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27 février 2025 ~ 0 Commentaire

Ammoniac (FR 3)

Timac Agro a été reconnue coupable d'avoir dépassé les seuils de rejets d'ammoniac à Saint-Malo et a été condamnée à 10 000€ d'amende.

Timac Agro a été reconnue coupable d’avoir dépassé les seuils de rejets d’ammoniac à Saint-Malo et a été condamnée à 10 000€ d’amende. • © Marc OLLIVIER / MAXPPP

Timac-Agro condamné pour ses rejets d’ammoniac : les écologistes bretons ne lâchent pas leur lutte contre ce gaz polluant

Timac Agro, l’industriel breton spécialisé dans la production d’engrais, vient d’être reconnu coupable de pollution à l’ammoniac à Saint-Malo (Ille-et-Vilaine). Les associations écologistes bretonnes à l’initiative des signalements se félicitent de cette condamnation, alors que la lutte contre ce gaz polluant représente un enjeu régional majeur.

L’industriel Timac Agro, envoyé devant la justice par l’association Osons ! pour des dépassements de seuils de rejets d’ammoniac fin 2019 et début 2020 à Saint-Malo, vient de reconnaître sa faute devant la justice.

La filiale du groupe Roullier, spécialisée dans la production d’engrais et implantée dans la zone industrielle de la cité corsaire, a été condamnée à 10 000€ d’amende devant le tribunal de Saint-Malo, dans le cadre d’une procédure de comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité.

« Pour la première fois, nous sommes dans une procédure où la Timac reconnaît sa culpabilité » se félicite Alain Guillard, Président de l’association « Osons ! », qui avait porté plainte contre l’industriel après le non-respect des obligations de seuil maximal de rejet d’ammoniac (Nh3) dans l’air à maximum 50mg/m3, fixé par la Préfecture d’Ille-et-Vilaine.

Malgré plusieurs alertes et une mise en demeure des services de l’Etat en 2018, Timac Agro avait continué ses rejets de gaz polluant. « Les rejets d’ammoniac 2017/2018 atteignaient 641 mg/m3 presque 13 fois plus que la norme. Ce record était battu en 2019, année durant laquelle le seul mois sans dépassement était un mois sans activité (mai) » s’indignait « Osons ! » qui dénonce, avec d’autres associations environnementales, des risques pour l’environnement et pour la santé publique.

L’ammoniac ou Nh3 est un gaz incolore, mais qui s’avère toxique, d’autant plus qu’il « peut se recombiner dans l’atmosphère avec des oxydes d’azote et de soufre pour former des particules fines, pouvant être responsables de graves problèmes de santé » comme l’explique l’Agence de la transition écologique (ADEME).

« La Bretagne est soumise à une surpollution à l’ammoniac »

Mais la bataille juridique entre Timac Agro et les associations écologistes Osons !, Eaux et Rivières et Bretagne Vivante (qui ont également porté plainte sur les infractions environnementales) n’est pas encore terminée.

Tout d’abord, la Timac peut encore faire appel de la condamnation prononcée ce mercredi 26 février 2025. Ensuite, le jugement de l’action civile de l’infraction, qui doit déterminer les montants des dommages et intérêts, a été renvoyé en novembre 2025. Enfin, les associations environnementales et les riverains exposés au Nh3, dont certains se plaignent de picotements dans les yeux et de difficultés respiratoires, entendent bien continuer le combat contre la pollution de l’air à l’ammoniac à Saint-Malo et plus largement en Bretagne.

« On ne lâche pas l’affaire. On voit que la mobilisation citoyenne fait bouger les choses et la santé est une préoccupation primordiale » lance Rozenn Perrot, membre du conseil d’administration d’AirBreizh et bénévole d’Eaux et Rivière qui suit de près le dossier Timac.

Car l’enjeu est de taille, d’autant plus sur le territoire breton. « Avec 17% des émissions régionales en 2018, la Bretagne est la première région émettrice d’ammoniac alors que la région ne représente que 5% de la population et de la superficie de la France » interpelle AirBreizh, dans une enquête du média Splann!.

« La Bretagne est soumise à une surpollution de l’air liée à l’ammoniac, qui est le résultat du système agro-industriel breton. Dans la région, plus de 99% des émissions d’ammoniac proviennent de l’agriculture. Comme les algues vertes, la pollution à l’ammoniac remet en cause le modèle agricole breton » affirme Rozenn Perrot.

De nouvelles études attendues

L’étude la plus récente de la pollution de l’air au Nh3 en Bretagne menée par AirBreizh, réalisée sur la période 2008 – 2018, n’indique « aucune tendance à la baisse des rejets d’ammoniac en Bretagne pour le moment, puisque l’évolution 2008-2018 des émissions est stable (1%)« .

De nouvelles données sont attendues d’ici le mois de mai, avec les résultats des capteurs fixes de Saint-Malo et Merléac et de dispositifs mobiles.

« Nous sommes en train de finaliser les études des relevés entre 2018 et 2022. Nous avons été confrontés à des difficultés d’inventaire car chaque appareil de mesure en temps réels coûte 70 000€ et est donc difficile à acquérir. Et aussi, car nous suivons nous-même le site de Saint-Malo seulement depuis juin 2024, car la Timac n’avait pas déclaré ses émissions » précise Gaël Lefeuvre, directeur d’AirBreizh.

À terme, les associations écologistes aimeraient multiplier les points de mesure pour mieux quantifier la pollution à l’ammoniac dans la région, notamment dans certains secteurs agricoles. « Nous aimerions que des capteurs fixes soient installés par exemple au nord de Brest, où on recense de nombreuses fermes à cochons, pour mesurer l’ammoniac issu de l’agriculture, souligne Rozenn Perrot. Dans tous les cas, nous restons mobilisés et en surveillance contre la pollution à l’ammoniac dans la région« .

  Lucas Hobe  27/02/2025

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27 février 2025 ~ 0 Commentaire

ATTAC

attac

Les prochaines Assises de la santé et la sécurité des travailleurs-ses auront lieu les 25 et 26 mars 2025 à Paris.

Elles sont organisées par un ensemble de syndicats et d’associations :
CGT, FSU, Solidaires, Andeva, ASD-Pro, Association des experts intervenant en santé au travail, Attac, Ateliers Travail et Démocratie, Cordistes en colère, Réseau féministe « Ruptures », Association-Santé-Médecine-Travail..

500 personnes ont participé aux différents ateliers des Assises de mars 2024. La richesse des échanges témoigne des interventions sur le terrain. Les apports de chercheur·es, avocat·es, inspecteurs·trices du travail, associations, experts auprès des CSE et des militant·es à la réflexion collective ont représenté des outils intéressants pour notre activité quotidienne.

Nous avons depuis vécu divers bouleversements politiques, et pourtant les questions de santé et sécurité au travail ne font toujours pas l’objet de débats publics. Les politiques publiques restent au point mort.
L’engagement syndical se heurte à de nombreuses difficultés.

Le constat est toujours le même : en 2023 la Sécurité sociale a recensé 555 800 accidents du travail avec arrêt dont 759 mortels, 47 400 arrêts de travail en raison d’une maladie professionnelle et 1287 morts comptabilisés suite à unaccident du travail ou de trajet ou une maladie professionnelle, 60 de plus qu’en 2022. Ces chiffres ne concernent que le secteur privé, il n’existe pas de statistiques globales sur la sinistralité dans la fonction publique.

Le mouvement syndical et social doit s’emparer de ces questions, en faire un enjeu politique et porter ses exigences sur le devant de la scène. Nos exigences doivent se traduire dans les mobilisations sociales, dans nos pratiques syndicales sur le terrain et dans les instances de représentation du personnel. Tels sont les objectifs de nos Assises.

Le 28 avril 2025, journée mondiale pour la santé et la sécurité des travailleurs-ses, doit être l’occasion de faire converger ces luttes car nous sommes convaincu·es que seul un rapport de force social permettra d’avancer sur ces questions. Nous nous associerons aux initiatives locales et nationales dans les différentes villes pour faire de ce 28 avril 2025 un évènement national.

Dès maintenant, inscrivez-vous pour les Assises de 2025 !

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27 février 2025 ~ 0 Commentaire

OQTF (Basta!)

OQTF (Basta!) dans A gauche du PS
© Aude Abou Nasr

« Je vais à l’école, je fais tout ce que la France me demande, et j’ai une OQTF ! »

Être sous OQTF, qu’est-ce que ça veut vraiment dire ? Comment le battage politique et médiatique après l’attentat de Mulhouse est vécu par les personnes concernées ? Récits de vies sous OQTF.

« Une fois de plus, ce sont les désordres migratoires qui sont aussi à l’origine de cet acte terroriste », a martelé le ministre de l’Intérieur Bruno Retailleau sur TF1, le soir de l’attentat de Mulhouse, perpétré le samedi 22 février.

Un Algérien sous le coup d’une obligation de quitter le territoire français (OQTF), au « profil schizophrène » et fiché pour prévention du terrorisme, a tué une personne, Lino Sousa Loureiro, et blessé plusieurs autres. « Il faut changer le droit », a soutenu le ministre de l’Intérieur. « Pour ces individus très dangereux [...] je pense qu’il faudrait une rétention. Des peines de sûreté. Pour les maintenir, tant qu’on ne peut pas les renvoyer, en centre de rétention », a poursuivi Bruno Retailleau.

L’enfermement dans un centre de rétention administrative de personnes que le pays d’origine refuse d’admettre sur son sol est inconstitutionnel – puisque sans laissez-passer consulaire, l’expulsion est impossible. « Il faut changer la loi », a rétorqué Sophie Primas, porte-parole du gouvernement, sur RTL le 24 février. Avant de s’en prendre au Conseil constitutionnel qui, « plusieurs fois, malgré nos propositions, dit qu’il faut laisser ces personnes en liberté ».

Ainsi s’installe un narratif : le gouvernement serait bloqué par l’état du droit actuel, et par les instances qui le garantissent. Ainsi s’installe surtout, dans le débat public, l’amalgame entre OQTF et délinquance, largement nourri par Bruno Retailleau à chaque crime impliquant une personne sous OQTF, et repris par la droite et l’extrême droite parlementaire.

« On nous colle une étiquette »

« Quand je vois les médias, c’est comme si on incitait les gens à diaboliser les personnes sous OQTF. On leur renvoie l’idée que ce sont forcément des délinquants, des criminels. Alors que pas du tout ! On ne peut pas cataloguer des gens comme ça ! » s’indigne Lyndie, jeune femme de 34 ans, placée sous OQTF en 2022 après un refus de sa demande de titre de séjour « vie privée et familiale ». « Évidemment qu’il y a des cas, comme partout. Mais une OQTF, ça ne définit pas une personne. Moi, par exemple, j’ai un casier judiciaire vierge. Tout ce qu’on voit et qu’on entend autour des OQTF, c’est frustrant. »

Lyndie est venue en région parisienne pour ses études, après son bac obtenu au Gabon. Comme ses sœurs et leur petit frère avant elle. Ses parents sont propriétaires en France. « J’ai fait mon master, obtenu mes diplômes, travaillé dans des jobs étudiants ici. Mon papa a fait ses soins sur le territoire français. Il est décédé à l’hôpital de Pontoise, en France », déroule Lyndie. L’une de ses sœurs s’est mariée et a obtenu la nationalité française. Les deux autres sont mères d’enfants français, car nés sur le territoire français.

Malgré cela, la préfecture a refusé le titre de séjour et délivré une OQTF à Lyndie. « Ils n’ont pas pris en compte mes études, le fait que je sois héritière donc propriétaire de la maison comme mes frères et sœurs, que je suis en règle depuis 2012… Que je n’ai plus d’attaches au Gabon et que toute ma vie est ici ! » s’attriste Lyndie. « On ne me donne pas ma place là où je me sens chez moi. »

« Ils n’ont aucun projet, à part s’acharner contre les immigrés »

Alors que l’idée d’un nouveau projet de loi immigration ne fait pas consensus pour Bruno Retailleau et le Premier ministre François Bayrou, le gouvernement continue d’agiter le débat public sur les OQTF. Une réunion du comité interministériel de contrôle de l’immigration a eu lieu mercredi 26 février sous l’égide du Premier ministre. Celui-ci a entre autres annoncé que serait présentée au gouvernement algérien « une liste « d’urgence » de personnes qui doivent pouvoir retourner dans leur pays et que nous considérons comme particulièrement sensibles », et lancé un audit interministériel sur la délivrance des visas.

Les OQTF sont désormais devenues l’alpha et l’oméga de la politique migratoire. Du moins, celle affichée au grand public. « On nous colle une étiquette », regrette Mamadou Dioulde Sow, jeune homme de 25 ans, co-auteur de l’ouvrage Né pour partir (Milan, 2023). « Il y a des drames causés par des personnes sous OQTF. Mais l’immense majorité sont des personnes de bonne volonté, intégrées, qui ont envie de rester en France. » Dans son parcours, lui aussi a connu deux OQTF, en 2018 et 2024. Chaque fois annulées par un tribunal, car jugées irrégulières.

Pour rappel, le nombre d’OQTF (près de 140 000 l’an dernier) a doublé en dix ans, tandis que le taux d’exécution a diminué de moitié. « On priorise ceux qui présentent des menaces de troubles à l’ordre public », avait soutenu Bruno Retailleau dans l’émission « Complément d’enquête » du 24 janvier. L’émission rappelait pourtant que seul 1,4 % des personnes sous OQTF avaient déjà été condamnées.

Côté judiciaire, les tribunaux administratifs déclarent illégales 20 % des OQTF qui leur sont présentées. C’est pourtant la politique du chiffre qui continue d’être encouragée au travers des circulaires successives de l’Intérieur, y compris la dernière, celle du 23 janvier 2025, adressée par Bruno Retailleau aux préfets.

« La délinquance, c’est eux qui la provoquent »

« Les politiciens font ça pour ternir l’image des immigrés, pour gâcher la vie de ces personnes, sans les connaître. Ils n’ont aucun projet pour la France, à part s’acharner contre les immigrés. Pourtant, il y aurait beaucoup d’autres choses à faire », épingle Mamadou Dioulde Sow. « Ils utilisent ce mot, OQTF, pour récupérer des voix dans la population française. Les voix de ceux qui ne savent pas ce qu’est une OQTF et dans quelles circonstances c’est délivré. »

« J’ai posé la question à un policier : qu’est-ce qui motive la délivrance d’OQTF ? » se souvient Abdoul, membre du collectif auto-organisé de mineurs isolés de Tours (Indre-et-Loire), qui a organisé la semaine dernière une manifestation contre la circulaire Retailleau. « Le policier m’a dit : les OQTF, on les donne aux délinquants, aux étrangers qui font des bêtises, qui vendent de la drogue… Je lui ai répondu : et nous ? Moi je vais à l’école, je fais tout ce qu’il faut, tout ce que la France me demande, et j’ai une OQTF ! »

Et de citer l’exemple d’autres jeunes de son collectif, dont l’un d’eux était inscrit dans un centre de formation d’apprentis (CFA). Avec un patron qui l’a appuyé dans sa demande de titre de séjour. « Il s’est pris une OQTF. Il ne peut plus aller au CFA. Le patron l’a viré. Il reste là, comme ça. »

« Tout allait bien », jusqu’à l’OQTF

Depuis la loi du 26 janvier 2024, les OQTF ont une durée d’exécution de trois ans, contre un an auparavant. « Tu perds des années. Il faut être fort mentalement. Tu ne fais rien, tu ne peux pas avoir de boulot, de logement. En fait, la délinquance, c’est eux qui la provoquent », martèle Abdoul.

Mamadou Dioulde Sow témoigne aussi de cet état de détresse qui peut faire plonger. Sa première OQTF lui a été délivrée alors qu’il était encore à l’école et en alternance. Pourtant « tout allait bien ». Tant qu’il était mineur, Mamadou était pris en charge par l’Aide sociale à l’enfance. Puis, l’OQTF, tombée à sa majorité, « a tout bloqué. Je me suis retrouvé à la rue », relate-t-il. Finis l’école, l’alternance, l’hébergement. « C’était un stress énorme. J’étais isolé, désespéré. Je ne voulais plus parler à personne. »

Lui dit que « c’est Dieu qui [l’a] sauvé » : « Il a fait que j’ai rencontré les bonnes personnes sur mon chemin. Grâce à elles, j’ai pu surmonter cette période. » Des bénévoles du Réseau éducation sans frontières (RESF) de Lyon l’accompagnent. Mais ces soutiens, tout le monde ne les a pas. Dès lors, « les OQTF poussent certaines personnes à tomber dans de mauvaises situations, à faire ce qu’elles n’auraient jamais souhaité faire », estime-t-il. « Il y en a qui sont déjà traumatisées par leur parcours, qui ont traversé la Méditerranée, se sont cachées dans des toilettes de trains, ont survécu à la rue, sont des rescapées… L’OQTF leur tombe dessus et tout repart de zéro. Cela coupe tout espoir. J’en connais plein qui ont commencé à fumer, à boire, et ça a dégénéré. »

OQTF : une plongée dans la précarité

Puisque l’OQTF bloque tous les droits sociaux, la précarité s’installe sur tous les plans. Alors qu’elle sortait d’études commerciales et de management, Lyndie s’est retrouvée à « faire du repassage chez des gens, de la garde d’enfants. C’est vraiment l’OQTF qui a fait que j’ai travaillé au noir. Je ne savais même pas que c’était possible. » Lyndie a pu compter sur l’aide de ses frères et sœurs et d’un petit ami. Heureusement, car, dit-elle, « j’étais mal payée, je pouvais à peine me nourrir, c’était vraiment pour m’acheter des choses essentielles comme des serviettes hygiéniques. Je n’imagine pas comment font des gens qui n’ont pas ces soutiens ou ne connaissent pas les rouages pour travailler au noir. »

Pour les plus vulnérables, l’OQTF est aussi synonyme de rupture dans le parcours de soin. Hawa Gakou, résidant dans les Hauts-de-Seine, a été placée sous OQTF après quinze ans de régularité sur le territoire français, dont sept avec un titre de séjour pour soins renouvelé jusque-là sans encombre. Reconnue handicapée à 80 %, en fauteuil roulant, isolée, sa situation (dont elle avait d’abord témoigné auprès du site Infomigrants anonymement) n’a fait qu’empirer depuis la réception de l’OQTF. Elle a perdu son allocation aux adultes handicapés, mais aussi son aide à domicile financée par le département.

Depuis, ses dettes s’accumulent. « J’ai trop de difficultés à payer mon loyer. À la mairie, on n’a pas pu me donner droit à une assistante sociale car je n’ai pas de titre de séjour », explique-t-elle. Surtout, « l’OQTF m’empêche de faire mes soins. Par exemple, je devais faire un hôpital de jour pour de la rééducation, mais tout a été bloqué. Alors que j’en aurais tellement besoin… ça devient difficile de me mettre debout. »

« Je veux mes papiers parce que je me sens française »

Après trois ans de calvaire et des recours judiciaires infructueux, l’OQTF d’Hawa va expirer fin février. Elle espère que ce sera le début d’une nouvelle page. Pour l’heure, « c’est tellement difficile pour moi de garder le moral, parfois je pleure. J’ai tellement peur qu’un jour ils viennent me sortir de l’appartement », confie-t-elle.

Mamadou, lui, a pu faire annuler sa seconde OQTF en justice à l’automne 2024. Avec le soutien de RESF, depuis octobre, les choses se sont arrangées : « J’ai repris l’école, je suis en alternance en BTS, dans le secteur logistique, ça se passe très bien. » Lyndie a également pu faire annuler en justice son OQTF, au bout de deux ans. Elle dispose d’une autorisation provisoire de séjour, et espère obtenir bientôt son titre.

Elle ne cesse de postuler à des offres d’emploi, mais elle estime avoir « perdu des années d’expérience : les entreprises sont assez frileuses pour me recruter », confie-t-elle. « J’ai aussi perdu du temps sur le plan de mon épanouissement. Je veux pouvoir me faire plaisir, faire plaisir à ma famille. On est des femmes : je tiens à ne plus dépendre de quelqu’un, comme l’OQTF m’y a obligée. Je n’ai pas envie d’être celle qui se marie ou a des enfants pour rester ici… Moi je veux mes papiers parce que je vis sur le territoire. Que j’y ai fait mes études. Que je me sens française. »

27 février 2025  Maïa Courtois

Cet article est publié dans le cadre de notre partenariat avec Rapports de force.

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26 février 2025 ~ 0 Commentaire

BIO (Basta)

ennemo bio

Alimentation bio et santé : ce que dit la science

L’alimentation bio est-elle vraiment meilleure pour la santé ? Sa consommation régulière réduit le risque de cancer, selon une étude à laquelle a participé le biochimiste et nutritionniste Denis Lairon. Il dresse l’état des lieux des connaissances scientifiques.

Campagnes solidaires : L’alimentation bio est-elle vraiment meilleure pour la santé ?

Denis Lairon, directeur de recherche émérite à l’Inserm : Globalement, oui. Avec les centaines d’études scientifiques dont on dispose sur différents aspects de l’agriculture biologique, dont la santé, il y a déjà beaucoup d’éléments d’informations pour en tirer des conséquences. Et c’est pourquoi le ministère de la Santé recommande de manger bio depuis 2019.

Quels types de bénéfices les études scientifiques ont-elles mis en avant ?

Elles pointent la qualité nutritionnelle des aliments bio, c’est-à-dire ce qu’ils apportent en termes de nutriments. Les aliments végétaux bio contiennent plus de matière sèche (moins d’eau), souvent plus de minéraux (magnésium), davantage d’antioxydant comme la vitamine C (jusqu’à 50 % de plus). En l’occurrence, les légumes bio contiennent en moyenne 50% de moins de nitrates qui s’accumulent dans les végétaux (racines et feuilles). Les céréales bio, elles, ont moins de cadmium et sont souvent peu raffinées (pâtes et pains complets, etc.). Ce qui ressort sur les produits laitiers comme sur la viande, c’est la composition en lipides avec davantage d’acide gras polyinsaturés (+ 70% d’oméga 3).

Ce qui explique le différentiel entre les aliments végétaux bio et non bio, c’est surtout les méthodes de fertilisation et de rotations des cultures. Pour les produits animaux, les explications tiennent au type d’alimentation des animaux qui sont, pour le bio, systématiquement à base d’herbe pour les ruminants.

L’autre aspect concernant la qualité des aliments bio porte sur la réduction significative de la teneur en pesticides de synthèse.

Quasiment un aliment végétal sur deux est contaminé par au moins un résidu de pesticides de synthèse, selon un rapport publié en 2018 de l’agence sanitaire européenne (Efsa) qui analyse tous les cinq ans 85 000 échantillons de produits végétaux. Un tiers des échantillons ont des contaminations multiples par des résidus de pesticides – c’est le cas des pommes notamment. Le rapport français de la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes publié en 2016 précise que 66 % des fruits sont contaminés, 40 % des légumes et 30 % des céréales.

Si on prend les aliments bio, la contamination par des résidus de pesticides de synthèse était de 1,9 % en France et 6,5 % au niveau européen. Pour les produits animaux, la réduction est significative dans les œufs (-81%) et le lait de vache (-87%).

Vous avez participé à une étude, publiée en 2018, révélant une diminution de 25% du risque de cancer observée chez les consommateurs « réguliers » d’aliments bio comparés aux non-consommateurs.

Cette étude s’inscrit dans la plus grande étude au monde sur le sujet, BioNutriNet, et est basée sur la cohorte d’adultes Nutrinet-Santé (plus de 100 000 personnes) suivis depuis 2009 en France. Dans les taux de cancers parmi les plus fréquents dans la cohorte, on a vu de très fortes différences pour le cancer du sein chez la femme ménopausée (-34%) et le lymphome non hodgkinien (-75 %). Nous avons aussi montré une réduction du risque de surpoids (-23%) et d’obésité (-31%), de risque cardio-vasculaire (-31%) et de diabète de type 2 (-35%). Après prise en compte des autres facteurs.

L’influence que pourrait avoir la qualité intrinsèque de l’alimentation bio est difficile à quantifier de façon précise. En revanche, on a quantifié les impacts de la contamination de l’alimentation par des mélanges de pesticides : on a montré un risque fortement diminué d’avoir un cancer du sein postménopause ou un diabète de type 2 quand on n’est pas exposé à un certain mélange. Les données scientifiques sont là, françaises et aussi étrangères, il faut les prendre en considération. Il faut vraiment une prise de conscience majeure si on veut sortir de l’impasse d’un système agricole dominant qui affecte fortement la société sur le plan de la santé et de l’environnement.

Recueillis par Campagnes solidaires

BIO (Basta) dans Altermondialisme cs413-couv

Cet entretien est tiré du dernier numéro de Campagnes solidaires, la revue mensuelle de la Confédération paysanne. Le dossier publié ce mois-ci est consacré au thème « Alimentation et santé ».

Cet article est publié dans le cadre de notre partenariat avec Campagnes solidaires.

25 février 2025 par Campagnes solidaires

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26 février 2025 ~ 0 Commentaire

Tracteurs (Basta)

 tracteur

Comment le lobby des tracteurs tisse sa toile dans l’enseignement agricole

Le lobby des constructeurs de machines agricoles, Axema, a trouvé un moyen imparable pour pousser le secteur agricole à toujours plus se mécaniser et à s’endetter : ce sont les constructeurs eux-mêmes qui forment les enseignants en agroéquipement.

« La marque du tracteur dans la cour de la ferme, c’est le signal de sa réussite », souffle un agriculteur. Du tracteur classique au pulvérisateur, en passant par les moissonneuses-batteuses, la mécanisation à outrance des fermes signifie aussi davantage d’endettement, avec le risque d’une spirale infernale. D’autant que tout est fait pour que les agriculteurs se suréquipent en machines.

« Deux tiers des machines agricoles sont superflues », alerte la fédération nationale des Cuma, les coopératives d’utilisation de matériel agricole, qui encouragent le partage. Résultat : le budget consacré aux machines agricoles représente en moyenne un quart des charges dans les fermes françaises.

« Dans pratiquement tous les dossiers de surendettement que j’accompagne au tribunal, une des causes des difficultés est le suréquipement », témoigne Gilbert Godet dans un entretien accordé ce mois-ci à la revue Transrural initiatives. L’homme est conciliateur et médiateur pour les agricultrices et agriculteurs en difficulté dans la Marne. Il suit une trentaine de dossiers de surendettement chaque année. Le suréquipement, ce sont des machines agricoles qui ne sont pas utilisées à la hauteur de l’investissement. C’est par exemple « avoir une moissonneuse-batteuse en propre alors qu’on peut la partager à au moins quatre », illustre le médiateur.

Des formateurs rémunérés par les industriels

À l’échelle nationale, moins de 10 % seulement des machines agricoles sont mutualisées entre agriculteurs. Cette mutualisation n’est absolument pas dans l’intérêt économique des constructeurs. Ceux-ci sont représentés par une discrète mais puissante organisation patronale, Axema. Regroupant près de 250 constructeurs et importateurs de machinerie agricole, ce groupement pousse à ce que chaque exploitation investisse dans son propre matériel. Selon les chiffres d’Axema, la vente de machines agricoles en France est évaluée à 7,25 milliards d’euros en 2023. Par comparaison, le matériel mutualisé rapporte 522 millions d’euros seulement. Soit quatorze fois moins.

Axema a trouvé un moyen imparable pour entretenir la fascination pour le matériel agricole, dès le lycée agricole. Ce sont les constructeurs qui forment les enseignants en agroéquipement, celles et ceux qui seront ensuite chargés de former les jeunes agriculteurs et agricultrices en matière de machines agricoles. Axema assume complètement ce rôle.

Le syndicat est membre de l’Aprodema, une association qui organise chaque année, depuis plus de vingt ans, des universités d’été à destination des enseignants en lycée agricole ou professionnel, des maisons familiales rurales ou bien des centres de formation agricole. Le but est explicite : « Les informer sur les évolutions et les innovations de la filière. »

Chaque université d’été annuelle dure trois jours, et reçoit 85 professeurs au titre de leur formation continue. Les ateliers s’enchaînent, animés par des formateurs présentés comme « responsables produits » et rémunérés par les industriels. Ici, deux récents modèles de moissonneuses-batteuses. Là, deux marques de nouveaux robots autonomes. « Cet événement est une réelle opportunité d’échange constructif entre le monde de l’enseignement et le monde des industriels sur les nouveautés et les nouvelles technologies de la filière », vante l’Aprodema.

« Rouleau compresseur »

Les formations dispensées par les représentants des constructeurs remplissent un vide en la matière. « Hormis cette offre privée de formation, les enseignant·es sont relativement livrés à eux-mêmes pour acquérir de nouvelles connaissances » souligne des chercheuses qui ont participé à ces universités d’été. Elles notent un recul marqué de l’État depuis les années 1980 dans la production de savoirs en agroéquipements. Les formations universitaires publiques dans ce domaine sont devenues très rares. Cette absence d’offre de formation alternative conduit au « poids déterminant du secteur privé du machinisme agricole dans la transmission des savoirs », analysent les chercheuses.

C’est donc sous la bannière du constructeur New Holland que se sont tenues les dernières universités d’été organisées par l’Aprodema. La multinationale New Holland (un conglomérat formé par les filiales de Fiat et Ford en véhicules agricoles) fait partie des cinq constructeurs – avec John Deere, Fendt, Claas et Massey Ferguson – à se partager deux tiers du marché mondial des tracteurs neufs. Dans une vidéo revenant sur ces journées, le syndicat Axema conclut ainsi : « Merci à John Deere, Krone, Manitou, Amazone, A à Z performance, JCB, Lemken et New Holland pour avoir transmis leurs savoir-faire à travers ces différents ateliers. »

Ce poids des constructeurs dans l’enseignement agricole « est un énorme rouleau compresseur alors qu’on sait qu’un des principaux leviers pour un meilleur revenu dans le secteur, c’est de limiter les charges de mécanisation », réagit Blandine Passemard, doctorante en ergonomie et qui mène actuellement une thèse au sein de la fédération régionale des Cuma en Auvergne-Rhône-Alpes.

Comment en arrive-t-on à une telle dépendance de l’enseignement public vis-à-vis du secteur privé ? Tout commence par la difficulté pour les établissements scolaires d’acquérir en propre les équipements nécessaires aux ateliers, en raison du coût très élevé des machines. Face à ces prix exorbitants, les établissements louent, par exemple, des tracteurs à des concessionnaires locaux. Les établissements tentent aussi de diversifier ce type de partenariats afin de multiplier les possibilités de stages pour les élèves.

Une fois le partenariat établi, les cours en atelier portent régulièrement sur le diagnostic des pannes. Or, ce diagnostic repose précisément sur la documentation fournie par le concessionnaire. Résultat : les contrats de location de matériel intègrent l’accès à la documentation qui devient un support de cours indispensable pour les enseignants. Leur support pédagogique est donc principalement lié à une marque et un modèle en particulier. « Beaucoup d’enseignants sont ou ont été agriculteurs. Ils ont eux-mêmes pratiqué. Ils sont en dialogue avec les professionnels, ont besoin de matière pour leurs cours, et conservent leur esprit critique », nuance Blandine Passemard.

Autoconstruction

Le fonctionnement des machines est aussi de plus en plus complexe, et les innovations sont quotidiennes. Cela oblige les enseignants à se mettre constamment à jour concernant les dernières nouveautés. Or, ces connaissances ne peuvent être acquises que par l’intermédiaire des concessionnaires et des constructeurs. Lors des ateliers menés par les constructeurs, la place des questions environnementales dans la diffusion des savoirs autour des agroéquipements est très marginale. Ce qui compte avant tout, c’est de former à la prise en main des machines.

Pour l’ergonome Blandine Passemard, « cet énorme rouleau compresseur n’empêche pas des initiatives portées par des individus, structures et interconnaissances fortes sur un territoire ». Dans le Rhône, les agriculteurs réunis au sein de la Cuma de l’Intrépide collaborent depuis plusieurs années avec la maison familiale rurale de Saint-Romain-de-Popey. Les élèves dans des cursus agroéquipement viennent réaliser l’entretien de certaines machines, en présence des agriculteurs adhérents de la Cuma qui viennent les aider, indépendamment de l’influence directe des constructeurs.

Dans la Loire, des élèves en brevet professionnel de responsable d’entreprise agricole et en bac professionnel de maintenance ont coopéré avec la Cuma de Roche pour concevoir un prototype de machines visant à récolter de la semence de prairies. Le matériel a été conçu avec des agriculteurs en vue de collecter des graines de prairies naturelles qui leur coûteraient cher s’ils devaient les acheter pour les ressemer. Une manière de faire des économies tout en maintenant de la biodiversité, grâce à la sélection de variétés locales robustes adaptées aux sécheresses.

« Les élèves sont certes souvent fascinés par les gros matériels, mais ils sont aussi très élogieux des agriculteurs qui pratiquent l’autoconstruction et savent travailler la ferraille directement pour adapter les matériels à leurs besoins », atteste un article de recherche du collectif Polma qui rassemble des paysans, des paysannes, et des sociologues.

« On mène un travail de longue haleine pour que, dans l’avenir, les agriculteurs ne s’endettent pas sur de l’équipement dont ils n’ont pas forcément besoin et qu’ils pourraient partager », résume Blandine Passemard. Avis aux ministères de l’Agriculture et de l’Éducation nationale qui n’ont cessé depuis quarante ans de déléguer la transmission des savoirs au secteur privé. En omettant la force et l’intelligence des collectifs de travail.

26 février 2025 Sophie Chapelle

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26 février 2025 ~ 0 Commentaire

Roulotte (Reporterre)

 

roulotte

« Gens du voyage, tiny houses… Il faut protéger tous ceux qui vivent en habitat léger »

Alors que les habitants des tiny houses bénéficient d’une image positive dans le milieu écologiste, les gens des voyages et leurs caravanes sont victimes de discrimination. Une situation que dénonce l’auteur de cette tribune.

Les tiny houses suscitent un engouement croissant en France. Présentées comme une alternative écologique, minimaliste et économique, elles bénéficient d’une image positive dans la presse et le milieu écologiste. Qualifiées de « petites maisons nomades et écologiques », elles promettent une « vie de bohème avec tout le confort ».

Mais pourquoi les gens du voyage, les Voyageurs, dont l’habitat mobile est bien antérieur à cette tendance, ne sont-ils jamais perçus comme des promoteurs d’un mode de vie respectueux de l’environnement ? Pourquoi la presse multiplie-t-elle les articles élogieux sur les tiny houses, tout en ignorant la réalité des caravanes et les obstacles rencontrés par ceux qui y vivent ?

D’un point de vue juridique, tiny houses et caravanes relèvent des mêmes restrictions urbanistiques. Elles sont toutes deux des résidences mobiles, une fois les roues enlevées elles deviennent éventuellement des résidences démontables. Dans les deux cas, leur installation sur un terrain privé est soumise aux règles du Plan local d’urbanisme (PLU) et à l’accord du maire. Une installation sans autorisation expose à des sanctions pénales, astreintes et lourdes amendes.

Le racisme, un facteur de poids

Si les tiny houses ne sont pas épargnées par les refus d’installation (il ne faudrait pas nier les difficultés rencontrées par ceux qui y vivent), elles bénéficient parfois d’une certaine tolérance ou d’adaptations du PLU sur demande. Globalement, leur image positive leur permet d’être mieux acceptées qu’une caravane, a fortiori lorsque celle-ci est habitée par des gens du voyage. Car il y a un facteur de poids entre les deux situations : le racisme.

Là où la tiny house est perçue comme un choix de vie alternatif, la résidence mobile n’en est pas un pour les Voyageurs. Il ne s’agit pas d’un choix, mais d’un type d’habitat hérité, qui va de pair avec une façon de vivre, qui croise des pratiques itinérantes, des pratiques culturelles anciennes et des traditions séculaires, et qui permet d’évoluer dans une sphère de sociabilisation que les Voyageurs appellent « être sur le voyage ».

Le rejet de la caravane est le corollaire du rejet des gens du voyage. Ce n’est pas seulement un problème d’urbanisme, mais une exclusion systémique, qui produit de la relégation avec tous les effets qu’on lui connaît, notamment sur la santé. Les conséquences de cette exclusion vont bien au-delà : accès limité à l’eau et à l’électricité, refus de scolarisation, impossibilité de se domicilier, difficultés à recevoir du courrier ou à bénéficier de services publics. Là où la tiny house est valorisée comme un choix innovant, la caravane reste un marqueur de discrimination systémique.

Un héritage antitzigane profondément enraciné

Ce traitement différencié trouve ses racines dans un passé de répression des Voyageurs. En 1912, la France instaure un statut ethnique de nomade, visant explicitement les Bohémiens, les Romanichels, les Tziganes et les Gitanos. Ce statut, qui imposait un fichage strict, servira de base aux persécutions raciales entre 1940 et 1946. Après la guerre, face à une sédentarisation croissante des Voyageurs, l’urbanisme devient progressivement un outil d’exclusion : la réglementation limite drastiquement la durée de stationnement des caravanes, rendant impossible toute installation pérenne.

En 2012, l’Association nationale des gens du voyage citoyens (ANGVC) révélait que 95 % des communes interdisent de manière absolue et générale le stationnement des résidences mobiles dans leur PLU, contraignant des milliers de Voyageurs (ceux qui ne voyagent plus et les plus modestes) à vivre dans des aires d’accueil inadaptées. Faute de perspectives légales en matière de logement, certains naissent et meurent sur des aires d’accueil sommaires, proches d’usines polluantes et à l’écart des villes.

Lorsqu’ils achètent un terrain, les Voyageurs restent sous la menace de l’arbitraire municipal. Se maintenir sur un terrain relève donc de la tolérance des élus locaux, d’un miracle administratif ou des rares PLU qui ne prévoient aucune interdiction. Les refus de raccordement à l’eau et à l’électricité, les batailles judiciaires pour obtenir une autorisation d’installation, ou encore l’action des Sociétés d’aménagement foncier et d’établissement rural (Safer) pour bloquer spécifiquement leurs acquisitions foncières témoignent de cette difficulté.

L’écologie, un prétexte à l’exclusion ?

En parallèle, l’écologie est un levier régulièrement utilisé pour justifier l’exclusion des Voyageurs. Là où les tiny houses sont célébrées pour leur sobriété énergétique, les caravanes sont perçues comme des éléments indésirables, polluant par leur simple présence. Il suffit de taper « gens du voyage » dans un moteur de recherche pour trouver des dizaines d’exemples récents. Ces articles sont, par exemple, assez représentatifs : « Les gens du voyage s’installent à côté d’un hôpital : “nous craignons la pollution des eaux qui alimentent les 285 résidents” » ; « Des toilettes à ciel ouvert : un grand rassemblement des gens du voyage inquiète un maire de Gironde » ; « La future aire de grand passage suscite l’inquiétude chez les habitants. [...] Selon eux, le bois de Frontenex n’est pas adapté à l’accueil des caravanes : risques de pollution, d’incivilités mais aussi de crues qui mettraient les occupants en péril en cas d’orage violent » ; etc.

L’argument environnemental est parfois utilisé comme un levier de relégation, soit que les gens du voyage polluent, soit que l’environnement serait trop pollué pour les accueillir, soit que leur accueil pourrait porter atteinte à l’environnement. Dans tous les cas le résultat est le même : les gens du voyage d’accord, mais pas ici. C’est dans cette logique que s’inscrit de nombreuses interventions de parlementaires à l’Assemblée nationale, ainsi que la récente proposition de loi du député macroniste Ludovic Mendes, missionné par le ministre de l’Intérieur Bruno Retailleau.

Déposée en février 2025, elle vise à instaurer un « préjudice écologique avéré ou imminent » comme nouveau motif légal d’évacuation forcée des gens du voyage. Ce texte assimile implicitement les installations des Voyageurs à des atteintes à l’environnement, sans preuve tangible de dommages réels. Il ajoute un outil juridique de criminalisation, renforçant l’exclusion sous couvert de protection environnementale. Il est urgent de repenser politiquement la question de l’habitat léger. Trop souvent, la gauche hésite à défendre l’habitat léger, craignant d’affaiblir la revendication du droit au logement ou de légitimer un modèle qui serait le reflet d’une précarité qui prend de l’ampleur.

« Les luttes écologistes doivent s’emparer du sujet »

Il n’est évidemment pas question de nier la crise du logement qui frappe les plus précaires, ni qu’une part importante des personnes qui vivent en caravane, tiny house, mobil’home ou autre habitat léger, subissent cet habitat et y vivent pour des raisons de pauvreté. Mais il faut articuler ces différentes réalités : celles qui résultent du choix, celles qui résultent du subi, celles qui résultent de l’héritage culturel. Toutes les personnes qui vivent en habitat léger ont intérêt à se soucier des droits des Voyageurs, car les restrictions créées contre eux finissent toujours par porter atteintes aux libertés de tous.

Il est indispensable de penser cette question sous l’angle du racisme environnemental. Ne pas le faire, c’est ignorer que l’exclusion des Voyageurs ne repose pas uniquement sur des considérations urbanistiques ou économiques, mais bien sur des logiques de discrimination structurelle. En somme, éviter le sujet c’est maintenir les Voyageurs à l’écart. Par ailleurs, il faut offrir une protection plus grande à celles et ceux qui vivent en habitat léger. L’urgence est d’intégrer ces formes d’habitat dans les documents d’urbanisme, d’accorder aux résidences mobiles des garanties similaires à celles d’un logement traditionnel et d’adapter les dispositifs d’aide existants.

Si la tiny house est valorisée comme un modèle écologique et innovant, alors les luttes écologistes doivent s’emparer du sujet dans une logique de justice environnementale, sociale et antiraciste. Sauf à vouloir contribuer à l’oppression des Voyageurs, la gauche écologiste doit mener la bataille de l’habitat léger pour tous — tout en reconnaissant les discriminations spécifiques qui frappent les Voyageurs. L’habitat léger n’est pas un simple débat urbanistique : c’est une question politique, qui touche à la justice sociale, à l’égalité des droits et à la lutte contre le racisme environnemental.

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25 février 2025 ~ 0 Commentaire

Internationalisme, campisme ( Portugal)

portugal

 Les deux identités de la gauche labellisée

La gauche conservatrice a un passé et un présent, et tous deux nous la définissent comme un projet politique : son passé est le campisme et son présent est le sectarisme.

La distinction politique entre la gauche et la droite, bien qu’elle ait eu des expressions antérieures, comme la lutte contre le féodalisme et l’esclavage, a pris sa forme moderne avec la Révolution française.

À l’époque, la « montagne » était la gauche jacobine et les alliances entre les différentes factions bougeaient de manière gélatineuse, jusqu’à ce qu’elles soient toutes écrasées par le coup d’État du 18 Brumaire et la victoire de Napoléon Bonaparte. Mais la référence à la géographie politique de la gauche et de la droite est restée.

Toutefois, cette cartographie a toujours varié en fonction des circonstances historiques : la révolution soviétique a redéfini la ligne de partage entre les deux fractions du parti social-démocrate russe, les bolcheviks et les mencheviks, et a rapproché de la première une partie des socialistes-révolutionnaires, qui étaient alors la plus grande force électorale et organisaient les masses paysannes.

La gauche allemande a également évolué : Karl Kautsky, qui était considéré comme l’héritier théorique d’Engels, s’est retiré du parti social-démocrate pour protester contre son soutien à la guerre et a rejoint le parti social-démocrate indépendant, qui comptait Rosa Luxemburg parmi ses membres (mais il est ensuite retourné au SPD). Mais depuis la création de l’URSS, une partie importante de la gauche s’est définie comme faisant partie de ce camp politique, malgré sa dégénérescence et la répression stalinienne – Staline a assassiné plus de communistes dans son pays qu’Hitler ne l’a fait en Allemagne. L’obéissance au Kremlin est devenue leur identité. C’est là l’origine du campisme.

Campisme

Un siècle plus tard, et 35 ans après la chute du mur de Berlin, symbole de la fin de ce système et début de l’éclatement de l’URSS, il peut sembler anachronique que la gauche conservatrice s’identifie à un « camp » qui n’existe pas. Pourtant, cette fantasmagorie a une histoire et elle est puissante : pour certains partis communistes, le soutien à Poutine et au régime russe relève simplement de la continuité et de la nostalgie du stalinisme et du monde bipolaire au sein duquel son pouvoir militaire et symbolique se déployait.

Cela se fait au nom de l’histoire, même si celle-ci est déjà terminée. Cet attachement peut prendre de multiples formes, y compris les plus tortueuses, comme celle qui consiste à affirmer que Poutine est aujourd’hui le chef de guerre de la lutte contre le fascisme et que cela justifie donc une certaine indulgence à l’égard de la répression à l’intérieur du pays, du traitement réservé aux droits des femmes, du fanatisme religieux, de la complicité avec les oligarques et du soutien dont ils bénéficient, et même du pillage des ressources de son propre pays.

D’autre part, les preuves sont suffisantes pour démontrer le paradoxe de ce discours opposé au fascisme avec en même temps l’engagement en faveur de la victoire de Trump, le financement de Le Pen, la relation étroite avec Salvini, le soutien à l’extrême droite roumaine et d’autres encore. S’il y a une montée des forces fascistes, le camp poutinien en est complice.

En tout état de cause, déterminer sa politique en fonction d’une obédience internationale a toujours été un piège pour la gauche. Le faire lorsque son phare est un régime autocratique et ploutocratique est encore plus bizarre et crée des contradictions insurmontables : quiconque qualifie la Chine de système socialiste de notre époque doit se taire lorsqu’une entreprise d’État chinoise achète EDP( groupe de production d’électricité) ou REN (gaz), dans une opération qui procède de son accumulation de capital à l’échelle internationale.

L’alignement sur Moscou lors de l’invasion de l’Ukraine est une autre de ces contradictions, étant donné que le président russe a explicitement indiqué sa motivation : corriger l’erreur de Lénine, qui avait accepté l’autodétermination ukrainienne au lieu de maintenir les frontières héritées de l’empire tsariste.

Outre cet enfermement dans l’obéissance au régime poutinien, le campisme a aussi des effets domino. Il implique une succession de compromis avec d’autres régimes qui ont pu être, ou peuvent être considérés comme des alliés réels ou potentiels dudit « camp ».

Dans le cas du PCP, comme dans celui d’autres partis communistes et de forces conservatrices de gauche, c’est l’un des facteurs qui a motivé le soutien à des régimes tels que celui du MPLA en Angola. Il y avait là une continuité : certains dirigeants du mouvement de libération dirigé contre le colonialisme portugais avaient collaboré avec le PCP sous le régime salazariste et avaient vécu en exil dans les pays de l’Est.

Ce lien de solidarité était une réalité historique. Cependant, les processus d’indépendance et de guerre civile ont conduit ces organisations à faire des choix, dont l’un a été l’assassinat de militants communistes à Luanda en 1977, comme par exemple ce fut le cas de Sita Valles. Même s’il n’y avait pas eu ce genre d’affaire, il était clair, surtout depuis le règne de José Eduardo dos Santos, que le régime angolais avait été transformé en un instrument destiné à protéger par la force un système d’accumulation basé sur la corruption au profit des familles dirigeantes. En fabriquant l’image d’un gouvernement progressiste, le campisme a camouflé le vol.

Le campisme a également pour résultat de protéger les régimes corrompus, en particulier lorsqu’ils se perpétuent grâce à la fraude électorale. Le cas actuel du Mozambique est une illustration de cette contradiction. Le Frelimo prétendait avoir remporté la plus grande victoire électorale de son histoire, avec 70 % des voix ; ce résultat aurait dépassé le soutien obtenu par le dirigeant le plus populaire que le parti ait connu dans son histoire, Samora Machel.

Cependant, les preuves de fraude, la dissimulation des registres électoraux et l’absence de vérification des urnes ont renforcé la certitude que les résultats avaient été falsifiés, à un moment où l’isolement du régime s’exprimait par l’ampleur des protestations populaires. Le même phénomène s’est produit au Venezuela, avec le refus de communiquer les listes électorales.

Le soutien des campistes à ces régimes a donc un prix : la gauche conservatrice accepte de renoncer au principe démocratique de la transparence électorale, ce qui n’est pas sans conséquence sur ce qu’elle peut dire dans son propre pays. Ce soutien est encore aggravé par la sympathie pour le régime chinois, qui est constitutionnellement fondé sur le principe du parti unique.

Les effets en sont considérables : si l’on veut lutter contre la poussée de l’extrême droite, renoncer à la règle démocratique et à l’exigence du respect de la sincérité du scrutin est une erreur qui fait le jeu de l’ennemi. Ce faisant, la gauche campiste dit à son peuple qu’elle se dispense de respecter les droits démocratiques qui ont été conquis par les mouvements ouvriers et populaires. Ce qui caractérise le campisme, c’est le renoncement à l’internationalisme et à la lutte socialiste et donc à la seule véritable traduction concrète de la lutte démocratique contre le fascisme.

Sectarisme

Le campisme a d’autres facettes, et je voudrais attirer votre attention sur l’une d’entre elles. Récemment, le Parti communiste brésilien a connu une scission, celle d’une faction connue sous le nom de PCB-RR (Reconstruction révolutionnaire).

Je ne veux pas entrer dans les détails de cette histoire ou de l’évolution de ce parti qui, au milieu du siècle dernier, était la force la plus importante de la gauche brésilienne. Lui aussi était un parti campiste, et Luís Carlos Prestes, son secrétaire général, lorsqu’il a décidé de soutenir le candidat du président Getúlio Vargas à São Paulo en 1945 (et qu’ils ont participé ensemble à un meeting), s’est allié à celui qui l’avait emprisonné pendant neuf ans et qui avait livré sa femme, Olga, juive et d’origine allemande, aux autorités nazies (elle est morte dans un camp de concentration en 1942).

Aujourd’hui, le PCB est un parti marginal, son candidat à la présidence en 2022 a obtenu 0,04 % des voix (au Portugal, même le MAS a obtenu 0,1 % lors des dernières élections). La scission qu’il a subie n’a aucune portée internationale, mais elle ne fait que souligner un fait : elle est née d’un débat interne mené par des influenceurs qui se servent de la communication sur les médias sociaux pour propager le sectarisme.

Vous reconnaîtrez peut-être ce schéma dans la vie politique qui vous est plus familière, où, à l’utilisation des médias sociaux à des fins de communication, se substitue la focalisation du débat politique sur une dramatisation émotionnelle au travers d’une cascade virtuelle. Ce discours toxique a pour objectif de mettre à distance les courants avec lesquels le sectaire pourrait avoir des accords occasionnels dans la lutte sociale, et quiconque a suivi la campagne des militants du PCP contre le choix du Bloc d’affronter au Parlement le discours provocateur de la droite le 25 novembre a pu se faire une idée de ce qu’est ce sectarisme infantile.

Mon propos est aussi le suivant : par nature, les discours sectaires ont besoin de se placer dans un lieu inexpugnable et c’est pourquoi ils se multiplient sur les réseaux virtuels. Ils se plaisent mieux dans un espace public qui est en fait privé et l’utilisation des réseaux favorise leur agressivité et leur discours apocalyptique, puisqu’il y est normal de crier pour attirer l’attention.

Or, si la politique se transforme en une surimpression de cris dans le monde virtuel, comme dans l’exemple brésilien ou comme dans celui de cette prolifération d’insultes le 25 novembre, elle subit une contamination par intoxication. L’espace virtuel déforme l’ensemble du discours politique et la rationalité de l’appel à la mobilisation sociale.

Il est de fait manipulé par la forme moderne du capital et, en somme, se calque sur le modèle du trafic de stupéfiants : un réseau social propose une assistance globale pour une bonne partie de la vie humaine, se constituant ainsi comme une réalité parallèle qui sélectionne des activités à haute intensité émotionnelle ; il repose sur la diffusion d’une drogue hallucinogène (les utilisateurs ont accès à des produits et à des actions qui libèrent de la dopamine, le neurotransmetteur qui nous offre le plaisir de la récompense) ; il est dominé par des entreprises géantes qui en contrôlent le trafic/commerce ; elle crée ainsi une dépendance qui prend la forme d’une anxiété et d’une perte de compétences sociales ; elle se retrouve dans de multiples moyens de divertissement, de travail et de culture, y compris l’engagement dans des systèmes qui promettent des changements dans sa vie par l’immersion dans le monde virtuel.

Cette magie institue l’individu sans individualité : le prototype de l’habitant du métavers est une nouvelle espèce, née de la marchandisation de l’attention, du tourisme dans les savoirs triviaux, de la dégradation du langage et de l’effondrement de la notion de temps. Il s’agit d’une forme d’universalisation du capitalisme, qui s’étend et subjugue tout et tous, vampirisant les émotions et les pensées. Dans ce monde, l’acteur ou l’actrice politique des réseaux virtuels est un. sectaire par nature.

Si le campisme est ce qui définit la gauche conservatrice dans le monde et si son langage est une illusion de guérilla virtuelle, il ne lui reste plus rien de ce qui fait un projet socialiste.

Francisco Louça

https://www.afriquesenlutte.org/

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25 février 2025 ~ 0 Commentaire

Trump-Poutine (SOAS)

 

Trump-Poutine (SOAS) dans Altermondialisme

Paix entre néofascistes et guerre contre les peuples opprimés

Que Washington et Moscou aient choisi le royaume saoudien comme lieu de réunion entre leurs délégations pour discuter des perspectives de la guerre qui se déroule en Ukraine depuis que les forces russes ont envahi ce pays il y a trois ans, est une illustration claire des profonds changements qui se produisent sous nos yeux dans les affaires internationales.

La manière même dont la réunion a été organisée est tout à fait cohérente avec le lieu : l’administration néofasciste de Donald Trump n’a pas cherché à promouvoir la paix entre les parties belligérantes dans le cadre du droit international et des Nations unies, comme la Chine n’a cessé d’y appeler depuis le début du conflit, mais cherche plutôt à conclure un accord direct avec le régime également néofasciste de Vladimir Poutine aux dépens du peuple ukrainien.

Il est donc tout à fait naturel que les deux parties n’aient pas choisi une arène neutre et conforme au droit international, comme les Nations Unies, mais une arène conforme à leur nature, même si son régime despotique est de type traditionnel.

Ce qui rend la scène encore plus hideuse, c’est que les États-Unis sont un partenaire à part entière dans la guerre génocidaire menée contre le peuple palestinien à Gaza, qui se déplace actuellement en partie vers la Cisjordanie.

L’administration Trump s’est même empressée d’annuler les mesures limitées que l’administration précédente avait prises pour parer au blâme, en particulier le gel de l’exportation de bombes d’une tonne qui ont grandement contribué à la destruction de la bande de Gaza et à l’extermination de sa population, ainsi qu’à la guerre d’élimination qu’Israël a menée contre le Hezbollah au Liban.

Au contraire, comme prévu, excepté par ceux qui ont tenté d’échapper à l’amère réalité en projetant leurs désirs sur elle (voir « Deux mythes sur le cessez-le-feu à Gaza », 22 janvier 2025), la nouvelle administration a surpassé la précédente dans la surenchère sioniste avec l’appel de Trump à déporter sans retour les résidents de la bande de Gaza, c’est-à-dire à mettre en œuvre ce que le droit international appelle « nettoyage ethnique » – un crime contre l’humanité.

L’axe néofasciste sioniste-américain converge avec la Russie de Poutine dans la haine raciale des peuples opprimés. Moscou a excellé dans ce domaine, non seulement par son agression coloniale contre l’Ukraine, répudiant sa souveraineté nationale, mais aussi dans la région arabe, où elle a joué un rôle clé dans la destruction de la Syrie et l’extermination d’un grand nombre de ses habitants, tout en étant ouvertement complice de l’État sioniste en lui permettant de bombarder à volonté les sites iraniens en Syrie (dans le cadre de la rivalité entre les influences russes et iraniennes dans ce pays).

Le ministre russe des affaires étrangères a même comparé la guerre de Moscou contre l’Ukraine à la guerre d’Israël contre Gaza, assimilant la description poutiniste des dirigeants ukrainiens comme nazis à la description sioniste du Hamas comme nazis. Notons également que la réaction de Moscou au projet criminel d’expulsion énoncé par Trump a été modérée, même par rapport à la condamnation explicite émise par certains des alliés traditionnels de Washington, comme la France.

Voici maintenant les Américains impliqués dans le meurtre de centaines de milliers de Gazaouis qui rencontrent les Russes impliqués dans le meurtre de centaines de milliers de Syriens, les deux parties partageant avec l’État sioniste un mépris commun pour les droits territoriaux des peuples. Ils se rencontrent sur le territoire d’un État arabe qui, s’il se préoccupait vraiment du sort des peuples syrien et palestinien, aurait dû être si hostile aux deux parties qu’il ne leur serait même pas venu à l’idée de lui demander d’accueillir leur réunion.

Ce à quoi nous assistons en réalité n’est rien de moins qu’une refonte de la carte politique du monde, passant de la confrontation de la Guerre froide entre un bloc occidental qui prétendait défendre les valeurs de la démocratie libérale (et les a constamment trahies) et un bloc de l’Est dans lequel prévalaient des régimes dictatoriaux – de cette confrontation à la dissolution du système occidental, après le système oriental, par suite de la crise mortelle qui a frappé la démocratie libérale et de la montée mondiale du néofascisme (voir « L’ère du néofascisme et ses particularités », 5 février 2025).

L’ère de la Nouvelle Guerre froide, qui a suivi l’effondrement de l’Union soviétique et la dissolution de son bloc, a constitué la transition en combinant loi de la jungle et néolibéralisme effréné. Washington a joué le rôle principal dans la prédominance de ces deux caractéristiques sur le droit international et le développement fondé sur l’État social et la protection de l’environnement.

Nous assistons aujourd’hui à une convergence entre néofascistes aux dépens des peuples opprimés, car le nouveau fascisme, comme l’ancien, nie ouvertement le droit des peuples à l’autodétermination. Les gouvernements libéraux restants en Europe sont stupéfaits, après avoir compté pendant huit décennies sur la protection américaine du système occidental sans oser former un pôle mondial indépendant de Washington, non seulement militairement, mais principalement dans le domaine de la politique étrangère.

Le résultat est que les peuples opprimés du monde ne sont plus en mesure de profiter de la divergence entre grandes puissances qui existait dans le passé, mais doivent maintenant mener leurs luttes de résistance et de libération dans des conditions plus difficiles que jamais. Le cas de la Palestine en est la preuve la plus évidente.

Traduit de ma tribune hebdomadaire dans le quotidien de langue arabe, Al-Quds al-Arabi, basé à Londres. Cet article est d’abord paru en ligne le 18 février. Vous pouvez librement le reproduire en indiquant la source avec le lien correspondant.

Gilbert Achcar Professeur, SOAS, Université de Londres

Médiapart
https://blogs.mediapart.fr/

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25 février 2025 ~ 0 Commentaire

El Watan

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Trump et les néonazis de Tel-Aviv

On le savait raciste, suprémaciste, génocidaire, voilà que depuis sa dernière visite à Washington, où il a rencontré Donald Trump l’impérialiste qui ne cache pas sa volonté de conquérir les pays voisins des Etats-Unis, le Canada, le Mexique, Panama, son canal et même le froid Groenland, le Premier ministre sioniste, Benyamin Netanyahu, vient de dévoiler sa nature néo-nazie, arabophobe et islamophobe. Il s’est dit « prêt à finir le travail entrepris au lendemain du 7 octobre » à Ghaza, en Cisjordanie et dans le reste du Proche-Orient.

Encouragé par les propos irresponsables du Président américain, franchement impérialistes et néocoloniaux, le Premier ministre de l’entité sioniste reprend à son compte l’expression favorite de tous les Néo-Nazis d’Europe et d’ailleurs, regrettant que la « solution finale », c’est-à-dire l’extermination de tous les juifs du Vieux Continent, pensée par Adolf Hitler et tous les Nazis, n’a pas été menée à son terme.

A savoir la poursuite de l’ethnocide des juifs d’Europe jusqu’au bout, un rêve que caressent beaucoup de groupuscules et de leaders d’extrême droite européenne qui vont jusqu’à arborer les croix gammées et croix de fer des « Waffen SS » hitlériennes sur leurs poitrines et à adopter le salut nazi dans leurs meetings où ils jurent de « casser de l’Arabe et du musulman ».

Telle est la vraie nature, aujourd’hui en 2025, de ces descendants de déportés de survivants des camps de la mort de la Seconde Guerre mondiale, d’Auschwitz et d’ailleurs, transformés en génocidaires, en ordonnateurs du nettoyage ethnique des Palestiniens de Ghaza et de Cisjordanie.

A vrai dire, Netanyahu et les suprémacistes racistes de son gouvernement sont les indignes continuateurs de l’entreprise d’extermination des populations arabes de Palestine, pensée et exécutée par les fondateurs de l’entité sioniste que furent Ben Gourion, Golda Meir et autre Shimon Pérès à partir de 1947. Une déportation des Palestiniens, accompagnée d’une dépossession de leurs terres ancestrales menée par les groupes terroristes sionistes de l’Irgoun, de la Haganah, du Stern…

Des villes comme Jaffa, Haifa ou Tibériade furent vidées, par la force des armes, de leurs populations arabes et annexées au territoire attribué aux juifs par le plan de partage de la Palestine décidé par l’Organisation des Nations unies.

Entre 900 000 et un million de Palestiniens prirent ainsi les chemins de l’exil, abandonnant les terres de leurs ancêtres à jamais. Une tragédie qui allait marquer la conscience collective du peuple palestinien comme une grande catastrophe, la « Naqba ».

Tout au long de ces 77 dernières années, la politique expansionniste sioniste d’Israël a pris prétexte des guerres avec les pays arabes voisins pour étendre sa domination, par l’annexion de nouveaux territoires comme le Golan syrien et l’implantation de colonies en Cisjordanie conquises sur les terres palestiniennes où se sont installés près d’un million de colons juifs en moins de trente ans.

Tant et si bien que ces annexions territoriales ont permis l’expansion d’Israël de plusieurs milliers de kilomètres, rendant impossible la viabilité du territoire palestinien en Cisjordanie du fait même de l’implantation de colonies sionistes, accompagnée d’une politique ségrégationniste à l’égard des populations arabes palestiniennes, y compris à Jérusalem-Est.

Ainsi, un véritable Etat d’apartheid s’est mis en place depuis ces trente dernières années. Apartheid sioniste dénoncé par les organisations internationales des Nations unies et les différentes ONG humanitaires qui ont déploré les violations du droit international, à travers la poursuite du nettoyage ethnique sioniste vis-à-vis des populations arabes de Palestine.

La guerre génocidaire ordonnée par Benyamin Netanyahu et les suprémacistes racistes de son gouvernement au lendemain du 7 octobre 2023 contre les Palestiniens de Ghaza et de Cisjordanie vient d’être confortée par les propos de l’impérialiste Donald Trump qui préconise de vider Ghaza de sa population et de la transférer vers d’autres pays voisins, sans droit de retour.

Une proposition ignoble, émanant du chef de la première puissance mondiale que les sionistes israéliens ont toujours rêvé à sa concrétisation depuis plus de 77 ans. Rien de moins que la poursuite du nettoyage ethnique, mené « au pas de charge », sous le scandaleux prétexte de faire de Ghaza la riviera du Proche-Orient. Proposition applaudie à tout va par les génocidaires sionistes, il va de soi.

mardi 25 février 2025 / Réda Bekkat Tiré d’El Watan.

El Watan est un quotidien « non gouvernemental » algérien

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24 février 2025 ~ 0 Commentaire

Elections allemandes (APLUTSOC)

 

Elections allemandes (APLUTSOC) dans A gauche du PS

Elections allemandes : entre deux eaux.

Ce matin les résultats, non totalement complets, annoncés des élections au Bundestag allemand sont : CDU-CSU 28,52%, 208 sièges, AfD 20,8 %, 152 sièges, SPD 16,41%, 120 sièges, Grünen 11,61%, 85 sièges, Die Linke 8,77%, 64 sièges, BSW 4,97%, pas de sièges, FDP 4,33% pas de sièges. Le taux de participation, de 83% est historiquement haut.

Les commentaires médiatiques sont axés sur la vague d’extrême droite. Elle est bien entendu réelle, mais la poussée de l’AfD correspond à ce qui était attendu : c’est évidemment une progression (11% aux Européennes, première percée), mais ce n’est plus une surprise, et le score n’a pas été dopé par Musk et J.D. Vance, qui l’ont peut-être même fait se tasser : les sondages donnaient ce score ou même un score légèrement supérieur depuis des semaines.

Alors que l’affaiblissement historique du SPD s’approfondit, le fait nouveau est la Remontada de Die Linke (5,5% aux Européennes), apparu, à son corps défendant (et c’est un enjeu qu’il soit ou non à la hauteur de cela), comme un vote de résistance aux forces anti-migrants et anti-ukrainiennes une fois la rupture faite avec le BSW, lequel, de très peu, ne franchit pas la barre des 5%.

Si le vote allemand ne constitue pas le basculement que voulaient Trump, Musk et Poutine, la carte du vote reconstitue de manière frappante la division de l’Allemagne d’avant 1989. Signalons qu’au forum du CPAC, aux Etats-Unis, auquel Bardella participait jusqu’au salut nazi de Steve Bannon, le vice-président J.D. Vance a déclaré que si l’Allemagne persistait dans la « censure » (?), les Etats-Unis retireraient leurs troupes : voila donc là une position impérialiste US suggérant le repartage de l’Allemagne en zones d’influences à Moscou, les même qu’avant 1989 !

Le probable chancelier CDU Friedrich Merz va dans l’immédiat tenter une coalition menant une politique capitaliste ne s’inscrivant pas dans les pressions de l’Axe Trump/Musk/Poutine, mais rappelons que c’est le même qui a opéré la première alliance parlementaire avec l’AfD, le 29 janvier, contre les migrants, alors que 28% des Allemands sont d’origine étrangère postérieure à 1945 (recensement de 2023).

Rien n’est donc joué et au final, ce ne sont ni un Merz ni un Macron qui résisteront à l’Axe Trump/Musk/Poutine, mais les peuples européens dont l’avant-garde est en Ukraine !

https://aplutsoc.org/

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