vu de grande-bretagne (socialist worker)
Les travailleurs français se sont organisés pour battre Macron
Les dirigeants syndicaux ont été lents à passer à l’action à mesure que la crise politique s’aggravait, mais les travailleurs se sont réunis et se sont organisés pour étendre leurs grèves, explique Charlie Kimber.
La semaine dernière, le président français Emmanuel Macron a fait passer son offensive sur les retraites au Parlement sans vote. Il ne disposait pas d’assez de voix de députés pour garantir l’adoption de son projet par l’équivalent de la Chambre des Communes.
Ce piétinement de la démocratie, en utilisant l’article 49.3 de la Constitution française, a déclenché une vague massive de résistance. Mais c’était aussi un défi pour l’organisation des travailleurs. Les dirigeants syndicaux ont retardé les débrayages immédiats, mais les militants de la base sont passés à l’action.
Les exemples ci-dessous ne sont qu’un aperçu d’un processus qui implique un grand nombre de travailleurs s’organisant à partir de la base. Dans certains endroits, ce processus est encouragé par les représentants syndicaux locaux et régionaux. Dans d’autres, ce sont de nouveaux militants qui émergent.
Dès l’annonce du mouvement du 49.3, les grévistes de l’équipe de nuit de la raffinerie de Normandie, en grève depuis le 7 mars, ont voté en faveur d’une fermeture complète. Il s’agit de la plus grande raffinerie de France. « Le vote a été assez serré, car les travailleurs ne veulent pas avoir l’impression d’être les seuls à agir », a déclaré Raphael à Socialist Worker.
« Nous discutons de ce qui est possible et ce qui a fait la différence, c’est qu’il s’agissait d’une gifle, d’un véritable mépris pour les gens ordinaires en France. S’il s’agissait des retraites, ce serait déjà assez grave, mais c’est maintenant beaucoup plus important. Les gens sentent que nous avons la possibilité de nous attaquer à ceux qui sont au sommet, à ceux qui ne vivent pas comme nous.
« Dans une réunion de masse, il y a ceux qui parlent des détails et ceux qui présentent une vue d’ensemble. Les deux sont importants. J’observe les visages des gens. Ils ont besoin d’être émus par le sentiment de faire partie d’une classe, et ils ont aussi besoin de savoir comment ils vont payer leur panier ».
À la raffinerie Petroineos de Lavera, près de Marseille, Sébastien Varagnol, représentant syndical CGT, a déclaré : « Les livraisons de carburant ont cessé et nous nous préparons à l’arrêt total de l’installation à partir de lundi en fin de journée. » À Paris, Lyon et Toulouse, des assemblées générales de cheminots ont voté vendredi une grève illimitée.
Alors que la grève des éboueurs parisiens s’est poursuivie le week-end dernier, les éboueurs nantais se sont également réunis et ont décidé que le 49.3 était la goutte d’eau qui faisait déborder le vase et qu’ils poursuivraient leur grève cette semaine. À Saint-Brieuc, les éboueurs ont voté à la quasi-unanimité la grève pour toute la semaine.
Alors que la coordination nationale des syndicats de l’éducation n’a appelé à la grève que « dans la mesure du possible », certains syndicats ont été poussés par la base à appeler à l’action lors d’examens importants (le Bac) cette semaine.
Aujourd’hui, de nombreux autres travailleurs se réunissent pour décider de leur réponse aux résultats des votes sur les motions de censure contre le gouvernement de M. Macron. Des millions de travailleurs à travers la France étaient prêts à se joindre à l’appel officiel à la grève jeudi de cette semaine. Mais nombreux sont ceux qui préconisent également des grèves totales et illimitées.
Comment nous, les travailleurs de l’électricité, nous battons
Les réunions de masse constituent l’élément vital de notre conflit. C’est ainsi que nous poursuivons l’action, que nous obtenons de nouvelles idées et que nous nous attaquons aux problèmes financiers et professionnels des travailleurs.
On ne peut pas mener une telle grève sans réunions. Ce n’est pas seulement une circulaire du siège qui est nécessaire.
C’est réel quand quelqu’un dit qu’il ne peut pas continuer parce qu’il n’y a pas d’argent. Nous organisons alors des collectes auprès d’autres travailleurs. Nous nous adressons aux étudiants et aux enseignants pour qu’ils nous donnent de l’argent pour continuer à nous battre. Mais il faut aussi arrêter de se contenter de financer ce que nous avons. Il faut que cela prenne de l’ampleur, et rapidement.
C’est ce dont nous parlons. Mardi dernier, nous avons décidé d’une journée de « sobriété énergétique », c’est-à-dire de coupures d’électricité ciblées.
Nous apprenons des autres. À Toulon, par exemple, les coupures ont visé les bases militaires, le conseil municipal, les grandes entreprises. Nous en avons discuté avec les grévistes, et il ne s’agit pas seulement de personnes syndiquées, cela doit être plus large.
Nous voulons tous frapper les patrons et l’administration locale, mais aussi montrer que nous sommes responsables. Nous pouvons décider de la manière dont l’électricité est acheminée. Nous ne nous contentons pas de plonger tout le monde dans l’obscurité, ce qui touche des gens comme nous et risque d’entraîner la fermeture d’un hôpital.
Les gars des barrages hydroélectriques nous disent qu’ils pourraient mettre tout le réseau hors service, qu’ils savent comment le faire. Mais ce n’est pas ce que nous voulons.
Mylan, travailleur de l’électricité, Bouches-du-Rhône
Charlie Kimber (SWP)
https://socialistworker.co.uk/