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Qui sont les tirailleurs sénégalais ?
Dans le film Tirailleurs, qui sort demain au cinéma, Omar Sy incarne un tirailleur sénégalais lors de la Grande guerre. Mais qui sont les tirailleurs sénégalais ?
Depuis leur création en 1857 jusqu’à leur dissolution dans les années 1960, les tirailleurs sénégalais ont combattu pour la France sur de multiples champs de bataille. Il s’agit de soldats recrutés par l’armée française, majoritairement au Sénégal – d’où leur nom –, mais aussi dans toute l’Afrique subsaharienne, dans les colonies françaises.
Les autorités coloniales étaient chargées de leur recrutement en se rendant dans les campagnes reculées de l’Afrique de l’Ouest ou équatoriale. Les locaux étaient souvent enrôlés sous la contrainte et étaient ensuite formés sur place avant d’être envoyés sur le champ de bataille.
Lors de la Première Guerre mondiale, ils sont 200 000 à se rendre en France pour combattre. 30 000 d’entre eux périront. La France était alors le seul pays à utiliser des troupes coloniales à grande échelle. Dans son ouvrage La Force noire, le général Charles Mangin, promoteur d’une armée africaine au service de la France, parlait des tirailleurs africains comme « des hommes primitifs, mais de bons soldats ».
Ne parlant pas français pour la plupart, les tirailleurs vivent dans des conditions difficiles, installés dans des camps séparés des soldats français. L’hiver, beaucoup tombent malades et sont placés dans des camps mal isolés dans le sud de la France. 959 tirailleurs internés dans ces camps succombent à des maladies entre 1916 et 1917.
Lors de la Seconde Guerre mondiale, ils étaient près de 150 000 à se battre à nouveau face aux forces allemandes. Ils mènent aussi des combats au Gabon en 1940 ou à Bir-Hakeim, en Libye, en 1942. Par la suite, certains sont également mobilisés lors des guerres d’Indochine et d’Algérie. Le bataillon des tirailleurs sera petit à petit dissous entre 1960 et 1962.
Guillaume Caire 03/01/2023
Tirailleurs sénégalais (Wiki)
Après de longues années de bataille judiciaire et administrative, les anciens tirailleurs sénégalais ont finalement obtenu gain de cause. Ces soldats, recrutés par l’armée française dans les colonies d’Afrique noire, et pas seulement au Sénégal, vont pouvoir retourner vivre définitivement dans leur pays d’origine, tout en continuant à percevoir leur minimum vieillesse. Jusqu’à présent ils ne pouvaient le toucher qu’à la condition de passer au moins six mois de l’année en France. Le nombre de ces vétérans africains, qui sont tous âgés de 90 ans ou plus, est aujourd’hui estimé à une quarantaine par l’Office des anciens combattants alors que l’on estime à quelque 700 000 ceux enrôlés comme chair à canon par la puissance coloniale pendant les deux Guerres mondiales mais aussi pendant les guerres coloniales d’Indochine et d’Algérie. Autant dire que le geste du gouvernement est purement symbolique et arrive trop tard pour nombre d’entre eux, morts dans la misère. Cette annonce coïncide avec la sortie dans les salles du film Tirailleurs, de et avec Omar Sy, qui raconte l’histoire de ces tirailleurs sénégalais pendant la Première Guerre mondiale. 5 janvier 2023
Omar Sy et le film Tirailleurs : une vérité qui dérange (Lutte Ouvrière)
Les propos de l’acteur Omar Sy dans le journal Le Parisien ont suscité les réactions imbéciles de certains politiciens. Il y était interrogé à propos de son film Tirailleurs évoquant la boucherie à laquelle les troupes africaines ont été envoyées lors de la Première Guerre mondiale.
Alors que le journaliste lui demandait s’il était découragé par ce qui se passe en Ukraine, lui dont la famille vient de Mauritanie, très marquée par les guerres, Omar Sy avait répondu : « L’Ukraine n’a pas été une révélation pour moi. Comme j’ai de la famille en Afrique, je sais qu’il y a toujours eu des enfants en guerre, des familles brisées. Ça n’a jamais cessé depuis la Seconde Guerre mondiale. Ça veut dire que quand c’est en Afrique vous êtes moins atteint ? Petit, j’ai été traumatisé par le conflit Iran-Irak, j’ai grandi avec ces images horribles. On a l’impression qu’il faut attendre l’Ukraine pour s’en rendre compte. »
Omar Sy énonçait là une évidence sur la différence de traitement des conflits. La guerre en Éthiopie a fait 600 000 morts en deux ans, et c’est à peine si les médias en ont parlé. Celle qui ravage en permanence la République démocratique du Congo et a fait des millions de victimes n’est pas mieux traitée. Quand l’armée française était au Mali, la misère des populations, la corruption du gouvernement n’étaient pas le sujet. En France, les médias passaient en boucle les enterrements de militaires morts pour défendre les intérêts de l’impérialisme français en affirmant qu’ils étaient allés là-bas pour protéger les Maliens.
Il n’en a pourtant pas fallu plus pour déclencher la colère de la députée européenne Nathalie Loiseau, ancienne ministre de Macron, qui s’est indignée : « Il y a 58 militaires français qui sont morts au Sahel en luttant contre les djihadistes. Non, Omar Sy, les Français ne sont pas moins atteints par ce qui se passe en Afrique. Certains ont donné leur vie pour que les Maliens cessent d’être menacés par les terroristes. » Les Maliens ont pourtant montré ce qu’ils pensaient de cette protection en demandant le départ de l’armée française… Mais Julien Odoul, porte-parole du Rassemblement national, en a rajouté une couche en reprochant à Omar Sy d’oublier que « les guerres africaines atteignent aussi les Français ».
Aujourd’hui comme en 1914, il y a des chiens de garde pour justifier les guerres impérialistes et sauter à la gorge de ceux qui semblent tant soit peu critiques.