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La France insoumise : un séminaire lundi pour tenter de guérir la crise interne
Le groupe LFI se réunit au complet le 9 janvier pour un séminaire de rentrée à l’Assemblée. Alors que la crise gronde depuis le mois de décembre, les députés remettront sur le métier la question de l’organisation du mouvement.
La France insoumise a connu des rentrées sous de meilleurs auspices. Lundi prochain, à 15 heures, les 74 députés du groupe mélenchoniste se retrouveront pour un séminaire de rentrée à l’Assemblée nationale. Officiellement, l’ordre du jour n’est pas arrêté. S’il sera, bien sûr, question de la riposte à la réforme des retraites – dont le texte sera présentée le lendemain – un épais dossier figure tout en haut de la pile des sujets brûlants : la réorganisation interne au sein de LFI.
Car depuis « l’assemblée représentative ratée » du 10 décembre dernier – selon les mots d’un député expurgé de la direction – les Insoumis peinent à trouver la sortie de crise. La refonte du mouvement, aussi profonde qu’imprévue, a creusé une fracture en interne. Entre les figures exfiltrées et la nouvelle direction, les ponts sont coupés : « Il n’y a plus de son, plus d’image » métaphorise l’un deux.
Au sein d’un mouvement d’ordinaire si noyauté, les fléchettes fusent désormais par voie de presse. Si Éric Coquerel ou Alexis Corbière ont choisi de rester plus discrets, Clémentine Autain , François Ruffin ou encore Raquel Garrido se succèdent en plateau pour dénoncer le manque de démocratie dans le parti. Plusieurs de ces compagnons de route historiques espèrent crever l’abcès : « Il faut qu’on atterrisse et qu’on se dise les choses franchement », assène l’un d’eux. « Les dirigeants actuels ne peuvent pas ne pas être ébranlés », se persuade un autre mis sur la touche.
Un groupe de travail pour apaiser les tensions
Mi-décembre, pour calmer l’orage, un groupe de travail a été constitué au Palais Bourbon. Une petite dizaine de députés LFI est chargée de piloter une réflexion sur la nouvelle organisation. Parmi eux, Eric Coquerel, Marianne Maximi, François Piquemal ou encore Danielle Simonnet.
Lundi, ils vont rentrer dans le dur. Et proposer au groupe une méthode de travail semblable à celle choisie au moment de l’affaire Quatennens. Des discussions en ateliers, avant des délibé-rations dans un deuxième temps et pourquoi pas un vote à la clé. L’optimisme est toutefois mitigé. « La question est de savoir si cela sera pris en compte par Manuel Bompard… », s’interroge un député expurgé. Mardi, ce dernier a été désigné « à l’unanimité » coordinateur de La France insoumise par la nouvelle équipe aux manettes.
Malgré les décisions prises en décembre, certains veulent déjà reconstruire la maison du sol au plafond. « Nous ne voulons pas de changements cosmétiques. Il faut pouvoir identifier qui dirige réellement et que cette direction soit pluraliste », revendique l’un des déçus. Le même appelle à « repenser le lien entre les militants et le parti ». Et s’inquiète de l’opacité autour de la gestion des finances de LFI : « 8 millions d’euros vont arriver dans les caisses du parti au printemps. Nous devons savoir qui les gère et qui décide comment cet argent est alloué ».
La plupart de ces questions resteront probablement sans réponse. A minima, la nouvelle direction a promis d’élargir la coordination des espaces à de nouvelles personnalités. Un geste d’apaisement confirmé par l’eurodéputée Manon Aubry au JDD ce jeudi.
« J’ai demandé et obtenu que l’espace parlementaire (…) au sein de la coordination des espaces, puisse élargir sa représentation. Nous allons en discuter collectivement : un ou deux députés pourraient nous rejoindre ». Réponse exaspérée de Clémentine Autain auprès de notre journal : « La bonne idée, ce n’est pas d’ajouter deux députés à une direction déjà surdotée en la matière et déjà bien trop homogène… [18 membres sur 21 sont députés, NDLR]. »
Mélenchon en chute libre
Face au défi de l’unité avant la présentation de la réforme des retraites, les mécontents se prennent à rêver d’un « sursaut de lucidité ». D’autant que « cela envoie un signal catastrophique au reste de la Nupes », s’inquiète l’un des mécontents.
« On va voir si lundi, ils reviennent un peu sur terre. Je suis mélenchoniste depuis trente ans. Alexis Corbière a créé le “phi” qui est l’emblème de notre mouvement. Des milliers d’insoumis souhaitent ancrer LFI dans le temps long. Il est hors de question de partir », écarte la députée de Seine-Saint-Denis Raquel Garrido.
Sa collègue Clémentine Autain abonde : « La question de la démocratie est importante pour le peuple de gauche ». D’autant qu’aux yeux de l’opinion, elle semble avoir fait plus de mal que l’affaire Quatennens selon le dernier baromètre Harris-Interactive publié le 28 décembre.
« Si la confiance à l’égard de l’ex-candidat à l’élection présidentielle ne semblait pas trop être affectée par sa prise de position dans l’affaire Adrien Quatennens, son attitude dans l’optique de la nomination de Manuel Bompard apparait comme davantage remise en cause », notent les auteurs de l’étude. L’image de Jean-Luc Mélenchon s’est ainsi considérablement érodée. La chute est vertigineuse : le triple candidat à la présidentielle perd 10 points en un mois auprès des sympathisants de La France Insoumise.
Juliette Droz 07/01/2023