locaux du journal La Montagne.

Alexandre Koltchenko a été transféré la semaine dernière de Moscou à Rostov-sur-le-Don, en vue de son procès qui doit commencer mi-juillet et durer une dizaine de jours. Capturé en Crimée par le FSB (les services secrets russes) au moment des événe- ments qui ont conduit à l’annexion de la péninsule par la Russie, le militant antifasciste risque jusqu’à vingt ans de prison pour « attentat » et « participation à des organisations terroristes ». D’autres actions sont prévues dans les jours qui viennent partout en France et en Europe pour le soutenir, lui et ses camarades.

Il est à noter qu’à Paris, un petit groupe de personnes a été renvoyé de la manifes- tation car l’une d’elles arborait le drapeau de l’UPA, une organisation nationaliste de résis- tance au nazisme et à l’Union soviétique qui n’en a pas moins pratiqué la purification ethni- que pendant la seconde guerre mondiale. Ce drapeau, composé de deux bandes horizon- tales rouges et noires, a été depuis repris par la formation d’extrême droite Pravyi Sektor. Il va sans dire que les soutiens d’Alexandre Koltchenko ne peuvent tolérer de tels symboles, qui ne peuvent que servir les velléités des autorités russes qui cherchent à faire passer Alexandre Koltechenko pour un fasciste et qui sont ceux de groupes qui en Ukraine s’en prennent violemment à leurs opposants1. C’est aussi ce qui a été réaffirmé lors de ce rassemblement.

1 juillet 2015 Ornella Guyet

Pour s’informer de l’évolution de la situation d’Alexandre Koltchenko et de ses camarades, nous vous conseillons les sites suivants :

Avtonom, un site antifasciste russe multilingue, qui contient aussi des pages en français et en anglais ;

Le site d’Alternative libertaire, qui recense les manifestations de soutien en France ;

– Une pétition peut également être signée et des dons effectués pour aider à la défense d’Alexandre Koltchenko sur ce site.

S’agissant de la Tchétchénie, vous pouvez également consulter ce site, qui rend compte de l’actualité culturelle et politique de cette région.

http://confusionnisme.info/2015/07/01/alexandre-koltchenko-compte-rendu-de-la-manifestation-parisienne-du-30-juin/

A (re)lire sur Confusionnisme.info :

Ukraine : le mouvement antifasciste européen dans la tourmente ?
Petit tour d’horizon des médias pro-Kremlin
Négationnisme en Ukraine et réactions des propagandistes pro-russes : une belle leçon d’opportunisme
Colloque pro-Poutine demain à Paris : du beau linge en perspective

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30 juin 2015 ~ 0 Commentaire

en parlant de ‘guerre de civilisation’, valls donne raison aux terroristes (jdd + rue 89)

civilisation

D’où vient le mot « civilisation », employé par Manuel Valls dimanche?
Le terme « civilisation » apparaît pour la première fois durant le 18e siècle, désignant la conception du monde portée notamment par les Lumières françaises. C’est un terme qui définit ce que prétendent être les Lumières, voulant donner aux valeurs de l’Europe occi- dentale une portée universelle. Au cours du 19e siècle, le terme connaît un grand succès, notamment dans le discours civilisationnel et civilisateur de l’Occident colonisateur, qui se positionne par ce terme au-dessus du reste du monde. En France, on peut trouver de nombreux emplois de cette notion chez les politiciens de la IIIe République, comme Jules Ferry, lequel encourageait à apporter la civilisation au continent africain. Au cours du 19e siècle, le terme de civilisation est régulièrement associé aux théories racialistes et à la défense de l’héritage chrétien en Europe.

«Le terme ‘civilisation’ stigmatise l’autre comme étant inférieur, non civilisé.»

Qu’est-ce que cela implique d’utiliser ce terme?
Ce qui pose problème, c’est que le terme « civilisation » n’est pas un concept scientifique. Il ne décrit pas une réalité. Il impose une vision du monde hiérarchisante et discriminante. La plupart des anthropologues ont d’ailleurs cessé de l’utiliser depuis la seconde guerre mon- diale, lui préférant celui de société ou de culture. C’est une notion qui ne devrait plus être utilisée dans le débat public, car elle n’explique rien. Ce terme a une apparence d’évidence, alors que si on analyse ses usages, on se rend compte que ce mot ne définit pas précisé- ment un phénomène historique ou culturel. Cette notion désigne le point de vue de celui qui parle, elle stigmatise l’autre comme étant inférieur, non civilisé. Ce terme désigne l’autre comme le méchant, le barbare. Utiliser ce terme aujourd’hui témoigne d’une vision du monde scientifiquement dépassée, désormais absurde, et politiquement extrêmement problématique.

Quel a été son trajet en politique française?
Le discours sur la Civilisation, qui en France s’appuie sur l’aura de l’historien Fernand Braudel, a été reprise notamment par Nicolas Sarkozy depuis plusieurs années. Dans le discours de Dakar qu’écrivit Henri Guaino en 2007, Nicolas Sarkozy déclare que « l’homme africain est entré dans l’histoire et dans le monde, mais pas assez », invoquant les écrits de Braudel pour justifier ce propos (Un an après, Henri Guaino persiste et signe dans Le Monde : « Cela ne veut pas dire que dans toutes les autres formes de civilisation, il n’y a pas eu des progrès, des inventions cumulatives. Mais l’idéologie du progrès telle que nous la connaissons est propre à l’héritage des Lumières », affirme-t-il en 2008, Ndlr). On voit bien que ce terme ne décrit en rien la réalité historique vécue par les populations africaines, il ne fait que  véhiculer un certain nombre de conceptions proprement occidentales, qui sont ethnocentriques et imprégnées par l’idéologie colonialiste.

«Valls ignore la géopolitique du monde.»

En reprenant ce discours civilisationnel à son compte aujourd’hui, Valls se calque sur Sarkozy, selon une stratégie qu’il déploie depuis plusieurs années, contribuant au glissement idéologique de l’ensemble de la société vers des conceptions qui n’étaient défendues que par l’extrême droite jusqu’à il y a une dizaine d’années. La gauche a critiqué Nicolas Sarkozy pour l’emploi de ce terme, et cela est nécessaire, car il est très grave que des dirigeants politiques expriment ce type de fantasmes sur le réel, agressant ainsi le reste du monde.

Manuel Valls en fait donc un marqueur politique…
Certainement. Résumer ce conflit à la guerre entre civilisés et barbares, comme le fait Valls aujourd’hui, c’est ignorer la géopolitique du monde. De la part d’un dirigeant politique, et à notre époque, c’est grave. Du temps où Bush utilisait ce terme, la France faisait partie de la levée de boucliers face à cette utilisation. Manuel Valls choisit désormais un camp que la diplomatie française s’était toujours refusée à rallier. Elle s’appuie sur le pragmatisme, la compréhension de la géopolitique qui régit les conflits à travers le monde. Aujourd’hui, en disant cela, Manuel Valls donne raison aux terroristes. Ils tiennent déjà ce discours civili- sationnel, en affirmant que l’Occident est une civilisation à combattre. L’emploi de ce terme signifie que le Premier adopte la même grille de lecture binaire du conflit qu’eux.

Certes, Valls tente de rattraper la chose en affirmant que ce n’est pas une guerre de l’Orient contre l’Occident (au sens où Samuel Huntington l’entend dans son « choc des civilisations », Ndlr) mais une guerre de la civilisation contre la barbarie. Mais comment définir la barbarie? Sont-ce ceux qui font usage de la violence? Dans ce cas, rappelons que la France elle- même est en guerre dans plusieurs pays! Séparer barbares et civilisés est plus qu’arbitraire, c’est impossible, et dangereux. Se poser comme « civilisé’ est une autoproclamation que personne ne peut vérifier.

Alix Hardy – leJDD.fr lundi 29 juin 2015

Dimanche, Manuel Valls qualifiait la réponse française au terrorisme de « guerre de civilisation » contre les « barbares ». Des termes qui ont fait bondir la gauche et applaudir la droite, coutumière de leur emploi. Blaise Dufal, historien à l’EHESS, revient pour leJDD.fr sur l’emploi du terme « civilisation » et ses implications.

http://www.lejdd.fr/Politique/En-parlant-de-guerre-de-civilisation-Manuel-Valls-donne-raison-aux-terroristes-740112

Lire aussi:

http://rue89.nouvelobs.com/2015/06/29/valls-guerre-civilisation-transgression-dangereuse-mots-260004

http://www.revolutionpermanente.fr/Guerre-de-civilisations-Mais-quelle-civilisation

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25 juin 2015 ~ 0 Commentaire

ils et elles s’engagent pour koltchenko (al)

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Photo: Zona Media

Syndicalistes, artistes, féministes, militantes et militants des droits de l’homme…

Des dizaines de personnalités soutiennent la demande de libération de notre camarade Alexandr Koltchenko, persécuté par les sbires du Kremlin.

LIBERTÉ POUR ALEXANDR KOLTCHENKO,
ANTIFASCISTE DE CRIMÉE,
KIDNAPPÉ ET EMPRISONNÉ PAR L’ÉTAT RUSSE !

Depuis plusieurs années, A. Koltchenko est connu en Crimée pour ses engagements anti- fascistes, syndicaux, anarchistes, écologistes. Ayant diffusé un film sur l’assassinat de la journaliste indépendante criméenne Anastasia Baburova, à Moscou en 2009, il avait déjà été attaqué au couteau par une bande fasciste. Il a poursuivi ses activités militantes en faveur des droits humains et a ainsi participé, dans le camp clairement antifasciste, aux manifes- tations de la place Maïdan qui ont abouti à chasser le président ukrainien Ianoukovytch, dont le clan pillait les richesses et exploitait la population de ce pays.

Lors de l’intervention militaire russe en Crimée, Alexandr Koltchenko a organisé des manifestations pacifiques de protestation contre l’occupation militaire, qui a faussé le réfé- rendum, aux côtés de citoyens et citoyennes tatar-es, ukrainien-nes ou russes. Quelques jours avant une de ces manifestations, la police politique russe (FSB) a enlevé plusieurs des organisateurs de ces résistances populaires ; ce fut le cas d’A. Koltchenko, le 16 mai 2014.

Avec trois autres personnes ainsi kidnappées, il a été accusé notamment «d’organi- sation d’un groupe terroriste lié à l’extrême-droite ukrainienne». S’en suit une litanie d’accu- sations délirantes: Koltchenko est accusé d’avoir planifié des explosions près de la statue de Lénine à Simféropol les 8 et 9 mai, saboté des voies ferrées et des lignes électriques, tenté d’incendier les locaux de l’Unité Russe et de la Communauté russe de Crimée le 14 avril, et ceux de Russie Unie le 18 avril ! Alexandr Koltchenko est un antifasciste que la police politique tente de faire passer pour un fasciste.

Alexandr Koltchenko est un homme qui se considère comme citoyen ukrainien et que la police politique russe veut juger en tant que russe. Il est enfermé dans des conditions draconiennes, ses avocats sont privés des droits élémentaires d’une défense digne de ce nom, et il est sous la menace de 15 à 20 ans de camp de travail.

  • A. Koltchenko est étudiant et militant syndical ; il travaillait aussi comme postier, en parallèle de ses études. Il défend activement, par sa pratique, le droit de s’organiser librement, le droit de créer et faire vivre des organisations associatives, syndicales, écologistes ou politiques.
  • Il fait partie des hommes et des femmes qui luttent contre l’extrême droite, qu’elle soit ukrainienne, russe ou autre.
  • Parce qu’il lutte contre la corruption et pour l’égalité des droits entre tous et toutes, A. Koltchenko, est la cible des clans oligarchiques, en Russie, en Ukraine.
  • A. Koltchenko milite pour le droit de chaque peuple à décider de son avenir.

La situation d’A. Koltchenko est emblématique de la répression exercée dans cette région du monde. Mais son cas est loin d’être le seul. A travers A. Koltchenko, ce sont les libertés démocratiques de tous et toutes que nous défendons. Notre démarche, comme celle d’A. Koltchenko, s’oppose donc à celles et ceux qui veulent restreindre ces libertés. Nous exigeons également la libération du cinéaste ukrainien Oleg Sentsov, détenu sous les mêmes accusations et risquant une peine semblable.

Pour la libération immédiate d’Alexandr Koltchenko, d’Oleg Sentsov et pour les libertés démocratiques dans tous les pays, nous appelons à amplifier la solidarité internationale afin de dénoncer leur enlèvement et leur détention par les autorités russes (qui comptent les juger début juillet), exiger leur libération immédiate, et pour que le gouvernement ukrainien revendique explicitement leur libération.

http://alternativelibertaire.org/?Ils-et-elles-s-engagent-pour

Voir les dates et lieux des rassemblements de soutien

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24 juin 2015 ~ 0 Commentaire

ukraine: dire la vérité sur la guerre du donbass (essf)

usa rusia

Hanna Perekhoda: As-tu été surpris que la guerre ait commencé justement dans le Donbass ?

Serhiy Jadan Les armes auraient pu commencer à parler à Odessa, à Kharkov, à Zapo- rozhié, mais elles ont commencé à parler dans le Donbass… J’étais à Donetsk, le 3 mai 2014, il y a un peu plus d’une année. Les séparatistes étaient dans les rues, établissaient des check-points. Et il s’est passé quelque chose de très bizarre : les bâtiments adminis- tratifs étaient déjà occupés ; les autorités autoproclamées de Louhansk étaient «protégées» par une poignée de tireurs cagoulés avec mitraillettes, et on ne voyait personne à part eux. A Donetsk, c’était la même chose: quelques types avec des kalachnikovs aux abords des bâtiments officiels. Pourtant, dans les villes, la vie semblait normale, les gens travaillaient, étudiaient, faisaient leurs courses, allaient au cinéma… Jusqu’au dernier moment, ils essa- yaient de montrer que tout cela ne les concernait pas, que ce n’était pas leur guerre. Je n’ai pas vu de mobilisation massive de la population en faveur des séparatistes ni de volonté de prendre les armes… C’est pourquoi je pense que cette guerre est artificielle, et que person- ne ne la veut dans le Donbass, sauf une poignée des fanatiques. Pour moi, les gens ont été trahis et poussés dans un piège, dont ils ne savent pas comment sortir.

En Europe, une partie de la gauche pense que Maïdan a été un mouvement d’extrê- me droite et que la véritable révolution se déroule dans le Donbass, où la population tente de se débarrasser de l’oligarchie et lutte contre l’impérialisme américain dont le gouvernement ukrainien serait une marionnette. Que penses-tu de ces discours ?

J’ai été déçu par la gauche occidentale, et pas seulement par elle. De façon générale, les militants de gauche réagissent d’une façon étrange par rapport à ces événements. Quand je parle de la gauche d’ici, je ne parle pas du Parti communiste de l’Ukraine (KPU), parce que c’est un parti au service des oligarques qui se cache derrière une rhétorique pseudo-sovié- tique. Je parle des nouveaux mouvements communistes, socialistes, anarchistes qui sont divisés. Une partie d’entre eux était sur le terrain, dans le mouvement de Maïdan. Chez nous, à Kharkov, les anarchistes ont occupé la rue avec les nationalistes. Bien sûr, ils ne s’ai- maient pas, mais ils faisaient le poing dans la poche, parce qu’ils comprenaient qu’ils avaient une cause commune à défendre. Pour moi, c’est ce qui montre qu’il s’est agi d’une authentique révolution.

Je connais bien ces discours portés par l’extrème-gauche selon lesquels Maïdan aurait été porté par l’extrême droite et financée par les USA, et que cette «révolution» n’aurait été qu’un épisode de la guerre Est-Ouest, l’Ukraine jouant juste le rôle de chair à canon. Mais, j’ai eu la possibilité d’observer cela de l’intérieur: j’ai été aux Maïdan de Donetsk, de Kharkov, de Louhansk, de Kirovograd, des villes de l’Ouest aussi, de Kiev évidemment. Qui a soutenu cette révolution, quel a été son moteur ? C’était une révolution démocratique typique, portée par la bourgeoise libérale, par les étudiants. En vérité, à Kiev, les « durs » ont commencé à donner le ton après coup […] Mais les affrontements violents ont été précédés par un mois et demi d’efforts de la société civile pour faire entendre ses revendications. Mais le pouvoir n’a rien voulu savoir.

Pourtant, on ne peut pas nier que le processus politique a pris ensuite un cours très conservateur, même s’il est absurde de le qualifier de fasciste…

Oui, dominé par le patriotisme et le nationalisme. Mais franchement, où sont les mouve- ments d’extrême droite en Ukraine? Ils sont toujours marginaux. Lors des dernières élections parlementaires, la droite dure a même perdu du terrain. Quels ont été les scores de Secteur Droite ou de Svoboda ? Nullissimes. On peut toujours montrer à la télé un gars en cagoule et dire qu’il représente la société ukrainienne. Par contre, si on examine les résultats des élections au parlement, ou les gens qui ont manifesté sur les places, on ne voit pas un grand enthousiasme pour l’ultranationalisme de Stepan Bandera (leader nationaliste durant l’entre-deux-guerres et la Seconde Guerre mondiale, NDT), ou pour le démontage des monuments de Lénine. Ces gens soutenaient la perspective de l’intégration européenne et de réformes économiques et sociales…

Certains disent que la révolution véritable a lieu dans le Donbass. Là-bas, les gens combattraient les oligarques et nationaliseraient les entreprises.

En effet, des séparatistes armés font passer le pillage pour des «nationalisations». Par exemple, ils ont pris l’habitude de «nationaliser» les supermarchés pour renouveler leurs stocks de nourriture. Cependant, les usines des principaux oligarques, comme celles de Monsieur Akhmetov, ne sont pas du tout nationalisées. Il faut une imagination sans bornes pour voir dans le Donbass l’Espagne de 1936: la révolution contre les riches, soutenue par les prolétaires de Tchétchénie et de Russie. Tout cela est absurde.

Il me semble que la gauche devrait être capable d’une attitude critique par rapport aux tentatives de manipulation et aux médias de masse. Mais il s’avère que non… Il semble parfois plus facile de manipuler les militants de gauche que les libéraux. Il suffit de leur rappeler les images de la guerre froide: il y a les méchants Américains d’un côté, et les Russes de l’autre, beaucoup moins méchants.

Actuellement, le gouvernement ukrainien prend des options qui compromettent le pays aux yeux des démocrates européens, y compris aux yeux des militants de gau- che qui soutiennent le peuple ukrainien. Par exemple, le président a signé une loi qui interdit toute propagande qui fait appel aux symboles de l’URSS et de l’Allema- gne nazie. La loi fixe une liste précise des organisations qui ont lutté pour l’indépen- dance de l’Ukraine, déterminant ainsi, d’une certaine manière, une vérité historique immuable. Comment interprètes-tu de telles décisions ?

[…] Le gouvernement a adopté cette loi aujourd’hui pour faire diversion. Il y a une année qu’il est en place et qu’il n’a fait aucune réforme significative. La corruption est toujours là. Alors que faire? Yanukovitch, par exemple, avait adopté des lois sur la langue russe; de son côté, le nouveau pouvoir a décidé de faire tomber les statues d’Illitch [Lénine]. Tout ça, c’est de la poudre aux yeux. Apparemment, nos députés n’ont rien de mieux à faire que de changer les noms soviétiques des villes et des rues. Mais je ne veux pas me renier, j’ai été pour la «désoviétisation». Je suis un vieux sympathisant des mouvements anarcho-­communistes, et je ne vois rien «de gauche» dans l’héritage historico-­culturel de l’Union soviétique. Qu’y a-t-il «de gauche» dans une figure comme celle de Brejnev, par exemple ?

Dans une telle situation, y a-t-il un avenir pour les mouvements de gauche en Ukraine ?

Oui, bien sûr. Il existe une énorme demande sociale pour un véritable mouvement de gau- che, mais elle n’est pas formulée dans des termes explicites. En bonne partie, parce qu’il existe beaucoup de préjugés envers tout ce qui est «de gauche», perçu comme «anti- ukrainien». Il faut dire qu’il est difficile de trouver un militant de gauche qui accorde assez d’attention et d’intérêt aux aspirations nationales de l’Ukraine, qui soit capable de reconnaître qu’il y a là un peuple avec sa culture, sa langue et son histoire. Je pense que la question nationale est une sorte de «ventre mou» du marxisme. Malheureusement, dans la situation actuelle d’Ukraine, on ne peut pas ignorer cette question. Cela dit, je suis content de voir que les nouveaux mouvements socialistes essayent d’agir, de travailler et de se développer au sein de la société ukrainienne en prenant en compte le fait que le peuple ukrainien existe et qu’il ne fait pas partie du «monde russe» ou d’une «Union soviétique bis» qui relève du fantasme. Il y a bien peu de forces socialistes dans le spectre politique de l’Ukraine. A Maïdan aussi, il n’y en avait pas assez. Et je pense que c’est un énorme problème. Car si les revendications sociales de Maïdan avaient été plus visibles et mieux défendues, peut-être que les habitants de l’Est de l’Ukraine auraient une attitude différente aujourd’hui envers ce mouvement.

Quels sont tes projets actuels ?

(…) Je trouve important de parler de la guerre, de l’Ukraine, de montrer que tout cela existe. A cause de la machine de propagande, l’interprétation de la réalité devient homogène. L’Ukrai- ne ne sait pas se défendre par rapport à cela, elle n’a aucune politique culturelle et d’infor- mation. Il ne s’agit pas de montrer que Poutine est un monstre, ou que les Russes ont déclenché la guerre. Il s’agit de dire la vérité sur ce qui se passe dans le Donbass. Par exemple, montrer l’ampleur des destructions, le nombre de personnes tuées, leurs noms, leurs visages. Il faut que l’on comprenne qu’il ne s’agit pas d’une guerre «géo­politique», qu’il ne s’agit pas d’une guerre «froide» entre Américains et Russes. Que derrière tout ce délire propagandiste, il y a des vies réelles, des gens qui meurent chaque jour ! Lorsque les intel- lectuels européens se disputent sur le fait de savoir si l’Ukraine a des droits sur ces terri- toires, si les insurgés sont vraiment des insurgés, si la Crimée est historiquement russe ou pas, etc. Tandis qu’ils parlent de tout cela en buvant un bon verre de vin, les gens de ces régions meurent chaque jour. Dans une telle situation, les artistes doivent essayer de cons- truire des ponts et de se substituer aux Etats pour diffuser l’information indispensable. […]

Tu es né dans la région de Louhansk, où la majorité de la population parle russe. Pourquoi as-tu décidé d’écrire tes textes en ukrainien ?

Pour moi, depuis l’enfance, la coexistence de ces deux langues était tout à fait naturelle. Je lisais des livres dans les deux langues et, autour de moi, je n’entendais pas tant le russe que le sourjyk (un parler mixte, un sociolecte utilisé par 20 % de la population). J’ai un diplôme de philologie ukrainienne, ce qui signifie que, pour moi, cette langue n’est pas seulement celle de la communication, mais aussi celle du travail. Cela fait 25 ans que j’habite Kharkov, et je n’ai jamais eu de problèmes à utiliser le russe ou l’ukrainien. C’est une ville ouverte : les gens parlent les deux langues, bien que le russe soit plus fréquemment utilisé. Ce « conflit langagier » a été créé de façon artificielle. On le fait sortir avant les élections et il disparaît juste après. En tout cas, penser que la guerre d’aujourd’hui résulterait d’un tel « conflit », c’est ne pas voir l’état réel des choses.

Entretien réalisé, transcrit et traduit du russe par Hanna Perekhoda

L’ÉCRIVAIN UKRAINIEN SERHIY JADAN:

Né en 1974 à Starobilsk, dans les régions minières d’Ukraine orientale, Serhiy Jadan est l’un des écrivains les plus populaires de sa génération. Chanteur de rock, essayiste et militant de gauche, il participe à l’organisation de festivals musicaux et culturels. Il avait été invité par l’Université de Fribourg, le 5 mai dernier, à présenter son premier roman traduit de l’ukrainien en français, La Route du Donbass (éd. Noir sur Blanc, Lausanne), qui lui a valu le Prix Jan Michalski (2014). Ce récit transforme le Donbass industriel en un pays fantastique, où souffle avant tout le désir de liberté. Nous en avons profité pour l’interviewer.

* Paru en Suisse dans « solidaritéS » n° 270 (11/06/2015) p. 5-6. http://www.solidarites.ch/journal/

http://www.europe-solidaire.org/spip.php?article35240

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18 juin 2015 ~ 0 Commentaire

le capitalisme c’est la guerre (ccr)

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Surenchère militariste entre les Etats-Unis et la Russie

Mardi dernier on apprenait dans la presse que la Russie va renforcer son arsenal nucléaire avec 40 missiles intercontinentaux. Cela fait suite à l’information révélée dans le New York Times selon laquelle les Etats-Unis seraient prêts à installer de l’armement lourd dans les pays baltes et dans d’autres pays d’Europe de l’Est membres de l’OTAN. Déjà lors du défilé du 9 mai commémorant la victoire de l’URSS sur le régime nazi, Moscou avait fait défiler ses nouveautés militaires.

Assiste-t-on à une partie de poker politico-militaire entre la Russie et les Etats-Unis ou à une vraie escalade militariste qui préparerait des évènements tragiques, y compris un conflit nucléaire ?

Aucune hypothèse ne devrait être écartée. Cependant, pour l’instant, il semble peu probable que les Etats-Unis, aussi bien que la Russie, envisagent de s’engager à court terme dans un conflit militaire, aux conséquences imprévisibles. En effet, même si les deux camps s’opposent ouvertement sur la crise ukrainienne, ainsi que sur d’autres conflits, et malgré leurs intérêts contradictoires, ils se voient objectivement forcés de collaborer sur d’autres terrains (la lutte contre Daesh, le dossier du nucléaire iranien). Cependant, aussi bien pour l’un que pour l’autre la crise autour de l’Ukraine comporte des enjeux centraux. La Russie cherche en effet à préserver ce qu’elle considère sa «zone d’influence», dont l’Ukraine constitue une pièce centrale. C’est cela qui explique sa détermination à garder le contrôle sur une partie au moins du territoire ukrainien.

Les Etats-Unis, de leur côté, essayent parallèlement de repousser le plus à l’Est possible la frontière de la «zone d’influence» russe et de freiner l’avancée de la Russie dans certains pays, notamment en Europe de l’Est et du Sud. En effet, en profitant de la crise économique et politique que certains pays de la région connaissent, Poutine tente de créer de nouvelles alliances géopolitiques qui contrecarrent la progression que l’OTAN a effectuée dans la région depuis la chute du Mur de Berlin et les vagues d’adhésion à l’Alliance transatlantique, notamment en Pologne l’un des pays les plus farouchement opposés à Moscou. (…)

Le principal objectif stratégique de Washington est Berlin Au fur et à mesure que la crise ukrainienne s’approfondissait on a vu de plus en plus clairement des divergences surgir entre les puissances impérialistes occidentales, notamment entre l’Allemagne et les Etats-Unis. Alors que ces derniers se sont montrés beaucoup plus agressifs contre Poutine, attisant les tensions sur le terrain militaire et s’appuyant sur les gouvernements les plus belliqueux et antirusses de la région comme celui de la Pologne et des pays baltes (Estonie, Lettonie et Lituanie), l’Allemagne a adopté une position beaucoup plus tournée vers le dialogue.

Cela ne relève pas d’un certain «pacifisme» allemand ou même d’un impérialisme plus «bienveillant» et «humain». Les souffrances imposées aux classes populaires de Grèce et d’autres pays de l’UE par le gouvernement d’Angela Merkel sont une preuve de son caractère tout aussi réactionnaire que celui de Barack Obama. Cependant, les capitalistes allemands et européens ont beaucoup plus à perdre dans une dégradation de leurs relations avec le régime russe que les Etats-Unis. C’est cela qui explique d’ailleurs toutes les pressions sur l’Allemagne, en interne comme en externe, pour lever les sanctions économiques contre la Russie, mises en place depuis juillet 2014. (…)

Les alliés de Poutine en Occident Jusqu’à présent la Russie a su jouer avec ces contradictions entre les impérialistes européens et les Etats-Unis, même si elle n’a pas encore réussi à faire que les premiers mettent fin aux sanctions économiques. Poutine utilise d’ailleurs les brèches ouvertes par la crise économique et politique que traverse l’UE et essaye de se rapprocher de certains gouvernements, parfois assez disparates politiquement. Ainsi, il tente de coopter des gouvernements marqués très à droite comme celui de Viktor Orban en Hongrie et, dans le même temps, il développe de bonnes relations avec le gouvernement Syriza-Anel en Grèce. Un autre allié de poids pour la Russie est l’Italie avec des échanges économiques entre les deux pays qui sont d’environ 49 milliards d’euros par an.

Ce rapprochement entre Moscou, Rome et Athènes est très important pour Poutine étant donné que ces deux pays sont au cœur de son projet de pipeline « Turkish Stream » qui amènera le gaz russe vers l’Europe en contournant l’Ukraine. D’ailleurs, dans ce projet la Russie engage un autre partenaire stratégique de l’impérialisme au Moyen-Orient : la Turquie.

Mais Poutine ne se limite pas à ces pays. Il essaye de se procurer des alliés politiques aussi bien dans les pays de l’ancien « bloc soviétique » à l’Est de l’Europe que dans les pays européens centraux. Pour ce faire, la Russie ne compte pas seulement sur le soutien traditionnel de certains courants de la gauche néo-stalinienne ou tiers-mondiste. Comme l’affirment des analystes du New York Times, Poutine s’appuie surtout sur des «forces d’extrême-droite opposées à l’Union Européenne et qui sympathisent avec l’attaque de Poutine contre ce qu’il appelle le déclin moral de l’Ouest». Selon ces mêmes auteurs, bien que le cas le plus notable soit le prêt de plus de 10 millions d’euros concédé au FN en France par une banque russo-tchèque, le régime de Poutine serait en relation avec d’autres partis d’extrême-droite comme le parti anti-euro Alternative pour l’Allemagne, le Jobbik en Hongrie, l’Attaka en Bulgarie, le Parti du Peuple de Slovaquie ainsi qu’avec des partis pro-russes dans les pays baltes. Selon le centre de recherche «Political Capital Institute» basé à Budapest, 15 partis d’extrême-droite européens seraient liés à la Russie. (…)

Un monde de plus en plus instable Cependant, malgré cette politique qui cherche à déstabiliser les puissances impérialistes, les discours et les annonces militaristes sur l’achat d’armement lourd et d’exercices militaires, la Russie ne semble pas vouloir d’un affrontement avec les occidentaux, en tout cas pour le moment. Ainsi, dans un entretien au journal italien Corriere Della Sera Poutine déclarait: «je pense que seulement un fou et seulement dans un rêve peut imaginer que la Russie pourrait attaquer soudainement l’OTAN». En effet, Poutine est conscient des risques qu’un tel affrontement impliquerait et que cela ne saurait être qu’un recours de dernière instance face à une situation où son régime n’aurait plus aucun autre choix.

Mais, une chose est sûre néanmoins, depuis le début de la crise en Ukraine le monde est rentré dans une situation de grande instabilité géopolitique. Un analyste militaire russe affirme dans les pages du New York Times : « tout le monde devrait comprendre que nous sommes en train de vivre dans un monde complètement différent depuis deux ans (…) Dans le monde, que nous avons perdu, il était possible d’organiser la sécurité des pays avec des traités, avec des mesures de confiance mutuelle (…) Maintenant, nous sommes arrivés à une situation complètement différente où en général la voie pour assurer la sécurité des pays est la dissuasion militaire  ».

La période d’après-Guerre Froide est finie. L’accélération du déclin relatif de l’hégémonie nord-américaine (les Etats-Unis n’arrivent plus à imposer leurs propres choix sans résistance) se combine avec le fait que des puissances régionales avec un grand poids géopolitique et militaire, comme la Russie, défient les puissances impérialistes sur certains terrains. Pour le moment Poutine est le dirigeant international qui le fait de la façon la plus ouverte.

Cependant, son opposition aux Etats-Unis n’a rien de progressiste, comme certains secteurs de gauche font croire. C’est le cas notamment de certaines fractions de gauche liées aux régimes d’Amérique latine dits «progressistes» comme Nicolas Maduro au Venezuela ou Rafael Correa en Equateur. Cela reflète en effet une vision simpliste qui considère que tout opposant aux Etats-Unis serait progressiste. La réalité c’est que sa politique grande-russe, anti-populaire et pro-capitaliste, au-delà d’un certain soutien au niveau national, lui empêche de gagner la sympathie des masses populaires à travers la planète (comme cela avait été le cas avec Hugo Chavez au Venezuela, malgré sa politique marquée par le nationalisme bourgeois). Ses alliances avec les pires groupes et partis d’extrême-droite en Europe en sont une autre preuve.

Contre les visions qui avaient effacé de l’horizon de la politique internationale les conflits entre les grandes puissances mondiales, nous devons constater que ces mouvements, prises de position et dissuasions militaires démontrent que le capitalisme c’est l’exploitation et la guerre. Pour les millions de travailleurs et travailleuses, pour la jeunesse et tous les opprimés les différentes options capitalistes et impérialistes ne représentent aucune alternative. Il leur faudra s’organiser pour lutter pour leurs propres intérêts économiques, sociaux et politiques.

17/06/2015 Publié le 17 juin 2015 Philippe Alcoy

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17 juin 2015 ~ 0 Commentaire

chine: quelque chose est pourri dans la cité interdite (ccr)

mao-citroen

La chute de Zhou Youngkang

La chute de l’intouchable ancien chef de la sécurité chinoise, condamné à la prison à vie, est la victoire la plus importante de la campagne contre la corruption menée par l’actuel président chinois Xi Ping, mais ouvre une boîte de Pandore au sein de l’élite gouvernante.

Le 11 juin, le Tribunal populaire intermédiaire de Tianjin a annoncé que Zhou Yongkang, ancien membre du tout puissant Comité permanent du Bureau politique du Parti communiste chinois et ancien chef de l’appareil de sécurité interne du régime, avait été condamné à la prison à vie pour recel de corruption, abus de pouvoir et révélation intentionnelle de secrets d’État. Le tout dans le cadre d’un procès fermé et totalement archaïque. Les images télévisées du verdict montrent la scène comme une farce, un véritable simulacre des procès staliniens qui avaient cours dans les pays dits «communistes» par le passé.

Retraçons la scène: «Comprenez-vous bien, prévenu Zhou Yongkang, la sentence?», tonne le juge. «Oui » répond l’intéressé en baissant la tête, à l’épaisse chevelure argentée. «Prévenu Zhou Yongkang, avez-vous quelque chose à dire à la cour?». «J’accepte le jugement et ne ferai pas appel. Je reconnais la réalité de mes crimes et j’ai à maintes reprises violé les lois et les règles du parti, ce qui a entraîné un dommage important pour le parti et a eu un effet négatif grave sur la société. Je plaide coupable et je me repens» répond M. Zhou, d’une voix posée. Tandis que les chefs d’inculpation étaient potentiellement passibles de la peine de mort, Zhou, 72 ans, a reçu une peine plus clémente après avoir confessé, montré ses regrets et demandé aux membres de sa famille de remettre la plupart de leurs gains mal acquis.

Zhou Yongkang est l’homme politique de plus haut rang à se retrouver devant le tribunal depuis le procès pour trahison de l’épouse de Mao Zedong et d’autres membres de la «Bande des Quatre» qui ont persécuté les opposants politiques pendant la Révolution culturelle entre 1966 et 1976.

Une victoire immédiate… En mettant en place une campagne féroce contre la corruption, mais aussi contre la dissidence pro-occidentale, Xi Jinping a réussi à consolider son pouvoir au sein du parti et à gagner une certaine sympathie parmi la population qu’il entend utiliser pour renforcer le régime et le parti, qui constitue la structure fondamentale sur laquelle il s’appuie. (…) D’après certains spécialistes, le jugement de Zhou représente à son tour un pas important dans la campagne menée par Xi depuis deux ans pour démanteler la faction politique établie par l’ancien chef du Parti communiste Jiang Zemin. Bien qu’officiellement en poste seulement entre 1989 et 2002, Jiang et ses acolytes (y compris Zhou) ont maintenu leur emprise politique et économique sur le Parti et la nation pendant plus d’une décennie après que Jiang se soit retiré de son poste. (…)

…mais avec d’énormes risques stratégiques Cependant, à plus long terme, sa stratégie peut renforcer l’instabilité. L’origine du régime chinois actuel remonte à la Révolution culturelle qui a constitué une période chaotique pour la bureaucratie gouvernante. Ce mouvement, une confrontation de tendances au sommet de l’État et dans les différents secteurs de la bureaucratie à partir de laquelle la fraction dirigée par Mao appelait les masses à mettre la pression sur l’appareil étatique et le parti, est devenu un conflit extrêmement aigu qui a mobilisé des secteurs fondamentaux de la société chinoise: les étudiants, la paysannerie, dans une moindre mesure et, fondamentalement, à son pic, les travailleurs. Du point de vue de la bureaucratie, c’était un fait extrêmement traumatisant qui a brisé le monolithisme de l’État et du PCC et presque remis en cause sa domination.

Après le (…) Grand Timonier (Mao) et le bref interrègne de confusion qui s’en est suivi, avec l’ascension de Deng Xiaoping, le vrai père des réformes, la bureaucratie est parvenue à un nouveau consensus consistant à considérer que la seule manière de sortir de cette période turbulente et d’assurer sa domination était le maintien de la croissance comme base de la stabilité politique. Ce consensus d’après-Révolution culturelle, qui se maintient avec des hauts et des bas jusqu’à présent, est ce qui a permis la mise en place et l’approfondissement des réformes pro-capitalistes.

Au niveau de la direction supérieure, cela se reflète par l’établissement d’une direction communiste collégiale et consensuelle. L’actuel renforcement unipersonnel de Xi Ping rompt avec cette règle et lui permet de mener cette campagne dans l’opacité totale. Exemple extrême dans ce cas, le procès de Zhou s’est tenu à huis clos après le scandale public qu’avait constitué la chute de Bo Xilai, l’ancien patron de la ville de Chongqing, tombé lui aussi en disgrâce et dont le procès en 2013 a permis de connaître des détails juteux sur le mode de vie des personnages les plus puissants du régime.

Pas moins important, le président chinois a brisé un autre tabou consistant à ne pas s’en prendre à un ancien membre de la «Commission permanente», la direction effective du parti et du pays. La condamnation de Zhou Yongkang démontre bien que plus personne au sein de l’élite du pays n’est à l’abri. Même l’actuel numéro un du pays. Ce n’est pas un hasard si la presse commence à affirmer que Xi est toujours hanté par la peur de se faire assassiner. Ainsi, début mars, ayant peur pour sa sécurité, Xi a remplacé de manière abrupte les hauts fonctionnaires de l’Office central de Sécurité du Parti Communiste et du Bureau municipal de la Sécurité publique de Pékin, tous les deux responsables de la protection de Xi et d’autres dirigeants. (…)

Seulement la pointe de l’iceberg(…) Malgré la campagne sans relâche contre la corruption menée par Xi, celle-ci reste largement superficielle. La grande partie de tous ceux qui ont accumulé des richesses privées par des moyens douteux reste à l’abri. Aucun des «princes rouges» n’est tombé. Ces secteurs liés «par le sang ou le mariage» à des dirigeants haut placés dans le parti et l’État ont profité du secret bancaire pour créer des entreprises off-shore ou placer leurs biens mal acquis.

Le niveau des fortunes de ce secteur bureaucratique en cours de transformation en bourgeoisie est gigantesque. Il s’agit de membres de famille de l’actuel président Xi Jinping, de son prédécesseur Hu Jintao, des anciens Premiers ministres Wen Jiabao et Li Peng, mais aussi au moins quinze des plus grandes fortunes du pays sont membres de l’Assemblée nationale, des généraux, et ainsi de suite.

Au niveau des masses, la chute d’un personnage aussi puissant que Zhou a stimulé de fortes attentes dans une frange de la population, alors que d’autres secteurs restent dans une indifférence totale liée au discrédit qui frappe le PCC. Ainsi, Liu, un enseignant du secondaire à Kashgar, dans la région nord-ouest du Xinjiang, a pu déclarer, exprimant un sentiment plus général: «Nous, les gens de tous les jours, voulons que le pays continue à attraper ’tigres’ et ’mouches’ pour que tous les fonctionnaires mettent de côté l’illusion qu’ils peuvent abuser de leur pouvoir sans conséquences».

Ces illusions se heurtent à la réalité (…)La tentative de Xi d’imposer des changements par en haut, sous le contrôle d’un parti épuré, discipliné et renforcé dans une économie et une société complexes qui passent par des moments difficiles, malgré l’image triomphaliste pourrait générer des forces incontrôlables tant au niveau des masses que des élites. Des réactions qui iraient bien au-delà des projets actuels de Xi.

Si la bureaucratie prête beaucoup d’attention en ce moment à la période de la chute de Gorbachov afin d’éviter le même sort ou au livre célèbre d’Alexis de Tocqueville, L’ancien régime et la Révolution, étude de la société française à la vieille de la Révolution de 1789, cela montre, au-delà des apparences, quelles sont ses véritables préoccupations et que, derrière la puissance indéniable de la Chine, se cachent bien des faiblesses.

Publié le 16 juin 2015 Juan Chingo

http://www.revolutionpermanente.fr/Chine-Quelque-chose-ne-sent-pas-bon-dans-la-Cite-interdite-de-Pekin

 

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16 juin 2015 ~ 0 Commentaire

otan, washington peaufine sa stratégie militaire en europe de l’est (ci)

French Army

Les Etats-Unis seraient prêts à entreposer de l’artillerie lourde en Europe de l’Est et dans les Balkans. Il y aurait de quoi armer 5 000 soldats aux portes de la Russie

La révélation provient d’une déclaration anonyme d’un haut responsable américain au New York Times. Selon des informations auxquelles le journal a eu accès, les Etats-Unis pour- raient renforcer leur présence militaire en Europe de l’Est et dans les Balkans en y installant de l’artillerie lourde, comme des chars de combat et des véhicules d’infanterie. Selon le quotidien, le matériel pourrait armer pas moins de 5 000 soldats.

Pour les Etats-Unis il s’agit d’une réponse aux craintes des pays de l’Est de voir un scénario à l’ukrainienne se reproduire sur leur territoire. “L’annexion de la Crimée par la Russie et la guerre dans l’est de l’Ukraine ont incité à une nouvelle planification militaire dans les pays de l’Otan.” Le journal russe Kommersant explique pour sa part que “la mise en œuvre de ce plan va obliger Moscou à poster à la frontière des Etats baltes son propre potentiel offensif, afin de pouvoir réagir en cas de conflit”.

Echec de la politique de démilitarisation Selon The New York Times, la proposition implique la présence d’équipements pour 150 soldats dans chacun des trois Etats baltes : la Lituanie, l’Estonie et la Lettonie. La Pologne, la Roumanie, la Bulgarie et éventuellement la Hongrie sont également concernées: du matériel pour 750 soldats y serait entreposé.

Selon le journaliste et analyste politique russe Fiodor Loukianov, qui s’exprime dans Gazeta, ces manœuvres sont “un véritable échec de la politique de démilitarisation de ces vingt dernières années”. Pour lui, le placement permanent de troupes dans ces pays constitue “une violation de l’acte fondateur Otan-Russie de 1997 sur la coopération et la sécurité”.

La décision doit encore être validée par la Maison-Blanche et le secrétaire américain à la Défense, Ashton Carter. Ainsi, souligne The New York Times, “si la proposition est approu- vée, ce serait la première fois depuis la fin de la guerre froide que les Etats-Unis stationnent du matériel militaire lourd dans des pays qui ont autrefois fait partie de la sphère d’influence soviétique”. Publié le 15/06/2015 – 16:21

http://www.courrierinternational.com/article/otan-washington-peaufine-sa-strategie-militaire-en-europe-de-lest

Commentaire: Il va de soi que nous ne soutenons ni l’otan, ni la politique d’annexion de Poutine. Nous refusons le « Campisme » issu de la guerre froide, qui nous somme de choisir une terreur contre une autre: http://wikirouge.net/Campisme

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