17 septembre 2013 ~ 0 Commentaire

Portugal, vers une école à deux vitesses (CI)

Medef : Gattaz et la lutte de classes dans NPA lutte-des-classes

Une nouvelle loi sur le financement de l’école privée par l’Etat risque de mettre en péril l’aspect égalitaire de l’éducation au Portugal, selon le journaliste Daniel Oliveira. Ce dernier prend nettement position contre cette mesure qu’il qualifie d’ »apartheid scolaire ».
Le jeudi 5 septembre, le gouvernement portugais a approuvé, sans guère de débat national, la possibilité de financer directement la scolarité des élèves de l’enseignement privé. En vertu de cette ordonnance, cette aide n’a pas besoin d’être justifiée par une quelconque carence de l’école publique. Nulle référence, non plus, à d’éventuelles difficultés économiques dont souffriraient ceux qui bénéficieront de ces subsides. Dans les faits, comme dans le cadre des « contrats simples d’aide à la famille », que ne régit aujourd’hui aucun règlement d’attribution, l’Etat traite désormais l’enseignement privé de la même façon que les écoles publiques (le ministre de l’Education, Nuno Crato, l’a d’ailleurs reconnu), contribuant aux frais de scolarité à la même hauteur dans le privé et dans public.

Les établissements privés ont un nombre de places limitées. Ainsi, dès lors qu’il y a plus de candidats que de places, il faut procéder à une sélection, sélection qui a toujours les mêmes objectifs : il s’agit d’une part de capter les meilleurs élèves, pour pouvoir grimper dans les classements et faire face à la concurrence, et d’autre part d’éviter les élèves à problèmes, qu’ils soient sociaux ou disciplinaires. Personne ne peut raisonnablement imaginer qu’une école privée renonce, officiellement ou officieusement, à cette prérogative de sélection.

En réalité, peu d’écoles ont une offre pédagogique vraiment distincte de celle du public. La majorité des établissements vit précisément de cette sélection, qui leur permet de garantir de meilleurs résultats. Et pour cause : quand on ne perd pas de temps avec des élèves ayant des besoins éducatifs particuliers, des problèmes de discipline ou des problèmes sociaux, c’est déjà la moitié du chemin parcourue pour offrir un environnement scolaire plus favorable et de meilleurs résultats. Il est naturel que les parents préfèrent que leurs enfants étudient dans cette ambiance protégée et triée sur le volet.

L’école publique ne garde que les enfants à problèmes D’une façon ou d’une autre, les écoles privées continueront à vouloir garder les meilleurs élèves et ceux ne présentant pas de difficulté disciplinaire ni sociale : des enfants sans problèmes, issus de familles riches ou de la classe moyenne, ou encore, grâce à cette subvention, les enfants les plus brillants des familles défavorisées. Tout cela avec des financements publics – et non, comme le voudrait la logique et comme c’est le cas dans certaines écoles, grâce au mécénat ou à des bourses versées par l’école elle-même. En d’autres termes, les écoles publiques récupéreront ce qui reste : les problèmes sociaux, les problèmes de discipline et les besoins particuliers.

Quel parent enverrait son enfant dans une école ghetto ? Celui qui n’a pas le choix. L’Etat va ainsi financer, aux frais des contri-buables, un système éducatif à deux vitesses, avec des écoles accessibles aux seuls élèves riches et doués, et d’autres pour les pauvres et les médiocres. Cet « apartheid scolaire » qui nous est sympathiquement vendu comme une marque de liberté scolaire ne va faire qu’annihiler la fonction première de l’école publique : garantir l’égalité des chances sans laquelle la liberté n’est qu’illusion.

Au Portugal, rien n’oblige à scolariser ses enfants dans le public. Les Portugais peuvent choisir librement entre écoles publiques et privées, laïques ou confessionnelles, portugaises ou étrangères. Ce qui est en cause, ce n’est pas cette liberté de choix, qui est garantie et légitime. Il s’agit de savoir si l’obligation de l’Etat porte sur la fourniture d’un service public universel et gratuit, ou si cette obligation s’étend au subventionnement d’entreprises privées du secteur éducatif.

Avec cette ordonnance, l’Etat garantit le financement à hauteur du coût d’un élève dans le système public. Cela signifie que, pour les plus défavorisés, la liberté scolaire se limite aux écoles qui coûtent moins cher que ce coût moyen. De plus, des familles riches qui aujourd’hui paient la scolarité de leurs enfants sans aide publique vont bénéficier de subventions pour les placer dans les établissements les plus chers du pays, et elles seules auront les moyens de payer le dépassement que ne couvre pas l’aide publique. Car la liberté scolaire a toujours des limites. Et le moyen le plus juste de la garantir consiste à créer les conditions nécessaires pour que les écoles publiques soient attrayantes pour tous, transcendant les classes sociales et offrant un enseignement de qualité : or cela nécessite des moyens financiers que la stratégie actuelle détourne au profit d’écoles à but lucratif.

Les classes moyennes ont déserté le privé Mieux vaut, certes, ne pas s’en tenir aux principes. Nous savons bien dans quel pays nous vivons. Nous savons que l’Etat fait affaire avec le privé. Nous avons même une certaine expérience du financement public d’établissements privés, par le biais des contrats d’association. L’un des cas a été présenté par la chaîne de télévision TVI, et je m’en suis fait l’écho dans un de mes articles : grâce à son entregent au ministère et alors qu’il offrait de moins bonnes conditions que les établissements publics voisins, GPS, un groupe de 24 écoles privées, avait pu détourner des élèves que le public était en mesure d’accueillir.

Il n’est pas impossible qu’on ne doive cette ordonnance qu’au fanatisme idéologique de Nuno Crato. Il n’en est pas moins curieux que cela se produise au moment même où des milliers de familles de la classe moyenne, faute de moyens financiers, ont retiré leurs enfants du privé. Cela crée de lourds problèmes pour de nombreux établissements privés, mais c’était aussi une excellente nouvelle pour les écoles publiques, qui voyaient ainsi revenir les classes moyennes, et qui allaient pouvoir renouer avec un enseignement plus égalitaire tel qu’il existait dans les années 1980. Or tout cela n’est pas pour enthousiasmer notre ministre. Alors que les coupes dans le budget de l’éducation se poursuivent et que l’année scolaire commence dans le chaos pour les écoles publiques, Nuno Crato semble surtout soucieux de consacrer son énergie, et nos impôts, au sauvetage des écoles privées en difficulté. Expresso Daniel Oliveira 16 Septembre 2013

Commentaire:  » Surtout ne pas ranimer la guerre scolaire »! Non ! Faire çà en douceur!

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