loi molac (ouest france)
« Parlez breton! »
Langues régionales. Le Conseil constitutionnel censure deux articles de la loi Molac
Les « Sages », saisis par une soixantaine de députés, ont partiellement censuré la loi sur la protection et la promotion des langues régionales, adoptée en avril par le Parlement. Paul Molac, le député du Morbihan qui a porté le texte, réagit.
La décision des « Sages » était très attendue, de Quimper à Ajaccio en passant par Strasbourg et Biarritz. Le Conseil constitutionnel, saisi par une soixantaine de parlementaires, a rendu son avis au sujet de la loi sur la protection et la promotion des langues régionales, portée par le député du Morbihan Paul Molac et adoptée par le Parlement le 8 avril.
Le forfait scolaire validé
La saisine du Conseil constitutionnel portait sur son article 6 qui institue le versement d’un forfait scolaire pour les écoles privées, associatives sous contrat, dispensant une scolarisation en langues régionales. Cet article est jugé conforme, ce qui constitue, à l’échelle de la Bretagne, une victoire pour le réseau Diwan.
Deux articles retoqués
Mais l’article 4, qui prévoit que l’enseignement d’une langue régionale peut prendre la forme d’un enseignement immersif, « est contraire à la Constitution » selon les Sages. Rappelons que Diwan propose un enseignement… immersif.
« C’est incroyable que le Conseil constitutionnel déclare une méthode pédagogique anti-constitutionnelle, réagit Paul Molac. Cela invalide toutes les expériences qui sont faites depuis plus de 50 ans en France. Diwan devient anti-constitutionnel donc illégal. »
De même, l’article 9, qui prévoit que les signes diacritiques des langues régionales sont autorisés dans les actes de l’état civil, comme le fameux n tilde (ñ) du petit Fañch, est lui aussi jugé « contraire à la Constitution ».
« La langue de la République est le français »
Dans les deux cas, les Sages estiment que ces articles ne sont pas compatibles avec l’article 2 de la Constitution, qui stipule que « la langue de la République est le français ».
Le 4 mai à l’Assemblée nationale, Paul Molac avait interpellé le ministre de l’Éducation Jean-Michel Blanquer, lui reprochant d’avoir œuvré « en sous-main » pour que des députés, parmi lesquels Aurore Bergé (LREM), saisissent, au dernier moment, le Conseil Constitutionnel.
« Des questions se posent », avait répondu Jean-Michel Blanquer à propos de ce texte, qui se retrouve aujourd’hui vidé en partie de sa substance.
Paul Molac réclame un projet de loi constitutionnel
Interrogé après la décision des Sages, Paul Molac réclame un projet de loi pour changer l’article 2 de la Constitution en y incluant les langues régionales.Sans se faire d’illusions. « Ça peut venir du gouvernement ou des députés. Mais étant donné que c’est le gouvernement qui a la maîtrise de notre agenda parlementaire, cela va être compliqué. »
Morgan KERVELLA et Christel MARTEEL. 21/05/2021
Commentaire:
Notre position, du temps de la LCR déjà, était pour « Le droit pour les parents de voir leur enfants recevoir un enseignement du breton, que ce soit en immersion, en bilingue ou en initiation, et il faut bien sûr les postes nécessaires. Si Diwan le demande, nous sommes pour son intégration au service public ».
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- Daniel Cueff, tête de liste de Bretagne Ma vie
C’est catastrophique. Depuis toujours, il y a une grande fragilité de l’immersion. D’un côté il y a une méthode pédagogique très efficace. De l’autre des gens comme M. Blanquer, jacobins, qui y voient une remise en cause de la république. Le ministre ne veut pas de Diwan et donc il attaque fort. Comment va se comporter un maire conduit à financer une école Diwan si son enseignement est jugé anticonstitutionnel. On est un peu sonnés !
- Pierre Yves Cadalen, tête de liste de La France Insoumise
Le Conseil constitutionnel se juge compétent sur des questions sur lesquelles il ne l’est pas. Sa décision est une interprétation de l’article 2 de la constitution avec lequel on est en désaccord. Il faut poser le débat de l’intégration de Diwan dans le public.
- Claire Desmares-Poirrier, tête de liste EELV-UDB
Les déclarations de Jean-Michel Blanquer sont la preuve qu’il s’agit d’une position politique du gouvernement avant d’être un sujet juridique. C’est une atteinte majeure à l’enseignement immersif en général et à Diwan en particulier.
- Loïg Chesnais-Girard, tête de liste PS et actuel président de la région Bretagne
L’enseignement par immersion pratiqué en Occitanie, en Aquitaine, en Bretagne ou en Corse pour nos langues régionales est un choix de nombreuses familles et n’a jamais empêché nos enfants de maîtriser le français, ainsi que d’autres langues ! La décision du Conseil constitutionnel met en danger les réseaux appuyés sur cette méthode, comme Diwan en Bretagne. C’est grave et inacceptable de voir le ministre confirmer dans Ouest-France tran-quillement que cette décision va entraîner des changements, alors que nous attendions a minima d’être rassurés face à ce risque fatal pour Diwan. Ce qui se passe n’est pas anecdoti-que, et c’est exactement le contraire de la volonté des parlementaires qui ont travaillé sur la loi Molac (NDLR : Paul Molac est candidat aux élections régionales sur la liste conduite par Loïg Chesnais-Girard). Ceux qui pensent sauver la République depuis Paris, du haut de leurs principes centralisateurs, ne voient pas qu’ils abîment notre unité et qu’ils dénigrent notre manière de vivre.